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1865. (1913) Le bovarysme « Avertissement »

Pourtant, il s’applique à une matière à laquelle les hommes, plus qu’à aucune autre, se croient tenus d’imprimer eux-mêmes une forme : on y traite de l’évolution dans l’humanité, c’est-à-dire des modes du changement dans cette partie du spectacle phénoménal où le fait de la conscience semblé attribuer à l’être qui subit le changement, avec le pouvoir de le causer, le devoir de le diriger.

1866. (1911) Psychologie de l’invention (2e éd.) pp. 1-184

En effet, nous pourrons souvent le remarquer, le jeu libre des éléments tient une place importante dans l’invention. […] « David pourrait s’en tenir là. […] Ils ressemblent aux autres par tout ce qu’ils tiennent d’eux. […] Celle-ci n’est pas autre chose qu’un soliloque que l’auteur tient avec lui-même. […] Ma rêverie a donné un cadre à mes réflexions et, grâce à elle, je tiens mon scénario complet.

1867. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome I

Cela peut tenir à plusieurs causes. […] Je tiens de M.  […] À quoi tient cette différence ? […] J’avais pensé d’abord, quand j’observai ces phénomènes pour la première fois, que cela tenait à une action particulière de la matière sucrée, mais il m’a semblé depuis que cette diminution de l’acidité pouvait tenir à la dilution de l’urine par le liquide injecté. […] Quoique le fait soit exact, cependant, il ne tient pas à la cause à laquelle on l’a rapporté.

1868. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1889 » pp. 3-111

Le quelconque et l’académicien n’avaient point de livres de messe, mais le bordelier entre ses mains en tenait un du plus grand format, en sorte que Mlle Barbier donna le bras à l’homme infâme. […] mais il a l’air d’y tenir tant, que je cède à son désir. […] Il me dit que s’il avait été le maître, il aurait tenu plus longtemps, et ajoute aimablement que la pièce n’avait pas été peut-être jouée, comme elle aurait dû l’être. […] Oui, vraiment la peinture contemporaine tient trop de place dans ce temps. […] un curé de la cure de Rabelais et de Béranger, ayant la carrure d’un frère Jean des Entommeures, et pouvant tenir une feuillette de vin.

1869. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXII » pp. 242-243

— On a publié des Mémoires de Fléchier sur les Grands jours tenus à Clermont en Auvergne en 1665-1666.

1870. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Champsaur, Félicien (1859-1934) »

De qui tient cette poésie, sans similaire en écriture ?

1871. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Holmès, Augusta (1847-1903) »

Il ne tenait qu’à Mlle Holmès d’entrer dans la voie des succès faciles… Loin de là ; elle a dédaigné même les tentatives sérieuses de second ordre.

1872. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Liégeard, Stéphen (1830-1925) »

Stéphen Liégard a donc de qui tenir, et d’illustres garants.

1873. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 433-434

« Si ce Livre me survit, dit-elle, je défends à toute personne, telle qu’elle soit, d’y ajouter, ni diminuer, ni changer jamais aucune chose, soit aux mots ou en la substance, sous peine à ceux qui l’entreprendront, d’être tenu pour détestables aux yeux des Gens d’honneur, comme violateurs d’un sépulcre innocent….

1874. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 131-133

« Vous ne sauriez croire avec quel acharnement il vous poursuit : il n’a pas tenu à ses sollicitations que je n’aie repris la plume contre vous, non seulement pour attaquer vos nouvelles Productions, mais votre personne….

1875. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 316-318

Elle ne tint pas tout à fait sa promesse, au moins quant à la décence ; mais on y trouve de l'art, de la délicatesse, le ton de la bonne Compagnie : agrémens cependant peu capables d'intéresser dans un Roman dont la vertu n'est pas le fondement, surchargé d'ailleurs d'épisodes & d'incidens peu vraisemblables.

1876. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Note préliminaire » pp. 5-6

La condition première d’une telle action est de revenir souvent à la charge, d’user de sa plume comme de quelque chose de vif, de fréquent, de court, de se tenir en rapport continuel avec le public, de le consulter, de l’écouter parfois, pour se faire ensuite écouter de lui.

1877. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre V. Sculpture. »

À quelques différences près, qui tiennent à la partie technique de l’art, ce que nous avons dit de la peinture s’applique également à la sculpture.

1878. (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

L’expérimentateur ne doit pas tenir à son idée autrement que comme à un moyen de solliciter une réponse de la nature. […] Il marche ainsi des vérités partielles à des vérités plus générales, mais sans jamais oser prétendre qu’il tient la vérité absolue. […] Toutes les variétés apparentes du raisonnement ne tiennent qu’à la nature du sujet que l’on traite et à sa plus ou moins grande complexité. […] Mais cette apparence tient simplement à ce que nous nous faisons illusion sur la simplicité des phénomènes de la vie. […] Cette condition est des plus importantes à tenir en considération, surtout quand on veut expérimenter l’action de substances toxiques ou médicamenteuses sur les organismes.

1879. (1889) Les artistes littéraires : études sur le XIXe siècle

Nous ne tenons pas au mot, puisqu’il n’est pas favorablement vu, et qu’on y a attaché l’idée d’une coterie étroite, se recrutant d’après des conventions immuables et restrictives, vivant d’une vie isolée, factice et byzantine. […] L’homme a tenu sa place dans son siècle : poésie, romans, voyages, journalisme, tout ce qu’il a touché, il l’a marqué d’un extraordinaire éclat. […] Et puis, il y eut contre Gautier, comme agent du discrédit parfois très vague, parfois très catégorique, où l’on continue à le tenir, la masse, non pas certes de ses disciples, mais de ses imitateurs. […] Que leur qualité de révolutionnaires ait tenu la grande foule éloignée de leurs écrits, rien de plus évident. […] Par malheur, il ne s’en tiendra pas à ces justes limites : nous ne sommes qu’à l’instant où il débute, et rapidement, par la suite, le progrès s’accélère.

1880. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 374-376

On ne peut se dissimuler qu’il n’y ait dans un grand nombre de morceaux, une enflure & une affectation qui tient plus du Phébus que du vrai beau, auquel on ne peut rien substituer quand on ne l’a pas saisi.

1881. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 407-409

La Nature elle-même semble avoir voulu tenir de lui une nouvelle vie, car elle l’a pourvu des plus heureux talens, pour développer ses ouvrages & les faire admirer.

1882. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 374-375

D’un veau la chair est bonne bouillie, la chair est bonne rôtie, de sa peau on en couvre des Livres ; mais la tienne, méchant, n’est bonne qu’à être grillée ; aussi le seras-tu demain : tu t’es moqué des Moines, & les Moines se moqueront de toi. »

1883. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 513-514

Les Italiens & les Allemands l'ont fait passer dans notre Langue, & il a été accueilli en France, des Esprits qui tiennent à la Religion & aux mœurs.

1884. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

A cause de quoi il ne voulut plus parler, rire, ni manger, ni même cheminer, mais se tenait couché. […] Un des acteurs qui tint le rôle du héros grec avait été menuisier de son état. […] Richelieu ne tint pas Desmarets quitte pour si peu, il lui demanda un ouvrage du même genre tous les ans. […] On comprend que Richelieu tenait à faire réussir cette comédie, puisqu’il en était en grande partie l’auteur. […] Probablement La Serre avait imaginé ce nouveau genre pour être sûr de tenir plus longtemps son public.

1885. (1910) Muses d’aujourd’hui. Essai de physiologie poétique

« Le langage, dit encore le Dr Voivenel, tient une place énorme dans la lutte pour la conquête de la femme. […] Elle dit encore : Je me suis appuyée à la beauté du monde Et j’ai tenu l’odeur des saisons dans mes mains. […] Elle voudrait « perdre cet air d’avoir touché l’ombre de Dante » et pouvoir être aimée un soir, un divin soir, Par un blond Titien qui me tiendrait captive. […] Que les bois ont l’air dur, inexorable, immobile, Dans ces heures invincibles de force inerte, chaude et         grise : Sans lueur qui zigzague ou rien qui passe et s’irise, Ils se tiennent formidables par le prestige survenu. […] Ils se tiennent là, dit-il à son cœur, les voilà qui rient, ils ne comprennent point, je ne suis pas la bouche qu’il faut à ces oreilles. » Et maintenant, une opinion s’est cristallisée, pour longtemps ; Nietzsche est immoral, une sorte de Crébillon fils qui aurait mis le Sopha en Évangiles ; autre chose aussi : un Rousseau athée.

1886. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Homère était plus grand et de meilleure mine qu’Aristote ; il se tenait très droit pour son âge, et ses yeux étaient les plus vifs et les plus perçants que j’eusse jamais vus. […] Un spectre, que je ne nommerai pas, me dit à l’oreille que ces commentateurs se tenaient toujours le plus loin qu’ils pouvaient de leurs auteurs dans le monde souterrain, parce qu’ils se sentaient honteux et coupables d’avoir si indignement défiguré la pensée de ces grands écrivains aux yeux de la postérité. […] Peu enclin à remonter le courant ou à le suivre, il se tenait volontiers sur la rive. […] Pour le peuple même, la religion n’est pas inutile ; il n’y croit pas plus que les hautes classes ; mais il s’en sert pour faire tenir les enfants tranquilles, et s’en amuse pendant les longues soirées d’hiver. […] Je ne puis répondre que la cité prête de l’argent au gouvernement35, à moins que mylord un tel ne soit président du conseil, etc… Voilà le langage que, pendant les dernières années, les sujets tenaient à leur prince… Cette façon de faire capituler le souverain, était déjà répandue de telle sorte que le moindre serviteur commençait à lever la tête et à prendre de l’importance.

1887. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

« Je me mis à chercher ce qui caractérise cette dissolution si regrettée du grand art grec, et cet examen me tint plus longtemps. […] Elle tient néanmoins une place honorable à côté de ses partenaires et supplée par le charme de sa personne aux qualités spéciales qui lui manquent pour, donner une représentation fidèle du personnage. Les rôles secondaires sont parfaitement tenus et les chœurs restent toujours l’étonnement de ceux qui connaissent la partition des Maîtres Chanteurs. […] Hans Richterax donnera neuf concerts dans lesquels la musique du Maître tiendra la place d’honneur. […] Pour la petite histoire, c’est lui qui tenait la partie de trompette dans la création de Siegfried-Idyll.

1888. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

— Ainsi encore, quand, le jour de la fête de Valérie, le Comte étant près de la gronder, Gustave envoie un jeune enfant lui souhaiter la fête et rappelle ainsi au Comte de ne pas l’affliger ce jour-là, Valérie est touchée, elle embrasse l’enfant et le renvoie à Gustave, qui l’embrasse sur la joue au même endroit, et qui y trouve une larme : « Oui, Valérie, s’écrie-t-il en lui-même, tu ne peux m’envoyer, me donner que des larmes203. » Cette même idée de séparation et de deuil, cet anneau nuptial qu’il sent au doigt de Valérie dès qu’il lui tient la main, reparaît sous une nouvelle forme à chaque scène touchante. […] Le second volume offre quelques défauts qui tiennent au romanesque : je crois sentir que l’invention y commence. […] Pourtant le mouvement teutonique de réaction contre la France, ou du moins contre l’homme qui la tenait en sa main, allait bientôt gagner Mme de Krüdner et la pousser, par degrés, jusqu’au rôle où on l’a vue finalement. […] Tel de sa connaissance familière, qui se croyait tenu de résister quand elle était là, prêchait un peu à son exemple dès qu’elle n’y était plus.

1889. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre II. Principale cause de la misère : l’impôt. »

Dans chaque paroisse, il y en a deux, trois, cinq, sept, qui, sous le nom de collecteurs et sous l’autorité de l’élu, sont tenus de répartir et de percevoir l’impôt. « Nulle charge plus onéreuse671 » ; chacun, par protection ou privilège, tâche de s’y soustraire. […] Chaque dimanche et chaque jour de fête, ils se tiennent à la sortie de l’église, avertissant les retardataires ; puis, dans la semaine, ils vont de chaumière en chaumière pour obtenir leur dû. « Communément, ils ne savent point écrire et mènent avec eux un scribe. » Sur les six cent six qui courent dans l’élection de Saint-Flour, il n’y en a pas dix qui puissent lire le papier officiel et signer un acquit ; de là des erreurs et des friponneries sans nombre. […] Contre le collecteur et le receveur il n’a qu’une ressource, sa pauvreté simulée ou réelle, involontaire ou volontaire. « Tout taillable, dit encore l’assemblée provinciale du Berry, redoute de montrer ses facultés ; il s’en refuse l’usage dans ses meubles, dans ses vêtements, dans sa nourriture et dans tout ce qui est soumis à la vue d’autrui. » — M. de Choiseul-Gouffier683 voulant faire à ses frais couvrir de tuiles les maisons de ses paysans exposées à des incendies, ils le remercièrent de sa bonté et le prièrent de laisser leurs maisons comme elles étaient, disant que, si elles étaient couvertes de tuiles au lieu de chaume, les subdélégués augmenteraient leurs tailles. » — « On travaille, mais c’est pour satisfaire les premiers besoins… La crainte de payer un écu de plus fait négliger au commun des hommes un profit qui serait quadruple684 » — «… De là, de pauvres bestiaux, de misérables outils et des fumiers mal tenus, même chez ceux qui en pourraient avoir d’autres685. » — « Si je gagnais davantage, disait un paysan, ce serait pour le collecteur. » La spoliation annuelle et illimitée « leur ôte jusqu’au désir de l’aisance ». […] Entre ces mains ignorantes et partiales, ce n’est pas l’équité qui tient la balance, c’est l’intérêt privé, la haine locale, le désir de vengeance, le besoin de ménager un ami, un parent, un voisin, un protecteur, un patron, un homme puissant, un homme dangereux.

1890. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIe entretien. Poésie lyrique » pp. 161-223

ils ne tiennent sous leur plume ou sous leurs doigts qu’une pincée de cendre ; la substance s’est évaporée, et ils n’entendent, comme l’alchimiste allemand des vieilles ballades, que le ricanement du mystère invisible et impalpable qui éclate dans les ténèbres, autour de leurs têtes, et qui se moque de leur sacrilège curiosité. […] Mais une certaine naïveté naturelle, qu’il tenait de sa mère et qu’on prenait mal à propos pour de la niaiserie, et de plus une longue habitude de se regarder comme le dernier de la maison partout, lui donnaient une apparence d’infériorité entre tous ses camarades. […] Les cailloux bruissaient en roulant sous ses souliers ferrés ; il tenait à la main, par suite de sa vieille habitude, la longue gaule de noisetier écorcé, armée de l’aiguillon de ses bœufs ; il en frappait par intervalles, à coups répétés, les buissons du sentier et les branches pendantes des rameaux des bois sur la route, comme s’il eût porté un défi à toute la nature. […] « Demain je tiendrai le manche de la charrue ferme dans le sillon !

1891. (1863) Cours familier de littérature. XV « XCe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (3e partie) » pp. 385-448

que cela m’a touchée ; que j’ai béni dans mon cœur ce pieux ami agenouillé sur tes restes, dont l’âme, par-delà ce monde, soulageait la tienne souffrante, si elle souffre ! […] Maurice et moi nous nous tenions intérieurement par des rubans roses. […] Je ne sais à quoi cela tient. […] J’en ai besoin : nous avons un côté du cœur qui s’appuie sur ce qu’on aime ; l’amitié, c’est quelque chose qui se tient bras à bras.

1892. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIVe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

À part la note poétique, Chateaubriand tenait plus de ce maître du style ; mais, quand la pompe des paroles est éloignée, la justesse de l’esprit éclate toujours dans Chateaubriand. […] Nous tenons de M. de Genoude, confident alors de madame Récamier et courtisan de M. de Chateaubriand, quelques détails curieux, dont il avait été témoin, sur les commencements de cette passion idéale entre l’écrivain le plus illustre de la France et la beauté la plus célèbre du siècle. […] Cela tenait peut-être à la prédilection de madame Récamier pour moi. […] M. de la Ferronnays, son ami, tenait le gouvernail des affaires étrangères, à Paris.

1893. (1914) Enquête : Les prix littéraires (Les Marges)

Il faudrait méditer là-dessus lors de la distribution des prix littéraires pour, à la fois, ne point en tenir trop grand compte à l’auteur, ni trop grande rigueur aux distributeurs de la couronne, laquelle est surtout utile comme chèque à la banque et comme moyen de réclame. […] Et puis, tenez : supposez que vous puissiez supprimer le prix Goncourt celui de la Vie Heureuse, d’autres encore. […] Puisque vous me faisiez l’honneur de me demander mon avis, je tenais, en effet, quand même à vous le donner. […] L’écrivain qui tient absolument à faire parler de lui a une ressource : qu’il se suicide.

1894. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Mais on trouve encore chez les différents poètes un genre de beauté qui leur est spécial, et qui tient au caractère particulier de leur siècle et de leur pays. […] La délicatesse vient du sentiment, la pureté tient à la raison. […] « Les jeunes gens et les jeunes personnes, nous dit-il, prennent plus de plaisir, obéissent plus volontiers, et se laissent plus facilement entraîner aux discours de la philosophie, qui tiennent moins du philosophe, et qui semblent plutôt être dits en jouant qu’à bon escient. […] « Mais tenez, ce jeune homme est poète lui-même : « De lui dans nos salons on fait un cas extrême.

1895. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 décembre 1886. »

Dupont et Lapissida, souvent associés dans le travail d’organisation des représentations wagnériennes, tiennent en main les destinées du théâtre de la Monnaie, on se demande si Wagner occupera enfin la place qui lui revient dans le programme de nos récréations artistiques. […] Mais ira-t-on s’en tenir là, et ne pensera-t-on pas avec nous que le Vaisseau fantôme, Tannhaeuser, Lohengrin et les Maitres Chanteurs, devraient constituer, autant que possible, comme eu Allemagne, le fond du répertoire courant, aux mêmes conditions que les opéras de Meyerheer, d’Halévy, de Verdi et autres. […] Kietz, de qui je tiens tous ces détails, cette première lithographie, qui porte la mention : « Richard Wagner, Componist der Opern : Rienzi und der Fliegende Hollaender ». […] Je puis vous garantir l’exactitude des dates que je vous communique, car non seulement je les tiens de M. 

1896. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre X »

Une querelle éclate ; ils se provoquent, ils se battront le lendemain même et le mariage de Suzanne ne tient plus maintenant qu’à un fil d’épée. […] Alors l’amant devient terrible, il sent vaguement, depuis quelques jours, un mensonge qui fuit à son approche, il le tient, il ne le lâchera plus, et, d’une main violente, il arrache le papier de ses doigts crispés. […] Le danger l’inspire, elle réfute l’évidence, elle tient tête aux accusations les mieux démontrées ; elle a des poses, des effusions, des repentirs, des tendresses dont le spectateur est dupe presque au même point que l’amant. […] Ne pouvait-il s’en tenir à sa première réponse, si spécieuse et si décisive : « Je puis mourir et je suis responsable de votre avenir. » Quel intérêt peut-il avoir à se poser en fripon devant une jeune fille tirée à quatre épingles dans sa vertu rigide et chagrine ?

1897. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre premier. La sélection et la conservation des idées dans leur relation à l’appétit et au mouvement. »

Les yeux fermés, pensons fortement à une couleur très vive et tenons-la longtemps fixée devant notre imagination ; par exemple, représentons-nous avec assez de force une croix d’un rouge éclatant ; si, après cela, nous ouvrons brusquement les yeux pour les porter sur une surface blanche, nous y verrons, durant un instant très court, l’image de la croix, mais avec la couleur complémentaire : le vert. […] Raccourcissez par la pensée les dimensions du ciel visible en gardant toutes les distances respectives des astres, vous pourrez, dans votre tête, faire tenir le firmament. […] James Ward remarque avec raison que nous appelons souvent vivacité de souvenir, intensité de souvenir, le caractère distinct et complet des souvenirs ; or ce caractère distinct et complet tient à la qualité et aux rapports plus ou moins nombreux que nous saisissons, bien plus qu’à l’intensité proprement dite. […] Enfin les perceptions comme telles sont surtout, à notre avis, la conscience de relations, de différences, de changements et de mouvements : conséquemment elles tiennent de la nature abstraite et superficielle des signes ou symboles ; les émotions, au contraire, sont des états généraux et profonds : elles sont donc autrement difficiles à reproduire qu’une simple esquisse de nature intellectuelle.

1898. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Victor Hugo » pp. 106-155

Hugo s’est emparé d’une pensée vulgaire, quand il a imaginé une âme sans complications, ou une péripétie sans antécédents, le poète ne s’en tient pas à cette simplicité sans intérêt. […] Les mots s’allient ainsi aux choses en une relation immédiate et essentielle par des actions et des réactions réciproques, qu’il faut tenir en mémoire. […] Dans tous les précédents paragraphes, nous avons tenu tacitement pour acquis que la pensée pure de M.  […] Hugo s’en tient aux mots ; de là, l’air de famille de ses créatures similaires, et leur psychologie écourtée, qui se borne à assigner à chaque type les tendances convenables et conventionnelles, à rendre les vieillards vénérables elles mères tendres, les traîtres fourbes et les amantes éprises, sans nuance, sans complications et sans individualité, sans rien de ces contradictions abruptes et de ces hésitations frémissantes que présente tout être vivant.

1899. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

Quel honneur pour cet autel, et combien est-il devenu terrible et respectable, depuis qu’à nos yeux il tient ce lion enchaîné ! […] Et le pauvre apprend ici à juger de son état tout autrement qu’il ne fait, et, loin de se plaindre, à savoir même bon gré à sa pauvreté, qui lui tient lieu d’asile, de port, de citadelle, en le mettant en repos et en sûreté, et le délivrant des craintes et des alarmes dont il voit que les richesses sont la cause et l’origine. » Le but qu’avait saint Chrysostome en tenant tout ce discours, n’était pas seulement d’instruire son peuple, mais de l’attendrir par le récit des maux dont il lui faisait une peinture si vive. […] je n’y tiens plus. […] » Cette faveur, accordée avec discernement, est ce qui produit de l’émulation et qui échauffe les grands génies ; c’est beaucoup de faire des fondations, c’est quelque chose de les soutenir : mais s’en tenir à ces établissements, c’est souvent préparer les mêmes asiles pour l’homme inutile et pour le grand homme ; c’est recevoir dans la même ruche l’abeille et le frelon.

1900. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

J’ai tenu à vous indiquer ce détail avec ce petit rapprochement parce que cela montre au moins que Gœthe s’est intéressé à Philémon et Baucis, dont il est probable qu’il a trouvé l’histoire plutôt dans La Fontaine que dans Ovide, encore que, bien entendu, je n’en sache rien. […] Il a tenu à faire un poème technique, non pas seulement didactique, mais véritablement technique, un poème où il fût question longuement de l’origine du quinquina, de la plante qui produit l’écorce dont il est tiré, et puis de tous ses effets, de tout le mécanisme très compliqué, surtout à le comprendre comme La Fontaine l’a compris, de tout le mécanisme de l’action du quinquina sur nos pauvres machines humaines. […] Sur la fragilité du bonheur, nous avons deux ou trois vers que je tiens à mettre en relief. […] Mais ce à quoi je tiens, c’est ce que j’appelle le sermon, le fameux sermon d’Agathe.

1901. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXV » pp. 299-300

C'est là de la fermeté qui tient peut-être à un faible, et un genre d’audace bien que née d’une peur.

1902. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Le Vavasseur, Gustave (1819-1896) »

Comme on ne peut supposer que Baudelaire ait crayonné son portrait par pure amitié, il faut admettre qu’il avait plus d’intelligence que de talent et qu’il fit, au temps de sa jeunesse, des promesses pour lui impossibles à tenir.

1903. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Trimouillat, Pierre (1858-1929) »

Léon Deschamps Spirituel comme treize bossus, fluet, barbichu, menu et tant soit peu étrange — tient donc, par l’imprévu de ses méplats, de Roquelaure, Littré et Wolff.

1904. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 105-106

Ces Anecdotes sont connues, mais elles tiennent au talent de l’Auteur ; c’est pourquoi nous n’avons pas voulu les passer sous silence.

1905. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 142-143

Il a tenu parole, & on ne peut que regretter qu’il n’ait pas joui d’une plus longue vie.

1906. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 78-80

On seroit tenté de croire que son génie tient du naturel de la Salamandre, qui subsiste, dit-on, au milieu des flammes sans en être échauffée, & vient à bout de les éteindre.

1907. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface et poème liminaire des « Châtiments » (1853-1870) — Préface de 1853 »

Cet engagement, nous le tenons aujourd’hui.

1908. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Jusque-là il était abbé comme on l’était volontiers alors, ayant le titre et quelques bénéfices ; mais il n’était point lié à son état, il n’était prêtre à aucun degré ; et en 1755, à l’âge de quarante ans, on le voit hésiter beaucoup avant de franchir ce pas dont il sent le péril, et d’où sa délicatesse d’honnête homme l’avait tenu éloigné jusque-là : « Je me suis lié à mon état, écrit-il à Pâris-Duverney (le 19 avril 1755), et j’ai mis moi-même dans cette démarche tant de réflexions que j’espère ne m’en repentir jamais1. » Quant aux petits vers galants, ils sont de sa première jeunesse ; il cessa d’en faire à l’âge de trente-cinq ans : J’ai abandonné totalement la poésie depuis onze ans, écrit-il à Voltaire en décembre 1761 ; je savais que mon petit talent me nuisait dans mon état et à la Cour ; je cessai de l’exercer sans peine, parce que je n’en faisais pas un certain cas, et que je n’ai jamais aimé ce qui était médiocre ; je ne fais donc plus de vers et je n’en lis guère, à moins que, comme les vôtres, ils ne soient pleins d’âme, de force et d’harmonie ; j’aime l’histoire… Il y a donc, avant tout, quand on parle de Bernis, à bien marquer les époques, si l’on veut être juste envers un des esprits les plus gracieux et les plus polis du dernier siècle, envers un homme d’une capacité réelle, plus étendue qu’on ne pense, et qui sut corriger ses faiblesses littéraires ou ses complaisances politiques par une maturité décente et utile, et par une fin honorable. […]  » En le citant, on a quelquefois supposé que c’est à Boyer, ancien évêque de Mirepoix, et qui tenait la feuille des bénéfices, que Bernis l’avait plus tard adressé ; c’est une erreur, et qui ôte au mot de son piquant et de sa vengeance. […] On a écrit et imprimé bien des choses plus ou moins romanesques, où l’on a mêlé le nom de Bernis à la date de cette ambassade : nous nous en tiendrons à ce qui est à l’usage des honnêtes gens.

1909. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

Ce n’est point le poète qui est censé parler dans ces vœux et dans ces jouissances anticipées de bonheur champêtre : c’est un usurier, Alfius, qui, tout d’un coup épris, pour une raison qu’on ne dit pas, d’un merveilleux amour des champs, veut quitter les affaires et la Bourse de Rome pour aller cultiver la terre de ses mains et pratiquer la douceur des géorgiques : mais cette belle disposition ne tient pas ; le naturel l’emporte, et tous ces fonds qu’Alfius a retirés le 15 du mois, il cherche à les replacer dès le 1er du mois suivant. […] Ce n’est donc pas tout à fait un désavantage pour Racan de s’en être tenu dans sa peinture à des images plus générales et plus larges : il y a gagné de produire une inspiration plus uniment champêtre, et sa pièce, moins curieuse pittoresquement que celle d’Horace, a bien plus de naïveté. […] combien ces conférences, ces belles conversations qu’on y tenait, combien les entretiens exquis du Marais ou de la place Royale faisaient défaut à Maynard absent !

1910. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — I. » pp. 134-154

Richelieu, plume en main, est un historien, un écrivain, et y vise : Sully tient avant tout à ce que l’on ne cesse de voir son grand état de maison, même dans l’office et les charges de l’histoire. […] Celui-ci refusa ; mais, se revêtant de sa robe d’écolier et prenant un livre d’heures sous le bras, il se rendit à travers les périls au collège de Bourgogne dont le principal le recueillit et le tînt trois jours caché. […] Ce que fit soigneusement Rosny : dans les diverses alternatives et boutades de cour qui suivirent cette sanglante catastrophe, lorsque Henri était traité avec plus d’égards et que ses domestiques avaient liberté de le venir servir, Rosny ne manquait pas à son devoir ; lorsque le prince était retenu en prison et séparé de ses serviteurs, le jeune homme se tenait à l’écart et dans l’attente : Mais, en quelque condition que vous fussiez, lui disent ses secrétaires ; vous preniez toujours le temps de continuer vos études, surtout de l’histoire (de laquelle vous faisiez déjà des extraits tant pour les mœurs que les choses naturelles), et des mathématiques, lesquelles occupations faisaient paraître votre inclination à la vertu.

1911. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Elle nous apparaît bien telle qu’elle est, une âme tourmenteuse d’elle-même, craignant avant tout ce qui serait faiblesse, inconséquence, et, dans cette crainte, se portant plutôt à l’excès contraire et à des gageures rigides qu’elle tiendra jusqu’au bout : tout ou rien, un éclat de volcan ou une glacière ! […] En fait de sentiments, dépensées portant sur les affections et les passions humaines, j’ai parcouru un cercle immense et creusé jusqu’aux antipodes ; je suis vraiment docteur en cette loi-là… C’est dans l’enceinte de mon propre cœur que j’ai appris à connaître celui des autres, et la seule connaissance de moi-même m’a donné la clef de ces énigmes innombrables qu’on appelle les hommes. » Elle se flatte et s’exagère sans doute un peu cette connaissance universelle, cette clef, ce passe-partout qu’elle croit tenir et qui l’a conduite, en définitive, à la possession d’un monde très-distingué, mais restreint. […] Chez Mme Récamier, on était tenu, pour tout tribut, à quelques mollesses de goût et à quelques complaisances de jugement.

1912. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

Fabre, d’ailleurs, tenait son rang, et des plus distingués, dans le cercle de la comtesse ; il y marquait par son tour d’idées et par l’accent de son esprit. […] Je suis fâché que ce cœur, fortifié et soutenu par Alfieri, ait eu besoin d’un autre appui. » M. de Chateaubriand ne tient aucun compte, dans ce portrait dénigrant, d’un certain « air majestueux » que d’autres ont reconnu jusqu’à la fin à Mme d’Albany. […] Elle s’occupait de sa correspondance très étendue et la tenait dans un ordre parfait.

1913. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin »

Il ne faut pas abuser, sans doute, de cette fusion du moral dans le naturel ; il faudrait encore moins se l’interdire et s’en tenir systématiquement à la couleur toute pure. Il est une certaine voie moyenne à tenir. […] Comme, à toute force, il faut vêtir l’idée, les maîtres ont compris que dépouiller la forme et la simplifier, c’est-à-dire supprimer toute couleur locale, c’était se tenir aussi près que possible de la vérité… » S’il m’est permis d’avoir un avis en telle matière, je ne trouve pas que les raisons de M. 

1914. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Benjamin Constant lui-même n’est point sans énergie ; les élections promettent, les ultra se taisent… Oui, mais les étrangers sont là, mais le Comité européen tient ses séances à Paris… » Vous aurez remarqué ces mots : Benjamin Constant lui-même … Ce grand citoyen avait fort à faire pour se relever dans l’opinion de sa palinodie des Cent Jours. […] Coulmann parle aussi très bien d’Alexandre de Humboldt, et il fait remarquer avec raison « qu’on n’a jamais vu un Allemand ni un Prussien plus jaloux et plus ambitieux que lui de la légèreté parisienne ; sa médisance tenait certainement plus du désir d’être amusant et agréable que de l’envie et de la malignité. » Ce sont là des traits heureux et justes. […] S’il tient d’un côté à l’Allemagne, ce n’est point par Gœthe, c’est par Auguste Lafontaine.

1915. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite.) »

Necker, au contraire, par toutes sortes de raisons plausibles, s’en tint à la non-intervention des ministres dans les préliminaires des États généraux : il crut par là faire d’autant mieux apprécier la pureté des intentions du roi. […] D’Éprémesnil le surnommait l’hérétique à bonnes intentions ; Mirabeau disait de lui, en lui appliquant ce que Plutarque a dit d’un ancien, qu’il tenait de bons propos mal à propos, Un royaliste violent, un esprit étroit et systématique, M.  […] Malouet avait d’abord contre l’éloquent tribun de grandes préventions : sous l’empire du soupçon universel qui planait sur cette tête fameuse et que ne démentaient pas les apparences, il n’était pas éloigné de le considérer comme un chef de conjurés, et il se tenait envers lui à distance respectueuse.

1916. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [III] »

Il s’agissait de ne pas bouger si les Russes se retiraient les premiers et d’éviter le désagrément de leur céder le terrain ; sinon, et s’ils tenaient ferme, de se replier soi-même, tout en faisant bonne contenance : « Vous resterez avec Grouchy », lui dit l’Empereur, « pour le diriger selon mes intentions. […] Le chef d’état-major de Ney, le général Dutaillis, l’homme de Berthier, avait eu un bras emporté dans la dernière campagne ; Ney tenait à s’en défaire, et Berthier à le maintenir. […] Bailly de Monthyon, qui sans doute, pensait-il, lui réservait l’honneur de commander quelque dépôt d’écloppés, ou de faire dans sa chancellerie des liasses d’ordres du jour. » Sa tête fermenta ; il n’y put tenir ; il roula dans son esprit une grande résolution : il était Suisse de nationalité et libre ; l’empereur Alexandre était l’intime allié de Napoléon.

1917. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — M. de Sénancour, en 1832 »

Jay estime, que les anciens rédacteurs du Constitutionnel et du Mercure ont connu ; que plusieurs littérateurs de cinquante ans regardent comme aussi ingénieux que modeste ; dont les femmes ont lu le livre de l’Amour, un peu sur la foi du titre, et que les jeunes gens de notre âge se rappellent peut-être avoir vu figurer dans quelque réquisitoire sous la Restauration ; — M. de Sénancour a eu, à tous égards, une de ces destinées fatigantes, malencontreuses, entravées, qui, pour être venues ingratement et s’être heurtées en chemin, se tiennent pourtant debout à force de vertu, et se construisent à elles-mêmes leur inflexible harmonie, leur convenance majestueuse. […] Pour mieux s’expliquer M. de Sénancour, dont une sorte de circonspection respectueuse l’a tenu jusqu’à présent éloigné, et qu’il n’a jamais eu l’honneur d’entrevoir, il a cherché et trouvé des renseignements précis auprès d’un ami commun, M. de Boisjolin, qui a voué au philosophe vénérable un culte d’affection et d’intelligence. […] L’identité de l’œuvre subsiste sous cet achèvement harmonieux ; la chaîne a tenu jusqu’au bout sans se rompre ; mais elle s’est par degrés convertie en un métal plus pur, et, après avoir longtemps traîné à terre avec un bruit de rouille et de monotone pesanteur, elle brille enfin suspendue à la voûte indestructible.

1918. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

Ce qu’il y a de très-certain, c’est que le peu de classiques qui tenaient encore la mer y périrent corps et biens ; les récits qu’on a faits depuis de MM. […] Quant au navire Argo, tout divin qu’il semblait être, il ne tint pas, mais l’équipage fut sauvé. […] « Mon père était peintre en armoiries ; il peignait des équipages, des ornements d’église. — Sa maison tenait au cimetière de l’humble paroisse Notre-Dame, à Douai.

1919. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN DERNIER MOT sur BENJAMIN CONSTANT. » pp. 275-299

Nous avons, dans ce but, comme souligné ou articulé plus fortement au passage les endroits qui nous semblaient tenir à quelque veine secrète, faisant exactement ce qu’on pratique en anatomie, lorsqu’on injecte quelque petit vaisseau pour le rendre plus saillant et le soumettre à l’étude. […] Au reste, il ne s’agit point, dans tout ceci, de blâmer ou de louer ; je suis moins disposé et moins autorisé que personne à ce genre de morale qui condamne, je crois très-suffisant pour mon compte de me tenir à celle qui observe et qui montre. […] On travaille à séparer le plus qu’on peut les sciences et les lettres de tout ce qui tient à la politique et à toute espèce d’idée d’organisation sociale : je ne dis rien sur ce système ; mais on agit ensuite comme si ce but était déjà atteint, et on protége les lettres, comme si elles étaient déjà dans ce bienheureux état d’indépendance de toutes les agitations humaines.

1920. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

Le mieux, selon nous, est de s’en tenir étroitement au vrai et de viser au roman le moins possible12, omettant quelquefois avec goût, mais se faisant scrupule de rien ajouter. […] Pour qui se complaît à ces ingénieuses et tendres lectures ; pour qui a jeté quelquefois un coup d’œil de regret, comme le nocher vers le rivage, vers la société dès longtemps fabuleuse des La Fayette et des Sévigné ; pour qui a pardonné beaucoup à Mme de Maintenon, en tenant ses lettres attachantes, si sensées et si unies ; pour qui aurait volontiers partagé en idée avec Mlle de Montpensier cette retraite chimérique et divertissante dont elle propose le tableau à Mme de Motteville, et dans laquelle il y aurait eu toutes sortes de solitaires honnêtes et toutes sortes de conversations permises, des bergers, des moutons, point d’amour, un jeu de mail, et à portée du lieu, en quelque forêt voisine, un couvent de carmélites selon la réforme de sainte Thérèse d’Avila ; pour qui, plus tard, accompagne d’un regard attendri Mlle de Launay, toute jeune fille et pauvre pensionnaire du couvent, au château antique et un peu triste de Silly, aimant le jeune comte, fils de la maison, et s’entretenant de ses dédains avec Mlle de Silly dans une allée du bois, le long d’une charmille, derrière laquelle il les entend ; pour qui s’est fait à la société plus grave de Mme de Lambert, et aux discours nourris de christianisme et d’antiquité qu’elle tient avec Sacy ; pour qui, tour à tour, a suivi Mlle Aïssé à Ablon, où elle sort dès le matin pour tirer aux oiseaux, puis Diderot chez d’Holbach au Granval, ou Jean-Jacques aux pieds de Mme d’Houdetot dans le bosquet ; pour quiconque enfin cherche contre le fracas et la pesanteur de nos jours un rafraîchissement, un refuge passager auprès de ces âmes aimantes et polies des anciennes générations dont le simple langage est déjà loin de nous, comme le genre de vie et de loisir ; pour celui-là, Mlle de Liron n’a qu’à se montrer ; elle est la bienvenue : on la comprendra, on l’aimera ; tout inattendu qu’est son caractère, tout irrégulières que sont ses démarches, tout provincial qu’est parfois son accent, et malgré l’impropriété de quelques locutions que la cour n’a pu polir (puisqu’il n’y a plus de cour), on sentira ce qu’elle vaut, on lui trouvera des sœurs. […] Qu’il nous suffise de dire que la fermeté amicale de Mlle de Liron tient en échec Ernest ce jour-là et le suivant ; que le mot vous n’êtes qu’un enfant, à propos jeté à l’amour-propre du jeune cousin, achève de le décider ; que M. de Thiézac, qui arrive en litière avec son projet de contrat de mariage et un brevet de nomination pour Ernest, est accueilli fort convenablement, et que celui-ci annonce bien haut, avec l’orgueil d’une résolution soudaine, qu’il part le lendemain de grand matin pour Paris.

1921. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — II. » pp. 195-213

Adieu, le cœur me bat au moindre bruit ; je tremble comme un voleur. » Il ne tient qu’à l’amie en ces moments de se croire plus nécessaire, plus aimée, plus recherchée pour elle-même que jamais. […] Sur l’aimable et sage M. de Boismorel, qui joue un si beau rôle dans les Mémoires ; sur Sévelinges l’académicien89, qui n’est pas non plus sans agrément ; sur certain Genevois moins léger, et « dont l’esprit ressemble à une lanterne sourde qui n’éclaire que celui qui la tient ; » sur toutes ces figures de sa connaissance et bientôt de la nôtre, elle jette des regards et des mots d’une observation vive, qui plaisent comme ferait la conversation même. […] Dès le premier jour, celle qui est destinée à illustrer historiquement son nom tient à son estime et se soucie de lui paraître avec avantage ; mais l’esprit seul et la considération sont engagés.

1922. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Aloïsius Bertrand »

Bertrand, à sa manière, tient d’eux, et jusque dans son romantisme il suit leur veine. […] Mais Bertrand ne s’en tenait pas là, il allait, il errait. […] Cependant, à trop attendre, sa vie frêle s’était usée, et cette poétique gaieté d’automne et de vendanges ne devait pas tenir.

1923. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XX. La fin du théâtre » pp. 241-268

Il n’est que d’acquérir le tour de main qui force sûrement la grimace du rire ou du pleur, pour tenir la recette à tout faire : farces et mélos, le procédé élastique, la formule-caoutchouc des succès imperméables. […] Enfin, si l’on veut percevoir le contact parfait de cette société et son théâtre, qu’on se rappelle ces solennités à la fois théâtrales et mondaines, dans le parc du château royal, où les intermèdes dramatiques, les danses, les festins et les musiques se fondaient dans une combinaison délicieuse de fête et de comédie, et dont Molière, dans les Plaisirs de l’Isle enchantée, nous a laissé une relation qui tient (comme la vie de ce siècle) de l’histoire, du théâtre et du ballet. […] Orchestres, gymnastiques, clowneries, pantomimes, Pezon, la Goulue, bars, montagnes russes, les spectacles tiennent tous ces articles, et même un autre.

1924. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IX, les mythes de Prométhée »

Trompé par elle, il lui demande de mentir encore, de lui chanter d’une voix de berceuse, les promesses qu’elle ne tiendra pas. […] Ailleurs, il tient paternellement sur ses genoux la maquette d’un homme qu’il termine. […] Cette plante tenait au corps du patient par des ramifications invisibles ; le fer qui la tranchait entrait aussi dans sa chair.

1925. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

Une fois ou deux il parut embarrasser Mirabeau, et il eut l’honneur de le tenir en échec. […] Si l’austérité de celui-ci le tenait un peu à distance, il trouvait auprès de sa mère, de son jeune frère et de ses sœurs, de quoi s’épancher et se détendre avec enjouement. […] Il importe, en effet, à la vérité historique de reconnaître que ce qu’on a appelé le changement de Barnave ne date point de ce voyage, ne tient point à une simple émotion, bien concevable d’ailleurs et bien naturelle, mais à une modification antérieure et raisonnée de vues et de principes.

1926. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame Geoffrin. » pp. 309-329

— « C’était mon mari, il est mort. » Mme Geoffrin eut une fille, qui devint la marquise de La Ferté-Imbault, femme excellente, dit-on, mais qui n’avait pas la modération de sens et la parfaite mesure de sa mère, et de qui celle-ci disait en la montrant : « Quand je la considère, je suis comme une poule qui a couvé un œuf de cane. » Mme Geoffrin tenait donc de sa grand-mère, et elle nous apparaît d’ailleurs seule de sa race. […] Elle a pour principe de ne causer elle-même que quand il le faut, et de n’intervenir qu’à de certains moments, sans tenir trop longtemps le dé. […] Personne ne connaissait mieux qu’elle, mieux que cette bourgeoise de Paris, l’art d’en user avec les grands, d’en tirer ce qu’il fallait sans s’effacer ni se prévaloir, et de se tenir en tout et avec tous d’un air aisé sur la limite des bienséances.

1927. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Théodore Leclercq. » pp. 526-547

Soyons juste pour tous : en s’emparant de son idée même, il fallait, pour la dresser et la faire tenir à la scène et sur les planches, y ajouter quelque chose, et ce quelque chose était aussi une part d’invention. Qu’on me permette une image classique et consacrée : la comédie au théâtre a besoin de chausser le brodequin pour se tenir ; la comédie de M.  […] quand je considère où nous en sommes venus à vingt-cinq ans de distance, quand je repense à cette vigueur de l’attaque et à cette confiance excessive avec laquelle on remettait alors à la bourgeoisie éclairée un rôle qu’elle n’a pas su tenir, la plume m’échappe des mains, et j’ai trois fois rejeté le livre au moment d’extraire ce que j’en voulais d’abord citer.

1928. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Monsieur de Bonald, (Article Bonald, dans Les Prophètes du passé, par M. Barbey d’Aurevilly, 1851.) » pp. 427-449

Considérant la personne de l’Homme-Dieu dans tous ses états et toutes ses conditions, M. de Bonald dira : « Dans la famille, il est fils, il est parent, il est ami ; dans la société politique, il est sujet et même il est pouvoir ; dans la société religieuse, il est pouvoir et même il est sujet. » Cette antithèse de pouvoir et de sujet tient à la formule fondamentale de l’auteur ; mais comment ne pas l’oublier ici ? […] D’autres parties subséquentes s’y joignent, qui n’y tiennent que par voie de digression ; je ne sais pas d’ouvrage si étroitement raisonné et si mal composé57. […] Damiron, qui se sont entremis dans le débat, se tiennent dans l’entre-deux et ne s’expliquent pas nettement.

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