Michelet, dans ce Cours, qui fut pour lui ce que, dans un autre temps, fut pour Massillon son Petit Carême, car l’étudiant, pour Michelet, c’est le petit roi de l’avenir ; Michelet a prêché l’établissement de la religion révolutionnaire, qui est une religion sans Dieu, avec les formules et les sentiments du Christianisme.
Louis XIV lui demandant quel était l’écrivain qui honorait le plus son règne, c’est Molière, répondit Boileau ; et quand le grand roi à son déclin persécutait Port-Royal et voulait mettre la main sur Arnauld, il se rencontra un homme de lettres pour dire en face à l’impérieux monarque : « Votre Majesté a beau chercher M. […] À peine se fit-il connaître, que Richelieu l’attira à Paris et l’y retint, le comblant d’honneurs et lui donnant le brevet de premier peintre ordinaire du roi avec la direction générale de tous les ouvrages de peinture et de tous les ornements des maisons royales. […] Et depuis il ne s’est pas trouvé en France un roi, un homme d’État pour interdire de laisser sortir sans autorisation du territoire national les chefs-d’œuvre d’art qui honorent la nation132 ! […] C’est encore au pinceau de Mignard que nous devons ce ravissant plafond du petit appartement du roi à Versailles, chef-d’œuvre aujourd’hui détruit, mais dont il nous reste une traduction magnifique dans la belle estampe de Gérard Audran. […] Ainsi je suppose que tout à coup un ami, dont l’innocence m’est connue, tombe dans la disgrâce ou d’un roi ou de l’opinion, maîtresse plus jalouse et plus impérieuse que tous les rois, et qu’il y ait du danger à lui rester fidèle et de l’avantage à me séparer de lui ; si d’un côté le danger est certain et si de l’autre l’avantage est infaillible, il est clair que je dois ou abandonner mon ami malheureux ou renoncer au principe de l’intérêt, de l’intérêt bien entendu.
Mais il voit trop en lui, il voit trop uniquement en lui « le roi des épouvantements ». […] Le fidèle se perd dans son Dieu et aime à annihiler en lui sa personnalité ; l’associé est dévoué à l’association, mais toujours avec une pensée de derrière la tête : « J’en suis, j’aime à en être ; je pourrais ne pas en être si je voulais. » Qu’on ne dise pas que l’État, la Nation peuvent avoir des fidèles et des dévots comme un roi. […] Il n’y aura jamais un dévouement à la nation égal à ce que fut le dévouement à un roi, surtout, bien entendu, dans les grandes nations ; car, encore une fois, le patriotisme dans les petits États républicains anciens avait tout le caractère d’un dévouement personnel. […] Il y a de même — cela a été constaté — de petits êtres qui naissent propres dans une jolie flaque de boue, et ces petits rois nés en cave sont très curieux aussi à étudier. […] Elle avait une tête, le roi ; des membres, les castes : caste militaire, caste sacerdotale, caste judiciaire ; un organe de défense et de reproduction, le peuple ; le mot prolétaire donne une clarté là-dessus.
Nos rois et leurs ministres inventèrent le seul stratagème possible et ils y recoururent de la façon la plus persistante : ce fut d’obtenir, à l’orient de nos rivaux, une diversion perpétuelle. […] Nicolas Ier refusa de lui écrire « Monsieur mon frère » ; et, à cette formule qui marque l’ancienne et quasi familiale union des rois séculaires, il substitua « Sire et bon ami ». […] » À ces historiens ou, plutôt, à ces partisans qui ont d’autres idées en tête et qui, en affectant d’écrire l’histoire, organisent l’apologie d’un groupe de politiciens et la déchéance de leurs émules, à ces historiens de gauche, par exemple, ou d’extrême gauche qui abusent des faits en faveur des doctrines, il aurait volontiers lancé le cri que le maréchal de Luxembourg, prêt à charger, adressait à la maison du roi : « Messieurs, souvenez-vous de l’honneur de la France ! […] Nos âmes sont bien à plaindre, telles que les voilà, et non seulement telles que Dieu les a faites, mais telles encore que les a refaites le hasard, le cher et fantaisiste hasard, roi et despote de nos plaisirs, de nos peines et de toute notre déraison. […] Victor Bérard, nous le désigne comme un malin qui flagornait les rois d’Asie Mineure, leur fournissait de complaisantes généalogies, racontait des voyages qu’il n’avait pas faits et pillait un peu les « guides du voyageur » de son temps.
Ce que pense un bouvier, un roi, ne vaut pas que l’on s’y attarde. […] Âmes de pirates, de rois et de laboureurs.
C’est la leçon de Thersite, du Premier Mouvement, de L’École des rois, de La Seconde Vie des Sept Dormants, de presque tous les autres contes aussi. […] Jules Lemaître nous ait donnée en cercles, son roman des Rois, ne nous a offert, quand nous l’avons goûtée, qu’un jus fade et douteux. […] L’essence et l’ordinaire de la littérature s’appliquent généralement à ce Socrate malheureux, et sa plus riche matière ce sont les misères d’un roi dépossédé. […] Le contraire se passe pour nos douleurs, nos misères de roi dépossédé. […] On ne peut pas ôter une scène à Œdipe Roi, on peut retrancher, sans les rendre ni moins épiques ni moins claires, la moitié de l’Iliade, du Nostos, de la Mnesterophonie ou de l’Énéide.
L’adolescent s’enorgueillit de participer à une tradition vénérable : Je suis fier d’être admis à vos cérémonies Ô Dieu du peuple élu, ô mon maître, ô mon roi ; Je suis heureux que mon enfance soit nourrie Dans votre temple saint, de votre sainte loi. […] Car le plaisir est roi du monde. […] Jamais encore on n’avait peint un tableau si vrai de la vie parisienne depuis la mort du roi jusqu’à la réaction thermidorienne. […] Les gens de cour qui rencontraient Le Nôtre dans les allées de Versailles pouvaient dire — cent documents en témoignent — ce que le favori du roi avait apporté de nouveau dans son art, et qui n’était autre chose que le sentiment de la perfection.
Voici comment ce prince s’exprimait au sujet des romanciers de son époque : Je vous répondrai que M. de Balzac n’est pas le roi des romanciers ; le roi des romanciers modernes c’est une femme, un de ces grands esprits… (Je passe plusieurs lignes de pathos sur George Sand). […] Lisez cette phrase de Brunetière dans le Roman naturaliste, au sujet d’un roman d’Alphonse Daudet : « Je vois bien dans les Rois en exil ce qu’il y a de nouveau ; je n’y vois pas encore assez clairement, ni surtout assez profondément marqués, ces caractères qui perpétuent les nouveautés et les font entrer dans la tradition. » En d’autres termes ce n’est pas le nouveau qui l’intéresse dans un livre, c’est ce qui est susceptible de devenir ancien, de se perpétuer en tradition. […] Quand les ministres girondins que la Législative imposa à Louis XVI entrèrent aux Tuileries sans permission et simplement parce qu’eux et l’Assemblée avaient la force et l’être, le maître des cérémonies sauva la face en leur criant de loin : « Messieurs, le roi vous accorde les grandes entrées » !
Comme petit détail exact, j’aimerais mieux que Jocelyn sortît du séminaire avant 93, avant la mort du roi, et dès 92, ce qui abrégerait d’autant l’année 94, trop longue dans le poëme (car par mégarde elle est double).
Les chansons de Désaugiers, plus rares sous la Restauration, furent trop souvent de circonstance : les fêtes du roi, le baptême du duc de Bordeaux, le sacre de Reims, obtenaient de lui sans effort des couplets sincères, mais que la France entière ne répétait pas.
Les princes et les rois s’honoraient d’y venir passer quelques instants, et d’y prendre, pour ainsi dire, leurs grades de beaux-esprits ou d’esprits-forts.
La peur de quelque dépense m’a retenu, et la vanité, et pis encore, m’ont emporté plus d’argent qu’il n’en eût fallu pour jouir en roi de ce que j’avais sous les yeux. — La société ?
« L’amour de la liberté commença la Révolution française ; l’Europe, désavouant la politique de ses rois, nous accordait son estime et son admiration.
La moitié de leur vie était heureuse : portiers le jour, ils étaient rois la nuit.
Le premier Napoléon, quand il s’arrêta quelques jours à Mâcon avec sa cour en 1805, en allant se faire couronner à Milan roi d’Italie, le fit appeler comme il avait fait appeler M.
Quand le roi serait venu, je ne m’en soucierais pas. » XIII Le 3 février.
Fils de M. de Bombelles, émigré français rentré avec le roi et devenu, depuis la mort de sa femme, évêque d’Amiens, il était resté au service de l’empereur François.
Les roues massives, les ridelles ou balustrades du chariot étaient tout encerclées de festons de branches en fleurs ; sur le plancher du chariot, grand comme la chambre où nous sommes, il y avait des chaises, des bancs, des matelas, des oreillers, des coussins, sur lesquels étaient assis ou couchés, comme des rois, d’abord les pères et les mères des fiancés, les frères et les sœurs des deux familles, puis les petits enfants sur les genoux des jeunes mères, puis les vieilles femmes aux cheveux d’argent qui branlaient la tête en souriant aux petits garçons et aux petites filles ; tout ce monde se penchait avec un air de curiosité et de bonté vers moi pour voir si l’éventail de la belle fiancée et les gouttes de rosolio de son sposo me rendraient l’haleine dans la bouche et la couleur aux joues.
Dans l’aile du zéphir qui joue, Dans l’armature du granit, Roi des atomes, il les noue, Les dénoue et les réunit.
L’unité française réalisée ou sur le point de l’être, les gloires poétiques se sont développées, à de très rares exceptions près, dans l’atmosphère de serre chaude de la cour et le rayonnement du roi.
Voici donc, d’abord, les partisans : [Les partisans] Paul Ackera Quand il y avait un roi, il pouvait, par des pensions et des dons faits sur sa cassette, venir en aide aux jeunes écrivains.
MENNECHET, homme de lettres, ex-lecteur des rois Louis XVIII et Charles X.
Tout ce qui mérite l’estime des hommes s’y trouve réuni : unité, consistance, fierté sans morgue ; un homme qui n’a pas toute l’ambition de ses talents ; pauvre et gardant un grand air ; l’agent d’un roi sans royaume, qui fait respecter dans son maître la dignité du malheur par la façon dont il fait respecter sa propre gêne ; aimable, civil, mêlé aux affaires sans en être possédé ; ayant, lui aussi, ses retraites et sa solitude, mais dans sa pensée tranquille, dans sa conscience de chrétien, dans les affections de la famille, si favorables à la recherche et à l’expression de la vérité.
On ne veut plus de généraux dans les armées, ni de roi à la tête des peuples ; de même l’intelligence groupant les sensations est inutile à nos modernes.
Dites, est-ce que l’effort héroïque, l’endurance, l’ascension lente du futur roi de la terre vers le bien-être, la lumière, la puissance, la justice ne sont pas cent fois plus émouvants, plus poétiques que les fables trop docilement répétées de siècle en siècle ?
D’ailleurs, parmi ses banalités, on découvre parfois des renseignements si intéressants… « Par lui nous savons que le vendredy vingt-septiesme jour de septembre 1630, le roi eut une fièvre très forte… que sa dysenterie était si forte qu’il fut à la garde-robe jusques à quarante fois dans vingt-quatre heures. » M.
voilà l’exploit suprême de ce paladin d’industrie que la comédie nous a présenté comme le prince des habiles et le roi des forts !
Les plus belles, les plus exquises, celles qui font les délices des princes de la jeunesse et de la fortune, ont souvent traversé des mondes d’amours obscurs avant d’apparaître et de parvenir, comme les diamants illustres qui, de la main du mendiant indien ou du nègre qui les déterre, passent par des milliers de trocs et d’achats subalternes, avant d’arriver à la couronne des rois ou à l’aigrette des sultans.
De nos jours, le parasite est un roi !
Les plus mauvais rois de Pavie sont auprès de lui des philosophes et des saints.
Il y a des théories qui sont leurs théories connues sur la fin de l’art des Raphaël et des Michel-Ange, du temps des papes et des rois, et sur le commencement d’un art nouveau, l’art de l’avenir, industriel et athée, imaginé par les pouilleux du temps actuel !
Dumas fils, auquel il ressemble plus qu’à lord Byron, et auquel il fait bien de dédier ses œuvres comme au roi des secs en littérature.
Guizot est venu hier à mon banc me demander si, lorsque le moment sera venu, vous consentirez à être présenté au roi. […] Comment un écrivain qui n’avait cessé depuis le commencement de ce régime de remplir des fonctions au nom de l’État, soit comme suppléant à la Faculté, soit comme maître de conférences à l’École normale, qui était professeur en titre au Collège de France, qui avait eu du ministre de l’instruction publique une mission pour son voyage d’Égypte, comment un tel académicien se serait-il dérobé à la visite d’usage et de pure forme, la présentation au roi ?
Des rois de l’Europe ont favorisé et honoré la liberté américaine. […] Le plus juste des rois, etc.
Guillaume (Le roi), IV, 193, 213, 221, 226 ; VII, 175. […] Rhompsonitos (Le roi), VIII, 106.
Son rôle est simple : manger, trimbaler, comme une vache sa sonnaille, un morceau de soie rouge au bout duquel pend une amulette, égrener la collection des sourires officiels, promener sa viande avariée parmi des nuées de coupe-coupe, exhiber les beautés du régime médiocrate aux regards humbles des éclopés qui finissent de crever de faim dans les hôpitaux, aux regards hébétés du bétail à guerre qui s’automatise sous les Porte-Plumets, répéter le discours émollient en usage depuis qu’il existe des rois et des empereurs et des présidents de république. […] Parut ensuite, sous ce titre Jadis et Naguère, un recueil de poèmes plus anciens où s’entremêlent des récits burinés comme des eaux-fortes, des évocations de villes et de campagnes tout imprégnées d’un sourd malaise : Despotique, pesant, incolore, l’Été, Comme un roi fainéant présidant un supplice S’étire par l’ardeur blanche du ciel complice Et bâille. […] Massif devant la vie, il l’obstrua, depuis Qu’il s’imposa sauveur des rois et de lui-même Et qu’il utilisa la peur et l’affre blême En des complots fictifs qu’il étranglait, la nuit. […] Car ces derniers soldats de la dernière guerre Furent grands ; ils avaient vaincu toute la terre, Chassés vingt rois, passé les Alpes et le Rhin, Et leur âme chantait dans les clairons d’airain. […] On peut dire que le sang de Périclès, de Cyrus, de Sémiramis empourpre et anime le pire laboureur tout aussi bien que les descendants des rois.
D’autre part, Olympio est aussi bien l’auteur de la Rêverie d’un passant à propos d’un Roi ; il aime à méditer sur les grandes catastrophes de l’histoire, sur les révolutions des empires et sur la chronique au jour le jour des événements publics : le monologue de Charles-Quint n’est qu’une « méditation » sur l’Europe de Charlemagne, celui de Barberousse est une « méditation » sur l’Allemagne féodale. […] Le Roi s’amuse n’est d’un bout à l’autre qu’un pamphlet ; c’est tantôt Saint-Vallier qui y injurie la royauté, et tantôt Triboulet qui humilie la noblesse. […] Hernani oppose le bandit à l’empereur et le jeune homme au vieillard ; le Roi s’amuse oppose au roi le bouffon ; Marie Tudor l’ouvrier au grand seigneur ; Angelo la courtisane à la grande dame ; Ruy Blas le valet au ministre et le ver de terre à l’étoile. […] André del Sarto a volé l’argent du roi et gâché son génie pour une femme qui le trahit ; pendant que Marianne s’éprend d’Octave, qui ne l’aime pas, Cœlio, qui l’aime, tombera sous les coups destinés à un autre ; l’amour prend aujourd’hui pour victime l’innocente Rosette ; ce sera, demain, soyez-en sûrs, le trop heureux Fortunio.
Elle s’écrierait comme Sapho dans l’ode célèbre : « Immortelle Aphrodite au trône d’or, fille avisée du roi des dieux, je t’invoque, épargne-moi, ne me dompte point par trop d’amères douleurs, ô déesse vénérée !
C’est bien de François Ier, de l’avènement du jeune roi vainqueur à Marignan, que date chez nous la vraie Renaissance, cette espèce d’aurore soudaine qui se leva sur les esprits et les intelligences, sur le goût public.
Un roi qui craint de perdre sa couronne par une révolution subite, ne ressent pas des angoisses plus vives que les miennes, à chaque accident qui menaçait les débris de mon rameau.
Aujourd’hui le cabot est roi !
Mais il ne s’agit point de décapiter l’ancien monarque ; on s’est borné à lui adjoindre des ministres responsables, des chambres législatives, une presse bavarde, — et le voici devenu roi constitutionnel.
Mon œuvre la plus importante est un poème sur Rodrigue dernier roi des Goths.
Ce berger et ce roi sont sous même planète ; L’un d’eux porte le sceptre, et l’autre la houlette ; Jupiter4 le voulait ainsi.
Paris, source des idées et roi de la mode ! […] Après des livres étincelants comme le Nabab, Jack, les Rois en exil, M. […] Son appréciation du théâtre d’Hugo représente à peu près ce que nous pensons tous aujourd’hui d’Hernani, de Ruy Blas et du Roi s’amuse. […] Le féerique palais des rois maures, avec sa sculpture innombrable, ses galeries blanchies de lune, le retentissement de ses marbres et le murmure de ses fontaines, était un cadre merveilleusement approprié à l’imagination descriptive de Chateaubriand. […] Il eut en elle un infatigable défenseur, qui brava les épigrammes et osa plaider sa cause jusque dans l’antichambre du roi.
L’art classique imitait un roi qui gouverne, punit, récompense, choisit ses préférés dans une élite aristocratique, leur impose des conventions d’élégance, de moralité et de bien dire. […] L’histoire reçoit la déposition des peuples et repousse au second plan les seuls témoins qu’elle écoutât jadis, rois, ministres, capitaines ; en parcourant ses nécropoles, elle s’arrête moins volontiers aux monuments pompeux, elle va dans la foule des tombes oubliées, s’efforçant de ressaisir leur murmure. […] — Un océan trouble et désordonné, où pour les siècles — il n’y a plus de chiffre et plus de nom ; où sans asile — les étoiles rôdent à la suite d’autres étoiles. — Jeté parmi leurs chœurs silencieux, — que fera l’orgueilleux roi de la création ? Le morceau finit en rappelant à ce roi qu’il est « terriblement pareil à un singe » […] Le mot « liberté » fut rayé partout et dans toutes ses acceptions, comme le mot « Roi » sous la Terreur ; puérilités identiques du despotisme, qu’il vienne d’en haut ou d’en bas.
L’ambition de chacun de ces rois, de ces princes souverains, de ces villes capitales, était de conquérir et de posséder un de ces hommes supérieurs qui portaient avec eux la renommée d’un royaume ou d’une ville.
Vie du Tasse (2e partie) I Mais une autre faveur plus tendre et plus durable que celle des rois, des papes et des cardinaux, veillait de loin sur lui malgré sa disgrâce ; c’était celle des deux charmantes princesses de Ferrare, Lucrézia, duchesse d’Urbin, et Léonora, toujours restée à la cour de son frère.
Le courant disparaît dans la seconde partie du siècle, sous l’éclat de la littérature catholique et sous la décence des mœurs imposée par le grand roi.
Kanut est un grand roi dont les hauts faits et les bienfaits ne se comptent plus.
La prêtrise égalait celui qui en était revêtu à un noble. « Quand vous rencontrez un noble, entendais-je dire, vous le saluez, car il représente le roi ; quand vous rencontrez un prêtre, vous le saluez, car il représente Dieu. » Faire un prêtre était l’œuvre par excellence : les vieilles filles qui avaient quelque bien n’imaginaient pas de meilleur emploi de leur petite fortune que d’entretenir au collège un jeune paysan pauvre et laborieux.
Ils voyaient le danger d’être plus royalistes que le roi et savaient qu’on passe facilement d’un excès à l’autre.
La sagesse du feu Roi, votre Pere, a su préserver vos Etats de cette contagion : la vôtre ne sera pas moins attentive, parce que ses lumieres savent également en discerner le vice & en prévoir les dangers.
L’homme n’est pas leur œuvre ; elles ne l’ont pas fait toutes seules, il lui fallait la Terre pour mère et pour nourrice, et après combien d’essais, de tâtonnements gigantesques, de moules brisés : Il lui fallait la terre et ses milliers d’épreuves, D’ébauches de climats, d’essais de formes neuves, D’élans précoces expiés, D’avortons immolés aux rois de chaque espèce, Pour que de race en race, achevé pièce à pièce, Il vit l’azur, droit sur ses pieds.
C’est donc en haut et non en bas qu’il faut regarder, en haut, c’est-à-dire au plus profond de la conscience humaine, et non à la surface même de la nature inorganique, pour y trouver l’essence de l’être, de l’être infime qu’on nomme la pierre comme de l’être supérieur qui est le roi du monde connu.
Or, les plus belles des collections privées de documents — à la fois bibliothèques et musées — furent naturellement en Europe, à partir de la Renaissance, celle des rois. […] Nous n’arrivons à exprimer les faits humains même les plus vulgaires, conditions sociales, actes, motifs, sentiments, que par des termes vagues (roi, guerrier, combattre, élire). […] (S’il y avait eu des assemblées régulières du peuple franc, Grégoire de Tours n’aurait pu concevoir et décrire la vie des rois francs sans en parler.) […] On enseignait jadis l’histoire aux fils des rois et des grands personnages, pour les préparer à l’art du gouvernement, suivant la tradition antique ; mais c’était une science sacrée, réservée aux futurs maîtres des États, une science de princes, non une science de sujets. […] L’histoire faisait partie des convenances mondaines ; il y a, disait-on, des noms et des faits « qu’il n’est pas permis d’ignorer » ; mais ce qu’il n’est pas permis d’ignorer varia beaucoup, depuis les noms des rois mérovingiens et les batailles de la guerre de Sept Ans jusqu’à la loi salique et à l’œuvre de saint Vincent de Paul.
L’Esprit gaulois, qui, par la coïncidence de son triomphe littéraire avec les empiétements — le roi aidant — de la Commune sur la Féodalité, démontre son origine plutôt bourgeoise que populaire, exprimait toute la poussée d’une part de la nation que nous commencions à devenir, contre l’esprit frank, contre l’esprit de liberté guerrière, de domination épique ; et, non moins que l’humiliation des vassaux par Louis XI, les Cent Nouvelles nouvelles furent une victoire. […] Ronsard fut un des princes de l’ode et un des rois de l’odelette. Il ne fut ni roi ni prince de son pays. […] Quant aux comédies et tragédies, si les Rois et les Républiques les voulaient restituer en leur ancienne dignité qu’ont usurpée les farces et moralités, je serais bien d’opinion que tu t’y employasses, et si tu le veux faire pour l’ornement de ta langue, tu sais où tu dois trouver les Archetypes. » Ainsi, tout net, et avec quelle chaleureuse passion, ce que le très intelligent et très lyrique Joachim Du Bellay conseille, ordonne même au futur poète, au futur poète français, c’est d’être grec, latin, italien, tout ce qu’il voudra en un mot, hormis français. […] Il est « comme le roi » non pas d’un pays pluvieux, mais d’un royaume ensoleillé où abondent les richesses des mines éventrées ; sa langueur, parmi les éblouissements et les luxes, s’accoude, plus désolée.
« Comme Buffon voyait que l’école encyclopédique était en défaveur à la cour et dans l’esprit du roi, il craignit d’être enveloppé dans le commun naufrage, et pour voyager à pleines voiles, ou du moins pour louvoyer seul et prudemment parmi les écueils, il aima mieux avoir à soi sa barque libre et détachée. » Et, de fait, à l’Encyclopédie, le premier usage que l’on devait faire de sa liberté, c’était de l’abdiquer aux mains des Diderot ou des d’Alembert ; mais Buffon, fort de sa naissance, de sa situation de fortune, et de sa valeur, avait la prétention de ne dépendre que de lui-même. […] Lorsqu’il commença de s’appliquer à l’histoire naturelle, c’est-à-dire lorsqu’il fut nommé « intendant du Jardin du roi », il n’était pas naturaliste et c’est ce qui peut servir à expliquer le désordre apparent des premiers volumes de son grand ouvrage. […] Mystère, Toutes les choses de la terre, Gloire, fortune militaire, Couronne éclatante des rois, Victoire aux ailes embrasées, Ambitions réalisées, Ne sont jamais sur nous posées Que comme l’oiseau sur les toits. […] Mais déjà, du vivant de Victor Hugo, Marion Delorme et Lucrèce Borgia, Marie Tudor et le Roi s’amuse, c’est vainement qu’on a prétendu les imposer à notre admiration.
Alcuin, entre autres, des lettres duquel nous avons appris ces particularités, prit celui de Flaccus, qui était le surnom d’Horace ; un jeune seigneur qui se nommait Angilbert, prit celui d’Homère ; Adelard, évêque de Corbie, se nomma Augustin ; Riculphe, archevêque de Mayence, Damétas ; et le roi lui-même, David. […] en roi…Qu’il mourût… Dieu dit : que la lumière se fasse, et elle se fit… et tant d’autres morceaux sans nombre seront toujours sublimes dans toutes les langues : l’expression pourra être plus ou moins vive, plus précise selon le génie de la langue ; mais la grandeur de l’idée subsistera tout entière.
N’est-ce pas là aussi un bienfait venu de loin, du fameux pré carré de nos Rois, et aussi de la longue tutelle ecclésiastique, prudente et sage, et aussi de ce sol merveilleux, unique et gras, qui se laisse diviser en parcelles et rejoindre en champs d’un seul tenant, qui a la bonhomie de son laboureur, de son vigneron, de son semeur ? […] Elle l’a submergé en le flattant, en lui répétant sur tous les tons, en prose et en vers, et du haut de toutes les tribunes, que jusqu’à la grande Révolution, c’est-à-dire jusqu’au début de la période sans précédent, ineffable et incomparable, la nation française avait croupi sous la tyrannie et dans l’erreur, courbée par les Rois, les moines, les soudards et les favorites. […] Le sujet d’Hernani, de Ruy Blas, du Roi s’amuse est inexistant comme celui des Travailleurs de la Mer et de l’Homme qui rit ; et les personnages qui s’y agitent ne sont même pas de fugitives ombres. […] Hugo vivait encore, lorsque tomba à plat la reprise du Roi s’amuse à la Comédie-Française, où Got jouait, sans la moindre fantaisie et avec le plus grand sérieux, le rôle extravagant de Triboulet, le bouffon paternel, pendant de la stupéfiante Sachette, de Notre-Dame de Paris. […] Du plus lointain des âges, l’esprit, ce grand antidote de tous les poisons intellectuels et sociaux, courait à travers le peuple français, du modeste artisan jusqu’au Roi.
L’oiseau, roi chronologique de la création, est demeuré jusqu’ici, et malgré ses perfectionnements, un animal ; la série des oiseaux ne semble pas, pour l’intelligence, supérieure à la série des mammifères, où l’homme figure à titre d’inexplicable exception. […] Comme on pourrait découvrir, même dans ce paradis égalitaire, une assez vague idée de compensation, donc de justice, il faut aller plus loin, à Java, où le paradis, sans doute à cause d’un excessif péage, n’était accessible qu’aux riches ; chez ces résignés où seuls les rois, les prêtres et les nobles étaient sauvés ; à Bornéo où l’au-delà, divisé en sept cercles, correspondait aux sept divisions de la hiérarchie sociale. […] II Comment la gloire, d’abord réservée aux rois et aux guerriers chantés par les poètes, a-t-elle fini par être attribuée aux poètes plus encore qu’aux héros de leurs poèmes, c’est un fait de civilisation dont l’origine exacte n’aurait pas beaucoup d’intérêt. […] Les siècles s’en allèrent, et il y avait toujours des Paraclétistes occupés à regarder si un signe n’allait pas paraître au ciel, annonçant la naissance du Roi juste ; ils en virent parfois, des signes, mais faux, ce qui ne les décourageait pas.
La veille de la publication du Roi s’amuse, il fit annoncer que mille exemplaires étaient retenus d’avance. […] Une caricature géniale comme Ubu roi finit par n’être plus qu’une farce de collégien. […] Au surplus, qu’on emploie je ou il, le ton direct ou le ton indirect, il sera toujours plus facile, comme nous le disions, de raconter ses souvenirs que de faire du roman objectif et de traiter la grande comédie de la vie, des types et des sujets comme César Birotteau, Eugénie Grandet, le Nabab, les Rois en exil. » Quand on dit : « Il faut peindre la vie », cela ne signifie pas qu’on peut traiter n’importe quoi, comme le pensaient Tchékhov et Goncourt. […] On ne traduit rien adéquatement ; on ne peut donner que des équivalents approximatifs. « Turannos, disait Péguy, ne signifie pas roi ; iereus n’est pas prêtre ; polis n’est pas la ville d’aujourd’hui ; ni techna les enfants de nos jours ; trophé non plus n’est pas nourriture. » Évidemment, les mots d’une langue ancienne ne correspondent plus aux mots des langues modernes.
Le Roi-Empereur, arrivé à Reims, fut logé par l’archevêque dans la plus belle pièce de l’Archevêché, que le Roi ne trouva d’abord pas digne de sa grandeur. […] Sur cette affirmation, le Roi se décida à l’occuper, et voici la carte de visite qu’il y laissa. […] La conversation s’engagea, et le chiffonnier s’écria : « Mon métier, c’est le plus beau des métiers, le roi des métiers !
On ne risquait plus alors d’être mis à la Bastille pour de telles échappées ; on raconte seulement que ces vers : Et vous, peuple injuste et mutin, Sans pape, sans rois et sans reines, Vous danseriez au bruit des chaînes Qui pèsent sur le genre humain !