Peu de temps auparavant, il comptait encore échapper à ce joug que la société impose et se croyait fait pour le célibat. […] Il a vécu avec Socrate, Phidias, Sophocle, Euripide, Thucydide, Aristophane, et il n’a pas été indigne de cette haute société. […] Selon moi, et si je m’écoute, Auguste Comte ne serait qu’un des hommes qui, depuis Lessing, Turgot, Condorcet, Saint-Simon, conçoivent le progrès de la société et celui de l’entendement humain selon une certaine ligne qu’on peut admettre dans sa généralité sans aller pourtant jusqu’à la serrer de trop près dans le détail. […] Littré, le néologisme marche toujours ; et il y a, tous les quarts de siècle ou les demi-siècles, de petits raccords à faire dans la langue comme dans toute institution mobile qui dépend de l’état de la société.
pouvait répondre M. de Vigny à ceux qui lui opposaient un goût plus difficile ; on a lu, on a cru, on a pleuré. » Un autre problème l’occupait alors et lui tenait encore plus à cœur que celui des destinées du soldat, le problème de l’homme de lettres, du poète, et de sa situation dans la société : c’est de là que naquirent les Consultations de son Docteur noir auprès du spleenique et vaporeux Stello. […] sans doute, pour le poète, pour l’homme de lettres véritable, dans cette société où nous sommes, la tâche est rude, et il y a pour les talents plus d’une forme de suicide ou de demi-suicide. […] Et puis, pour parer au mal, il faudrait, à la tête de cet ordre de la société et dans les premiers rangs du pouvoir, je ne sais quel personnage de tact, de goût à la fois et de bonté, qui choisît, qui devinât, qui sût, qui fût comme s’il était du métier et qui n’en fût pas, qui aimât les belles choses pour elles-mêmes, qui discernât les talents, qui les protégeât sans leur rien demander en retour, ni flatterie, ni éloge, ni dépendance…, un Mécène comme il ne s’en est jamais vu. […] Mais je dois à ce malentendu de la société un chagrin de tous les jours et que vous seule pouvez bien comprendre.
Ses ouvrages d’ailleurs sont des plus intéressants par les côtés historiques ; ils sont riches en détails de toutes sortes sur la vie littéraire, sur ce monde des rhéteurs et des grammairiens, et sur les nuances précises qui séparaient les uns des autres, sur la vie domestique, sur les mœurs de cette société avancée qui ne songe qu’à couler la vie dans de charmantes villas, sur les rives du Rhin et de la Moselle, et qui s’amuse à analyser ses jouissances en vue des Barbares qui déjà s’amoncellent, et à la veille de la grande invasion qui va déborder sur le monde. […] Je ne poursuivrai pas cette énumération, messieurs, pour le v e siècle : qu’il suffise de signaler Salvien, prêtre de Marseille, puissant dans l’accusation et dans l’invective, éloquent et déclamatoire, et Sidoine Apollinaire, évêque et politique, qui mêle un reste d’Ausone à la littérature chrétienne, — tous deux témoins curieux, expressifs, des malheurs et des mœurs du temps, et le dernier surtout (Sidoine), dont les ouvrages sont le répertoire le plus complet pour faire retrouver au vrai et pour nous représenter la société de ces âges dans sa civilisation raffinée encore, bien qu’expirante. […] Dans les grandes villes, dans les centres et aux environs, dans le rayon de la puissance administrative et dans le cercle de la haute société gallo-romaine, on parlait latin ; dans les cantons écartés et hors des grandes voies romaines, les idiomes du pays, qu’on sait être si tenaces, devaient persister. […] Il y eut, vers le milieu du xive siècle, par suite des affreux malheurs de la guerre de Cent-Ans, une interruption véritable, une demi-dissolution de la monarchie, de la société, et, par une inévitable conséquence, il se fit une lacune, il se produisit un oubli, une défaillance dans les choses de l’esprit, dans les règles de la langue.
VI Le hasard me les a fait connaître familièrement l’un et l’autre ; mais, avant de parler de l’un et de l’autre, on ne peut s’empêcher de remarquer que, par un phénomène littéraire qui doit avoir sa raison cachée dans les choses, c’est la même petite vallée de Savoie qui a donné au dix-huitième et au dix-neuvième siècle les deux plus magnifiques écrivains de paradoxes du monde moderne : Jean-Jacques Rousseau et le comte de Maistre ; l’un, le paradoxe de la nature et de la liberté poussé jusqu’à l’abrutissement de l’esprit et à la malédiction de la société et de la civilisation ; l’autre, le paradoxe de l’autorité et de la foi sur parole, poussé jusqu’à l’anéantissement de la liberté personnelle, jusqu’à la glorification du bourreau, et jusqu’à l’invocation du glaive du souverain et des foudres de Dieu contre la faculté de penser. […] Le sophisme de de Maistre devait aboutir à la servitude, mensonge à la dignité morale de l’homme, comme le sophisme de liberté de Jean-Jacques Rousseau devait aboutir à l’anarchie, mensonge de la société politique. […] Son existence, un peu amère sous le rapport de la fortune, était très douce sous le rapport de la société. […] Le contrat se signait dans une maison de plaisance nommée Caramagne, à quelque distance de la ville, chez la marquise de la Pierre, centre de la société aristocratique de Savoie.
Elle partait le lendemain pour s’établir avec sa société de printemps dans sa villa des collines euganéennes ; elle me proposa, d’un ton qui ne permit pas même l’hésitation, de m’emmener avec elle, et de passer la saison des grandes chaleurs dans ses jardins tempérés par le vent de l’Adriatique. […] VIII La société très restreinte que la comtesse Léna emmenait avec elle à la campagne pour passer la villegiatura se composait, outre sa fille, d’un vieil oncle de son mari. […] Il avait pour fonction unique, dans la société, de rendre une espèce de culte, uniquement poétique, à la comtesse Léna, et de composer sur chacun de ses attraits, sur chacun de ses pas, sur chacun de ses sourires, des milliers de sonnets, qu’on imprimait sur papier rose, qui se distribuaient aux amis de la famille. […] Mais, au lieu de laisser dans notre entretien de la soirée cette mélancolie pensive que laisse la lecture d’un livre passionné dans l’esprit d’une société de lecteurs, notre entretien, plus gai et plus souriant qu’à l’ordinaire, se ressentit de la folie et de la verve du poète : la villa, les jardins, les bois de lauriers, les vallées de l’horizon, la mer et le ciel nous parurent pleins de paladins, d’enchanteurs et de belles aventurières poursuivies par leurs persécuteurs ou poursuivant leurs héros à travers le monde.
Quand j’entrai chez lui, son lit de mort était, pour ainsi dire, encore chaud, et il venait d’être emporté sous son pesant mausolée à Santa-Croce, dans une société de morts très supérieurs à lui : Michel-Ange, Machiavel, et, je crois, Galilée ! […] Dès l’âge de dix-sept ans, la jeune chanoinesse attirait tous les regards dans cette société d’élite. […] Instruite sans pédantisme, passionnée pour les arts sans nulle affectation, Louise de Stolberg semblait faite pour régner avec grâce sur l’aristocratie intellectuelle de son époque, dans les plus pures régions de la société polie. […] Il faut citer cette lettre tout entière, avec ses incorrections de style et son orthographe ; on y verra ce que la société italienne pensait de cette singulière aventure.
Les arts qui ont rompu avec l’ordre établi ou qui ont eu à se développer en l’absence de l’ordre, prennent une allure, ont un accent que ne tolère pas cette sorte de salon qu’est une société bien organisée. […] Toutes les tentatives de littérature de société sont vouées au médiocre, parce qu’il n’y a pas de société. […] Nous manquons d’une société digne d’entendre un nouveau Molière.
* * * — Ce qui tuera l’ancienne société, ce ne sera ni la philosophie ni la science. […] Dans un sentiment de hauteur et de femme du monde, elle se plaignait spirituellement, ce matin, d’avoir à partager avec de pareilles femmes, la société, la pensée de ses amis, d’hommes comme Sainte-Beuve, Taine, Renan, lui volant vingt minutes, lorsqu’ils dînaient chez elle, pour aller les porter chez cette fille. […] Et on a rabâché sur la contagion de leur corruption, l’imitation et les plagiats de leurs modes, et on a cité les noms des femmes de la société qui rivalisent avec elles. […] La règle absolue des sociétés, la seule logique, la seule naturelle et légitime doit être le privilège.
Dans les salons sans doute, dans la société ; Léopold Robert n’y allait pas. […] Je vis extrêmement retiré, j’ai la société de mon frère qui est un bon enfant, nous sommes heureux de notre vie tranquille : tant il est vrai qu’il n’y a que la vertu qui donne ce calme, ce bien-être qui est trop peu connu !
En cherchant bien, et même sans chercher beaucoup, on trouverait des talents spirituels qui étaient nés pour cet emploi, et à qui il ne manque qu’un accueil meilleur et, comme aux plantes, une exposition plus favorable ; mais ils sont dépaysés aujourd’hui, ils n’ont que de très petits cercles, si encore ils en ont, et la société ne les entend pas, ne les écoute pas ; elle n’est plus faite pour eux, elle n’a pas le temps. Quand elle s’éprend de caprice pour un poète agréable, il faut que celui-ci ait en lui quelque chose de plus, qu’il ait une flamme et des éclairs d’un Byron ; il faut qu’il donne à cette belle société au moins quelques accès de fièvre et qu’il la secoue : autrement elle passe et court à ses affaires ou à ses plaisirs, ce n’en est plus un pour elle que d’entendre des petits vers légers et bien tournés.
L’intérêt prodigieux que mettait la société d’alors à ce procès si justement entamé peut-être, mais si odieusement instruit et si arbitrairement conduit, les habiles instances des amis restés fidèles au malheureux surintendant, qui finirent par retourner l’opinion en sa faveur, les plaidoyers anonymes de Pellissoa qui s’échappaient à travers les barreaux de la Bastille et qui se récitaient avec attendrissement, les beaux vers miséricordieux de La Fontaine, et par-dessus tout les bulletins émus, pathétiques, de Mme de Sévigné, ont gagné jusqu’à la postérité elle-même ; et pour peu qu’on ait vécu en idée dans la société de ce temps-là, on fait comme les contemporains, on demeure reconnaissant envers M. d’Ormesson.
Exalté pour les femmes, mais en toute délicatesse et pureté, Deleyre, à un moment, devint passionnément amoureux et se maria ; il dut dès lors compter avec la société, avec ces mêmes préjugés dont il avait horreur, et subir des chaînes. […] Si je lis et si j’étudie, c’est afin de me dispenser du commerce pénible de la société.
Quand la société s’est compliquée, que les mœurs se sont effacées à force de se polir, que le goût usé se blase de chefs-d’œuvre, il faut cependant faire quelque chose, ou répéter dans une suite de contre-épreuves, de plus en plus pâles, les types classiques… Si Marivaux n’avait pas les défauts que l’on critique en lui et qui ne sont, à vrai dire, que des qualités poussées à l’excès, il se perdrait obscurément parmi la foule obscure des plats imitateurs de Molière. […] Il ne se contentait pas de hanter, d’habiter même par moments ces palais et antiquités moresques qui étaient Sa première et souveraine passion, il voyait aussi la société, allait à la tertulia presque chaque soir et se mêlait familièrement aux belles jeunes filles et aux enfants rieuses.
je le sais, dans le tourbillon accéléré qui entraîne le monde et les sociétés modernes, tout change, tout s’agrandit et se modifie incessamment. […] » vous qu’un sang généreux pousse aux nouvelles et incessantes conquêtes de l’art et du génie, et qu’impatiente, qu’ennuie à la fin cet éternel passé qu’on déclare inimitable, veuillez y songer un peu : les Anciens, si vantés qu’ils soient, ne doivent pas nous inspirer de jalousie ; trop de choses nous séparent ; la société moderne obéit à des conditions trop différentes ; nous sommes trop loin les uns des autres pour nous considérer comme des rivaux et des concurrents.
Nul exemple ne me paraît plus propre à montrer à quel point des hommes, même énergiques de trempe et de volonté, sont assujettis et soumis au milieu où ils vivent, dépendant des circonstances, changeant de face sans changer de caractère ; combien il est juste, même après des excès et des torts, de ne pas désespérer de ceux qui ont une valeur réelle et un vertueux principe d’énergie ; comment le malheur éprouve et épure, même à leur insu, certaines natures restées saines au fond ; et ce que peuvent devenir d’honorable et d’utile pour la société et pour la patrie ceux qui, hors des cadres réguliers et durant l’orage des interrègnes, dans la convulsion des mouvements révolutionnaires, cherchaient vainement leur niveau et leur emploi. […] Comme la plupart des régénérateurs de son temps, il paraissait croire, moyennant méthode, à une refonte complète possible de la constitution morale, intellectuelle et physique de l’homme : « La société a besoin, disait-il, que chacun de ses membres ait une constitution vigoureuse, un esprit éclairé et un cœur droit. » Prêchant l’excellence de l’éducation, il est en garde à tout instant contre l’instruction proprement dite, et semble demander qu’il n’y en ait pas trop, absolument comme Jean Reynaud parut le dire un jour dans sa fameuse circulaire.
Là peut se développer la société à la fois la plus variée et la plus complète. […] Zeller, avec plus de précision et résumant le sens politique de toute la conduite romaine dans ces mêmes siècles, dira : « Vous avez cet admirable gouvernement où la sagesse du Sénat tempère l’élan de la place publique ; où la monarchie temporaire, sous le nom de dictature, empêche ou modère les luttes ou les excès de l’aristocratie et de la démocratie ; où les Consuls conservent toujours un pouvoir fort ; où les assemblées n’ont que la délibération et la sanction, le contrôle et les appels des grandes causes politiques ; cette société, enfin, où le mariage et la propriété constituent en quelque sorte la cité même, où la famille est réglée comme un État, où l’État et la religion se pénètrent au point que le gouvernement fait un avec le culte, et que l’amour des dieux est le culte même de la patrie, et le culte de la patrie l’amour des dieux !
Il en est de l’orthographe comme de la société : on ne la réformera jamais entièrement ; on peut du moins la rendre moins vicieuse. […] le xixe siècle, à en juger du moins par la tête de la société et de la littérature, est bien peu le fils de son père le xviiie .
Colbert, qui jugeait si mal Homère et Pindare, entendait le moderne à merveille ; il avait le sentiment de son temps et de ce qui pouvait l’intéresser ; il trouva là une veine bien française, qui n’est pas épuisée après deux siècles ; on lui dut un genre de spectacle de plus, un des mieux faits pour une nation comme la nôtre, et l’on a pu dire sans raillerie que, si les Grecs avaient les Jeux olympiques et si les Espagnols ont les combats de taureaux, la société française a les réceptions académiques. […] Il en est sorti toutefois, il s’est mêlé depuis aux émotions contemporaines par son drame touchant de Chatterton et par ses ouvrages de prose, dans lesquels il n’a cessé de représenter, sous une forme ou sous une autre, cette pensée dont il était rempli, l’idée trop fixe du désaccord et de la lutte entre l’artiste et la société.
L’homme des sociétés secrètes est toujours étroit, soupçonneux, partiel. […] Qui peut blâmer les premiers chrétiens de s’être fait un monde à part dans la société corrompue de leur temps ?
Qu’on n’impute point à Carrel d’avoir été dans de telles idées, dans de pareilles illusions sur ce que c’est que l’homme et la société. […] Si j’osais traduire cette impression dans une langue toute littéraire et pour des littérateurs, je dirais : Zumalacárregui, c’est son André Chénier : Il est des temps, disait-il (28 juin 1835), où avec de médiocres facultés on peut devenir rapidement fameux ; nous sommes, au contraire, une de ces époques où tout conspire contre le développement des grands caractères, et où le travail des sociétés n’amène à la surface que des natures dégradées.
Arrivé aujourd’hui à la pleine maturité de la vie, maître en bien des points, sachant à fond et de près les langues, les monuments, l’esprit des races, la société à tous ses degrés et l’homme, il n’a plus, ce me semble, qu’un progrès à faire pour être tout entier lui-même et pour faire jouir le public des derniers fruits consommés de son talent. […] Dans Le Vase étrusque, l’auteur s’est plu à retrouver des passions fortes et à les dessiner en quelques traits jusque sous notre civilisation élégante ; plus habituellement, il s’est attaché à les découvrir ou à les créer hors du cadre des salons, et, se détournant des caractères effacés qu’on y rencontre, il s’est mis en quête des natures primitives appartenant à un état de société antérieur, et qui sont comme égarées dans le nôtre.
C’est un homme aimable dont la société est aussi agréable qu’elle est inutile, s’il est vrai, ce que l’on pourra contester, que ce qui est agréable puisse être inutile. […] L’amateur de livres réalistes est d’une société un peu attristante.
Par exemple, considérant la société à Rome, vous y distinguez la faculté très générale d’agir en corps, avec une vue d’intérêt personnel, faculté instituée en partie par des dispositions primitives102, mais principalement par cette circonstance que Rome, dès sa naissance, fut un asile, ennemi de ses voisins, composé de corps ennemis, où chacun était absorbé par la pensée de son intérêt, et obligé d’agir en corps. Vous détachez cette faculté égoïste et politique, et vous en déduisez aussitôt tous les caractères de la société et du gouvernement romain, l’art de combattre, de négocier et d’administrer, l’invincible amour de la patrie, le courage orgueilleux et froid, l’esprit de discipline, le projet soutenu et accompli de conquérir, garder et exploiter le monde, le respect de la loi, le talent de la résistance et de l’attaque légale, la mesure et l’obstination dans les luttes civiles ; partout la réflexion qui calcule et la volonté qui se maîtrise.
Point de société chez eux. […] On ne fonde pas une société sur le culte du plaisir et de la force ; on ne fonde une société que sur le respect de la liberté et de la justice. […] Une puissance extraordinaire, un gigantesque ressort d’action s’était tout d’un coup tendu dans l’âme, et il n’y avait aucune barrière dans la vie morale, ni aucun établissement dans la société civile que son effort ne pût renverser. […] Y avait-il auparavant quelque exemple qu’une femme pût concevoir sans la société d’un homme ? […] Ils veulent appliquer l’Écriture, établir « le royaume de Dieu sur la terre », instituer non-seulement une Église chrétienne, mais encore une société chrétienne, changer la loi en gardienne des mœurs, imposer la piété et la vertu ; et pour un temps ils y réussissent
Cette haute société royaliste et spiritualiste depuis la Révolution avait son grand écrivain, Chateaubriand, et son philosophe, Bonald. […] Cette première expiation de Cédar paraît assez complète : car il souffre vraiment tout ce qu’il peut souffrir dans son corps et dans son âme et comme époux, et comme père, et comme membre d’une société humaine. […] Au service de cette corruption, des arts mécaniques tellement avancés que cette société antérieure au déluge connaît, non seulement l’artillerie, mais les ballons dirigeables. […] Car, par ce renversement des temps, par cette juxtaposition hardie d’une société ignorante et à demi sauvage et d’une société très civilisée et très savante, mais horriblement injuste et impitoyable, Lamartine nous signifie que celle-ci a beau devoir être séparée, historiquement, de celle-là par des siècles et des siècles, elle en est moralement toute proche ; que ces deux sociétés, l’une très primitive et l’autre très « avancée », mais l’une et l’autre sans Dieu, ne sont que deux formes de la même barbarie et que, des deux, c’est la seconde qui est la pire. […] Ce n’est, en somme, que la description lyrique de la société idéale dont la formation est racontée, étape par étape, dans les strophes des Laboureurs, et dont le code est formulé dans le Livre primitif : revenons donc à celui-ci.
En attendant que les Lombroso aient conclu, nos penseurs se dépêchent de refuser à la société le droit de tuer. […] Et ainsi nos plus mois penseurs se réclament de Lombroso pour engager la société contemporaine dans une aventure de suicide absurde. […] Et ils veulent réformer la société, qui est si lasse et qu’on surmène. […] Il souhaitait, comme on fait à vingt ans, de corriger la société contemporaine, de susciter les classes ouvrières, etc. […] Que la société distinguée était généreuse, élevée, délicate !
Qui dit société de secours moral dit religion, ou chose destinée et se destinant à le devenir. […] Il existe chez les animaux, même chez ceux qui ne forment pas, à proprement parler, des « sociétés ». […] La société humaine est moins fondée qu’on ne croit sur la famille, M. […] Car nous vivons dans une société. […] Encore une société qui est prise tout à fait sur le vif et qui est crayonnée magistralement.
La société étant fort riche, acheta l’ancien hôtel des ducs de Bourgogne, tombé alors en ruine. […] Défenseur des droits de la société, Garnier est non-seulement un poëte patriote, mais encore un moraliste éclairé. […] Cette société acquit bientôt une certaine célébrité sous le nom de l’Illustre Théâtre. […] Une ordonnance royale affecta 12, 000 livres à cette nouvelle société, dont toute l’administration fut réglée par ordonnance royale. […] La société fit l’acquisition du jeu de paume de la rue Saint-Germain-des-Prés et de deux maisons voisines.
Ce n’est que dans la seconde moitié du xviie siècle que les femmes de la société se sont piquées d’honneur et se sont mises, dans l’usage ordinaire, à vouloir écrire convenablement.
L’attitude de l’un et de l’autre y répond exactement à leurs fonctions respectives dans les sociétés occidentales : elle, pliante, à demi blottie, se prêtant avec une soumission volontaire aux mouvements qu’il imprime ; lui, plus ferme sur ses jarrets, la tête plus droite, commandant et dirigeant les évolutions, enfermant sa compagne dans une étreinte qui à la fois la détient et la défend, et, là comme au foyer, jouant son rôle de protecteur respectueux et tendre.
Quoi qu’ils aient fait, ils ont souffert, soit physiquement, soit moralement, à peu près autant qu’on peut souffrir ; et c’est de leur vie qu’ils ont, comme on dit, « payé leur dette à la société ».
Par cela même aussi peuvent naître les émotions morales, attachées à l’idée même de la société universelle et de ses fins.
Il publia contre la société plus de trente libèles diffamatoires dont on a la liste.
— Son jugement sur la société, le gouvernement, les conditions et les professions. — Comment il diffame la nature humaine. — Derniers pamphlets. — Construction de son caractère et de son génie. […] Ils vivent en rois tombés, toujours insultants et blessés, ayant toutes les misères de l’orgueil, n’ayant aucune des consolations de l’orgueil, incapables de goûter ni la société ni la solitude, trop ambitieux pour se contenter du silence, trop hautains pour se servir du monde, nés pour la rébellion et la défaite, destinés par leur passion et leur impuissance au désespoir et au talent. […] Voilà le puissant et douloureux génie que la nature livrait en proie à la société et à la vie ; la société et la vie lui ont versé tous leurs poisons. […] La société rebute encore plus que l’homme. […] Il faut supprimer ces sciences, ces arts, ces combinaisons de sociétés, ces inventions d’industries dont l’éclat éblouit.
Avons-nous à étudier, nous proposons-nous d’étudier La Fontaine ; au lieu de commencer par la première fable venue, nous commencerons par l’esprit gaulois ; le ciel ; le sol ; le climat ; les aliments ; la race ; la littérature primitive ; puis l’homme ; ses mœurs ; ses goûts ; sa dépendance ; son indépendance ; sa bonté ; ses enfances ; son génie ; puis l’écrivain ; ses tâtonnements classiques ; ses escapades gauloises ; son épopée ; sa morale ; puis l’écrivain, suite ; opposition en France de la culture et de la nature ; conciliation en La Fontaine de la culture et de la nature ; comment la faculté poétique sert d’intermédiaire ; tout cela pour faire la première partie, l’artiste ; pour faire la deuxième partie, les personnages, que nous ne confondons point avec la première, d’abord les hommes ; la société française au dix-septième siècle et dans La Fontaine ; le roi ; la cour ; la noblesse ; le clergé ; la bourgeoisie ; l’artisan ; le paysan ; des caractères poétiques ; puis les bêtes ; le sentiment de la nature au dix-septième siècle et dans La Fontaine ; du procédé poétique ; puis les dieux ; le sentiment religieux au dix-septième siècle et dans La Fontaine ; de la faculté poétique ; enfin troisième partie, l’art, qui ne se confond ni avec les deux premières ensemble, ni avec chacune des deux premières séparément ; l’action ; les détails ; comparaison de La Fontaine et de ses originaux, Ésope et Phèdre ; le système ; comparaison de La Fontaine et de ses originaux, Ésope, Rabelais, Pilpay, Cassandre ; l’expression ; du style pittoresque ; les mots propres ; les mots familiers ; les mots risqués ; les mots négligés ; le mètre cassé ; le mètre varié ; le mètre imitatif ; du style lié ; l’unité logique ; l’unité grammaticale ; l’unité musicale ; enfin théorie de la fable poétique ; nature de la poésie ; opposition de la fable philosophique à la fable poétique ; opposition de la fable primitive à la fable poétique ; c’est tout ; je me demande avec effroi où résidera dans tout cela la fable elle-même ; où se cachera, dans tout ce magnifique palais géométrique, la petite fable, où je la trouverai, la fable de La Fontaine ; elle n’y trouvera point asile, car l’auteur, dans tout cet appareil, n’y reconnaîtrait pas ses enfants. Ou plutôt ce n’est pas tout, car depuis cinquante ans nous avons fait des progrès ; — le progrès n’est-il pas la grande loi de la société moderne ; — ce n’est pas le tout d’aujourd’hui ; aujourd’hui qui oserait commencer La Fontaine autrement que par une leçon générale d’anthropogéographie. […] Chaque classe de la société est un rouage, un bras de levier dans cette immense machine. […] La seule garantie qu’on nous donne à présent est qu’« une société d’anthropologie vient de se fonder à Paris, par les soins de plusieurs anatomistes et physiologistes éminents » ; nous qui aujourd’hui savons ce que c’est, dans le domaine de l’histoire, que l’anthropologie, et ce que c’est, dans la république des sciences, que la société d’anthropologie, une telle garantie nous effraye plus qu’elle ne nous rassure ; c’est bien sensiblement à l’humanité présente, à la grossière et à la faible humanité, que Taine remet non pas seulement le gouvernement mais la création de ce monde ; il ne s’agit plus d’un Dieu éloigné, incertain, négligeable, mort-né ; c’est à l’humanité que nous connaissons, aux pauvres hommes que nous sommes, que Taine remet tout le secret et la création du monde ; par exemple c’est lui, Taine, l’homme que nous connaissons, qui saisit et qui épuise tout un La Fontaine, tout un Racine ; c’est la présente humanité, c’est l’humanité actuelle que Taine, au fond, se représente comme un Dieu actuel, réalisé créateur. […] Une société d’anthropologie vient de se fonder à Paris, par les soins de plusieurs anatomistes et physiologistes éminents, MM.
Diderot n’était pas, il ne fut jamais comme Voltaire, qui écrivait à toute l’Europe de cette plume qui courait comme le feu sur la poudre, un chef d’opinion reconnu dans le vaste soulèvement, dans l’effroyable conspiration organisée au xviii® siècle contre l’ancienne société française et le christianisme qui l’avait faite. […] Les relations de ce hanteur de cafés ne furent jamais nombreuses, et il fallait la société du xviiie siècle, cette vieille duchesse libertine qui dérogeait jusqu’aux laquais et qui finit par faire son idole de Jean-Jacques Rousseau, pour que le fils du coutelier de Langres et l’écrivailleur de la rue Taranne pût pénétrer dans quelques salons, qui s’ouvrirent devant lui comme tout s’ouvrait dans une société qui s’éventrait elle-même ; car Diderot n’avait pas en lui ce qui force les portes : le génie de la domination. […] Ce sont des lettres sur les choses de la vie, du sentiment, de la société, qui sont l’ordinaire sujet des lettres de tous ceux qui nous en ont donné de charmantes, — et même d’immortellement charmantes ; et nous allons voir ce que ces choses deviennent sous cette plume de Diderot, qui, si elle n’est pas une plume de paon lui passant, quand il écrit, par-dessus la tête, n’est plus qu’un tronçon dans sa main. […] Il y parle aussi, et beaucoup plus au long, de la vie qu’il mène éloigné d’elle et de la société qui l’entoure chez le baron d’Holbach ; et, comme cette société est très spirituelle et très brillante, il semble qu’on ait le droit de s’attendre à tout autre chose qu’à ce qu’on trouve en ces lettres, parfaitement indignes de tout homme qui n’aurait pas été Diderot mais qui aurait eu ne fût-ce qu’une étincelle de ce qui fait le génie de cette chose à part qu’on appelle la correspondance.
Bien des incidents de société y fournissaient matière. […] Chaillet133, vous l’avez rendue douce, et que vous m’avez consolé pendant deux mois du malheur d’être, d’être en société, et d’être en société avec les Marin, Guenille et compagnie ; je recompte ainsi dans ma chaise ce que je vous dois, parce que ce m’est un grand plaisir de vous devoir tant de toutes manières. […] Il y a des traits distinctifs qu’elles ne manquent jamais D’avoir : mépris pour l’endroit qu’elles habitent, plainte sur le manque de société, sur les étudiants qu’il faut voir, sur la sphère étroite ou monotone où elles se trouvent, prétention et teinte plus ou moins foncée de romanesquerie, voilà l’uniforme de leur esprit, et Mlle Heyne, prévenue de ma visite, avait eu soin de se mettre en uniforme. […] Il y a autant d’absurdités que de lignes dans ce fameux livre ; aussi a-t-il un plein succès dans toutes les sociétés anglaises et allemandes. […] J’ai rarement vu une réunion pareille de qualités étonnantes et attrayantes, autant de brillant et de justesse, une bienveillance aussi expansive et aussi cultivée, autant de générosité, une politesse aussi douce et aussi soutenue dans le monde, tant de charme, de simplicité, d’abandon dans la société intime.
Dumas l’armait avec les fonds d’une société d’actionnaires. […] Ce Monsieur voulait à tout prix faire partie d’une société qui se disposait à jouer la comédie à l’hôtel du comte de Castellane. […] Mme d’Abrantès a un salon ; mais j’ignore si sa société est fort nombreuse. […] Chez lui, c’est un excellent jeune homme, plein de cœur et de dévouement, spirituel à l’excès, et en un mot de la meilleure société possible. […] Luchet, dînant chez le restaurateur avec quelques amis, se trouva en société de son importun.
Ce fut alors que se constituèrent en Russie et à Venise, dit-on, ces sociétés où chacun adoptait un personnage de Balzac et s’efforçait de le réaliser. […] Ajoutons que la société prête les mains, le plus souvent, à ces ruses et joue son rôle dans ce complot, Balzac nous montre comment le guet-apens échoue devant une volonté tenace et déterminée. […] Il aimait les plaisirs de la société sans dédaigner ceux de la nature, la campagne presque autant que le théâtre. […] Grâce à lui, nous pouvons reconstituer la société brillante, mais un peu mélangée, qui s’agitait autour du fermier général. […] Un étranger, à Venise, a peu d’accès dans la société.
Il vivait riche, mondain, très poli, ne fuyant nullement la compagnie des personnes du sexe, et ne s’interdisant pas les honnêtes divertissements de la société.
Andrieux, secrétaire perpétuel, sur le concours déjà ouvert depuis plusieurs années, et dont le sujet est la charité considérée dans son principe, ses applications et son influence, relativement à la société : il y a eu trois mentions et pas de prix.
Stanley découvre que la forêt est l’image de la société, en ce que, chez les arbres comme chez les hommes, les plus forts tuent les plus faibles.
C’est sans doute que les liens s’offrent, d’eux mêmes, plus nombreux et plus étroits entre les membres d’une société fortement et minutieusement hiérarchisée, comme était l’ancienne, qu’entre dix millions de têtes supposées égales.
Rêve de justice et de bonheur universel, amour des faibles et des opprimés, malédiction jetée à une société pourrie ; extase prophétique, pitié, colère, révolte, ce ne sont qu’attitudes généreuses (certes !)
L’Espion et le Bourreau ont toujours passé pour des êtres nécessaires à l’ordre social ; ils n’en sont pas moins mis au ban des hommes, excommuniés de toute relation et de tout accueil ; ces satellites du salut public sont les réprouvés de la société qui s’en sert.
Il institua différentes sociétés de flagellans ou de pénitens bleus, gris, blancs, noirs : elles subsistent encore dans quelques villes des provinces éloignées de la capitale.
On admire plus l’un, on aime plus l’autre ; le premier a des douleurs trop royales, le second parle davantage à tous les rangs de la société.
Il aurait fallu placer dans l’État à la même hauteur de respect, l’historiographe et le juge ; il aurait fallu assimiler, dans la considération publique, le juge des morts et des intérêts généraux et politiques, comme l’historiographe, et le juge des vivants et des intérêts privés et civils, comme le magistrat ; car l’honneur et la sécurité des sociétés reposent également sur cette double justice.
Pour les former, la société a découpé le réel selon ses besoins. […] Et l’objet essentiel de la société est d’insérer une certaine fixité dans la mobilité universelle. Autant de sociétés, autant d’îlots consolidés, çà et là, dans l’océan du devenir. […] Elle s’imposait dans les sociétés primitives. […] Sans doute, dans le cadre rigide des institutions, soutenue par cette rigidité même, la société évolue.
On peut dire que toute la société est en guerre contre lui. […] Cependant quelques chants purs et frais commençaient à circuler dans des concerts et dans des sociétés particulières. […] Une société restreinte pourra enlever au public immense de Paris le droit d’apprécier un ouvrage dont le jugement appartient à tous. […] L’avantage restait encore à la vertu, malgré la perversité de la société, que je n’ai pas faite, disait-il. […] Renier les efforts de la société précédente, chrétienne et philosophique, c’est se suicider, c’est refuser la force et les moyens de perfectionnement.
Idée que les hommes s’étaient faite du monde depuis la dissolution de la société antique. — Comment et pourquoi recommence l’invention humaine. — Forme d’esprit de la Renaissance. — Que la représentation des objets est alors imitative, figurée et complète. […] Sous cette contrainte, la société pensante avait cessé de penser ; la philosophie avait tourné au manuel et la poésie au radotage, et l’homme inerte, agenouillé, remettant sa conscience et sa conduite aux mains de son prêtre, ne semblait qu’un mannequin bon pour réciter un catéchisme et psalmodier un chapelet236. Enfin l’invention recommence ; elle recommence par l’effort de la société laïque qui a rejeté la théocratie, maintenu l’État libre, et qui à présent retrouve ou trouve une à une les industries, les sciences et les arts. […] Toujours le modèle idéal exprime la situation réelle, et les créatures de l’imagination, comme les conceptions de l’esprit, ne font que manifester l’état de la société et le degré du bien-être ; il y a une correspondance fixe entre ce que l’homme admire et ce que l’homme est. […] Au bas et au sommet de la société, dans toutes les parties de la vie, à tous les degrés de la condition humaine, ce bien-être nouveau devenait visible.
Je ne crois pas qu’il y ait en Occident deux spectacles plus dissemblables, deux sociétés plus opposées, que Belges d’Ambiorix et Belges de Léopold. […] Maintenant, c’est la plus belle floraison de cités, de sociétés municipales qui existe au monde. […] Et les Romains, loin de vouloir forcer les habitudes des hommes, semblent avoir préféré les maintenir, et laisser les sociétés suivre dans ce pays leur voie traditionnelle. […] Former sur elles des projets de conquérant, ce serait un crime contre la société humaine et la vie divine du monde, crime aussi grand « que de tuer son père ou de brûler le Capitole », comme disait Marc-Aurèle. […] Le travail local m’a paru mieux organisé que chez nous ; des fédérations de sociétés se sont fondées d’où il résulte une saine entente et des recueils utiles.
Je sentis qu’une fusillade n’était pas une société, qu’une révolution n’était pas à elle-même son propre but, et qu’il fallait se hâter de lui imposer à elle-même un gouvernement pour qu’elle eût un terme et un nom. […] XXIV Le Vieux Vagabond va plus loin encore ; il y a des grincements de dents de la faim et des imprécations de désespoir contre la société et contre la nature. […] La chanson des Fous, en glorifiant toutes les sectes, même les plus téméraires, n’était propre qu’à devenir la Marseillaise des chimères contre les frontières sacrées de la société connue. […] Mais la société, sur qui tout repose, ne doit point chercher aventure comme l’imagination qui ne répond de rien, elle doit chercher progrès et raison. […] La philosophie imprime à l’action sa tendance divine à l’amélioration du sort de toutes les classes, sans exception, de la société humaine ; l’action donne à cette philosophie politique son efficacité, sa force, sa mesure, son opportunité, sa modération.
Il plaide pour eux, il les aime ; il allègue vingt exemples : le cerf poursuivi qui en « suppose un plus jeune », la perdrix qui, pour préserver ses petits, contrefait la boiteuse, la société des castors architectes, la stratégie des renards polonais, les perplexités, les inventions, les réflexions des deux rats qui veulent sauver leur oeuf. […] Toutes les aventures d’Ysengrin finissent de même ; et ce portrait demi-sérieux, demi-moqueur, est plus vrai que la sombre et terrible peinture de Buffon : « Il est l’ennemi de toute société, il ne fait pas même compagnie à ceux de son espèce. Lorsqu’on en voit plusieurs ensemble, ce n’est pas une société de paix, c’est un attroupement de guerre, qui se fait à grand bruit, avec des hurlements affreux, et dénote un projet d’attaquer quelque gros animal, comme un cerf, un boeuf, ou de se défaire de quelque gros mâtin.
Une société où elle n’avait pas son rang lui semblait mal faite. […] Ils trouvent la société souvent inverse de la nature ; ils se vengent en la méprisant. […] Il y a peu de grandes âmes qui ne sentent en naissant la persécution de la fortune, et qui ne commencent par une révolte intérieure contre la société.
Il s’y livra en paix, et dans la société lettrée de la cour du duc d’Urbin, à la révision de son poème. […] Cette occupation et la société des poètes de Venise décidèrent de plus en plus la vocation du jeune Torquato vers la poésie. […] Tel est le portrait minutieux qu’un contemporain et un ami trace du Tasse ; ce portrait est parfaitement conforme à celui que nous possédons nous-même, copié sur le portrait original, peint sur le Tasse vivant à Florence, et qui nous a été prêté par notre illustre ami, le marquis Gino Caponi, homme digne de vivre dans sa galerie en société avec ces grands hommes de sa patrie.
Mais la société laïque, l’aristocratie féodale avait pourtant déjà ses poèmes qui l’enchantaient, des chansons, et surtout des récits de caractère épique : seulement on ne les écrivait pas. […] Elle a été fixée par l’écriture quand la société avait encore une âme adaptée à l’esprit originel de l’épopée : elle n’avait plus de force active pour en créer, mais elle gardait sa sensibilité intacte pour en jouir. […] Si extravagantes qu’elles soient, elles sont platement réalistes en un sens : elles sont inconsciemment le plat et réaliste roman d’une société qui manque de science et de sens.
La Haute et le Nouveau Jeu, Leur Cœur et Nocturnes, le Prince d’Aurec et Viveurs, c’est la surface brillante et pourrie de la société contemporaine, décrite par un esprit aigu, — mais en même temps jugée, le plus souvent sans le dire, par une âme qui, dans sa rencontre avec l’éphémère, continue de porter en soi quelque chose de stable et de traditionnel : la vieille France, simplement. […] Ses honnêtes duretés contre cette noblesse décadente dont il s’est fait spécialement le peintre impliquent, avec un sens très juste du rôle historique de la noblesse, une irréductible sympathie et un rien de préjugé. « Si l’on pèche plus dans cette société-là, fait-il dire à un abbé, on rachète aussi davantage. […] Enfin, le poème d’Émile Pouvillon est tout pénétré d’évangélisme, de partialité pour les petits, de défiance à l’égard de la société bourgeoise et des « autorités constituées », de doutes sur le bienfait de la civilisation industrielle, et de cette idée que le chef-d’œuvre de l’homme, ce qu’il y a de plus beau et de meilleur au monde, c’est la foi et la bonté parfaite dans une âme simple.
L’anarchie, prêchée immédiatement, est un anachronisme — ce qu’on appelle crime en politique — car elle ne peut exister dans notre société égoïste ; le procédé même, nullement angélique, employé de préférence par ses prophètes les plus actifs, suffirait à prouver que son jour n’est pas arrivé. Une société anarchique supposerait que l’altruisme est devenu la règle de tous les hommes, qu’ils appliquent cette règle même sans le vouloir, comme, pour les stoïciens, un homme vertueux pratique la vertu. […] Certes, de même qu’il est bon de voir les individualistes catholiques et anarchistes combattre par les armes du raisonnement les autoritaires socialistes et jacobins, et tenter ainsi d’établir dans la société un progressif équilibre, il faut aussi que les individualistes des lettres, les poètes spécialement subjectifs, comme M.
En effet, non seulement les diverses parties de chaque science, qu’on est conduit à séparer dans l’ordre dogmatique, se sont, en réalité, développées simultanément et sous l’influence les unes des autres, ce qui tendrait à faire préférer l’ordre historique ; mais en considérant, dans son ensemble, le développement effectif de l’esprit humain, on voit de plus que les différentes sciences ont été, dans le fait, perfectionnées en même temps et mutuellement ; on voit même que les progrès des sciences et ceux des arts ont dépendu les uns des autres, par d’innombrables influences réciproques, et enfin que tous ont été étroitement liés au développement général de la société humaine. […] Je la crois tellement indispensable, que je regarde l’enseignement scientifique comme incapable de réaliser les résultats généraux les plus essentiels qu’il est destiné à produire dans la société pour la rénovation du système intellectuel, si les diverses branches principales de la philosophie naturelle ne sont pas étudiées dans l’ordre convenable. […] De même, relativement aux phénomènes Sociaux, qui sont encore plus compliqués, ne serait-ce point avoir fait un grand pas vers le retour des sociétés modernes à un état vraiment normal, que d’avoir reconnu la nécessité logique de ne procéder à l’étude de ces phénomènes, qu’après avoir dressé successivement l’organe intellectuel par l’examen philosophique approfondi de tous les phénomènes antérieurs ?
Depuis que Beyle taquine la France et les sentiments que nous portons dans notre littérature et dans notre société, il m’a pris plus d’une fois envie de la défendre. Une de ses grandes théories, et d’après laquelle il a écrit ensuite ses romans, c’est qu’en France l’amour est à peu près inconnu ; l’amour digne de ce nom, comme il l’entend, l’amour-passion et maladie, qui, de sa nature, est quelque chose de tout à fait à part, comme l’est la cristallisation dans le règne minéral (la comparaison est de lui) : mais quand je vois ce que devient sous la plume de Beyle et dans ses récits cet amour-passion chez les êtres qu’il semble nous proposer pour exemple, chez Fabrice quand il est atteint finalement, chez l’abbesse de Castro, chez la princesse Campobasso, chez Mina de Wangel (autre nouvelle de lui), j’en reviens à aimer et à honorer l’amour à la française, mélange d’attrait physique sans doute, mais aussi de goût et d’inclination morale, de galanterie délicate, d’estime, d’enthousiasme, de raison même et d’esprit, un amour où il reste un peu de sens commun, où la société n’est pas oubliée entièrement, où le devoir n’est pas sacrifié à l’aveugle et ignoré.
On n’avait pas plus de douceur et de sel tout ensemble : C’était, a dit de lui son tendre ami Chaulieu, un homme qui joignait à beaucoup d’esprit simple et naturel tout ce qui pouvait plaire dans la société ; formé de sentiment et de volupté, rempli surtout de cette aimable mollesse et de cette facilité de mœurs qui faisait en lui une indulgence plénière sur tout ce que les hommes faisaient, et qui, de leur part73, en eurent pour lui une semblable… Les siècles auront peine à former quelqu’un d’aussi aimables qualités et d’aussi grands agréments que M. de La Fare. Ces qualités et ces agréments, nous en entrevoyons quelque chose, bien moins encore par les vers qu’a laissé échapper La Fare et qui sont faibles, privés aujourd’hui des circonstances de société qui les ont fait naître74, que par ses mémoires fins, sérieux, piquants et qu’on regrette seulement de trouver trop courts et inachevés.
Il y avait des temps où il disait : « La retraite est le but de mes désirs ; je veux terminer mes jours loin du bruit et d’une société qui finirait peut-être par me rendre misanthrope. […] Les trônes qui s’écroulent, les ministres qui tombent et se succèdent, l’intéressent moins que le courant profond de la société qui continue de couler sous toutes ces arches de pont.