Polémiste de tempérament, fait pour toutes les luttes, tous les combats, toutes les mêlées, et sentant cette vocation pour la guerre bouillonner en lui comme bouillonne cette sorte de vocation dans les âmes, quand elle y est, il a de bonne heure demandé instamment à ceux qui semblaient penser comme lui sa place sur leurs champs de bataille, mais ils lui ont toujours fermé l’entrée de leur camp.
— donner une volée… de sa cravache d’amazone philosophique et littéraire à ce jeune missionnaire de salon qui se mêlait des affaires du catholicisme ; mais la main n’y est plus et la cravache n’a ni sifflé ni cinglé.
∾ Certaines personnes qui ont l’esprit confus se plaisent à mêler les termes, et décorent du titre de catholique, de chrétien, de religieux tout idéaliste, tout homme détaché des avantages matériels.
Chez les peuples pasteurs et à demi sauvages, l’amour devait se mêler à toutes les idées, et même à celles de la guerre, parce que les femmes y étaient des objets de conquêtes.
Comment se fait-il que, dans l’intérieur même de l’Asie Mineure, jusqu’aux pieds du Taurus, les villages chrétiens soient mêlés aux villages turcs, de telle sorte que le voyageur a peine à savoir laquelle des deux populations domine l’autre en nombre, en autorité, en richesse, dans toutes ces parties de l’empire ? […] L’élément nouveau appelé l’opinion, force morale, s’est mêlé aux autres éléments de force matérielle que les négociations et les traités avaient pour objet de concilier et d’asseoir. […] Le roi de Piémont abuse évidemment de l’héroïsme ; brave comme s’il n’était que soldat, et encouragé à tout oser par l’Angleterre, à qui tout convient de ce qui peut nous nuire, le roi de Piémont, comme le grand Condé, qui jetait son chapeau au milieu de la mêlée, a jeté sa couronne de Sardaigne par-dessus les Apennins à Florence, à Rome, à Naples, à Palerme, pour que les soldats lui rapportent celle d’Italie !
Mais, comme ces hommes simples sont aussi les plus impressionnables et les plus séductibles de tous les hommes, et en même temps les plus incapables d’analyser en masse un ouvrage de dix volumes, accumulés d’une main de géant pour mêler le vrai et le faux, le raisonnement et le sentiment dans un mouvement d’art inextricable, je lui proposai d’en causer à loisir, et de me permettre de l’interroger en notant ses réponses. […] Mais examinez donc, selon moi, la profondeur d’atrocité, et d’atrocité mêlée d’ingratitude et d’injustice, de ce brave homme auquel M. […] La révolution française est, comme toutes les choses humaines, mêlée de bien et de mal.
L’idée vraiment neuve de ces deux fondateurs fut de chercher à procurer l’amélioration du clergé séculier au moyen d’instituts de prêtres mêlés au monde et joignant le ministère des paroisses au soin d’élever les jeunes clercs. […] On ne saurait nier qu’il ne se mêlât à tout cela une certaine antipathie contre le talent et quelque chose de la routine de scolastiques gênés dans leurs vieilles thèses par d’importuns novateurs. […] Manier mêlait à ces vieilles thèses les analyses psychologiques de l’école écossaise.
Il me tendit une main nerveuse et molle en même temps et se mit à causer, à discourir ensuite : la phrase était curieuse, incorrecte, sans rythme peu à peu triviale et crue, mêlée d’expressions argotiques. […] Flottante, évidemment, cette idée Anarchique, et mêlée d’éléments très disparates. […] Et vraiment elle ne méritait guère le dire de dédain, mais mêlé de rancœur, de Gustave Kahn disant en son livre de Souvenirs que la « Revue Indépendante » n’avait plus connu les heures valeureuses qu’il lui avait values en l’an 1888 lorsqu’il présidait à ses destins. […] Ne nous étonnons pas : en Mallarmé le génie esthéticien se mêle souvent d’ingéniosité, exercée à la rare perception et au travail de l’analogie primitive Reprenons. […] Je crois donc dangereux pour Mallarmé, parce que ce peut être irritant — de vouloir lui prêter des grandeurs qu’il ne possède pas, tandis qu’il en a d’autre part qui vainquent la durée… « Il a mêlé l’individualisme au Mysticisme, dit Camille Mauclair.
Au dire des chroniqueurs, le sang étrusque de Fiesole et le sang romain de Florence n’avaient jamais pu ni se mêler ni s’accommoder. […] Pour l’obtenir, il s’efforce de tout apprendre : il veut se mêler à tout, être le premier partout. […] Pour peu que Marcel s’en mêle, nous ne commencerons pas aujourd’hui le voyage dantesque. […] » Cependant, au récit de ses prodiges et de ses bienfaits se mêlent des anecdotes moins favorables, inventées peut-être dans les cloîtres, pour discréditer la sagesse antique. […] Nous sommes avec lui au troisième cercle où tombe sur les pécheurs par gourmandise une pluie froide et lourde, mêlée de grêle et de neige.
Que de poésie dans ces vapeurs bleuâtres tourbillonnant dans un ciel serein pour se mêler aux nuées diaphanes qui cachent la cime du Péguère et du Cabaliros ! […] Comme un mélange de vin et d’eau, se mêlent leurs amours, plus inséparables que la clarté et la resplendeur, que l’essence et l’être. […] Les catholiques, enfin, s’en sont mêlés. […] La passion la dévore toujours, mais, maintenant, le remords mêle à ses brûlures son cuisant aiguillon. […] José-Maria de Pereda, un récit mêlé de descriptions : c’est une autobiographie, dont le héros redit lui-même ses aventures et ses malheurs.
Littérature et poésie se mêlent de ce qui ne semble pas d’abord leur affaire : leur affaire ne serait-elle pas de nous divertir ? […] Il ne se mêle point des affaires publiques et fuit les honneurs, qui lui font peur. […] Et des Grieux, après avoir causé avec Tiberge : « La piété se mêla dans mes considérations. […] Bouvard et Pécuchet se mêlent de toutes les sciences à l’étourdie et procèdent mal, sans exactitude et sans rigueur. […] Pourquoi veut-on que la littérature se mêle éperdument de ce qui ne la regarde pas ?
S’il place le vase à verser le vin sur le cratère où l’on mêle les boissons, c’est un signe funeste. […] Il s’y mêle aux grands poètes et aux sages qui vécurent avant le Christ ou qui ne reçurent pas le baptême. […] Shelley en conserva à jamais le souvenir « d’une âpre et discordante mêlée de tyrans et d’ennemis ». […] Sa grandeur est mêlée de meurtre et de charnier ; et la veuve Scarron jette sur son nom « une ombre vile ». […] Le pythagorisme s’y mêle au panthéisme et au saint-simonisme.
« Il y a des gens dont la vanité se mêle de tout ce qu’ils font, même de leurs lectures. […] La vieille Mme d’Héricourt tape déjà sur les doigts de ce monstre, quelle sera sa douleur quand les jeunes s’en mêleront. […] À chaque instant le professeur se perdait au milieu de cette population mêlée, et on le voyait chercher avec inquiétude en disant : « Où ai-je mis mon évêque ? […] Ne peut-on faire un roman sans y mêler des roucoulades et des déclarations ? […] Je les mêle à dessein.
On avoit entièrement oublié l’usage de la langue Latine, & l’on ne parloit, on n’écrivoit plus qu’en langue Romance, ou rustique ; c’est-à-dire, dans un idiome barbare, mêlé d’un Latin corrompu. […] Dans ces temps du bon goût, ce n’étoient pas seulement les Orateurs que les filles de Mémoire inspiroient ; elles se plaisoient encore à mêler leurs chants célestes aux accords de la lyre des Quinault & des Lulli ; elles faisoient revivre les pinceaux des Apelles & des Zeuxis, & ranimoient le ciseau des Phydias & des Praxitelles ; elles portoient avec complaisance leurs regards sur ces Monumens immortels, qui s’élevoient par la magnificence & pour la gloire du Monarque & des Arts ; en un mot aucun genre ne pouvoit demeurer imparfait. […] La Géométrie eut son cours comme les Romans : l’engoument pour cette science fut universel ; tout, jusqu’aux femmes, s’en mêla : on alla même, pour leur plaire, jusqu’à traiter la galanterie géométriquement. […] Jamais siècle n’a mêlé à son escrime, pour me servir des expressions de Montagne(*), tant d’injures & tant d’indiscrétions. […] Ils formèrent alors un Grec mêlé d’Hébraïsmes, qu’on appelle le langage Hellenistique :la version des Septante est en ce langage.
Lundi 1er juin Cette kermesse me dégoûte, et je remercie mon état de souffrance, qui me permet de ne pas m’y mêler. […] » Et le monde du dimanche arrive, et l’on cause et l’on blague, et l’on s’emporte et l’on s’indigne ; et peu à peu Daudet se mêle à la causerie, au rire ou à la colère des paroles. […] Et pour paysage et horizon, tout près de soi, à cinq mètres, un mur couleur de boue, dans lequel ouvre une fenêtre aux carreaux moitié cassés, moitié bouchés par des toiles d’araignées, et au milieu de la petite cour séparant le bureau de rédaction du mur en face, un espèce de soupirail de verre, d’où montent des odeurs de cuisine de restaurant à vingt-cinq sous, mêlées à des odeurs de laboratoire de pharmacie. […] … Là-dessus je lui dis qu’il aurait à faire le plus beau et le plus intéressant livre du monde, un livre qui n’a été fait par aucun peintre des temps anciens et modernes : un catalogue, où il raconterait la genèse et l’histoire de ses tableaux, et ce qu’il y a de sa vie intime et psychique mêlé à chacune de ses compositions. […] Elle a cette femme, un charme à la fois mourant et ironique tout à fait singulier, et auquel se mêle la séduction des Slaves : la perversité intellectuelle des yeux et le gazouillement ingénu de la voix !
Les plus graves leçons cessent de leur peser lorsqu’on y mêle l’amusement, et la plupart des personnes qui viennent assister à nos séances littéraires témoignent en faveur de cette vérité par leur assiduité même. […] Le Mégarien ne fait rien parmi ses compagnons, ou ne leur prête qu’un bras faible : s’il n’était affamé et réduit à ce labeur par la disette, il ne s’en mêlerait pas. […] Sont-ce des intrigues : il faut qu’elles ne sortent que les unes des autres, et que rarement le hasard s’y mêle d’une manière trop fortuite et trop brusque. […] Trop de passions alors s’y mêlaient, et la pitié qu’il pouvait exciter, en immolant une victime connue et désignée, troublait en quelque sorte l’enjouement de la satire. […] Je n’ai garde de le penser : aussi n’est-ce point de lui que la philosophie se joue, mais du préjugé qui s’y mêle.
Derrière la vitre d’un café, un convalescent, contemplant la foule avec jouissance, se mêle, par la pensée, à toutes les pensées qui s’agitent autour de lui. […] Les sensations fraîches de la famille, l’amour, la contrainte, l’esprit de révolte, s’y mêlent en quantités suffisantes pour créer un poëte. […] Il se fait une grande mêlée ; et, par manque de sagesse philosophique, chacun prend pour soi la moitié du drapeau, affirmant que l’autre n’a aucune valeur. […] De quoi diable se mêle M. le ministre ? […] La morale n’entre pas dans cet art à titre de but ; elle s’y mêle et s’y confond comme dans la vie elle-même.
Il les a regardés avec une sorte de tendresse mêlée d’une pitié vague, avec ce genre d’émotion triste et résignée qu’exprima dans des toiles mémorables le peintre François Millet. […] Et, en même temps qu’ils mûrissent et parachèvent leurs œuvres, ils se mêlent à la vie publique, l’animent de leur sage activité, l’embellissent de leurs enthousiasmes. […] Ils sont rares, constate-t-il, les hommes de lettres qui, de Chateaubriand à Maurice Barrès, se mêlèrent à la politique. […] Camille Mauclair se décider sur le tard à abandonner Éleusis et les mornes architectures de la Cité Intérieure, pour se mêler à la vie publique et nous donner dans l’Aurore d’intéressants commentaires sur l’évolution sociale. […] J’ai déjà eu l’occasion, voici, je crois, plusieurs mois, de parler dans la Revue Naturiste de ce bel et puissant roman, l’Île vierge, où l’idyllique suavité se mêle à la magnificence épique.
La politique se mêla encore à ses derniers jours : il avait écrit un petit livre : L’Esprit de la Révolution de 1789 ; il en communiqua le manuscrit au duc d’Orléans (depuis roi) en 1829, et il le publia en 1831. […] Ces quelques mots, tout pétris d’amertume, sont mêlés d’inexactitude.
Étienne de La Boétie a de plus qu’eux de mêler, au milieu de son découragement et de sa douleur, une verte sève de jeunesse, un accent un peu rude, mais franc, de poésie. […] La Fontaine, au contraire, semble avoir conçu l’amitié aussi vive que l’amour, et il les a quelquefois mêlés par une sorte de confusion charmante.
Les imprudents se battent, et les gens sages viennent à profiter de l’objet du combat quand on est bien sûr qu’ils ne s’en sont pas mêlés ; et cette aventure de tertius gaudet arrive dans les cours les plus intrigantes tout comme pendant les gouvernements forts et tranquilles… Dans ces intrigues, ajoute-t-il, le moindre risque, selon moi, surpasse les plus hautes espérances ; je crains extrêmement la disgrâce et la Bastille ; j’aime ma liberté et ma tranquillité, et je ne les veux jamais sacrifier qu’au bonheur de mes citoyens ; mais quelle sottise de les sacrifier à ses vues personnelles ! […] Il y mêle une théorie à lui sur l’amour-propre : après quoi il ajoute, en en faisant l’application à son frère (août 1738) : Il s’aime en tout bien, il aime son élévation et toute la plus grande élévation ; par-delà lui, il aime sa maison ; il a encore le sentiment du moment pour quelques objets de parenté ou étrangers.
Sa voix est fine et fluette ; il éprouve de la gêne quand il commence à parler, et les mots sortent difficilement de sa bouche ; il prononce mal les r et les l ; en somme toutefois, il sait dire ce qu’il veut, et parvient à se faire comprendre assez bien. » Suivent quelques détails sur son moral, un peu mêlés, et où il entre du pour et du contre. […] Je trouve fort singulier que vous vous mêliez de mon mariage qui ne vous regarde pas, et je ne sais pourquoi vous prétendez que mon père me marie plutôt avec l’une qu’avec l’autre.
Qu’un nid vide te recouvre et t’abrite, une masure que réchauffe un petit feu flambant, quand même tu n’y aurais qu’un pain commun, d’une farine mal blutée, pétrie de tes mains dans une pierre creuse, et pourvu que tu y aies encore et du pouliot, et du thym, et de ce gros sel amer si doux à mêler aux aliments. » Enfin l’on a son Épitaphe, composée par lui en perspective de sa mort prochaine ; on est loin ici du bonheur champêtre de cet autre vieillard de Tarente que nous a montré Virgile. […] « On a renversé le panier : aux délicats maintenant de reconnaître dans la mêlée les cerises du dessus. » C’est encore ce que m’écrit, après avoir lu le présent article et en se ravisant, le spirituel correspondant dont on vient de voir les craintes, et que je prends sur moi de nommer, M.
Je ferai observer à mon tour qu’il ne faut prendre de ces conversations redites et répétées à loisir, même quand elles sont le plus sincèrement reproduites, que le trait saillant et la physionomie : pour le détail, les inexactitudes et les à peu près s’y mêlent toujours plus ou moins, et la mémoire aussi est une arrangeuse. […] On pense bien qu’en pareille matière je ne me mêle pas de dogmatiser pour mon compte ni en mon nom.
C’est une pâture mêlée et qui n’est pas saine que la leur. […] Le nom de l’auteur, qui ne se trouvait pas sur la première édition, devint instantanément glorieux : mille fables, mille conjectures empressées s’y mêlèrent.
abusé. « Ce n’est plus un violon qu’a votre Apollon, me disait quelqu’un, c’est un rebec. » Charles Loyson salua la venue de Lamartine d’un applaudissement sympathique où se mêlèrent tout d’abord les conseils prudents142 : « Edera crescentem ornate poetam, s’écrie-t-il en commençant ; voici quelque chose d’assez rare à annoncer aujourd’hui : ce sont des vers d’un poëte. » Et il insiste sur cette haute qualification si souvent usurpée, puis il ajoute : « C’est là ce qui distingue proprement l’auteur de cet ouvrage : il est poëte, voilà le principe de toutes ses qualités, et une excuse qui manque rarement à ses défauts. […] Pline le Jeune, parlant d’un poëte de son temps (Lettres, I, 16), dit qu’il sait mêler avec art, dans ses élégies, à des vers doux et coulants, d’autres vers un peu durs (duriusculos quosdam), et qu’eu cela il fait comme Calvus ou comme Catulle.
Et, par exemple, il importe de bien dégager l’idée principale, l’idée monarchique, de la séparer des nombreux accessoires où elle se mêle et qui peuvent parfois la faire perdre de vue. […] M. de Saint-Priest possède à un haut degré les qualités littéraires : il en faisait déjà preuve dans sa jeunesse, et, quoiqu’il l’ait sans doute oublié lui-même aujourd’hui, d’autres que l’inexorable Quérard se souviennent encore de gracieux essais par lesquels il préludait avec aisance et goût dans la mêlée, alors si vive.
« Retrouvant dans nos châteaux, avec nos paysans, nos gardes et nos baillis, quelques vestiges de notre ancien pouvoir féodal, jouissant à la cour et à la ville des distinctions de la naissance, élevés par notre nom seul aux grades supérieurs dans les camps, et libres désormais de nous mêler sans faste et sans entraves à tous nos concitoyens pour goûter les douceurs de l’égalité plébéienne, nous voyions s’écouler ces courtes années de notre printemps dans un cercle d’illusions et dans une sorte de bonheur qui, je crois, en aucun temps, n’avait été destiné qu’à nous. […] S’il est vrai, comme on l’a dit, que plus tard, les circonstances européennes étant changées, Catherine, pour mieux déjouer la mission de M. de Ségur à Berlin, ait envoyé au roi de Prusse les billets confidentiels dans lesquels l’ambassadeur de France avait autrefois raillé les amours de ce neveu du grand Frédéric, elle ne fit en cela sans doute que suivre les pratiques constantes d’une politique peu scrupuleuse ; mais elle put bien y mêler aussi tout bas le plaisir de se venger d’un ancien dédain.
Sa force est dans ce qui se mêle de sincérité à son habileté. […] Après un demi-siècle, il retrouve les sentiments complexes du jour du départ, l’allégresse, l’anxiété, le regret, tout ce que le connu que l’on quitte, et l’inconnu où l’on va, peuvent mêler d’agitations morales aux impressions physiques de l’œil et de l’oreille.
L’histoire ne serait pas complète, en général, si les coups ne s’en mêlaient. […] Quelques thèmes plus rares et moins grossiers, au moins extérieurement, sont des histoires d’amour, mêlées ou non de merveilleux, qui font comme la transition entre les lais de Marie de France et les fabliaux bourgeois.
Et l’on se sent si incapable d’une telle sublimité de conduite qu’on entre en confusion et qu’un peu d’irritation se mêle à notre émerveillement. […] M. de Camors mis à part, presque toutes ces figures s’effacent et se mêlent un peu après qu’on les a vues.
C’est de là qu’il put les voir de près sans s’y mêler, s’amuser du spectacle de leurs actions sans en avoir le contrecoup. Mieux placé que la Rochefoucauld, qui, durant l’âge où se formait le trésor de ses pensées, n’avait vu que la cour et les grands seigneurs, ou cette espèce d’hommes avides ou crédules qu’on appelle les hommes de parti, La Bruyère, par son emploi, avait vue sur la cour, et, par sa condition, sur la ville, et il mêlait dans ses peintures les grands et les petits.
C’est pour cela que les rimes mêlées lui réussissent mieux que l’alternative des féminines et des masculines, les vifs mouvements des vers inégaux que la gravité de l’alexandrin, le vers de dix syllabes que tous les autres. […] Après ces deux années d’une douce vie passée en compagnie de deux amis dignes de lui, c’est-à-dire en compagnie plus intime avec lui-même, il revint à Paris, la tête débordant de poèmes, de plans, d’esquisses, où sont mêlées la science, la politique, la Bible, l’Amérique ; ambitieux de tout sentir et de tout rendre, de faire de la poésie l’organe inspiré de toutes les idées modernes, l’écho du passé et du présent, la voix prophétique de l’avenir.
Le lyrisme et l’ironie se mêlaient en lui. […] Au lieu de présenter à ses oreilles les conques sonores où l’on entend le murmure d’une mer idéale, ils l’assoieront au bord des flots mêmes pour qu’elle en écoute la rumeur et qu’elle y mêle sa voix.
Pour saisir le jeu de ces mouvements qui se mêlent et s’entrecroisent, on est souvent obligé de sortir de l’époque qu’on étudie, de regarder ce qui l’a précédée et ce qui l’a suivie. […] Notre siècle a mêlé le tragique et le comique ; il en est arrivé à des œuvres théâtrales qui, né sachant, comment se définir, se sont vaguement intitulées pièces.
Il y mêle encore je ne sais quelle ruinée cabalistique et mystagogique, sortie des livres spirites, qui achève de tout obscurcir. […] C’est l’élan d’une inspiration mêlé à la rapidité d’un coup de main.
Jeune, je mêlais aux Portraits que je faisais des poètes beaucoup d’affection et de l’enthousiasme, je ne m’en repens pas ; j’y mettais même un peu de connivence. […] On en a retenu le refrain et des vers charmants : La fleur des champs brille à ta boutonnière… Ces jours mêlés de pluie et de soleil… C’est très joli de motif, très spirituel d’idées, quelquefois très heureux d’expression.
Quand on le lit aujourd’hui, s’échappant sur ces matières dans sa Correspondance, il faut faire la part des idées hasardées, des paradoxes, du besoin d’amuser qui le tourmentait toujours, de sa manie de prédire et de prophétiser, enfin des bouffonneries perpétuelles qui viennent se mêler à tout cela. […] Il faut les avoir bien étudiés pour se mêler de les gouverner. » Il déniait cette connaissance et cet art à M.
Il y a en Mme de Girardin un homme de beaucoup d’esprit (celui qui sera le vicomte de Launay), et qui a tué le poète ; tué, non, car le poète apparaît encore parfois avec son masque, sa cuirasse, son casque de Clorinde, son escrime habile, aisée et large de jeu, ses poussées de beaux vers dans la tirade, et comme ses éclairs dans la mêlée ; mais tout cet appareil et cette mise en scène ne sauraient imposer à ceux qui ont une fois connu ce que c’est que la poésie véritable. […] L’auteur écrit ces petits feuilletons si légers, d’un style des plus nets, et les compose avec un art parfait ; l’imagination aussi s’en mêle.
En tout, c’était une beauté touchante et non triomphante, une de ces beautés qui ne s’achèvent point, qui ne se démontrent point aux yeux toutes seules par les perfections du corps, et qui ont besoin que l’âme s’y mêle (et l’âme avec elle s’y mêlait toujours) ; elle était de celles dont on ne peut s’empêcher de dire à la fois et dans un même coup d’œil : « C’est une figure et une âme charmantes. » Le roi l’aima donc, et pendant des années uniquement et très vivement : pour elle, elle n’aima en lui que lui-même, le roi et non la royauté, l’homme encore plus que le roi.
Mais il se mêlait dans ces premiers essais d’une société sérieuse et polie une grande inexpérience. […] Encore une fois, voilà de la raison, et il y en a beaucoup dans les livres de Mlle de Scudéry, mêlée, il est vrai, à beaucoup trop de raisonnement et de dissertation, et aussi noyée dans ce qui nous semble aujourd’hui des extravagances romanesques.
Cette parole aux mains d’un seul semble bientôt une usurpation, et Rivarol, tranchant, abondant dans son sens, imposant silence aux autres, n’a rien fait pour échapper au reproche de fatuité qui se mêle inévitablement jusque dans l’éloge de ses qualités les plus belles. […] Rivarol n’était point un homme de génie, mais c’était plus qu’un homme d’esprit : il réalisait tout à fait l’idéal de l’homme de talent, tel qu’il l’a défini : « Le talent, c’est un art mêlé d’enthousiasme. » Il est dommage que ce talent, chez lui, fût un peu gâté par du faste et de l’apprêt.
Suard en jugeait comme Napoléon, et La Harpe écrivait : « Il est facile de concevoir les jouissances et les joies d’un public charmé de s’amuser aux dépens de l’autorité, qui consent elle-même à être bernée sur les planches. » Mais, où le rire général se mêle et où l’ivresse éclate, que peuvent les prévisions et les réserves de quelques esprits ? […] Le chiffre s’y mêle à tout, et y console de tout.
Les sensations de chaque moment ont beau se mêler aussitôt au continuum sensoriel, elles n’en ont pas moins, à leur apparition, des qualités tranchées qui leur confèrent une sorte d’individualité. […] Bastian avec Leibnitz, un simple « miroir du monde » ; il mêle sa propre nature à celle des choses, il les informe et souvent les déforme, d’abord selon ses plaisirs ou ses peines, puis selon ses appétitions.
Samedi 26 mars Chez Mme ***, deux femmes, une brune et une blonde, se surplombant, appuyées et mêlées l’une à l’autre au-dessus d’un piano, et mariant leurs musiques et la jouissance de leurs physionomies amoureuses : cela ressemble à de la tribaderie céleste. […] Et cet anéantissement heureux est mêlé d’une inquiétude nerveuse, qui vous pousse à vous en aller de chez vous, pour éloigner, d’une douzaine d’heures, l’embêtement qui peut vous tomber sur les reins.
Elles ne réussissent qu’à mêler à la gloire un bruit grossissant. […] Cependant on pleure autour de lui, la terre se désespère, les nuées femmes, les cinquante océanides, viennent adorer le titan, on entend les forêts crier, les bêtes fauves gémir, les vents hurler, les vagues sangloter, les éléments se lamenter, le monde souffre en Prométhée, la vie universelle a pour ligature son carcan, une immense participation au supplice du demi-dieu semble être désormais la volupté tragique de toute la nature ; l’anxiété de l’avenir s’y mêle, et comment faire maintenant ?
Avec Zarathoustra, c’était, mêlée aux inquiétudes modernes, toute la lumière d’Hellas qui venait à nous, ses méthodes, son âme, ses erreurs, sa volupté précise. […] Mêlons l’incertitude de l’analyse décriée à la belle sagesse des vérités acquises, comme le sel de nos larmes anxieuses à l’harmonie décidément fade des généralités trop sûres.
Marius-Ary Leblond comme l’auteur du Grand-Pan ont voulu mêler à l’aristocratie — un peu affectée — du style, la démocratie des idées ; ils ont oublié les pages amères des Goncourt et de Leconte de Lisle contre la Commune. […] Aujourd’hui que les écrivains s’en mêlent qu’elle évite avec la ceinture dorée, son ancienne renommée.
Nettement a voulu faire pour la France de la Restauration ce que Mme de Staël a fait autrefois pour l’Allemagne, — le tableau d’une littérature, mêlé à toute une galerie d’écrivains. […] Voilà le programme de rigueur que tout écrivain qui se mêle d’apprécier les manifestations de l’esprit humain, dans un moment de son histoire, doit s’imposer d’abord comme une règle suprême, — oui, d’abord !
Elle ne lui avait nullement nié sa découverte ; mais elle n’entendait pas, comme c’était son droit, à elle, qu’il mêlât de la théologie à son enseignement. […] Ces six ans terribles d’une intimité sacrilège, ces six ans de crimes, non pas seulement à deux, mais à quatre, à cinq, car les deux coupables eurent des complices qui servirent leur passion ou qui s’y mêlèrent, finirent par le repentir et l’expiation dans des proportions épouvantables.
Joseph Delorme la mêle à tout, et même à la honte. […] » Grâce, il faut l’avouer, très-particulière et très-piquante encore : mais que je l’aimais bien mieux, mêlée à la honte de l’Adam du Joseph Delorme, rougissant de toutes les nudités de son âme et de son péché !
Mon âme s’est fermée et limitée à soi ; Et, n’ayant pas voulu se mêler à la vie, S’en épure et de plus en plus se clarifie. […] Je crois au contraire que toutes les œuvres où éclatent la couleur, la nouveauté, la richesse et la variété, — toutes qualités du génie — ont eu pour auteurs des êtres vivant et sentant, en intime et sensuel contact avec le monde, dépourvus de la crainte de s’y mêler largement et d’y renouveler sans cesse leur vitalité par des sensations intégralement et réellement vécues.
Je les vis s’emparer de lui, le renverser ; je vis Kasia s’élancer dans la mêlée. […] Mais cette confusion, cette mêlée, ce désordre, ne faisaient pas de bruit, n’avaient, pour ainsi dire, pas de paroles, et un silence étrange et un peu effrayant planait sur le remuement muet de l’entracte. […] Puis, la ville se remplissait d’un bourdonnement de voix, où se mêlaient des hennissements de chevaux, des bêlements d’agneaux, des grognements de cochons, avec le bruit sec des carrioles dans la rue. […] Elle m’assit sur ses genoux et me couvrit de baisers, en me prodiguant les noms les plus tendres, auxquels se mêlaient des mots d’une langue étrangère, qui semblaient une musique, tant sa voix était harmonieuse et douce. […] Ali, grimpé sur l’impériale d’un wagon, tirait dans la mêlée en ajustant de préférence les officiers.
Cependant des boutades de franchise échappent parfois qui purent bien scandaliser ; on écrivit un jour ces téméraires paroles : « De quoi se mêlent ceux qu’on appelle jansénistes et le parti contraire, d’empêcher qu’on envoie à Rome des personnes qui soient ou ne soient pas dans leurs opinions ?
A propos de l’enlèvement des tableaux et des statues, contre lequel il se déchaîne avec plus d’emportement qu’il ne sied au compatriote et à l’ami de lord Elgin, « Il est certain, dit-il, que les Français ne ressemblaient nullement à ces peuples dont le génie créa les premiers chefs-d’œuvre de l’art ; au contraire, le prototype classique de Bonaparte dans cette circonstance fut ce Mummius, consul romain qui dépouilla violemment la Grèce de ses trésors, dont lui-même et ses compatriotes étaient incapables d’apprécier le véritable mérite. » Cette mauvaise humeur de l’historien se mêle même aux éloges que lui arrache une admiration involontaire.
M. de Lamartine, le seul dont nous ayons à nous occuper, par cela même qu’il range humblement sa poésie aux vérités de la tradition, qu’il voit et juge le monde et la vie suivant qu’on nous a appris dès l’enfance à les juger et à les voir, répond merveilleusement à la pensée de tous ceux qui ont gardé ces premières impressions, ou qui, les ayant rejetées plus tard, s’en souviennent encore avec un regret mêlé d’attendrissement.
je ne parle plus des cinquante volumes inqualifiables qui précédèrent ses premières œuvres distinguées ; je parle de ce qui se mêle à tout instant à ses œuvres les plus distinguées et les plus fines elles-mêmes.
Les courtisans venant se mêler aux habitants de la capitale, voulaient y montrer un mérite personnel, un caractère, un esprit à eux ; et les habitants de la capitale conservaient toujours un attrait irrésistible pour les manières brillantes des courtisans.
Nous trouvons le témoignage curieux de cet embarras dans la Préface que Pierre Robert Olivetan mit à sa traduction de la Bible (1533) : « Aujourd’hui pour la plupart le François est mêlé de latin et souvent de mots corrompus : dont maintenant nous est difficile les restituer et trouver.
Quand c’est le moyen âge qui met sa griffe sur la révolution, quand c’est le passé qui se substitue à l’avenir, l’impossibilité est mêlée au succès et l’ahurissement du triomphe s’ajoute à la stupidité du vainqueur.
De nouveau, les poètes se mêleront aux tribus.
Elle n’y a pas toujours réussi et le dommage fut ici d’autant plus sensible que le génie franc, mêlé déjà au génie latin, représentait sous son aspect le plus original et avec son développement le plus haut la civilisation du moyen âge.
Il comprit qu’un succès politique à propos de Charles X tombé, permis à tout autre, lui était défendu à lui ; qu’il ne lui convenait pas d’être un des soupiraux par où s’échapperait la colère publique ; qu’en présence de cette enivrante révolution de juillet, sa voix pouvait se mêler à celles qui applaudissaient le peuple, non à celles qui maudissaient le roi.
On croit voir, dans le nombre de ses partisans & de ses ennemis, deux armées qui se mêlent.