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890. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

Un jour, raconte M.  […] L’auteur nous raconte d’abord la jeunesse de son héros, depuis l’année 1585 jusqu’à l’année 1614. […] C’est pourquoi j’engage M. de Rouvre à nous raconter ce qu’il a vu, tout ce qu’il a vu, et à ne plus s’aventurer dans le roman mondain. […] C’est du moins ce que racontent les historiens byzantins. […] Une vieille inscription nous raconte la touchante histoire de ces enfants.

891. (1896) Le livre des masques

Le poète, qui n’a pas de scrupules psychologiques, ne s’attarde pas au soin de partager les hallucinations en vraies et en fausses ; pour lui, elles sont toutes vraies, si elles sont aiguës ou fortes et il les raconte avec ingénuité, — et quand le récit est fait par M.  […] Herold est l’un des plus objectifs, parmi les poètes nouveaux ; il ne se raconte guère lui-même ; il lui faut des thèmes étrangers à sa vie, et il en choisit même qui semblent étrangers à ses croyances : ses reines n’en sont pas moins belles, ni ses saintes moins pures. […] D’autres ont et avouent la tendance à tout simplifier, n’observent et ne comparent les faits que pour en extraire des résumés et des quintessences ; ils ont scrupule et comme pudeur à raconter des mécanismes si souvent décrits : ils établissent des portraits d’âmes, ne gardant de l’anatomie physique que la seule matérialité nécessaire à soutenir le jeu des couleurs. […] Paul Adam est pourtant un précoce, mais il y a des limites à la précocité, surtout chez un écrivain destiné à raconter la vie telle qu’il la voit et telle qu’il la sent. […] Alors on raconte, non pas des anecdotes, mais sa propre anecdote à soi, la seule que l’on dise bien et que l’on puisse redire bien plusieurs fois, si l’on a du talent et le don de varier les apparences.

892. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

Marianne est une ingénue qui, arrivée sur le retour et dans l’âge d’une expérience consommée, raconte à une amie les aventures de sa jeunesse et détaille ses sentiments. […] Elle raconte tout le menu de ce manège avec une curiosité, une réflexion et un détail infini qui fait ressembler ce passage et bien d’autres à une petite scène d’une ingénue de quinze ans, telle que Mlle Mars pouvait la jouer à cet âge : « Où en étais-je ?

893. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — II. (Fin.) » pp. 109-130

Parmi les morceaux les plus distingués du livre, je compte le Fragment de lettre d’une femme qui a substitué avec préméditation la vanité au sentiment, et qui, dans l’art de la vie, ne fait entrer comme principe dominant que l’amour-propre et le plaisir de briller : elle se raconte à une amie et expose son système complet de domination, son code de Machiavel. […] Le prince de Ligne s’arrête avec complaisance sur cette idée secrète et chère de M. de Meilhan, que celui-ci a manqué sa fortune et sa destinée et qu’il aurait dû être ministre à la place de Necker ou de Calonne : Avec l’air de mépriser tous les détails, les regardant au-dessous de vous, il n’y en avait pas un de votre intendance de Valenciennes qui vous échappât, et vous racontez très plaisamment ce que c’est que de travailler légèrement, quand M. de Calonne écrivait sur le coin de la tablette d’une cheminée sur ce que vous aviez été vingt-quatre heures à penser.

894. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — II » pp. 454-475

Je ne puis résister à vous raconter un trait qui vous fera connaître la vanité de la maréchale, et qui dans le moment me frappa de la manière la plus comique. […] — Je n’ai pas bien distingué, il faisait nuit. » — Un autre : « Il faut qu’il ait mis plus de six heures pour venir de Versailles. » — D’autres racontaient froidement quelques circonstances.

895. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) «  Essais, lettres et pensées de Mme  de Tracy  » pp. 189-209

Mme de Coigny n’aime pas assez Shakespeare ; l’original lui donne trop de peine, et elle déteste les traductions impossibles… Je raconte à Mme de Coigny mes lectures anglaises, et elle dit que ces lectures (aidées de Dieu) m’ont donné un esprit original et sain. » Mme de Coigny avait raison ; ces lectures croisées sont un excellent régime et fortifient une jeune nature. […] Est-il rien de plus riant, de plus frais, comme page et vignette d’histoire naturelle, que ce joli nid de mésange : Ce matin, en faisant une promenade sur les bords de l’étang (il s’agit de l’étang de Paray, et ceci n’est plus du voyage de Plombières), j’ai joui d’un spectacle qui m’a confondue d’admiration, et que je vais tâcher de raconter. — Je m’étais appuyée contre un saule pour me reposer un instant, lorsque tout à coup un charmant petit oiseau sembla jaillir de l’écorce même de l’arbre ; je voulus me rendre compte de ce phénomène, et voici ce que je vis en y regardant de très près.

896. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Souvenirs militaires et intimes du général vicomte de Pelleport, publiés par son fils. » pp. 324-345

C’était le temps du blocus établi dans toute sa rigueur, et les négociants dont ces mesures prohibitives ruinaient le commerce essayaient de les éluder par tous les moyens : Depuis longtemps, raconte Pelleport, l’une des plus riches maisons de commerce du pays, — je tairai le nom —, avait eu recours à toutes sortes d’expédients pour faire entrer des marchandises anglaises en Hollande ; elle avait échoué. […] Que pouvons-nous raconter, nous autres, acteurs partiels de ce long drame ?

897. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Madame Roland, ses lettres à Buzot. Ses Mémoires. »

Faugère nous dit : « On raconte qu’au pied de l’échafaud, en ces derniers instants où, entrevoyant les ombres redoutables de l’Éternité, les cœurs les plus fermes se troublent, les plus incrédules commencent à douter, Mme Roland demanda qu’il lui fût permis d’écrire des pensées extraordinaires qu’elle avait eues dans le trajet de la Conciergerie à la place de la Révolution. […] (Reboul), qui me l’a raconté, fondait en larmes.

898. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. »

Mais il est impossible que dans les dictées d’un homme de guerre d’une vocation aussi décidée il n’y ait pas de bonnes et fines remarques de détail (comme chez Montluc en son temps), des observations pratiques utiles au métier et d’autres qui touchent au moral de l’art et qui sont supérieures : Mes Rêveries en sont semées ; Napoléon, en les lisant, y a fait les deux parts10 ; et le comte Vitzthum a raison d’y signaler, à son tour, de bonnes et même de tout à fait belles pages : ainsi l’exposé de la bataille de Pultava, ainsi un curieux récit de l’affaire de Denain au point de vue du prince Eugène11 ; ainsi des réflexions sur la défaite de Malplaquet, sur la déroute de Ramillies ; de singulières anecdotes sur des paniques d’hommes et de chevaux même après la victoire gagnée, racontées à l’auteur par Villars ; mais surtout un admirable endroit sur l’idée du parfait général d’armée que le comte de Saxe avait vu à peu près réalisé en la personne du prince Eugène. […] Il raconte cette conversation de point en point, dans toutes ses circonstances et ses nuances ; les sous-entendus y sont ; et il finit par un conseil héroïque au roi son frère, conseil qu’il eût fallu être Maurice lui-même pour suivre et pour exécuter : « Il ne m’appartient pas de donner des conseils à Votre Majesté, et surtout des conseils hardis ; mais, si j’étais à la place de Votre Majesté, je ferais marcher, cette lettre reçue, mes troupes vers les frontières de Bohême ; j’enverrais au roi de Prusse pour savoir s’il veut tenir bon, au cas que je me déclarasse pour lui et que je fisse entrer mes troupes en Bohème.

899. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le Général Franceschi-Delonne : Souvenirs militaires, par le général baron de Saint-Joseph. »

Le capitaine de Saint-Joseph, beau-frère du maréchal Suchet, fut plus heureux : « Le 26 du mois de septembre (1809), dans l’après-midi, nous étions à table, nous raconte-t-il, lorsque le gouverneur de l’Alhambra, qui rarement était venu nous voir, suivi de l’adjudant et de l’officier de garde, entra dans noire appartement, et me montrant une lettre : « Vous partez pour être échangé », me dit-il. — « Nous partons !  […] On racontait qu’il faisait rôtir les petits enfants espagnols échappés aux baïonnettes françaises.

900. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

On raconte qu’au sortir du Mariage d’inclination, une jeune fille, se jetant tout d’un coup dans les bras de sa mère, lui avoua qu’elle devait se faire enlever le lendemain par quelqu’un qu’elle aimait. […] Quand on lui avait raconté ce détail, elle n’avait pas écouté, ce semble, tant sa pensée était ailleurs ; mais voilà que sa jalousie en éveil a intérêt à s’en ressouvenir, et il se trouve qu’elle a entendu comme après coup ; elle se ressouvient.

901. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

Ampère, il ne m’appartient pas de raconter en détail la diversité et la multiplicité des influences, ou, pour mieux dire, des aimantations successives que reçut ce noble esprit avant d’arriver à sa formation entière et à sa constitution actuelle. […] on raconte que dom Rivet, dans les derniers mois de sa vie, fut atteint d’une toux qui le força de prendre une chambre à feu : ce fut le seul adoucissement qu’il s’accorda 173.

902. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

Il nous a raconté clairement, sobrement, fortement les faits auxquels il a pris part depuis qu’on prit la croix, jusqu’à la mort du marquis de Montferrat, en 1207. […] Il se raconte en racontant saint Louis ; il se peint, avec ses goûts, son humeur, ses vertus, ses faiblesses, ses saillies : mais en se peignant, il a peint l’homme, ou du moins l’homme du xiiie  siècle, en un de ses plus aimables exemplaires.

903. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre I. Roman de Renart et Fabliaux »

C’étaient des contes, sans prétention et sans intention autre que d’amuser, qui racontaient les actions, les luttes, les méfaits et les malheurs des animaux : de ces contes, dont les premiers éléments remontaient aux plus lointaines origines des peuples européens ; les uns venaient de l’Orient, comme ceux où figure le lion, d’autres venaient du Nord, comme ceux dont l’ours était avant le loup, le primitif héros. […] Bédier en compte 8 qui se racontaient en Occident avant les croisades (sur lesquels 6 remontent à l’antiquité gréco-romaine) et 11 seulement comme ayant eu une existence certaine en Orient.

904. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

France-Bonnard nous racontera-t-il des histoires fort simples. […] Ce qu’il raconte d’ailleurs, ce sont les impressions d’un petit enfant très particulièrement doué, d’un enfant qui sera un artiste, un contemplateur, un rêveur, et qui prendra surtout le monde comme un spectacle pour les yeux et comme un problème pour la pensée, non comme un champ de bataille ou comme un magasin de provisions où il s’agit avant tout de se faire sa part.

905. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

Et, après tout, cette histoire du dur dressage d’un enfant à son métier de prince et de général est fort intéressante en elle-même, et M. le duc d’Aumale nous la raconte avec beaucoup de vivacité et de charme et dans un style qui a en même temps de la tenue et de la grâce. […] L’Histoire des princes de Condé s’arrête à la bataille de Nordlingen : la partie la plus intéressante de la vie du duc d’Anguien reste donc à raconter.

906. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

) Le 17, madame de Sévigné raconte des détails du voyage : « Madame de Fontanges avait quatre carrosses à six chevaux, le sien à huit. […] Plus loin encore, Madame raconte que « la reine était enchantée quand le roi couchait maritalement avec elle.

907. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IV, Eschyle. »

Élien raconte que le poète, traduit devant l’Aréopage, allait être condamné par son arrêt sans appel, si Amynias, qui assistait son grand frère, fendant sa tunique, n’avait montré aux juges le bras mutilé du soldat de Platée et de Marathon. […] Dans l’interlocuteur qui lui vient, le héros trouve un appui ou une résistance, il ne raconte pas seulement, il agit.

908. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Huet, évêque d’Avranches, par M. Christian Bartholmèss. (1850.) » pp. 163-186

Huet y est trop réfuté et combattu, au lieu d’être plus uniment raconté et exposé. […] Huet, que trop de savoir conduisait, comme il arrive souvent, à moins admirer, tout en reconnaissant dans ce passage le sublime de la chose racontée, se refusait à y voir, pour l’expression et même pour la pensée, rien de plus qu’une manière de dire, une tournure habituelle et presque nécessaire aux langues orientales, avec lesquelles il était si familier.

909. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

Le dimanche 12 juillet 1789, deux jours avant la prise de la Bastille, ce fut Desmoulins qui, au Palais-Royal, monta sur une table, annonça aux Parisiens le renvoi de Necker, et fit cette scène, si souvent racontée, où il tira Pépée, montra des pistolets et arbora une cocarde verte comme signe d’émancipation et d’espérance. […] On raconte qu’il s’évanouit presque en entendant leur arrêt de mort, et qu’il s’écria : « C’est moi qui les ai tués ! 

910. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La Grande Mademoiselle. » pp. 503-525

Cependant elle marquait de bonne heure le goût de l’esprit, du bel et fin esprit, de celui qui sert à la conversation ; son père y excellait : elle raconte comment à Tours, chaque soir, elle aimait à entendre Monsieur l’entretenir de toutes ses aventures passées, « et cela fort agréablement, comme l’homme du monde qui avait le plus de grâce et de facilité naturelle à bien parler ». […] Lorsque je lui fis mon compliment, raconte-t-elle, il me dit qu’il était bien persuadé de l’honneur que je lui faisais de prendre part aux bontés que le roi avait pour lui. » Ce simple mot la transporte : « Je commençais dans ce temps-là à le regarder comme un homme extraordinaire, très agréable en conversation, et je cherchais très volontiers les occasions de lui parler. » Elle commençait à s’ennuyer vaguement dès qu’elle ne le voyait plus : « Cet hiver, dit-elle (1669), sans savoir quasi pourquoi, je ne pouvais souffrir Paris ni sortir de Saint-Germain. » Chaque jour elle lui trouvait plus d’esprit et d’agrément quand elle parvenait à l’entretenir dans quelque embrasure de croisée, ce qui n’était pas toujours facile à cause de l’étiquette et du rang.

911. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

Et réfléchissant avec humilité à l’étincelle qui peut jaillir sur les âmes de cette œuvre modestement accomplie, le poète se rappelle et s’applique un fabliau charmant que son aïeule bretonne, dit-il, lui a souvent raconté. […] Mme Sand raconte, décrit et peint ; elle fait le drame.

912. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « L’abbé Maury. Essai sur l’éloquence de la chaire. (Collection Lefèvre.) » pp. 263-286

On raconte qu’au sortir d’Avallon, il rencontra deux autres jeunes gens aussi peu en fonds, mais aussi confiants que lui. […] Marmontel a raconté une conversation qu’il eut avec Chamfort lors de la convocation des États généraux.

913. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le comte-pacha de Bonneval. » pp. 499-522

Il a raconté gaiement cette conversion et en homme d’esprit qui ne craint que le ridicule. […] Ces articles du lundi ont souvent provoqué des éditions et réimpressions d’ouvrages dont j’avais parlé avec éloge ; cette fois ça été mieux, et il en est sorti toute une aimable inspiration, tout un roman : La Comtesse de Bonneval, histoire du temps de Louis XIV, par lady Georgina Fullerton, livre délicat dans lequel une plume toute française, qu’on dirait contemporaine des personnages qu’elle produit, s’est plu à retracer, à restituer l’enfance de Judith de Biron, à nous raconter les sentiments de la jeune fille ayant son mariage avec le comte de Bonneval, de telle sorte que les lettres qu’on a d’elle n’en soient plus qu’une suite naturelle et qu’on y arrive tout préparé.

914. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Sa vie, souvent racontée, se divise en deux parties bien distinctes : la première et la plus longue partie se passe dans l’Université proprement dite, dans l’enseignement pratique, dans les fonctions spéciales, dans l’étude et dans la prière. […] Après avoir raconté, dans l’« Histoire des Mèdes », l’aventure du Lydien Gygès, qui avait vu toute nue la femme du roi Candaule, il fait une remarque sur ce qu’il est étonnant que la police, à Paris, n’empêche point les indécences et les désordres dans la saison des bains.

915. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — I. » pp. 414-435

On a recueilli plusieurs anecdotes de son enfance qui auraient tout leur prix, si on les avait racontées plus simplement. […] Ces harmonies qu’il ne pouvait réaliser sur la terre dans l’ordre politique et civil, il les demanda à l’étude de la nature, et il en raconta avec consolation et délices ce qu’il en entrevoyait : « Toutes mes idées ne sont que des ombres de la nature, recueillies par une autre ombre. » Mais à ces ombres son pinceau mêlait la suavité et la lumière ; c’est assez pour sa gloire.

916. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — I. » pp. 389-410

On raconte qu’il voulut avant son départ, revoir Angers et l’oncle maternel qui avait eu quelque soin de son enfance ; là il s’exerça durant plusieurs mois par un régime actif et par des courses de chaque jour à ses fatigues nouvelles, et, quand il se crut suffisamment aguerri, il se mit en marche comme un valeureux fantassin (fin de 1783). […] Au lieu de nous raconter ses marches, l’emploi de ses journées, et de nous permettre de le suivre, il n’a donné que les résultats de ses observations durant trois ans : « J’ai rejeté comme trop longs, dit-il, l’ordre et les détails itinéraires ainsi que les aventures personnelles : je n’ai traité que par tableaux généraux, parce qu’ils rassemblent plus de faits et d’idées, et que, dans la foule des livres qui se succèdent, il me paraît important d’économiser le temps des lecteurs. » Il a donc composé un livre, un tableau, et n’a pas senti qu’il y avait plus de charme pour tout lecteur dans la simple manière d’un voyageur qui nous parle chemin faisant, et qu’on accompagne.

917. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

Le poète raconte la joie des premières adorations, un cœur débordant prenant à témoin de sa félicité le printemps et le monde ; des doutes arrêtent cet essor passionné ; la bien-aimée est plus belle que bonne ; ses perfidies détruisent une à une toutes les promesses de ses yeux ; l’amant, abîmé de douleur, ne pouvant être aussi oublieux que sa maîtresse, se plaît à aigrir sa souffrance par ces éternelles plaintes qu’échangent les amants déçus. […] Il sait raconter de jolies histoires de fées, combiner un rapide scénario de ballet, se moquer galamment de ses créanciers, attaquer les puissances politiques et sociales avec le rire d’Aristophane, puis, comme ce dernier, faire chanter les oiseaux et babiller de jolies femmes.

918. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIV. »

combien de fois il a entrepris de se raconter lui-même à l’avenir ! […] Heredia, dans une lettre publiée par les journaux américains, avait raconté d’abord ce que ses vers ne pouvaient agrandir : « Mes regards, écrivait-il, se sont assouvis à contempler un des prodiges de la création.

919. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Il raconte ses souffrances, ses tortures morales… Le monde, tel qu’il est, prouve si peu l’existence de Dieu ! […] Mais racontons le drame. Quand je dis raconter… cela ne se raconte guère, puisque ce n’est qu’une juxtaposition de détails multiples, d’où se doit dégager une impression totale. […] Mais ce qui dépasse infiniment en pathétique l’action racontée ou vue, c’est l’action devinée. […] Dans ses dernières années, elle racontait un rêve qu’elle avait fait : « J’étais morte.

920. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

… Alors, écoute… Haletante, elle lui raconta en quelques paroles brèves l’expédition qu’Élysée et elle préparait depuis trois mois, envoyant lettres sur lettres, discours, dépêches, le Père Alphée toujours en route par les villages et la montagne. […] Je n’ai pas à raconter ici les paroles échangées entre nous sur le rôle qu’il jouait à cette époque. […] Je lui réponds que c’est arrangé pour aujourd’hui, si elle veut… et je lui raconte la petite combinaison de M.  […] Pour l’expliquer sa confiance et pour gagner la tienne, il te raconte qu’ils lui ont tué son fils, son unique enfant. […] M. de Loménie fait également apparaître la mère du grand orateur, triste personne assurément, mais qu’il importe de connaître pour expliquer son fils et excuser son mari ; il raconte cette lutte implacable entre les deux époux, qui a défrayé la malignité des contemporains ; les scandales et les pamphlets injurieux contre lesquels le marquis de Mirabeau a eu le tort de se défendre à coups de lettres de cachet ; le rôle singulier de son fils, le futur orateur, sans cesse occupé à exciter ses parents l’un contre l’autre, pour tirer profit de leur division, et justifiant cette parole de son père : « Si la graine aux expédients enragés était perdue, elle se retrouverait dans cette tête-là ! 

921. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Post-scriptum sur Alfred de Vigny. (Se rapporte à l’article précédent, pages 398-451.) »

Cette légère réserve faite, je ne sais rien de mieux raconté. » M. le comte de Circourt enfin, cet homme de haute conscience et de forte littérature, dans une lettre qu’il m’écrivait le 24 avril 1864, reconnaissait la vérité du Portrait et s’exprimait en ces termes par lesquels je terminerai et qui me couvrent suffisamment : « Les grands côtés du talent de M. de Vigny sont mis par vous en relief d’une manière tout à la fois large et fine ; et malgré la sévérité de quelques-unes de vos appréciations, je n’ai rien à souhaiter de mieux pour la mémoire de M. de Vigny, si ce n’est que la postérité s’en tienne sur lui à votre jugement, ce que j’espère ; j’apprends que ses vrais (et par conséquent rares) amis sont tout à fait de ce sentiment. » 79.

922. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Note »

Et maintenant, si de ces hauteurs nous descendons à de menus détails littéraires, à ces petites choses auxquelles pour ma part j’attache de l’importance, j’ai besoin de rectifier sur quelques points le passage, très-bienveillant d’ailleurs et tout favorable, qui m’est accordé dans le livre de biographie domestique intitulé : Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie ; on y lit (t. 

923. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — II »

On a la relation de la première campagne d’Italie écrite flous la dictée de Napoléon : tout y est simple, clair, et grand comme ce qu’il y raconte.

924. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VII. De la littérature latine, depuis la mort d’Auguste jusqu’au règne des Antonins » pp. 176-187

Ce trait surpasse certainement tout ce que l’histoire moderne a jamais raconté d’intrépide en fait de bassesse.

925. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Paul Bourget, Études et portraits. »

je me suis, sans doute, figuré depuis que j’avais fait le plus adorable voyage, et je le raconte quelquefois en coupant mon récit de cris d’admiration ou de plaisir : mais, quand je rentre en moi-même et que je tâche d’être sincère, je sens très bien que, ce coin du Sahara, c’est à travers le livre de Fromentin que je le revois, non à travers mes propres souvenirs ; je sens que ce voyage n’a rien ajouté à la vision que j’apportais avec moi, et que mes yeux ont, sans le savoir, conformé la réalité à cette vision.

926. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IX. Beltrame » pp. 145-157

Mais Fulvio, qui arrive aussi opportunément que de coutume, détrompe le capitaine et lui raconte son amour et les trames ourdies par son valet.

927. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVII. Conclusion » pp. 339-351

La fameuse scène de la galère, que Molière emprunta à Cyrano de Bergerac, se trouve dessinée déjà dans un des canevas de Flaminio Scala : dans ce canevas intitulé Il Capitano, Pedrolino, afin d’arracher à Pantalon l’argent dont Oratio, fils de Pantalon, a un besoin pressant, vient lui raconter que ce fils est tombé entre les mains des bandits et mis à la rançon de cent écus.

928. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre premier. »

Ces deux petits faits mis ainsi à côté l’un de l’autre, racontés dans le même nombre de vers et dans la même mesure, font un effet très-piquant.

929. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 40, si le pouvoir de la peinture sur les hommes est plus grand que le pouvoir de la poësie » pp. 393-405

Pour alléguer des faits plus positifs, lorsqu’on brûla le corps de Jules Cesar, il n’y avoit personne dans Rome qui ne se fut fait raconter les circonstances de cet assassinat.

930. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 1, idée generale de la musique des anciens et des arts musicaux subordonnez à cette science » pp. 6-19

Cependant j’espere qu’en m’aidant des faits racontez par les écrivains anciens qui par occasion ont parlé de leurs arts musicaux, je pourrai venir à bout de donner une notion ; si non pleine et entiere, du moins claire et distincte de ces arts, et d’expliquer comment les pieces dramatiques étoient representées sur le théatre des anciens.

931. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 7, nouvelles preuves que la declamation théatrale des anciens étoit composée, et qu’elle s’écrivoit en notes. Preuve tirée de ce que l’acteur qui la recitoit, étoit accompagné par des instrumens » pp. 112-126

Le premier raconte même un incident arrivé dans une representation de l’Hercule qui dût divertir l’assemblée autant qu’aucune scene de comedie.

932. (1860) Ceci n’est pas un livre « Les arrière-petits-fils. Sotie parisienne — Premier tableau » pp. 180-195

. — Voyons ce qu’elle raconte, cette feuille.

933. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IX. »

Tantôt c’était une méditation sur les chagrins et la brièveté de la vie, tantôt une tradition de la Fable, racontée avec cette douceur émue que le poëte portait dans ses propres souvenirs de regrets et ses consolations d’amitié.

934. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

Vous rappelez-vous, pour ne citer que les morts, l’éloquence et la conviction de ce grand Armand Carrel, lorsqu’il s’en va, la plume à la main, comme il tiendrait une épée, ameutant ces orgueils, ces vanités, ces colères impuissantes, et tout semblable au sanglier (dans cette chasse racontée par Virgile) qui, tout couvert de flèches acérées, tient tête aux chasseurs et les fait pâlir ? […] Voici cependant cette lettre que mademoiselle de Brie écrivait probablement à une amie, dont elle ne dit pas le nom : « Je vous ai raconté que la troupe était très abandonnée et ne gagnait pas d’argent depuis longtemps ; que le parterre n’applaudissait plus que Scaramouche, et qu’enfin, sur les représentations de mademoiselle du Parc et de mademoiselle Molière, celui-ci avait promis d’écrire une comédie sur le patron d’une pièce espagnole qu’on lui a racontée. […] Pas n’est besoin de vous faire remarquer que Shakespeare, pour l’unité de son drame, aussi bien que Molière, a recours à un mort qui revient au monde, et qui raconte aux vivants ce qu’il a vu chez les morts. […] Bulwer nous raconte qu’il avait commencé par présenter sa pièce au directeur de Drury-Lane, et que ce directeur malappris n’avait pas voulu représenter la pièce, sans la lire. […] Dans ses lettres à M. le maréchal de Bellefonds, l’évêque de Meaux raconte d’un style attristé, grave et touché tout ensemble, ce drame caché dont M. 

935. (1881) Le naturalisme au théatre

Tous raconteraient leur fuite en roulant les yeux et en faisant les grands bras. […] On nous a raconté comme quoi M. […] Je n’ai pas cru devoir raconter la pièce en détail. […] Je n’ai d’ailleurs pas à raconter ce mouvement poétique, qui a copié en petit et dans l’obscurité le large mouvement de 1830. […] On raconte que M. 

936. (1902) Le critique mort jeune

Faguet racontait, par manière de rire, qu’il l’avait écrit sans s’en douter, à force de contempler, entre autres choses, le portrait de Sainte-Beuve et celui de Sarcey qui sont comme les dieux lares de son logis. […] Bourget les célébra dans son discours de réception à l’Académie, après avoir raconté l’anecdote fameuse des lunettes de Maxime Du Camp. […] Sous ce beau prétexte, c’est Michelet lui-même qui se raconte, qui dit ses émotions, ses visions, ses rêveries, ses cauchemars. […] Qui entreprendrait, sans crainte de le dénaturer, de raconter un de ces livres ? […] Rebell y a raconté l’histoire d’une de ces passions dont le professeur de morale de Triphème tâche de détourner ses élèves.

937. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

On ne risquait plus alors d’être mis à la Bastille pour de telles échappées ; on raconte seulement que ces vers : Et vous, peuple injuste et mutin, Sans pape, sans rois et sans reines, Vous danseriez au bruit des chaînes Qui pèsent sur le genre humain ! […] On raconte qu’il avait composé un poëme sur les Amours des Reines de France, et qu’il le brûla par délicatesse à l’époque où ce poëme aurait pu, en tombant entre des mains parricides, devenir une arme d’infamie contre d’illustres victimes. […] On raconte que, quelques années auparavant, celle qui avait été Éléonore, devenue veuve et libre, et restée naïve, avait écrit de Bourbon à son chantre passionné pour lui offrir sa main ; mais il était trop tard, et Parny ne laissa échapper que ce mot : « Non, non, ce n’est plus Éléonore. » — Celle-ci alors, selon la chronique désormais certaine et très-positive, se remaria, vint en France, habita et mourut en Bretagne, et l’on se souvient d’elle encore à Quimper-Corentin.

938. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

Il ne loue pas, il raconte ; son tort est de raconter avec l’impassibilité d’une page de bronze, et de ne témoigner dans l’accent du narrateur aucune préférence pour le bien, aucune pitié pour les victimes, aucune exécration contre les attentats politiques. […] Il devient de plus en plus évident, à quelques pages de là, qu’il raconte le succès du crime, mais qu’il ne le glorifie pas.

939. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIIe Entretien. Montesquieu »

IV On voit que Montesquieu ne se montrait pas extraordinairement sévère sur le choix de ses connaissances, pendant son voyage ; le scepticisme de son esprit ne fit que s’accroître, et l’on raconte que, dans la ville éternelle, il dégagea spirituellement sa bourse des étreintes de la fiscalité du Vatican. […] Un de ses meilleurs et derniers biographes, le baron Walckenaer raconte en ces termes un acte de charité de Montesquieu, devenu célèbre, et que le théâtre a même reproduit, d’après Fréron, sous le titre de : le Bienfait anonyme. » « Il allait souvent à Marseille, dit le baron Walckenaer dans la Biographie universelle, visiter madame d’Héricourt. […] La famille de Robert a raconté le reste. » VI Nous avons eu la curiosité de lire le drame composé sur ce sujet, par Joseph Pilhes, de Tarascon, en 1784 ; ce drame est médiocre, et le nom de Montesquieu, changé en celui de Saint-Estieu, produit un effet assez ridicule ; cependant il a dû faire couler des larmes, surtout pendant la révolution où il se jouait encore, et où les pièces dans lesquelles triomphaient l’humanité et la nature, réussissaient d’autant plus que l’époque était plus terrible et plus agitée.

940. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Edmond et Jules de Goncourt »

Cette vie contemporaine qu’ils racontent, on sent qu’ils y tiennent par les entrailles ; ils frissonnent eux-mêmes de cette fièvre qu’ils décrivent. […] Au fond, ils n’aiment pas raconter ; ils ne peuvent souffrir le labeur d’un récit suivi, avec des passages nécessairement plus éteints, des transitions d’un épisode à l’autre. […] Le Jardin des plantes ; un atelier de trente élèves ; une ville d’Asie Mineure racontée par un coloriste ; une partie de canotage la nuit ; quelques aperçus sur la cuisine russe ; une vente après décès d’artiste pauvre et malchanceux ; un atelier au crépuscule ; l’ouverture du Salon ; ce qu’on voit en omnibus le soir ; le corps d’un modèle ; une pluie de printemps au Palais-Royal ; une synagogue ; un bal masqué chez un peintre ; les amours d’un bohème et d’un singe ; un petit cochon dans un atelier ; l’auberge de Barbizon ; la forêt de Fontainebleau ; la Bièvre et ses paysages ; la plage de Trouville ; je ne sais quelle rue derrière Saint-Gervais ; une pleine eau, la nuit, dans la Seine, sous les ponts… — le tout mêlé de tirades amusantes et truculentes sur l’École de Rome, sur Ingres et Delacroix, sur les primitifs, sur le bourgeoisisme des artistes..  

941. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

J’aurais voulu que la vie publique mêlât le talent littéraire à tout ; rien ne me paraissait réellement beau, dans les champs de bataille, dans les vicissitudes des empires, dans les congrès des cours, dans les discussions des tribunes, que ce qui méritait d’être ou magnifiquement dit, ou magnifiquement raconté par le génie des littérateurs. L’histoire elle-même me semblait mesquine et triviale quand elle ne racontait pas les événements humains avec l’accent surhumain de la philosophie, de la tragédie ou de la religion. […] C’est alors aussi que j’étudiai plus profondément les plus grands historiens littéraires de l’antiquité, pour raconter aussi les grands événements de mon pays.

942. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Ici personnages et situations sont soudés ensemble, ou, pour mieux dire, les événements font partie intégrante des personnes, de sorte que si le drame nous racontait une autre histoire, on aurait beau conserver aux acteurs les mêmes noms, c’est à d’autres personnes que nous aurions véritablement affaire. […] Ce qui nous a intéressés, c’est moins ce qu’on nous a raconté d’autrui que ce qu’on nous a fait entrevoir de nous, tout un monde confus de choses vagues qui auraient voulu être, et qui, par bonheur pour nous, n’ont pas été. […] Elle tient à ce que Mark Twain déclare être un de ces jumeaux, tout en s’exprimant comme s’il était un tiers qui raconterait leur histoire.

943. (1853) Histoire de la littérature française sous la Restauration. Tome I

La prophétie y coudoie l’histoire, et souvent, dans la même phrase, l’auteur raconte à la fois l’avenir et le passé. […] « Quel air martial ont ces petits hommes », dit M. de Bonald à ses enfants, après leur avoir raconté son aventure ; « avec eux, on ferait la conquête de l’Europe !  […] » l’historien de la philosophie peut, à plus juste titre encore, s’écrier, après avoir raconté les erreurs surprenantes des plus savants philosophes, que la science, comme la grandeur, n’appartient qu’à Dieu. […] Il a lui-même raconté comment, dans une heure de désespoir, il tenta une démarche qui améliora sa position. […] Suard, où elle avait raconté l’anecdote.

944. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Il nous a raconté qu’il eut l’idée de Clavijo après avoir lu ces brûlants Mémoires, et, pour se vanter, sans doute, de la difficulté vaincue, qu’il le lit en huit jours et pour plaire à Lily… le galant homme ! […] Sa vie, il l’a racontée dans ses Mémoires, dont nous parlerons, et qu’il a écrits avec le double soin prudent de sa position dans la vie et de celle qu’il voulait se faire dans l’immortalité. […] Lui qui parle toujours de vie n’en a jamais quand il raconte la sienne. […] Il n’avait pas plus le génie du cœur que l’autre génie… Il y a dans son Voyage à Rome une aventure d’amour — vertueux — avec une jeune et ravissante Milanaise, qui peint trop bien Gœthe pour que je ne la raconte pas en cette étude sur sa nature intellectuelle et morale, c’est-à-dire sur la valeur absolue de cet homme si étrangement et si prodigieusement surfait.

945. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

On a souvent raconté que Taine, après son échec, avait été nommé suppléant de sixième au collège de Toulon, et qu’il avait donné sa démission au ministre par ces simples mots : « Pourquoi pas au bagne ?  […] L’histoire de ses tribulations est bonne à raconter, ne fût-ce que pour faire apprécier aux Français d’aujourd’hui les libertés dont ils jouissent. […] S’il raconte un naufrage, il nous montre le navire « assommé, éreinté », gisant sur la grève « comme un corps mort ». […] Comme il avait été le premier à retrouver et à raconter ce qu’avaient été les fédérations en 1790, il gardait l’espoir de voir un jour jaillir du cœur des peuples des fêtes exerçant une action morale sur ceux qui y prendraient part. […] Le talent de s’observer et de se raconter soi-même n’est-il pas un des mérites les moins contestés de nos écrivains ?

946. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVIII » pp. 266-276

On donna autrefois à Marc-Paul le sobriquet de Messer milione à cause des histoires merveilleuses et incroyables qu’il racontait de ses voyages : on pourrait donner le même surnom au Balzac d’aujourd’hui, et il ne fait que représenter en cela le rêve et la chimère de maint confrère.

947. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Jules Laforgue » pp. 36-47

Baudelaire l’invite à se raconter « sur un mode modéré de confessionnal », mais lui insuffle ses préjugés de 1830, sa haine du « bourgeois » qu’il veut éloigner, en se cuirassant d’un peu de fumisme extérieur.

948. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XI » pp. 89-99

Voilà l’histoire de son mariage, qui n’a rien de remarquable que son opposition avec ce qu’on en raconte.

949. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXV » pp. 402-412

Pour moi, j’aimerais mieux ce haillon loin que près. » Le 4 septembre, elle raconte à sa fille cette anecdote : « Un homme de la cour disait l’autre jour à madame de Ludres : Madame, vous êtes, ma foi, plus belle que jamais. — Tout de bon, dit-elle ; j’en suis bien aise, c’est un ridicule de moins. « J’ai trouvé cela plaisant. » Le 6 septembre, elle écrivait de Vichy : « Madame disait l’autre jour à madame de Ludres, en badinant avec un compas : Il faut que je crève ces yeux-là, qui font tant de mal. — Crevez-les, madame, puisqu’ils n’ont pas fait tout ce que je voulais. » On voit dans les mémoires de Madame, que madame de Ludres finit par se retirer dans un couvent à Nancy, où elle vécut jusqu’à un âge fort avancé.

950. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre sixième. »

Cette fable écrite purement et où le fait est bien raconté, a, ce me semble, le défaut de n’avoir qu’un but vague, incertain, et qu’on a de la peine à saisir.

951. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 29, qu’il est des païs où les ouvrages sont plûtôt apprétiez à leur valeur que dans d’autres » pp. 395-408

Un de mes amis fut le témoin oculaire de l’avanture que je vais raconter.

952. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 15, observations concernant la maniere dont les pieces dramatiques étoient représentées sur le théatre des anciens. De la passion que les grecs et les romains avoient pour le théatre, et de l’étude que les acteurs faisoient de leur art et des récompenses qui leur étoient données » pp. 248-264

Après avoir parlé du régime dont on usoit et des remedes dont on se servoit pour avoir la voix plus belle, il raconte que Neron après qu’il fut de retour de son voïage de Gréce, avoit tant d’attention à sa voix, qu’il faisoit beaucoup de remedes afin de la conserver, et que pour l’épargner il ne voulut plus, lorsqu’il faisoit une revûë des troupes, appeller, suivant l’usage des romains, chaque soldat par son nom.

/ 1898