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750. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (2e partie) » pp. 81-159

Et quand on passa du général au particulier, tous aussi me désignèrent, au lieu de choisir les deux cardinaux Doria et Mattei, ou tout autre auquel on aurait pu songer. […] Nul ne songea à lui contester le titre de ministre pacificateur de l’Église. […] Après Wagram il songea à perpétuer sa domination en se donnant une épouse plus jeune et des héritiers légitimes de sa puissance. […] Dans cette lettre, personne ne songea, en aucune façon, à glisser quelque demande, afin d’être réintégrés dans la possession de nos fortunes et d’avoir le droit de porter la pourpre.

751. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre troisième »

Ici l’objet de la recherche de l’amant n’est pas une femme, c’est une rose ; et les aventures n’ont lieu qu’en songe. […] au riche usurier. — Et si on lui en demande la raison : « C’est, répondit-il que le riche qui pèche plus que le pauvre, a bien plus besoin de mon assistance au dernier moment. » Ici Jean de Meung, dans une digression dont il ne songe pas à s’excuser, se sert de Faux-Semblant lui-même, qui n’est que le type de l’ordre fameux des moines mendiants, pour attaquer cet ordre, dont la querelle avec l’Université est un des plus curieux épisodes du règne de saint Louis. […] Dans ce traité, le grave chancelier a aussi un songe il lui a semblé qu’il s’envolait jusqu’au sénat de la chrétienté. […] Christine de Pisan, qui, dans ses Epistres du desbat sur le Roman de la Rose, qualifiait ce livre d’exhortation de très-abominables mœurs, lui empruntait, pour son poëme du Chemin de longue estude, son inévitable songe, ses allégories et sa forme encyclopédique.

752. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

Telle légende, tel roman, tel drame (je parle d’œuvres dont les auteurs ne songeaient pas du tout à cet honneur et le redoutaient peut-être) ont été des sources fraîches d’où ont coulé sur le monde des flots d’harmonie. […] Si elle est brune, elle fera songer à Mignon aspirant au ciel ; si elle est blonde, elle sera mélancolique et pâle comme Ophélie, ou semblable A quelque ange pensif de candeur allemande (Il était convenu en ce temps-là qu’on était toujours candide en Allemagne). […] Nous disons tous les jours dessiller les yeux, sans songer que nous faisons ainsi allusion à l’usage où l’on était de coudre les cils ou les paupières de l’oiseau de proie, afin de le dresser plus facilement. […] Songe-t-on que les odes de Pindare et les tragédies d’Eschyle naquirent ainsi presque sur commande et osera-t-on affirmer que ce miracle ne pourra jamais se répéter ?

753. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre onzième. La littérature des décadents et des déséquilibrés ; son caractère généralement insociable. Rôle moral et social de l’art. »

Il n’en acheva pas moins son récit, où, par moment, l’ingéniosité de l’expression fait songer à Richepin, qui a fait des pastiches connus de ce genre de littérature. […] Déjà les voleurs songent à l’emploi de l’argent. […] Pour bien comprendre cette tendance, il faut songer que dans ces cerveaux affaiblis, où les réactions sont lentes à se produire, une image forte se fixe aisément et devient facilement obsédante. […] C’est l’orgueil de l’artiste qui songe à son moi plus qu’à la vérité et à la beauté ; qui se manifeste par l’affectation du savoir, par le besoin de se singulariser et de sortir du commun, par la subtilité, par la déclamation ; c’est la recherche du plaisir avec tous ses raffinements, avec son mélange d’amertume et de volupté.

754. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

Alors, le souvenir excitant l’espérance, L’attente d’être heureux devient une souffrance ; Et l’œil ne sonde plus qu’un gouffre éblouissant, Pareil à ceux qu’en songe Alighieri descend. […] ……………………………… La pensée D’un homme est de plaisirs et d’oublis traversée ; Une femme ne vit et ne meurt que d’amour ; Elle songe une année à quoi lui pense un jour ! […] — Songez bien, dit Dalti, que je ne suis, comtesse, Qu’un pêcheur ; que demain, qu’après, et que sans cesse Je serai ce pêcheur. Songez bien que tous deux Avant qu’il soit longtemps nous allons être vieux.

755. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

Toutes mes passions futures encore en pressentiments, toutes mes facultés de comprendre, de sentir et d’aimer encore en germe, toutes les voluptés et toutes les douleurs de ma vie encore en songe, s’étaient, pour ainsi dire, concentrées, recueillies et condensées dans cette passion de Dieu, comme pour offrir au Créateur de mon être, au printemps de mes jours, les prémices, les flammes et les parfums d’une existence que rien n’avait encore profanée, éteinte ou évaporée avant lui. […] Ce sont de ces moments d’ineffables délices Dont Dieu ne laisse pas épuiser les calices ; Des éclairs de lumière et de félicité Qui confondent la vie avec l’éternité ; Notre âme s’en souvient comme d’une pensée Rapide dont en songe elle fut traversée. […] … XI De telles extases que je goûtai alors sans songer à les exprimer sont la puberté de l’âme ; elles sont aussi la poésie elle-même dans sa substance la plus éthérée. […] Plusieurs tyrans ont eu des traces de sensibilité sur le visage et dans la voix, et ils affectaient au dehors le langage des malheureux qu’ils songeaient intérieurement à déchirer.

756. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre III. Le roman » pp. 135-201

Mais, à côté de ces œuvres, qui veulent soutenir une thèse, combattre des idées, en un mot exercer une action, ne croyez-vous pas qu’il y a place pour le roman d’art, lequel ne songe qu’à divertir le lecteur, à lui faire passer une heure agréable, en lui racontant, dans la meilleure langue possible, une histoire, véridique ou non, dont tout l’intérêt est dans le beau décor d’art ou de nature qui l’enveloppent ? […] Qu’elles paressent quand le dîner est en retard, ou qu’elles songent devant le premier feu, qu’elles s’effarent pendant le voyage ou qu’elles échangent de puériles sentimentalités, elles disent les choses les plus exquises et les plus émouvantes. […] Peut-être eut-il tort : il est des romanciers qui doivent ne pas trop songer à la forme, mais achever leur œuvre, si énorme qu’elle puisse être. […] Ils sont souples et gracieux comme des palmes, nuancés en d’infinies harmonies L’auteur d’Yvelaine aime les soirs d’enchantement, les palais de songe, les sources maléfiques envoûteuses des fleurs, les mystères des nuits d’orage où crient les voix sous les gibets, les souvenirs qui dorment au fond des mémoires et qui font frissonner les enfants.

757. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IX : Insuffisance des documents géologiques »

Cependant, si l’on songe à l’immense surface sur laquelle se répandent les alluvions plus ou moins ténues transportées par les courants sous-marins, le procédé d’accumulation sur une surface de quelque étendue doit être excessivement lent. […] Cette rareté n’a rien de surprenant, si l’on songe d’une part qu’une proportion énorme d’ossements d’animaux tertiaires ont été découverts dans des cavernes ou des dépôts lacustres ; et de l’autre qu’on ne connaît pas une seule caverne ou un seul dépôt lacustre véritable qui appartienne à une formation secondaire ou paléozoïque. […] Il est non moins utile de songer aux oscillations du sol, aux changements extraordinaires du climat, à la prodigieuse longueur du temps, enfin à tout ce qui est compris dans cette même époque glaciaire. […] Je reconnais combien il est téméraire à moi de m’opposer à de semblables témoins, surtout quand je songe que c’est à eux et à quelques autres encore que notre science moderne doit la plupart de ses progrès.

758. (1903) La renaissance classique pp. -

Si d’autre part on songe qu’ils ont créé des mœurs et une civilisation qui, à travers mille changements superficiels, sont encore les nôtres ; que l’épanouissement de leurs œuvres a coïncidé avec la période la plus brillante de notre histoire, avec le moment où les forces vives de notre pays ont atteint leur maximum d’intensité et leur parfait équilibre, on avouera que nous pouvons assez glorieusement nous réclamer de tels ancêtres intellectuels. […] Que l’on songe plutôt à tout ce que l’épopée virgilienne entraîne dans ses flots, — tant il est certain que tout d’abord le poète voudrait absorber dans son œuvre la réalité totale ! […] On demeure stupéfait d’un tel malentendu et l’on s’étonne plus encore quand on songe que ces mêmes gens qui s’extasiaient avec l’illustre philosophe sur la vigueur exubérante et sur la belle unité de la littérature anglaise — manifestation incomparable de la puissance d’une race — s’évertuaient par tous les moyens à tuer chez leurs compatriotes ce qui subsistait encore de la race et de la tradition françaises. […] On songe aux lieux tristes d’alentour et l’on se rappelle que cette misère du sol fut transformée par la volonté toute-puissante d’un seul, avec le concours d’une race et d’un peuple.

759. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — I. » pp. 1-19

Il songeait sérieusement à s’y ensevelir, à y faire vœu de silence. […] La vocation de la parole était désormais trop manifeste en lui pour qu’il songeât à y résister.

760. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Le Tellier, touché d’un procédé si noble, lui dit qu’on lui donnerait, si elle voulait, vingt-quatre heures pour y songer. […] Devenu à vingt-trois ans veuf de sa première femme, il songea à faire un mariage d’amour, et crut pourvoir au bonheur de toute sa vie en épousant une personne accomplie, mais qui était restée dans une position fausse, duchesse de Lorraine durant quelques heures, et puis bourgeoise après comme devant.

761. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — I. » pp. 409-426

Noblesse et vérité, c’est là toute la poétique de Léopold Robert, et qu’il ne songea à s’exprimer à lui-même que successivement et après l’œuvre : « La noblesse sans la vérité, pensait-il, n’est plus qu’une singerie qui ne peut plaire aux véritables connaisseurs. » La vérité sans noblesse est un autre écueil : Si je copie juste ce que je vois, je sens que je ferai un tableau plat… Si on se contentait de faire vrai, on se contenterait aussi de copier servilement le modèle que l’on a sous les yeux ; mais, aussitôt que l’on veut ajouter à cette qualité de l’élévation et de la noblesse, c’est une difficulté bien plus grande ; on peut tomber dans la manière, qui est l’opposé de ce qu’on doit chercher. Ainsi pensa-t-il de bonne heure ; mais, au début, il songeait peu à ajouter à ses modèles.

762. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — III. (Fin.) » pp. 479-496

Lui qui a si bien senti l’individualité et comme le génie de chaque montagne, n’a-t-il pas dit : « Une fois que le Marboré s’est saisi du spectateur, on n’est plus où l’on est, et il n’y a plus que lui dans tout ce qui mène à lui. » En 1793, arrêté trois fois au milieu de ses paisibles herborisations, recueilli ici, insulté là, il n’avait qu’un pas à faire pour franchir la frontière, il ne songea point à émigrer : il n’aurait voulu compromettre ni son vieux père ni aucun des siens ; et puis il était de ceux (selon sa belle expression) qui respectaient jusque dans son délire la mère qui les frappait. […] Qu’on songe qu’il était monté jusqu’à trente-cinq fois en quinze ans au pic du Midi !

763. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — II » pp. 71-89

À celle nouvelle, il éprouva une impression soudaine et qu’il a rendue bien énergiquement ; tout son sang se glaça, en écoutant le gentilhomme qui lui faisait ce récit : « S’il m’eût donné, dit-il, deux coups de dague, je crois que je n’eusse point saigné ; car le cœur me serra et fit mal d’ouïr ces nouvelles ; et demeurai plus de trois nuits en cette peur, m’éveillant sur le songe de la perte. » Il se représentait la scène du conseil, sa promesse solennelle de la victoire, la conséquence incalculable dont une défaite eût été pour la France, et dans ce prompt tableau que son imagination frappée lui développa tout d’un coup, cet homme intrépide retrouva la peur à laquelle il était fermé par tout autre côté. […] Transporté dans une place voisine, à Montalsin, et sachant Montluc presque à l’extrémité, il dépêcha à Rome pour faire venir un autre gouverneur, M. de Lansac ; mais celui-ci ne sut point s’y prendre et se laissa tomber aux mains des ennemis en essayant d’arriver à Sienne : « S’il fût venu, dit naïvement Montluc, je crois que je fusse mort, car je n’eusse eu rien à faire ; j’avais l’esprit tant occupé à ce qui me faisait besoin, que je n’avais loisir de songer à mon mal. » Après avoir été trois jours regardé comme mort, et avoir reçu la visite de Strozzi guéri plus tôt que lui, Montluc revint peu à peu à une santé suffisante pour vaquer à ses devoirs.

764. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — II » pp. 254-269

L’enfant aussitôt né, il songe à la nourrice : « Selon la raison, dit-il, et tous les sages, ce doit être la mère » ; et il cite à ce sujet ce que dit le philosophe Favorinus chez Aulu-Gelle et ce que répétera Rousseau43. […] Charron ne fut nullement près de périr, il dut cependant songer à se défendre : il le fit dans un sommaire de son livre ou Petit Traité de la sagesse, qui ne parut qu’après sa mort.

765. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

Il semblerait qu’en écrivant ceci l’abbé de Rancé songeât expressément à Santeul, comme au plus en vue de ceux qui marchaient par les voies larges et spacieuses, et il y songeait en effet.

766. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Voiture. Lettres et poésies, nouvelle édition revue, augmentée et annotée par M. Ubicini. 2 vol. in-18 (Paris, Charpentier). » pp. 192-209

Voiture, en homme d’esprit (et il avait bien autrement d’esprit proprement dit que Balzac, qui avait principalement du talent), ne songea point à lutter avec lui : il laissa ce provincial superbe et solennel croire qu’il régnait de sa maison d’Angoulême sur l’empire des lettres ; il lui rendit même hommage : quant à lui, il ne se piqua que de bien vivre, de vivre le plus agréablement, de conquérir la faveur des plus grands et des plus belles, et, tout en s’amusant à tous les étages, de s’épanouir par son côté précieux au centre de la vraie urbanité dans la plus douce lumière. […] Avec Catulle, on est plus à l’aise pour lui comparer Voiture, qui évidemment a songé quelquefois à l’imiter.

767. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — I » pp. 298-315

Certes quand j’y songe, le cœur me fend. […] La ruine de ceux de la religion n’est pas si prochaine qu’elle ne donne aux mécontents loisir de former des partis… Songez que vous avez moissonné tout ce que les promesses mêlées de menaces vous pouvaient acquérir, et que ce qui reste combat pour la religion qu’il croit… Il finit en refusant de se prêter à aucune conclusion particulière et qui le sépare de l’intérêt général.

768. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

Voilà donc Emma devenue Mme Bovary, installée dans la petite maison de Tostes, dans un intérieur étroit, avec un petit jardin plus long que large, qui donne sur les champs ; elle introduit partout, aussitôt l’ordre, la propreté, un air d’élégance ; son mari, qui ne songe qu’à lui complaire, achète une voiture, un boc d’occasion pour qu’elle puisse se promener, quand elle le voudra, sur la grande route ou aux environs. […] Ce double rêve côte à côte et à perte de vue, du père abusé qui ne songe qu’à de pures douceurs et joies domestiques, et de la belle et forcenée adultère qui veut tout briser, est d’un artiste qui, quand il tient un motif, lui fait rendre tout son effet.

769. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « La princesse des Ursins. Ses Lettres inédites, recueillies et publiées par M. A Geffrot ; Essai sur sa vie et son caractère politique, par M. François Combes » pp. 260-278

Aussitôt que je sus la résolution du roi d’accepter le testament, je songeai que l’intérêt de la France était principalement de détruire en Espagne le parti qui reste affectionné à l’empereur, et, par conséquent, qu’il fallait éviter d’y introduire une Allemande, à qui il serait aisé d’acquérir de nouvelles créatures et de conserver les anciennes par le crédit qu’ont ordinairement les reines dans ce royaume. […] Je vous ai déjà marqué, madame, que je ne songerai à votre damas qu’après les nouvelles soies…, etc.

770. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Lammenais » pp. 22-43

Songez seulement à ce que seraient les nôtres, si nous étions venus au monde dix siècles plus tôt ou, dans le même siècle, à Téhéran, à Bénarès, à Taïti. […] Si onl’avait fait cardinal la première fois, comme il paraîtque Léon XII y songea, que serait-il advenu ?

771. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

Parmi ceux qui ne se présentent point, j’ai peine à ne pas songer à M.  […] Dans la chaire, on cite pour leur talent et pour leur succès quelques Pères jésuites ; mais ceux-là, l’esprit de leur institut leur défend de songer à l’Académie : le grand Bourdaloue n’en a pas été. — Je cherche parmi les autres prédicateurs en renom.

772. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

mais, peu à peu, le retour de ces mélodies monotones vous pénètre et vous imprègne en quelque sorte, et pour peu que des souvenirs personnels un peu tristes s’y ajoutent, vous vous sentirez pleurer sans songer seulement à juger, à apprécier ou à apprendre les airs que vous entendez. […] Quant au Symbole de Nicée, au sacrifice de la messe et au grand événement qu’il rappelle, vous n’y songez guère plus qu’après une représentation de Guillaume Tell ou un concert de Paganini.

773. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite) »

Dans son mélange de rêverie et d’épreuve, de réalité et de chimère, il songeait par moments à la Corse dont Rousseau était censé faire la Constitution et qui semblait sur le point de se régénérer : « En un mot, cher ami, je cherche un pays où je n’entende point le peuple se plaindre du gouvernement, où l’on puisse parler avec plaisir et des lois et de leur exécution, où l’étranger n’ait rien à craindre des citoyens, ni ceux-ci de leurs régisseurs. […] Deleyre, qui resta encore quelques années à Parme, y vécut, à sa manière, dans le supplice de Rousseau ; il l’imitait, sans y songer, par un secret accord douloureux, jusque dans cette variété d’une même mélancolie.

774. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite.) »

Que si cela vous étonne et vous afflige, prenez-vous-en aux inventions et aux cadrés du jour de créer ainsi des critiques d’office qui n’auraient jamais songé à l’être sans cela. […] Voici de lui un tout petit couplet, un air détaché qui est aussi daté de Grenade et qui fait songer : J’ai laissé de mon sein de neige Tomber un œillet rouge à l’eau..

775. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise par M. Taine. »

Songez seulement à ce que seraient les nôtres si nous étions venus au monde dix siècles plus tôt, ou, dans le même siècle, à Téhéran, à Bénarès, à Taïti. » C’est si évident, qu’il semblerait vraiment ridicule de dire le contraire. […] Je songe, en parlant ainsi, au livre spirituel et plein de faits que vient de publier M. 

776. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Legkzinska »

— Non, ma fille, reprit Stanislas : le Ciel nous est bien plus favorable, vous êtes reine de France. » La jeune fille, douce, modeste, soumise, assez peu aimée de sa mère, adorée de son père, voyait se réaliser le plus beau songe. […] Marie Leckzinska n’y songea pas assez : elle ne voulait d’aucun démon, tandis qu’il aurait fallu y mettre de l’invention, de la fantaisie, même avec de l’honnêteté, quelque chose de français qui fît trêve à l’ennui.

777. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

Mais on est tenté d’oublier ces portions magnifiques quand on songe à tant d’autres récidives simplement opiniâtres, à cette absence totale de modification et de nuance dans des théories individuelles que l’épreuve publique a déjà coup sur coup jugées, à ce refus d’admettre, non point en les louant au besoin (ce qui est trop facile), mais en daignant les connaître et en y prenant un intérêt sérieux, les travaux qui s’accomplissent, les idées qui s’élaborent, les jugements qui se rassoient, et auxquels un art qui s’humanise devrait se proportionner. […] Dans ces hautes influences philosophiques qu’il ne se refuse pas, il est, par rapport à tous, une simple précaution à garder : c’est de songer parfois à ceux qui sondent à d’autres points la sphère infinie, ou qui même, lassés, ne la sondent plus, et de se rappeler aussi que l’actuel espoir, l’impétueux désir des fortes âmes n’est pas le but trouvé.

778. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

C’est alors, vers l’an de Rome 617, qu’un jeune homme d’une famille plébéienne, mais illustre, un élève formé de la main des philosophes grecs, Tibérius Sempronius Gracchus, « dont le caractère bon et humain n’avait pu être corrompu par l’orgueil exclusif de sa nation, » comme il traversait l’Étrurie pour aller servir en qualité de questeur dans l’armée qui s’assemblait contre Numance, fut frappé de l’aspect désolé de ce pays, célèbre autrefois par sa richesse ; il s’en demanda les causes, il songea aux grands remèdes : de là plus tard ses tentatives de tribun et sa catastrophe. […] Avant qu’elle songeât à généraliser les griefs, et à y intéresser la plèbe domestique qu’elle continuait d’opprimer, il fallut qu’elle se fût bien assurée du peu de succès de son moyen ; il fallut du temps aussi pour que cette plèbe italiote comprît et s’émût.

779. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

Il le sentait bien, et ne se livrait à elles que par instants, pour revenir ensuite avec plus d’ardeur à l’étude, à la poésie, à l’amitié. « Choqué, dit-il quelque part dans une prose énergique trop peu connue44, choqué de voir les lettres si prosternées et le genre humain ne pas songer à relever sa tête, je me livrai souvent aux distractions et aux égarements d’une jeunesse forte et fougueuse : mais, toujours dominé par l’amour de la poésie, des lettres et de l’étude, souvent chagrin et découragé par la fortune ou par moi-même, toujours soutenu par mes amis, je sentis que mes vers et ma prose, goûtés ou non, seraient mis au rang du petit nombre d’ouvrages qu’aucune bassesse n’a flétris. […] En parcourant cet admirable musée de statuaire antique à Naples, je songeais à lui ; la place de sa poésie est entre toutes ces Vénus, ces Ganymèdes et ces Bacchus ; c’est là son monde.

780. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jean Richepin »

Dans les Blasphèmes, vous rencontrerez des souvenirs directs de Lucrèce, de Pline l’Ancien et de Juvénal (je ne parle pas des réminiscences de Musset et de Hugo), et dans la Mer, des morceaux de poésie didactique et descriptive qui vous feront songer, selon votre humeur, soit au Virgile des Géorgiques, soit à l’abbé Delille. […] Ces poèmes ont aussi le tort de faire songer à M. 

781. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Stéphane Mallarmé » pp. 146-168

Il songe au suicide « beau ». […] Lorsque Mallarmé, écrit Paul Valéry, m’ayant lu le plus uniment du monde son Coup de dés, comme simple préparation à une plus grande surprise, m’en fit enfin considérer le dispositif, il me sembla voir la figure d’une pensée, pour la première fois, placée dans notre espace… Ici, véritablement, l’étendue parlait, songeait, enfantait des formes temporelles.

782. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre V. La littérature et le milieu terrestre et cosmique » pp. 139-154

A plusieurs reprises, l’ermite de Montmorency a fait des démarches peu connues pour émigrer en quelque île de la Méditerranée ; il a songé à Minorque, à Chypre, à la Corse. […] On voyageait pour conquérir des terres, de l’or, de l’ivoire, des esclaves ; on ne songeait guère à partir en quête d’idées ou d’images.

783. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

On me dit que les hommes éclairés du ressort de qui elles dépendent à l’Instruction publique songent à les développer et à les perfectionner. […] J’ai vu un temps où nous étions loin de songer à ces choses ; c’était le beau temps des athénées, des cénacles, des réunions littéraires choisies, entre soi, à huis clos.

784. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Éloges académiques de M. Pariset, publiés par M. Dubois (d’Amiens). (2 vol. — 1850.) » pp. 392-411

Et moi je demande comment il est possible de savoir si bien ce qui se passa sur le visage de Haller regardant son ami avec complaisance, dans une scène qui n’eut pas de témoin, puisque Gessner d’abord n’y figurait qu’endormi ; et Haller était sans doute trop occupé de son ami pour songer à sa propre attitude. […] Il est évident que, pour les simples éloges des savants, il songeait trop à l’oraison funèbre ; il relisait bien plus volontiers Bossuet ou Fléchier qu’il ne relisait Fontenelle.

785. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Droz, sans le dire et sans y songer, est par instinct de l’école ou de la famille écossaise ; il a ses vrais parents de ce côté-là. […] J’ai anticipé sans y songer, et je reviens en arrière.

786. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — III. (Suite et fin.) » pp. 128-145

Et quand on songe que Zumalacárregui était un chef carliste espagnol, on y voit par un exemple sensible à quel point, dans l’estime de Carrel, le caractère de l’homme passait avant les opinions mêmes et le drapeau. […] Selon lui, le malentendu de 1830 est désormais consommé ; le divorce est manifeste aux yeux de tous, il est irréparable, et il faut songer à se pourvoir ailleurs.

787. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Étienne, ou une émeute littéraire sous l’Empire. » pp. 474-493

Songez aussi à cette seconde partie de la vie de M.  […] Étienne n’a jamais songé à ce point de vue, et ç’a été de sa part une distraction.

788. (1912) Le vers libre pp. 5-41

Notez bien que je ne songe nullement à vous dire du mal du Parnasse. […] Il en résulte que les libertés romantiques, dont l’exagération (plaisante) se trouverait dans des vers comme ceux-ci les demoiselles chez Ozy menées ne doivent plus songer aux hy- ménées sont fausses dans leur intention, parce qu’ils comportent un arrêt pour l’oreille que ne motive aucun arrêt du sens.

789. (1912) L’art de lire « Chapitre III. Les livres de sentiment »

Je ne songe pas à leur en vouloir ; mais il me semble que peut-être il vaudrait mieux qu’ils s’adressassent à un autre art qu’à la littérature. […] Je songe au lecteur d’Homère ou d’Horace qui les lit par goût, par élection, par vocation, et qui se plaît à eux, seulement parce que ce sont eux et que c’est lui.

790. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Un symbole »

Si l’on y songe un seul moment, il est impossible de ne pas rayer spontanément ce qui « nous a été imposé, en de mauvais jours de réaction, par une coterie toute puissante65 » Déjà, en 1880, le conseil municipal adressa une pétition à la Chambre, en vue de faire disparaître le vote du vingt-quatre juillet 1873. […] Ce n’était pas la première fois que l’on songeait à Montmartre pour y accomplir des desseins variés.

791. (1925) Comment on devient écrivain

S’il faut en croire Goncourt, Gautier était de ceux qui prenaient la plume sans songer à ce qu’il allait écrire. […] Ces réserves faites, on ne peut que louer Marcel Proust d’avoir songé à écrire sa vie. […] Quelqu’un qu’on ne songe pas à pasticher, c’est Brunetière. […] Rabelais, Montaigne, Amyot ne songeaient pas le moins du monde à être naïfs. […] On est effrayé quand on songe à l’énorme production que peut fournir une carrière de journaliste.

792. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

la représentation d’une pièce médiocre de Boissy, La vie est un songe. […] Le bal ne fut pas gai, car Lélète n’y dansa pas, et la mariée songeait à son amie. […] Je prends exemple sur la fourmi et, louant sa prudence, je songe à garnir mes greniers sur ses bons avis. […] — Quel bronze, répondit le recteur en souriant, n’avoir pas onze ans, et quelle laine ne jamais songer au lendemain !  […] ceci ne fait point l’affaire des libres-penseurs du village ; songez un peu !

793. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

Qui ne songera maintenant à un célèbre vers de Valéry ? […] La haine des intuitionnistes qui ne songent qu’aux âmes conduit M.  […] Louis XVI, que personne, pas même Robespierre, alors constituant, ne songeait à renverser en 1789, s’est perdu par ses flottements et sa déloyauté. […] Le gouvernement actuel, où siègent tant de ministres lettrés, voire académiciens, ne voudra-t-il pas y songer ? […] Mais il songe à tout révéler au mari, pour s’humilier devant lui !

794. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Voltaire, en qui nous trouverons plus loin un partisan décidé de l’Etat directeur de conscience, n’a pas songé à demander que l’Etat fût directeur de l’enseignement. […] Il n’y a pas de liberté, ni même de sécurité dans un pays où les juges sont nommés par le gouvernement Quand les Parlementaires de 1770 soutenaient leurs droits, ce n’était pas du tout au peuple qu’ils songeaient ; ils songeaient à eux ; mais en se défendant ils défendaient la liberté et la sécurité du peuple ; car, eux détruits, que restait-il ? […] Qu’il songeât aux républiques anciennes, c’est peu douteux ; mais il était de taille à considérer l’avenir en même temps que le passé et celui-la à travers celui-ci. […] Ils songent à rendre des services à l’Etat, au lieu de songer à lui en demander. […] Il y a une partie de la nation, restreinte, à la vérité, qui ne songe pas à être percepteur et qui alimente par son travail les caisses de la perception.

795. (1923) Nouvelles études et autres figures

Ils songent aux bêtes hideuses qui se tapissent dans leur repaire, et qui n’y sont pas au large, non plus ! […] Il ne pouvait cependant songer à les recommencer. […] On ne pouvait songer à le remplacer par la cordelière du Docteur Faust. […] C’était une dernière expérience que l’on tentait, car on songeait à la supprimer. […] Songez seulement à la somme d’expérience que représentent ces diverses situations.

796. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

L’amant entend songer l’amante qui s’est tue. […] Mais ils n’y ont pas songé… Dès lors, les pauvres ne sont-ils pas en droit de lever l’étendard de la révolte ? […] Paul Verlaine ne songeait pas alors à la politique. […] La réalité a toujours pour lui le décousu et l’inexpliqué d’un songe. » En d’autres termes, M.  […] Et aussitôt sa colère tombe ; et il songe et il s’enfonce en une sombre et amère rêverie.

797. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Rêves et réalités, par Mme M. B. (Blanchecotte), ouvrière et poète. » pp. 327-332

Chacun a vu passer quelque riant mensonge Dont rien n’a pu voiler l’ineffaçable songe : Heureux quand la chimère a des ailes d’azur Comme un nuage blanc flottant en un ciel pur !

798. (1874) Premiers lundis. Tome I « Dumouriez et la Révolution française, par M. Ledieu. »

Et qui donc songe à l’accuser aujourd’hui ?

799. (1875) Premiers lundis. Tome III « Eugène-Scribe. La Tutrice »

Scribe y songe : la haute muse comique, qui à la vue des excès du vaudeville est blessée au cœur et nous boude avec raison, a tendu la main à l’auteur de la Camaraderie, et le protégerait de préférence à beaucoup d’autres, si, au lieu d’éparpiller ses forces, il s’appliquait à les réunir ; s’il livrait plus souvent de véritables combats, au lieu d’escarmouches sans fin ; s’il donnait à son observation plus d’étendue et de profondeur, et s’il ne dédaignait pas aussi ouvertement cette puissance ombrageuse qui ne se laisse captiver que par de continuels sacrifices, mais qui seule aussi peut faire vivre l’écrivain : c’est du style que je veux parler.

800. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VIII. De la clarté et des termes techniques »

Il faut songer toujours pour quel lecteur on écrit, ou, ce qui revient au même, dans quel genre on écrit.

801. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Malaise moral. » pp. 176-183

Aucun journal n’a songé à demander s’il était vrai qu’un de ces derniers dimanches, au Théâtre de la République, on eût prié M. 

802. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 4, objection contre la proposition précedente, et réponse à l’objection » pp. 35-43

Les génies qui demeurent ensevelis toute leur vie, je l’ai déja dit, sont des génies foibles ; ce sont de ces hommes qui n’auroient jamais songé à peindre ni à composer, si l’on ne leur avoit pas dit de travailler ; de ces hommes qui ne chercheroient jamais l’art d’eux-mêmes, mais ausquels il faut l’indiquer.

803. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 31, que le jugement du public ne se retracte point, et qu’il se perfectionne toujours » pp. 422-431

Il seroit d’autant plus ridicule de prétendre que Martial eut songé à dire que les romains aïent mis durant un temps les poësies d’Ennius à côté de l’éneïde, qu’il s’agit précisement dans ce vers de son épigramme de ce qui se passoit à Rome du vivant de Virgile.

804. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — II »

Renan ne songeait plus qu’à se préparer à la mort.

805. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — VI »

Il était bien trop dégoûté pour attendre rien d’excellent même de ce qu’il aimait. « Lorsque, sous l’influence d’un mauvais régime, un organisme a contracté un vice qui l’atteint jusque dans ses éléments, ce régime lui devient presque nécessaire ; en tout cas, il ne faut pas songer à le modifier tout d’un coup. »‌ Soyons tranquilles là-dessus !

806. (1928) Les droits de l’écrivain dans la société contemporaine

Comment aurait-on songé à protéger la pensée ? […] J’ai été l’ami intime pendant toute sa vie d’un artiste célèbre, j’ai recueilli toutes ses confidences, j’ai été son collaborateur le plus étroit ; je n’aurai cependant pas le droit de divulguer ses lettres si (au cas où il n’a pas fait de testament, et c’est une précaution souvent impossible en cas de mort fortuite, ou à laquelle l’artiste ne prend simplement pas la peine de songer) un petit-fils ou un beau-fils, ou un parent éloigné, qui ne l’a pas connu mais qui tient à profiter de sa gloire, s’y oppose, même sans motif. […] J’ai souvent songé aux dangers de l’encombrement. […] Et puis il est impossible d’en exiger la publication  et puis encore, le classement prévu est à peu près inefficace… Reconnaissons pourtant qu’il n’est pas déraisonnable d’y songer, et pas inutile d’en parler. […] On songe au « sot abbé Raillane » : à Pauline Beyle, [8 févr. 1803], Stendhal, Lettres intimes, Paris, Calmann Lévy, 1892 (dans Correspondance I, 1800-1821, Gallimard, « B. de la Pléiade », 1962, p. 55).

807. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

cingle, frappe, mords de ta saine rudesse,  L’adulte chair qui songe à de la volupté,  Car je me veux pudique en ma virginité,  Moi, ta folle, orgueilleuse et sombre poétesse ! […] Elle songe qu’elle fut une petite fille, puis une fillette aux tresses pendantes, jeune bourgeoise qu’à travers la ville sa bonne accompagnait pour garder son innocence, et que ni des fillettes devenues grandes, ni des jeunes bourgeoises émancipées par le mariage, on n’attend pareille clairvoyance dans l’observation des réalités. […] — « L’œuvre du divin poète fait songer à la Victoire de Samothrace, ouvrant dans l’infini ses ailes mutilées. […] » Songez que le maître de Franckfort notait ses aphorismes au temps où la femme-auteur se manifestait comme le phénomène le plus rare et le plus isolé, vingt années avant que son disciple Nietzsche, qui partageait ses sentiments, flétrît en George Sand « l’ambition populacière qui aspire aux sentiments généreux ». […] Il songeait aux jeunes hommes de son âge, tout fiévreux d’ambition et d’amour, à ceux qui veillaient, courbés sur des livres, à ceux qui pressaient des femmes pâmées dans leurs bras.

808. (1864) Le roman contemporain

Elle déclare que, quant à elle, elle n’a jamais songé, elle ne songera jamais à rien prouver. […] On voit que l’auteur a songé à don Quichotte, et il a donné à ce don Quichotte femelle pour écuyer, sous les traits d’un Sancho Pansa amaigri, son aumônier, l’abbé Pyrmil. […] Feuillet en refermant le livre, sans songer qu’ils ne ressemblent pas beaucoup eux-mêmes à Maxime. « Ah ! […] Mais peu à peu le soleil descend à l’horizon ; il faut songer au retour. […] Il n’a pas assez songé qu’il y avait là une tentation pour Jean Valjean, dont le sens moral est comme oblitéré et dont la convoitise s’allume.

809. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. de Falloux » pp. 311-316

Il s’agissait de louer M. le comte Molé, que remplaçait M. de Falloux, et M. de Falloux, qu’une telle succession honore, surtout si l’on songe qu’elle a été presque une désignation, ou du moins un désir du mourant, a compris que c’était l’éloge de cet homme d’État illustre et de cet homme d’esprit aimable qui devait remplir tout son discours.

810. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXVII » pp. 306-312

Le style est ce qui, dans l’ouvrage, paraît laisser le plus à désirer ; le plus souvent on n’y songe pas, tant ce style est simple, facile et courant.

811. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Andrieux »

Je crois bien qu’on s’occupe d’idées plus larges, de théories plus radicales et plus absolues ; mais il en est peut-être à ce sujet des littératures qui se décomposent, comme des corps organiques en dissolution, lesquels donnent alors accès en eux par tous les pores aux éléments généraux, l’air, la lumière, la chaleur : ces corps humains et vivants étaient mieux portants, à coup sûr, quand ils avaient assez de loisir et de discernement pour songer surtout à la décence de la démarche, aux parfums des cheveux, aux nuances du teint et à la beauté des ongles.

812. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Jean Lahor (Henri Cazalis). »

Le bouddhisme, enfin, est le meilleur baume à la pensée souffrante… Quel bonheur, quand on y songe, que tout ne soit que rêve et vanité !

813. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Un grand voyageur de commerce »

Il est digne de notre admiration, et nous ne songeons point à la lui marchander.

/ 2008