/ 2579
1732. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les petites revues » pp. 48-62

Qui la fera tomber l’armure du silence ?

1733. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Conclusions » pp. 169-178

Elle ne s’est pas terminée que Samain nous quitte, suivi dans la tombe, à quelques jours d’intervalle, par Emmanuel Signoret.

1734. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIV. Rapports de Jésus avec les païens et les samaritains. »

Il les accusait d’enchérir sur la Loi, d’inventer des préceptes impossibles pour créer aux hommes des occasions de péché : « Aveugles, conducteurs d’aveugles, disait-il, prenez garde de tomber dans la fosse. » — « Race de vipères, ajoutait-il en secret, ils ne parlent que du bien, mais au dedans ils sont mauvais ; ils font mentir le proverbe : « La bouche ne verse que le trop-plein du cœur 645. » Il ne connaissait pas assez les gentils pour songer à fonder sur leur conversion quelque chose de solide.

1735. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre V. Des trois ordres de causes qui peuvent agir sur un auteur » pp. 69-75

Beyle, né à Grenoble, voulait qu’on mît sur sa tombe : Arrigo Beyle, Milanese.

1736. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre III. Soubrettes et bonnes à tout faire »

[René Maizeroy] Tomber des habiletés énervantes de Mendès aux maladresses de René Maizeroy : lourde chute, Des mains expertes et amusées d’une parfumée aimable on passe à la hâte grossière d’une fille qui, après trente ans d’exercice, ne sait même pas encore grimacer le sourire et feindre la joie.

1737. (1856) Cours familier de littérature. I « IIe entretien » pp. 81-97

Tout y tombe en ruines après une certaine durée de vie, et tout y ressort des ruines après une certaine durée de mort.

1738. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Madame Therbouche » pp. 250-254

Elle en tomba dans le désespoir, elle se trouva mal ; la fureur succéda à la défaillance ; elle poussa des cris ; elle s’arracha les cheveux, elle se roula par terre ; elle tenait un couteau, incertaine si elle s’en frapperait ou son tableau.

1739. (1767) Salon de 1767 « Sculpture — Pajou » pp. 325-330

Pigalle, jettez-moi à bas et ce squelette, et cet Hercule, tout beau qu’il est, et cette France qui intercède ; étendez le maréchal dans sa dernière demeure, et que je voie seulement ces deux grenadiers affilant leurs sabres contre la pierre de sa tombe ; cela est plus beau, plus simple, plus énergique et plus neuf que tout votre fatras moitié histoire, moitié allégorie.

1740. (1767) Salon de 1767 « Les deux académies » pp. 340-345

Moette, honteux de son élection, a été un mois entier sans entrer à la pension, et il a bien fait de laisser à la haine de ses camarades le temps de tomber.

1741. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 8, des plagiaires. En quoi ils different de ceux qui mettent leurs études à profit » pp. 78-92

Qu’ils évitent de tomber entre les mains du Barigel que le Boccalin établit sur le double mont.

1742. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « II »

Mais il déclare, et avec raison, qu’il y a de grands modèles dits classiques et qu’à force d’étudier leur pensée puissante et leur style génial, de se pénétrer de leur goût impeccable, on arrive à développer ses qualités personnelles, oui personnelles, et à se former à leur école, sans être contraint de tomber dans le bovarysme et la servilité, et sans renoncer à son originalité si l’on en a9. »‌ La question est ainsi fort bien posée.

1743. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le marquis de Grignan »

En parlant de l’ancien régime, il en a pris la grâce, cette grâce avec laquelle ce pauvre ancien régime, à qui il ne restait plus que cela, est tombé comme le gladiateur !

1744. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Rome et la Judée »

— je ne sais quelle grâce méprisante qui l’empêchera de tomber jamais dans les hautes niaiseries du pédantisme contemporain : « Cela est assez ignoble pour être historique », est un mot qui le révèle.

1745. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Bruyère » pp. 111-122

Deux ou trois sots, que le sort lui devait bien pour adversaires, et qu’il châtia, en passant, de sa noble plume, comme l’aigle secoue de sa grande aile les crottes tombées de l’escarbot sur la robe de Jupiter, constituèrent tous les malheurs de ce favori de la gloire, qui, avec deux volumes à peine, et mourant à quarante ans, honoré comme s’il ne le méritait pas, s’établissait, avec la sereine majesté d’un grand homme qui rentre dans sa demeure après sa journée, dans la plus solide et la plus tranquille immortalité.

1746. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Auguste Vitu » pp. 103-115

Ce sont toujours, plus ou moins, des portefeuilles qui tombent et qui, en tombant, s’éparpillent avec plus ou moins d’art ; car il y a un art encore pour s’éparpiller.

1747. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « De Cormenin (Timon) » pp. 179-190

À ne le voir que dans les deux volumes qui vous font tomber de si haut, on peut affirmer que son talent ne fut que l’occasion prise, en passant, aux cheveux, et secouée, et que, comme tous ces talents qui ne furent que l’attrapement de l’occasion et le secouement de la circonstance, au bout d’un certain temps on ne devait plus le reconnaître.

1748. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

Mais justement parce que c’était vrai, Ozanam n’avait pas besoin d’ajouter à ses preuves de la vie poétique du Moyen Âge cette grande individualité du Dante, solitaire et tombé du ciel comme tous les grands poètes, et qui sont, prenez-y garde !

1749. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « I. Saint Thomas d’Aquin »

Aussi sa gloire, sa gloire réelle, est bien moins de s’être élevé que de n’être jamais tombé.

1750. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Lefèvre-Deumier »

il avait plongé plus avant que cela dans ces sources âpres et cachées sur lesquelles la gloire ne fait pas même tomber le rayon qui dit la source au fond des bois.

1751. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Le Conte de l’Isle. Poëmes antiques. »

Quand Midi parut, cette pièce, dans laquelle le poète a sonné ses douze coups comme talent et de même que Midi, ne sonnera pas un coup de plus, on s’en allait, citant ses vers trop connus pour qu’on ait besoin de les citer tous : Midi, roi des Étés, épandu dans la plaine, Tombe en nappes d’argent des hauteurs du ciel bleu.

1752. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Gères. Le Roitelet, verselets. »

Son livre nous tombait donc, sans avertissement, comme une tuile.

1753. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Deltuf » pp. 203-214

Or cinq pensées, tombées de l’esprit d’un homme ou du sein d’une femme et nouées ensemble, c’est là un bouquet bien fragile, qui peut être vite écrasé et disparaître sous les mille pieds de l’animal aux têtes frivoles, comme dit La Fontaine.

1754. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Conclusion »

Tant qu’on n’a regardé la conquête du monde occidental par les idées égalitaires que comme la fortune surprenante d’une théorie de philosophes qui, tombée du ciel dans le cerveau de quelques penseurs, en serait descendue de proche en proche jusqu’à l’âme des foules, on a pu croire qu’il suffisait pour l’arrêter, d’une discussion philosophique : réfutons Rousseau et l’égalitarisme est vaincu.

1755. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXII. Des panégyriques latins de Théodose ; d’Ausone, panégyriste de Gratien. »

On trouve encore dans ce discours un morceau plein de force sur la lâcheté du tyran, qui, vaincu et sans ressource, n’avait pas eu, dit l’orateur, assez de courage pour ne pas tomber entre les mains du vainqueur.

1756. (1929) La société des grands esprits

Ne tombe-t-il pas dans un autre excès et, pour ainsi dire, dans un luxe de sobriété ? […] Il ne m’en est jamais tombé sous la main, et je ne connais à l’usage de la jeunesse que de courts « morceaux choisis ». […] Il tombe à chaque page dans des bévues et des naïvetés qui nous paraissent énormes. […] On tombe des nues en découvrant que M.  […] La raison, c’est notre seule boussole, notre seule ressource solide, les deux amis en tombaient d’accord.

1757. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

L’autre espèce de rime que M. de Banville affectionne, c’est celle qui tombe sur des prépositions, des pronoms relatifs ou des adjectifs possessifs. […] … Déjà tombent l’enthousiasme et la foi des premiers poèmes. […] Puis, les stances Sur la mort essayaient de concevoir la vie par-delà la tombe et, n’y parvenant pas, expiraient dans une sorte de résignation violente. […] Non à plaisir, mais à dessein, et le reproche tombe puisqu’il les a vaincues. […] On ne saurait ouvrir un de ces petits volumes sans tomber sur une paire de seins, quand encore il n’y a que cela.

1758. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

Il tombait d’accord avec moi sur la valeur et la durée probable de Pelham : mais pour lui, la question littéraire ne méritait pas dix minutes d’attention. […] Le roi, après avoir tué de sa main plusieurs impériaux, reçoit deux blessures, a son cheval tué sous lui, et tombe. […] Charles-Quint apprend que la duchesse d’Étampes agit auprès du roi contre lui ; pour la gagner, il laisse adroitement tomber un diamant magnifique qu’elle ramasse, et qu’il la prie de garder. […] Tout à l’heure il voyait Dieu luire dans la création, maintenant dans la beauté humaine il l’aperçoit tout entier, et il tombe à genoux comme foudroyé par son nouveau bonheur. […] À force de penser à Ellénore et de publier partout son admiration, Adolphe se convaincra, ou croira se convaincre de la réalité de son amour ; et Ellénore tombera dans le même piège.

1759. (1888) Portraits de maîtres

Depuis on l’a montrée dans sa pleine lumière, mais qui le premier a fait tomber le voile qui la cachait ? […] Allons chercher ce secret dans ses œuvres impérissables, et, s’il le faut, au pied de cette tombe que le vieillard épique s’est si bien choisie, tombe solennelle et mystérieuse qui a la mer pour compagne de solitude, pour sentinelle d’éternité. […] Notre siècle s’est découronné et, comme le chêne dont il est parlé dans les Châtiments, il a vu tomber une à une ses plus fortes branches. […] Les villes tombaient en ruines qu’il refusait encore de s’inquiéter. […] Il est temps que, selon l’expression de Michelet, de nouveau « la flamme morale tombe sur la foule ardente ».

1760. (1914) En lisant Molière. L’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Vous allez tomber sous une domination. […] Quand les Précieuses ont montré tout leur ridicule et les Turlupins le leur, la toile tombe. […] Elles n’indiquent et ne peuvent indiquer que dans quels défauts on peut tomber, quelles fautes on peut faire, mais non point du tout le moyen de faire bien. […] Et il est tombé très juste, plus que tel autre très grand. […] Un jour il tombe amoureux et l’amour a raison, partiellement, de l’inhibition.

1761. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

Et le manifeste de la baronne tombait dans un monde, dans une politique, dans une société à qui il allait être interdit, pour quinze ans, de l’écouter. […] Sa foudre tombe, comme celle de Hugo, du parvis des dieux. […] Elle était tombée dans la Révolution. […] C’est le thème de l’ange tombé qui anime toute la pièce À Byron. […] L’âme se crée par le sacrifice, par l’effort qui remonte une pente, cette pente même selon laquelle elle est tombée.

1762. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxvie entretien. L’ami Fritz »

On n’a jamais eu besoin de lui dire : « Sûzel, il faut s’y prendre de telle manière. » C’est venu tout seul, et voilà ce que j’appelle une vraie femme de ménage… dans deux ou trois ans, bien entendu, car, maintenant, elle n’est pas encore assez forte pour les grands travaux ; mais ce sera une vraie femme de ménage ; elle a reçu le don du Seigneur ; elle fait ces choses avec plaisir. « Quand on est forcé de porter son chien à la chasse, disait le vieux garde Frœlig, cela va mal ; les vrais chiens de chasse y vont tout seuls, on n’a pas besoin de leur dire : Ça, c’est un moineau, ça une caille ou une perdrix ; ils ne tombent jamais en arrêt devant une motte de terre comme devant un lièvre. » Mopsel, lui, ne ferait pas la différence. […] Le lendemain, il n’y songeait plus, quand ses yeux tombèrent sur le vieux clavecin entre le buffet et la porte. […] Nous sommes tombés d’accord à trois cent cinquante florins. […] Au premier mot, Kobus tombe évanoui du seul contre-coup de ce renversement de sa pensée.

1763. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

Mazarin mort, le rideau qui cachait le roi tomba, et l’idéal rêvé par tout le monde apparut dans la personne d’un jeune prince qui, comparé aux autres hommes, était lui-même une sorte d’idéal. […] Et pourtant Boileau n’y est pas tombé. […] Si Bourdaloue, en faisant la revue de toutes les conditions, et des formes que le vice affecte dans chacune, s’arrêtait toujours devant la condition royale, par l’esprit de déférence et de respect que prescrit l’Évangile, il n’exemptait pas de la censure évangélique les désordres où le roi était tombé, et il prêcha contre l’adultère en présence de l’amant de Mme de Montespan254. […] Louis XIV eut à entendre de sévères paroles sur « ces victoires et ces conquêtes qui remplissent ici-bas la vanité des histoires, auxquelles on élève des monuments pompeux pour en éterniser le souvenir, et qui ne seront regardées, au jour du jugement, que comme des agitations stériles ou le fruit de l’orgueil et des passions humaines255. » Il se vit représenter les malheurs que ses fautes, avaient en grande partie suscités ; des batailles perdues lors même que la victoire paraissait assurée ; des villes imprenables tombées à la présence seule des ennemis ; un royaume, le plus florissant de l’Europe, frappé de tous les fléaux que Dieu peut verser sur les peuples dans sa colère ; « la cour remplie de deuil, et toute la race royale presque éteinte : malheurs singuliers que Dieu préparait à Louis XIV pour purifier les prospérités de son règne256. » Il eut à se reconnaître dans la peinture de ces guerres « où l’on voit les disciples de celui qui vient apporter la paix aux hommes, armés du fer et du feu les uns contre les autres ; les rois s’élever contre les rois, les peuples contre les peuples ; les mers, qui les séparent, les rejoindre pour s’entre-détruire ; chacun voulant usurper sur son voisin, et un misérable champ de bataille, qui suffit à peine pour la sépulture de ceux qui l’ont disputé, devenir le prix des ruisseaux de sang dont il demeure à jamais souillé257. » Massillon, devant ce roi plus que sexagénaire, parlait déjà le langage sévère de l’histoire.

1764. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

Jusqu’alors les catastrophes des empires avaient été rarement jusqu’au cœur des populations ; c’étaient des rois qui tombaient, des majestés qui s’évanouissaient, rien de plus. […] Est-ce autre chose en effet que ce contraste de tous les jours, que cette lutte de tous les instants entre deux principes opposés qui sont toujours en présence dans la vie, et qui se disputent l’homme depuis le berceau jusqu’à la tombe ? […] Philoctète tombe dans ses accès de souffrance ; un sang noir coule de sa plaie. […] Et ici, que la jeune littérature, déjà riche de tant d’hommes et de tant d’ouvrages, nous permette de lui indiquer une erreur où il nous semble qu’elle est tombée, erreur trop justifiée d’ailleurs par les incroyables aberrations de la vieille école.

1765. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Virgile et Constantin le Grand par M. J.-P. Rossignol. »

Ces races héroïques et musicales qui faisaient de si grandes choses, restaient sensibles jusqu’au plus fort de leurs passions publiques à la moindre note du poëte ou de l’orateur, et l’applaudissement soudain n’éclatait que là où la pensée tombait d’accord avec le nombre, là où l’oreille était satisfaite comme le cœur.

1766. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — I »

Accablé, tourmenté, poursuivi sans cesse par le besoin d’une solution, il tombe dans la mélancolie.

1767. (1874) Premiers lundis. Tome II « Des jugements sur notre littérature contemporaine à l’étranger. »

Indiana et Valentine tombent frappées du même coup que Lélia, laquelle est livrée net au bourreau.

1768. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — George Sand. Cosima. »

Il est vrai que, dès qu’elle y pense et qu’on l’en avertit, elle répare, elle tombe à genoux devant lui ; mais c’est trop après trop peu.

1769. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Réponse à M. Dubout. » pp. 305-316

Dubout, comme l’ont insinué quelques médisants, ait obéi à un autre sentiment qu’au zèle pur de la vérité ; pas un instant je n’ai cru qu’il cédait, dans sa poursuite grotesquement acharnée, à un dépit cuisant d’auteur tombé, à une rage de vanité déçue, à une démangeaison de réclame, à une humeur processive et hargneuse d’homme d’affaires et de chicanou provincial, ou encore au désir têtu de montrer aux habitants de sa petite ville, témoins de son retour humilié, que ces gens de Paris ne lui faisaient pas peur et qu’ils n’auraient pas avec lui le dernier mot. » Qu’auriez-vous à dire ?

1770. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Musset, Alfred de (1810-1857) »

Comme un homme, au milieu d’une fête, qui boit dans une coupe ciselée, debout, à la première place, parmi les applaudissements et les fanfares, les yeux riants, la joie au fond du cœur, échauffé et vivifié par le vin généreux qui descend dans sa poitrine et que subitement on voit pâlir ; il y avait du poison au fond de la coupe ; il tombe et râle ; ses pieds convulsifs battent les tapis de soie, et tous les convives effarés regardent.

1771. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Régnier, Henri de (1864-1936) »

Remy de Gourmont M. de Régnier est un poète mélancolique et somptueux : les deux mots qui éclatent le plus souvent dans ses vers sont les mois or et mort, et il est des poèmes où revient, jusqu’à faire peur, l’insistance de cette rime automnale et royale… M. de Régnier sait dire en vers tout ce qu’il veut, sa subtilité est infinie ; il note d’indéfinissables nuances de rêve, d’imperceptibles apparitions, de fugitifs décors ; une main nue qui s’appuie un peu crispée sur une table de marbre, un fruit qui oscille sous le vent et qui tombe, un étang abandonné, ces riens lui suffisent, et le poème surgit, parfait et pur.

1772. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VI. La commedia sostenuta » pp. 103-118

Verum, mais je tomberai dans la dérision de mes élèves et de tout le monde, à cause des aventures qui se sont abattues sur mon dos.

1773. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XV. La commedia dell’arte au temps de Molière et après lui (à partir de 1668) » pp. 293-309

De bonne heure, on tomba dans cette confusion.

1774. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « F.-A. Cazals » pp. 150-164

Il tomba foudroyé en pleine jeunesse, en pleine fougue de travail.

1775. (1890) L’avenir de la science « I »

Il y a un grand foyer central où la poésie, la science et la morale sont identiques, où savoir, admirer, aimer sont une même chose, où tombent toutes les oppositions, où la nature humaine retrouve dans l’identité de l’objet la haute harmonie de toutes ses facultés et ce grand acte d’adoration, qui résume la tendance de tout son être vers l’éternel infini.

1776. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre X. Prédictions du lac. »

Il y avait aussi un pauvre, nommé Lazare, qui était couché à sa porte, couvert d’ulcères, désireux de se rassasier des miettes qui tombaient de la table du riche.

1777. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVIII » pp. 305-318

Aimé Martin tombe dans des fautes du même genre sur d’autres personnages de la même pièce.

1778. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 151-168

La Satire, il est vrai, a toujours été le fléau de leurs absurdes prétentions : mais sur qui doit-elle tomber ?

1779. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Fontenelle, et le père Baltus. » pp. 2-16

Les oracles ont dû tomber avec le paganisme, les démons disparoître, & les impostures des prêtres rester à découvert.

1780. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — De la langue Françoise. » pp. 159-174

Le systême de M. de Montcrif est opposé à celui de Despréaux, qui n’avoit rien tant à cœur que de voir ériger en auteurs classiques nos meilleurs écrivains, & qui vouloit que l’académie Françoise travaillât en conséquence, & s’occupât à les épurer de toutes les fautes de langage, à leur donner force de loi, à les empêcher de vieillir & de tomber journellement.

1781. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence en général. » pp. 177-192

Car le sublime, qui tombe toujours sur la grandeur de l’idée, se soutient de lui-même, indépendamment de la diction, dans quelque langue que ce soit.

1782. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Quatrième faculté d’une Université. Faculté de théologie » pp. 511-518

Le prêtre est intolérant et cruel ; la hache qui mit en pièces Agag 102 n’est jamais tombée de ses mains.

1783. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 12, des siecles illustres et de la part que les causes morales ont au progrès des arts » pp. 128-144

Un habile homme peut se consoler d’un mépris qui tombe sur son art.

1784. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution d’Angleterre »

Toujours est-il que le coup d’œil jeté, dans ces biographies, sur ce tas d’hommes médiocres qui ont eu, pourtant, leur jour et leur heure, n’est jamais tombé de plus haut et avec un rayon plus calme.

1785. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Francis Wey » pp. 229-241

Je me permettrai d’en indiquer une petite, — un grain de poussière que d’une chiquenaude Francis Wey fera tomber.

1786. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « W.-H. Prescott » pp. 135-148

Incontestablement, l’Histoire de Philippe II ne pouvait pas être faite par un Américain qui n’a pas étudié le Catholicisme, et qui le regarde comme une mythologie tombée.

1787. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IV. Saisset »

aujourd’hui que cette philosophie court-vêtue, et en souliers plats, — et fort plats, — comme la Perrette, portant sur sa tête son pot au lait, dans la fable, — aujourd’hui que cette philosophie a une peur blême pour ce pot au lait qui va tomber peut-être, M. 

1788. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VI. Jules Simon »

Saisset, passé toute sa vie à citer des textes et à commenter des doctrines, tombées en désuétude et dans le mépris de l’histoire, si l’histoire n’était pas une pédante, quand elle est écrite par des professeurs !

1789. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIV. M. Auguste Martin »

Martin s’amuse à gratter avec son petit coutelet de moraliste, et à faire tomber d’entre les pierres d’un édifice qui, sans un reste de ce ciment, depuis longtemps ne tiendrait plus.

1790. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXV. Le Père Ventura »

Mais l’Évangile et la tradition ne lui fournissent pas ce qu’ils auraient fourni à saint Thomas d’Aquin, par exemple, si saint Thomas, tombé de son siècle dans le nôtre, nous avait donné une loi sur la famille chrétienne déchirée et l’ordre social ébranlé.

1791. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Armand Hayem »

il a écrit, sans que la plume lui tombe des mains : « L’homme suffit à l’homme.

1792. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Émile Augier, Louis Bouilhet, Reboul »

dont l’amant se fait gladiateur et se trouve en face d’un inceste quand il s’agit d’épouser la femme qu’il aime… Mais cette histoire, qui aurait pu être dramatique et touchante, surtout à l’heure où le christianisme, sortant comme une aurore des Catacombes, commençait de jeter, avec ses premiers rayons, dans les âmes, les troubles d’une vertu et d’une pudeur inconnus à cet effroyable monde romain qui finissait, cette histoire n’est pour Bouilhet qu’un prétexte : son vrai but, c’est de nous décrire le luxe inouï et les derniers excès d’une société dont les vices sont restés l’idéal du crime, et qui tombe, ivre-morte du sang dont elle a nourri ses murènes, sous la table de Lucullus.

1793. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Banville. Les Odes funambulesques. »

Des concetti de l’Italie de la Renaissance, elle est tombée sous une plume éperdue et perdue de souplesse, dans l’abjection de la farce grossière, des quolibets et des calembourgs du xixe  siècle..

1794. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Charles Didier » pp. 215-226

C’est du détritus littéraire tel qu’il en tombe depuis trente ans de cette littérature qui s’écaille comme un vieux tableau, et dont il ne restera pas dans vingt ans un atome que le vent ait la peine d’enlever.

1795. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Duranty » pp. 228-238

IV L’auteur, je le crois, hors son livre, a beaucoup d’avenir, mais, qu’il me permette de lui dire, et qu’il ne l’oublie pas, c’est à la condition expresse de se dépêtrer le plus tôt possible de ce réalisme qui l’étreint et colle à sa pensée, comme la fange étreint dans ses plis mollement tenaces l’homme qui y est tombé.

1796. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXV. Des éloges des gens de lettres et des savants. De quelques auteurs du seizième siècle qui en ont écrit parmi nous. »

Nous avons vu les panégyristes le plus souvent au pied des trônes, dans les cabinets des ministres, sur les champs de bataille des conquérants, sur la tombe de tous les hommes puissants, vertueux ou coupables, utiles ou inutiles à la patrie.

1797. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Je suis même persuadé que la Chartreuse serait sinon tombée dans l’oubli, du moins qu’elle resterait dans une demi-obscurité, n’était son frère aîné. […] Il le confesse dans ses Poisons : « Chaque critique a son gibier favori, sur lequel il tombe, et qu’il dépèce de préférence ; pour moi, c’est Balzac. » Oui, ils se haïssaient, et cependant la raison de leur actualité présente est la même. […] Mais ces souvenirs intimes sont trop amers à évoquer devant une tombe si soudainement ouverte. […] « J’ai été recevoir Notre-Seigneur sur la tombe de mon mari. […] Je voudrais penser aussi que ceux, sous les yeux de qui tombera cette page trop sommaire, les reliront, ces poèmes, et ils sentiront, ce que j’ai senti si vivement en les reprenant moi-même, quel bon serviteur les Lettres françaises viennent de perdre.

1798. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Madame de Verdelin  »

Dans un coin reculé de l’empire, en Judée, un doux et puissant prédicateur évangélisa : Marie-Madeleine tomba à ses pieds et les arrosa de parfums, ou tout au moins elle lui voua son cœur. […] Elle ne pouvait s’empêcher de prendre Rousseau pour confident de sa peine secrète : « Imaginez, mon bon voisin, que votre très aimable lettre est tombée entre les mains d’une créature qui n’existait plus ; peignez-vous l’état d’une âme touchée au-delà de toute expression, qui depuis sept ans ne vit, ne respire que pour un être qui était prêt à la sacrifier au fanatisme d’un dévot. […] Elle ne pouvait nous être connue que par Rousseau ; un rayon de sa gloire est tombé sur elle : le rayon se retirant, elle est rentrée dans l’ombre et l’on perd sa trace79.

1799. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (1re partie) » pp. 397-476

C’est un édifice obscur ou à demi-jour dans lequel l’architecte n’a percé que cinq fenêtres, mais où la lumière entrera à torrents quand les murailles tomberont sous la main divine de la mort. […] David, qui vient de mourir, génie plus romain que grec, n’a pas emporté son marteau ; de jeunes émules rêvent le beau moderne sur sa tombe, et le rêve dans l’art précède toujours le réveil. […] L’attention a fait tomber de sa main et rouler à terre le tambourin entouré de grelots sur lequel elle venait de frotter du doigt la tarentelle de son île.

1800. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

Les orateurs savent combien importe le choix des mots sonores, l’arrangement des périodes qui tombent avec grâce et solennité. […] On tombait dans l’incompréhensible et le chaotique. […] Charles VI tombe en démence et avec ce fou couronné reparaissent les désastres de la guerre étrangère et les horreurs de la guerre civile.

1801. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IX »

Et encore le conflit qui en naît entraîne-t-il la mort immédiate d’un des deux frères, qui tombe assassiné par l’autre, tandis que ce dernier, dans sa crainte de se voir voler l’or, est forcé de se transformer lui-même en dragon, et qu’il meurt ainsi plus tard de la main de Siegfried. — Je ferai aussi remarquer comment, dans le second acte de la Mort de Siegfried, toutes les Walküres venaient plaindre Brünnhilde et lui parler de leurs exploits, tandis que maintenant c’est Waltraute seule qui vient lui parler de Wotan, lui décrire la détresse du Dieu, et la supplier de rendre l’anneau maudit au Rhin, ce que Brünnhilde refuse de faire : « Que plutôt toute la magnificence de Walhall tombe en ruines !  […] Tous les artistes et tous ceux qui aiment l’art devraient se liguer — quelles que soient leurs opinions — pour contrarier ces néfastes projets de Théâtres-Wagner, soit à Paris, soit ailleurs, qui reparaissent à chaque moment, et qui sont l’œuvre, soit de commerçants spéculateurs, soit d’hommes animés des meilleures intentions et qui ne semblent point soupçonner quel ton la réalisation de leurs projets ferait à l’art. — L’œuvre vraiment wagnérienne, ce n’est point de faire des importations de musique allemande en France, c’est de faire au contraire en France ce que Wagner a tenté en Allemagne : c’est ce secouer les esprits plongés dans la torpeur, c’est de redresser l’idéal de l’art aujourd’hui tombé si bas, c’est de créer le drame parfait (poésie, musique, gestes) tel qu’il convient au génie du peuple français.

1802. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre premier. Causes physiologiques et psychologiques du plaisir et de la douleur »

alors la cloche des morts peut sonner ; que le cadran s’arrête, que l’aiguille tombe et que le temps soit accompli pour moi. » L’activité ne change que pour se maintenir, pour s’adapter progressivement à un milieu qui change lui-même, pour accroître enfin ses conquêtes sans perdre ses acquisitions. […] Ce dernier, corrigeant en partie Schopenhauer, reconnaît qu’il y a des plaisirs directement sentis, non subordonnés à la suppression de la peine ; mais, par une étrange contradiction, et pour nous démontrer en dépit de tout notre misère, il soutient que la douleur tombe seule directement sous la conscience, tandis que le plaisir n’y peut tomber qu’indirectement : le plaisir est donc directement senti d’une manière inconsciente, mais il n’est qu’indirectement conscient.

1803. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Ces fleurs innombrables répandaient leurs teintes lactées et rosées sur toute la campagne ; elles tombaient des branches à chaque légère bouffée du vent tiède de la mer ; elles semaient d’un véritable tapis de couleurs riantes l’intervalle d’un arbre à l’autre ; elles remplissaient l’air soulevé par la brise d’une nuée de papillons inanimés qui venaient tomber jusque sous les roues sur le chemin. […] J’aime à lui rendre ce tribut de reconnaissance sur sa tombe ; il y est descendu tard ; il s’y repose d’une vie honorable et laborieuse dans un champ des morts de Paris.

1804. (1926) L’esprit contre la raison

Le culte des apparences, les préoccupations techniques certes étaient moins angoissantes et nous savons très bien comment, à l’exemple de tel ou tel animal qui peut tomber en sommeil s’il regarde longtemps un point fixe, les réalistes d’une part et, à leur suite, les esthètesac qui n’avaient d’yeux que pour les attitudes, d’oreilles que pour les mots, d’attention que pour les objets, ne se dédiaient ainsi à tout cet attirail que par un confus mais réel désir de somnolence. […] Le rideau du sommeil tombé sur l’ennui du vieux monde soudain se relève pour des surprises d’astres et de sable. […] Ce n’est donc pas sans humour que Crevel fait tomber celui qui fut M. 

1805. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

En d’autres termes, nos perceptions, sensations, émotions et idées se présentent sous un double aspect : l’un net, précis, mais impersonnel ; l’autre confus, infiniment mobile, et inexprimable, parce que le langage ne saurait le saisir sans en fixer la mobilité, ni l’adapter à sa forme banale sans le faire tomber dans le domaine commun. […] Mais lorsque nous nous figurons que les éléments dissociés sont précisément ceux qui entraient dans la contexture de l’idée concrète, lorsque, substituant à la pénétration des termes réels la juxtaposition de leurs symboles, nous prétendons reconstituer de la durée avec de l’espace, nous tombons inévitablement dans les erreurs de l’associationnisme. […] Même, une psychologie superficielle pourra se contenter de la décrire sans tomber pour cela dans l’erreur, à condition toutefois de se restreindre à l’étude des faits une fois produits, et d’en négliger le mode de formation. — Mais si, passant de la statique à la dynamique, cette psychologie prétend raisonner sur les faits s’accomplissant comme elle a raisonné sur les faits accomplis, si elle nous présente le moi concret et vivant comme une association de termes qui, distincts les uns des autres, se juxtaposent dans un milieu homogène, elle verra se dresser devant elle d’insurmontables difficultés.

1806. (1903) La renaissance classique pp. -

Ce qu’il daigne uniquement apercevoir, c’est ce qui tombe en poussière, ce qui est étiqueté et conservé sous une vitrine : c’est le cadavre de la jeune princesse allemande que l’on voit à Saint-Thomas de Strasbourg, petit monstre grimaçant sous les soies de ses atours brûlées par les poisons corrosifs des aromates funéraires ; c’est le roide squelette de cette Thaïs arrachée aux sépultures d’Antinoë, qui montre les trous béants de ses orbites sous les boucles de sa chevelure encore vivace et qui mêle l’épouvantable misère de son corps décomposé à l’éclat de ses joyaux, plus durables qu’elle. […] Bien plus, elle est maintenant, comme toujours, l’avant-courrière de la science positive, elle est l’éternelle Divinatrice, celle qui détache … les morceaux noirs qui tombent Du grand fronton de l’Inconnu. […] Nous en croirons le témoignage de nos yeux et nous jugerons à la façon du peuple, dont l’instinct reconnaît sans hésiter « les êtres de race », — exemplaires uniques d’une perfection relative, devant lesquels tous les autres tombent au niveau d’ébauches grossières ou manquées.

1807. (1902) Le critique mort jeune

La tombe rendait la vie. […] On pense bien que Jean Monneron ne s’est pas libéré de l’illuminisme révolutionnaire pour tomber dans un bas mysticisme chrétien. […] Un archéologue de profession qui, devenu romancier, ne tombe pas plus que M.  […] Monsieur Jammes, Monsieur Jammes, tomberiez-vous dans l’intellectualisme ? […] Celle-ci est tombée dans un traquenard légal : une soi-disant réconciliation au berceau de leur enfant blessée et que Le Hagre oppose avec perfidie.

1808. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Quand il tomba, cette gloire continua cette besogne de purification, et elle seule, d’abord. […] Quand il tomba, la Démocratie était passée à l’état de religion. […] La destinée a fait tomber la plume des mains du romancier : le récit commencé en chef-d’œuvre s’arrête brusquement. […] S’il y tombe, ce sera la moralité de son malheur. […] C’est alors que le sous-lieutenant, debout sur le parapet, tombe frappé d’une balle à la tête.

1809. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

Il a un triangle dans le cerveau, et y applique tout ce qui tombe en sa pensée. […] Faites tomber les restes de juridictions seigneuriale et ecclésiastique, et vous avez l’indépendance judiciaire, c’est-à-dire la liberté de n’obéir qu’à la loi, c’est-à-dire la liberté. […] — Cela est vrai, parce qu’il serait immoral et désolant que cela fût faux : « Dans quel découragement l’esprit ne tomberait-il point s’il cessait d’espérer que chaque jour ajoute à la masse des lumières ? […] Et il n’en est pas moins vrai que le Génie est, sinon la charte, du moins le manifeste insurrectionnel de toute la littérature moderne, parce qu’il a montré et la futilité où la littérature classique déclinante était tombée, et certaines erreurs dont la littérature classique triomphante, depuis Boileau et depuis Ronsard, avait toujours gardé la trace. […] Si, vraiment, il a une âme, mais une âme peu profonde, terre légère où ne se nouent point les fortes racines ; et comme sa volonté est toute eu velléités violentes, sa sensibilité est toute en exaltations soudaines qui tombent vite, feux de paille qui ont l’air d’éclairs.

1810. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Les morceaux en sont demeurés bons, si l’édifice est tombé par terre ; et, après tout, de combien de systèmes n’en pourrait-on pas dire autant ? […] Mais aimez-vous encore beaucoup ces vers, et pourriez-vous me les expliquer : Quand notre âme, en rêvant, descend dans nos entrailles, Comptant dans notre cœur, qu’enfin la glace atteint, ……………………………………………………… Chaque douleur tombée et chaque songe éteint ? […] Ce serait là-bas, dans sa tombe, lui prêter vraiment trop à rire ; et seul au monde, je crois, ce vieux paradoxe ambulant de Barbey d’Aurevilly s’est avisé de voir dans les Fleurs du mal une manifestation de « la justice de Dieu » ! […] C’est toujours Midi qu’on en cite pour preuve : Midi, roi des étés, épandu sur la plaine Tombe en nappes d’argent des hauteurs du ciel bleu ; et j’ose au moins les rappeler à mon tour, maintenant que le poète est mort. […] Aussi, toute une partie de son livre, qui ne repose en quelque sorte que sur une métaphore, tombe-t-elle aussitôt qu’ayant éprouvé le titre de la métaphore, on l’a trouvé douteux.

1811. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

Dès l’abord, avouons-le, si, au sortir de la lecture de l’Illustration, nous ouvrons le petit volume de Poésies qu’il se hâta de publier dans le même temps, nous tombons de haut. […] Son titre principal est l’Illustration, dans laquelle il a souvent devancé et anticipé la théorie d’André Chénier, cet autre précurseur ardent, tombé également avant l’âge.

1812. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (3e partie) » pp. 5-56

À l’exception des arts barbares de la guerre qu’un excès de philosophie fait tomber en mépris et en désuétude chez ses disciples, voyez la population : cette contre-épreuve de la bonne administration : quatre cents millions d’hommes traversant en ordre et en unité vingt-cinq siècles ; jamais l’esprit législatif a-t-il créé et régi une telle masse humaine en une seule nation ? […] Car il croit que Dieu n’a pas borné à ces phénomènes d’agglomération, de révolution, de progrès matériel, de décadence, de dissolution et de disparition, les destinées de cette noble catégorie d’êtres appelés hommes ; que ces êtres ne sont pas bornés dans tous leurs développements par la tombe ; mais que le vrai contrat social, celui dont l’âme de l’humanité est l’élément, celui dont la vertu est le mobile, celui dont le devoir est la législation, celui dont Dieu lui-même est le souverain, le spectateur et la récompense, que ce contrat social, interrompu ici à chaque génération par la mort, ne se résilie pas dans la poussière de ce globe.

1813. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Vous devez comprendre vous-même que l’envie ne vous a pas vu avec indifférence parvenir si jeune à une si éminente dignité, et ceux qui n’ont pu réussir à vous exclure de cet honneur feront jouer toutes sortes d’intrigues pour le flétrir entre vos mains, en vous faisant perdre l’estime publique, et tâchant de vous entraîner dans le gouffre de turpitudes où ils sont eux-mêmes tombés ; et sur ce point la considération de votre jeunesse redouble leur confiance. […] La dignité de cardinal n’offre pas moins de tranquillité que de grandeur, d’où il arrive que l’on se livre à une sorte de négligence ; on croit avoir tout fait quand on s’est élevé à ce poste éminent et que l’on n’a plus rien à faire pour s’y maintenir, opinion aussi funeste à la vertu qu’à la véritable grandeur, et dont vous devez avoir grand soin de vous garantir ; sur ce point, il vaut mieux pécher par trop de défiance que de tomber dans l’excès contraire.

1814. (1824) Observations sur la tragédie romantique pp. 5-40

Il faudra donc que Jeanne d’Arc soit brûlée après que les Anglais l’auront prise, que l’amiral Coligny tombe sous le fer des assassins, quand Médicis et les Guise l’auront ordonné : le poète a pu disposer de presque tous les faits antérieurs. […] Il est à la vérité tombé sous un fer ennemi ; mais que sais-je ?

1815. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre IV. Racine »

Il faut joindre ces livrets aux œuvres de Quinault, si l’on veut comprendre sur quel public tombèrent les furieux amants de la tragédie racinienne. […] Elle figure un pouvoir qui tombe, contre qui toutes les circonstances fortuites tournent fatalement, et qui n’a plus vraiment la force de se soutenir : il donne quelques secousses, violentes et inutiles, qui l’épuisent, et il est incapable d’une résistance ferme.

1816. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre II : Examen critique des méditations chrétiennes de M. Guizot »

Si nous n’avons pas d’autorité, vous n’en avez pas davantage, et vous tombez dans une contradiction qui au moins nous fait défaut : c’est qu’il y a un livre sacré et divin, auquel vous devez vous soumettre, et ce livre, c’est vous qui le jugez. […] » Et Platon : « Avoue donc que les dieux connaissent, voient, entendent tout, et que rien de ce qui tombe sous les sens et l’intelligence ne peut leur échapper. » La providence n’est donc pas un dogme exclusivement chrétien, ni même exclusivement religieux ; c’est en même temps une doctrine philosophique.

1817. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre III. Le théâtre est l’Église du diable » pp. 113-135

te voilà assis bêtement à ta table, calme et froid comme un faiseur d’anatomie et tout prêt à disséquer je ne sais quoi qui va tomber sous ta main, et voici une bonne heure que je t’étudie, et rien n’est changé dans ton allure quotidienne ! […] L’enfant joua peu à peu tous les petits rôles de Molière ; peu à peu l’esprit lui vint, puis sa main blanchit, puis son coude et le bras se remplit, puis la jambe ; un jour le voile tomba de cette voix éclatante, sonore, et touchante.

1818. (1809) Quelques réflexions sur la tragédie de Wallstein et sur le théâtre allemand

Le nœud se forme, les caractères se développent, la dernière scène du cinquième acte arrive, et la toile tombe. […] Mais j’ai senti bientôt que je tomberais dans une invraisemblance qu’aucun détail ne rendrait excusable.

1819. (1913) La Fontaine « VII. Ses fables. »

Elle tombe dans tous les panneaux avec sa gentillesse et sa coquetterie et sa légèreté incurables. […] La solidarité est représentée, par exemple, par la colombe qui, pour sauver une fourmi, jette un brin d’herbe dans le ruisseau où la fourmi est tombée par mégarde, service que lui rend immédiatement la fourmi en piquant au talon un croquant qui voulait abattre la colombe d’un coup d’arbalète ; il se retourne et la colombe a le temps de s’enfuir.

1820. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

Génies bilatéraux, groupe indivisible, faces d’un même fait, œuvres inséparables que les années qui tombent entre elles ne peuvent séparer. […] L’article de journal, c’est le lingot tombé en menue monnaie ; c’est la pièce de dix sous littéraire.

1821. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

Elle tomberait d’elle-même en dissolution, à moins que le feu du ciel ne se chargeât d’en faire bonne et prompte justice. […] On s’ingénie à recueillir, non seulement les vulgarités, mais les indécences qui peuvent tomber des bouches déchues et dégradées.

1822. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite et fin.) »

Mais il y eut quelque chose de plus efficace et de plus puissant à produire cette révolution, que toutes les intrigues particulières ; ce fut, à un moment donné, le concert universel et la conspiration véritable de tous, le mépris profond dans lequel était tombé Pierre III, l’intérêt qu’inspirait Catherine, et la faveur populaire qui n’avait cessé de la suivre pendant des années jusque dans sa disgrâce.

1823. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Mémoires du comte d’Alton-Shée »

C’était la première fois depuis huit ans que je lui voyais ainsi tomber la plume des mains !

1824. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « BRIZEUX et AUGUSTE BARBIER, Marie. — Iambes. » pp. 222-234

On ne saurait dire tout ce qu’il y a d’ingénieux et de combiné dans la plus tendre simplicité de l’un, dans la plus rapide indignation de l’autre ; quelle part d’étude antique détournée à l’innovation actuelle ; quels sucs nombreux et mélangés dans ces fruits tombés d’hier et de si franche saveur.

1825. (1874) Premiers lundis. Tome I « Espoir et vœu du mouvement littéraire et poétique après la Révolution de 1830. »

Au xviiie  siècle, l’art était tombé, comme on sait, dans une fâcheuse décadence, ou plutôt l’art n’existait plus en soi et d’une vie indépendante ; il n’avait plus de personnalité.

1826. (1874) Premiers lundis. Tome II « Alexis de Tocqueville. De la démocratie en Amérique. »

Et il énumère tous les pouvoirs qui sont tombés, les grandes existences individuelles désormais impossibles, la perte des croyances, qui, chez le grand nombre, a devancé l’acquisition des lumières ; il montre la démocratie grandissant, et, à chaque combat décisif, renversant tout ce qui est sur son chemin, mais sans direction jusqu’ici, sans conscience d’un but à atteindre, et de plus en plus pareille à un enfant robuste et sauvage.

1827. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre IV. Unité et mouvement »

On a beau savoir à fond la chose, et où elle se termine : on ne trouve pas l’idée et la phrase de la fin, celles qui doivent achever l’impression et conclure le discours ; on reprend son propos, on revient sur ses pas, on change un peu sa direction, sans pouvoir tomber juste au but.

1828. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

L’enfant tombe malade.

1829. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXI. Le littérateur chez les peintres » pp. 269-282

Supprimer les Salons, les négliger, les faire tomber en désuétude, c’est mettre les peintres dans la triste position sociale des musiciens. « Se faire connaître », on sait, pour un musicien, c’est exactement impossible, sauf fortune ou bonne fortune.

1830. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre IX. L’antinomie politique » pp. 193-207

« Les auteurs des deux Déclarations des droits de l’homme sont tombés dans une étrange confusion et une étrange contradiction.

1831. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVI. Miracles. »

Aussi l’exorciste et le thaumaturge sont tombés ; mais le réformateur religieux vivra éternellement.

1832. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIX. Progression croissante d’enthousiasme et d’exaltation. »

On a deux passereaux pour une obole, et cependant un de ces oiseaux ne tombe pas sans la permission de votre Père.

1833. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 326-344

Par-là il tombe dans l'écueil que Quintilien recommande si fort d'éviter.

1834. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — II. La versification, et la rime. » pp. 257-274

Le mauvais poëte, celui qui veut porter un poids au-dessus de ses forces, tombe seul dans cet inconvénient.

1835. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VIII. Mme Edgar Quinet »

Auriez-vous jamais cru que Paris bombardé, fumant, dévasté, aurait abrité, pendant son effroyable siège, une palombe de ce roucoulement éternel, une femme que l’amour pour son mari rend tour à tour soucieuse de son action, de sa gloire, de son portrait, de ses intérêts littéraires, de ses intérêts même de boutique, quand la patrie tombe par morceaux !

1836. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIII. Henry Gréville »

A-t-elle entassé lentement dans sa tête l’avalanche de livres que voilà lâchée et dont les premiers tombent sur nous avec une grêlante rapidité ?

1837. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « César Daly »

Il n’y a entre nous que cette dentelle, — l’épaisseur d’un monde tombé !

1838. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Prévost-Paradol » pp. 155-167

Mais, dans le cours de ces articles sur tant· de sujets, je n’ai pas senti une seule fois l’accent ému, sincère et mâle d’un homme… L’auteur, qui ne pense qu’à une chose, — à rendre au temps présent le désagrément qu’il en reçoit, — tombe sur nous tous tant que nous sommes à coups de moralistes et de moralités.

1839. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Taine » pp. 231-243

Nous les connaissions… Mais, puisqu’il n’est plus le moqueur des Philosophes français et qu’il s’est fait compréhensif et grave, croyant à la philosophie dont il a commencé par douter, quand nous donnera-t-il un système qui ne soit pas la poussière du système des autres, tombée (sic) sur ses ailes… hélas !

1840. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Gustave III »

Je viens de lire son Gustave III avec toute l’attention que mérite un livre d’histoire, et particulièrement un livre d’histoire sur un homme qui, jusqu’ici, n’a pas été jugé, et sur lequel nulle plume, de celles-là qui fixent la lumière et clarifient la renommée, n’a fait tomber ce jour terrible qui reste une immortalité.

1841. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Maintenon » pp. 27-40

La haine et la jalousie des âmes basses que souleva l’immense Fortune qui s’abattit sur elle, comme un aigle, et qui l’enleva dans ses serres d’or à toutes les misères de la vie ; cette haine et cette jalousie semblent, après plus d’un siècle, fouler sa tombe et charger sa mémoire.

1842. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Du Deffand »

Ce fut le bon sens et sa charmante fille, la plaisanterie, qui l’empêcha de tomber là-dedans, puisque ce ne furent point la religion et ses bons anges… Eh bien, cela suffirait, je ne dis pas à la gloire, mais à l’excuse de sa vie !

1843. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Collé »

Une ou deux fois il la souffla, cette mousse, et la fit tomber de son verre, et j’ai dit alors quel vin est resté.

1844. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Sophie Arnould »

II Jamais chute plus profonde après une montée plus rapide… Une autre coquine de ces temps de coquines heureuses qui ont cependant fini par tomber, la Dubarry, eut l’honneur d’être guillotinée avec le même couperet que Marie Antoinette, mais la fin, dans la destinée de Sophie Arnould, rien n’en a diminué ou n’en a relevé la bassesse.

1845. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVI. Médecine Tessier »

L’immutabilité des maladies s’explique par les prédispositions morbides ; les prédispositions morbides, par une hérédité qui, elle-même, confine à un état antérieur dont l’homme n’est sorti qu’en se laissant criminellement tomber.

1846. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXII. L’Internelle Consolacion »

Pourvu que nous ne tombions pas dans le système rasé de bien près par les éditeurs, à la page 14 de leur Introduction, dans cette immense bourde allemande qui a décapité Homère et qui répugne à la constitution même de l’esprit humain, que nous importe de savoir si l’Imitation s’appelait A Kempis ou de toute autre réunion de syllabes.

1847. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Caro. Le Pessimisme au XIXe siècle » pp. 297-311

En quelques coups de vent, ces amoncellements disparaissent ; en quelques années, ces systèmes… Demandez-vous quelle grande place tiennent, maintenant, dans le respect intellectuel des hommes, tous ces capucins de cartes philosophiques tombés les uns sur les autres : Kant, Fichte, Schelling, Hégel, qui étaient pourtant, comme on dit au whist, les honneurs du jeu.

1848. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Léon Aubineau. La Vie du bienheureux mendiant et pèlerin Benoît-Joseph Labre » pp. 361-375

Rien d’étonnant à ce que les partisans de la philosophie du Mondain tombent à bras raccourci sur les guenilles du pauvre Benoît Labre, ce mendiant qui ne soupait pas ou qui ne voulait pas souper, comme cet autre mendiant de Voltaire, chez les Pompadour de son temps.

1849. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « A. Dumas. La Question du Divorce » pp. 377-390

… Sans comparaison le premier dans l’art difficile et épuisé, du théâtre, tombé jusqu’à n’être plus qu’un spectacle, mais adoré toujours à une époque d’un histrionisme exaspéré, M. 

1850. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Mgr Rudesindo Salvado »

On se rappelle le bruit que fit naguères cette première gloire littéraire de l’Amérique, qui éclata tout à coup comme un aloès qui fleurit et dont la fleur est déjà tombée… Des philanthropes, Narcisses humanitaires qui trouvaient l’humanité jolie en se regardant, prirent sur le poing et présentèrent à l’Europe attendrie cette Mistress Edgeworth américaine, et placèrent son livre sous la protection d’une telle émeute de sensibilité insurgée, que si la critique littéraire avait osé planter son scalpel dans cette œuvre esthétiquement médiocre, les Wilberforce du journalisme auraient crié au scandale, comme si on eût voulu toucher littérairement à l’Imitation de Jésus-Christ.

1851. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Docteur Favrot »

La mort comme nous la connaissons qu’est-elle vraiment, quelle qu’en soit l’agonie, en comparaison de cette torture ignorée, qui peut être la nôtre, à chacun de nous, de la vie reprise tout à coup au fond d’une tombe fermée dont on sent sur soi le poids affreux, autour de soi les ténèbres affreuses et le froid affreux ?

1852. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Gérard Du Boulan »

Et voilà comment les sottises des hommes de talent ne tombent jamais par terre et peuvent toujours germer dans les têtes qui viennent après eux !

1853. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. J. Autran. Laboureurs et Soldats, — Milianah. »

sur celui de Molière qu’il énerve, affadit et disloque, tombe de dix degrés dans cette trivialité supportable et de ressemblance, à la scène, dans la bouche d’une servante comme Dorine ou d’un vieux bourgeois comme Gorgibus, mais devient dans un poème où le poète parle toujours, d’une incomparable platitude.

1854. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Ferdinand Fabre »

C’est là qu’une lutte s’est engagée, sur des questions d’administration cléricale, entre l’évêque de Roquebrun, vieillard apostolique et homme de grande race, et l’abbé Ruffin Capdepont, le supérieur du séminaire, dit « Tigrane » dès l’école, sauvage paysan de la montagne n’ayant, lui, pas plus de race que les aérolithes qui à certains jours tombent du ciel.

1855. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « L’Abbé *** »

Ce sont les idées qui, depuis trente ans, grouillent dans les bas-fonds d’un monde tombé, et qui étaient déjà jugées et déshonorées alors que des plumes plus puissantes que celles de l’auteur ou des auteurs du Maudit les remuaient.

1856. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVII. Des panégyriques ou éloges adressés à Louis XIII, au cardinal de Richelieu, et au cardinal Mazarin. »

Ils conviennent enfin que peut-être dans de vastes empires, tels que la Chine et la Russie, où, entre la capitale et les provinces, il y a quelquefois douze cents lieues de distance, la réaction du centre aux extrémités doit être souvent arrêtée dans sa course ; qu’ainsi il pourrait être utile d’y rassembler dans une cour tous les grands comme des otages de l’obéissance publique et de la leur : mais ils demandent s’il en est de même dans les petits États de l’Europe, où le maître est toujours sous l’œil de la nation, et la nation sous l’œil du maître, et où l’autorité inévitable et prompte peut à chaque instant tomber sur le coupable.

1857. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXI. Des oraisons funèbres de Bourdaloue, de La Rue et de Massillon. »

Enfin, c’est peut-être de tous les orateurs celui qui a le plus approché de la marche de Bossuet ; mais il est loin de son élévation, comme de ses inégalités : il n’est pas donné à tout le monde de tomber de si haut.

1858. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XII. »

Après quelques années d’une soumission assez douce et d’un loisir encore illustré par les arts, sous la domination de Démétrius de Phalère, ce Périclès dégénéré comme le peuple qu’il gouvernait, Athènes, en se croyant délivrée, tomba dans les dernières bassesses de la servitude.

1859. (1890) Le massacre des amazones pp. 2-265

Un peu effrayé de la « grêlante rapidité » avec laquelle les premiers livres de Mme Gréville tombaient sur les lecteurs, tout en signalant « la fadeur et la fadaise » des sujets, il se laissait entraîner pourtant à des louanges. […] A son petit dernier tombé entre les mains de l’ennemi, on offre, avec le trône de Judée, la princesse dont il est amoureux et aimé. […] Sur sa tombe pousse presque chaque mois un champignon sans saveur que les éditeurs vantent dans les échos des journaux et que Drumont admire parce qu’il espère en empoisonner Israël. […] Je suis mal tombé. […] Le soir tombe et j’ai fini ma journée.

1860. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Ensuite il tombe sérieusement malade. […] Aussitôt les lardons tombèrent sur moi. […] Je tombai bientôt dans les plus cruels accidents. […] Julie tombe malade, rappelle secrètement Saint-Preux, et « elle perd son innocence ». […] Et, Julie tombée, il recommençait à parler de vertu, et elle aussi

1861. (1892) Essais sur la littérature contemporaine

En voici un second : c’est qu’il y a des degrés entre Campistron et Voltaire ; c’est qu’il y en a d’autres entre Zaïre et Bajazet ; c’est qu’il y en a partout, et qu’il n’est personne qui n’en tombe d’accord. […] Marcel Prévost, dans un prochain roman, n’aura qu’à ne pas tomber au-dessous de lui-même. Dût-il y tomber, qu’est-ce que cela ferait à la vérité des idées qu’il exprime ? […] Auguste Vacquerie, Jalousie, tombé sans fracas au Gymnase, dix ou douze jours auparavant. […] Mais la toile est tombée sans que personne pût discerner où l’auteur voulait en venir, et nous cherchons encore ce qu’il a prétendu faire en écrivant Grand-Mère.

1862. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Les meilleurs n’échappent pas à cette condition. « J’ai une espèce de confusion, écrit Boileau à M. le Verrier, d’avoir employé quelques heures à faire des vers d’amourette, et d’être tombé moi-même dans le ridicule dont j’accuse les autres. » Voilà donc un homme qui se connaît, et un poète qui n’est que cet homme-là se faisant voir dans ses vers106 ! […] Telles sont les doctrines de l’Art poétique, ce code si vainement attaqué depuis deux siècles, qu’aucun changement de goût n’a pu faire abroger, et dont quelques prescriptions à peine sont tombées en désuétude : encore y aurait-il du péril à les indiquer. […] Ils adoraient les ouvrages des anciens, ne refusaient point à ceux des modernes les louanges qui leur sont dues, parlaient des leurs avec modestie, et se donnaient des avis sincères, lorsque quelqu’un d’eux tombait dans la maladie du siècle, et faisait un livre, ce qui arrivait rarement. » Ces quatre amis ne sont autres que Molière, qui y est désigné sous le nom de Gélaste (γελαστός, plaisant) ; Boileau (Ariste) qui était sérieux sans être incommode ; Racine (Acante), et La Fontaine (Polyphile), dont « on pouvait dire qu’il aimait toutes choses131. » Racine et La Fontaine s’étaient liés les premiers. […] De même, si, par un vain scrupule, l’écrivain moderne, qui traite des mêmes choses que l’ancien, évite de reproduire une vérité déjà dite, là où l’exigent impérieusement la matière et la suite du discours, il risque de tomber dans le faux pour n’avoir pas voulu répéter le vrai. […] « En septembre 1661, dit-il, les auteurs et tous les savans couraient risque de tomber en cette nécessité de n’avoir à louer que la corruption.

1863. (1925) Dissociations

Dernier scandale : quand il est tombé, écrasé et le crâne ouvert, les autres prisonniers ont applaudi et poussé des cris d’admiration. […] Il juge tout ce qui lui tombe sous la main avec une célérité telle qu’on en reste confondu d’étonnement. […] Précisément un de mes amis a eu l’occasion d’assister, ces jours derniers, à une audience correctionnelle et il m’avouait en être sorti un peu effaré, tellement tombaient drus, sur les pauvres diables, les jours, les mois, les années de prison. […] L’Église a résisté à la canonisation des gamins visionnaires de La Sallette, maintenant à peu près tombés dans l’oubli ; la bergère de Lourdes a eu de meilleurs et de plus généreux protecteurs et la voilà sur les autels. […] J’ai en vain cherché sa tombe, mais je sais qu’elle y est.

1864. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome III

Ainsi le parterre de 1734 dut trouver fort étrange cette Adélaïde, tombée comme des nues dans les murs de Lille ; ce Nemours qui se trouve, à point nommé, général de l’armée des assiégeants, sans que Vendôme en sache rien ; ce Nemours, que son frère renverse et fait prisonnier sans le connaître, qu’il se fait amener par curiosité, et qu’il ne regarde seulement pas lorsqu’il paraît. […] À ces dieux impuissants, dans la tombe endormis, As-tu fait le serinent d’assassiner ton fils ? […] Les taureaux aux autels tombent en sacrifice, Les criminels tremblants sont traînés au supplice ; Les mortels généreux disposent de leur sort. […] …………………………………………… Je vois près d’une tombe une foule éperdue. […] Il serait donc plus noble, plus théâtral, plus digne de la reine de Babylone, de braver le coup qu’elle ne peut parer, de lutter contre l’inévitable destin, de périr en reine, en héroïne, en conquérante, et de ne pas cent fois mourir de peur avant de tomber sous le glaive de la justice divine.

1865. (1902) Propos littéraires. Première série

Il assista au congrès, causa avec un empereur et vit tomber un homme historique. […] La vieille tante répète souvent : « Pourvu que je vive assez pour le voir tomber !  […] Le mur est acheté ; le mur tombe. Le jour où il est tombé, la mère, maintenant très vieille, la jeune fille, devenue vieille fille, se regardent avec une immense déception et une véritable douleur. […] Le bouquet tombe ; vous recevez un violent coup de poing dans le dos ; le bouquet tombe derrière vous ; vous vous retournez ; vous l’apercevez délicatement tenu par deux doigts de la main dont vous venez de sentir la vigueur, et vous entendez le gamin vous dire en souriant : Due soldi, signore.

1866. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

C’est à leur avis un des premiers fruits de l’ignorance & de la fainéantise, où la barbarie a fait tomber les siecles qui ont suivi la décadence de l’Empire. […] Il y a encore une troisieme colonne où l’on met les lettres nulles ou inutiles, qu’on n’a ajoûtées que pour augmenter la difficulté de ceux entre les mains de qui l’écrit pourroit tomber. […] dit que l’anastrophe est un vice de construction dans lequel on tombe par des inversions contre l’usage, vitium inversionis. […] Bien est autant adverbe que largiter, la valeur de l’adverbe tombe sur le verbe inesse largiter, il a bien.

1867. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Note »

Si nous en valons la peine, on nous nomme, on nous caractérise en deux mots, et voilà la page de notre vie dans un siècle. » Dans les temps d’orage, au contraire, « dans ces drames désordonnés et sanglants qui se remuent à la chute ou à la régénération des empires, quand l’ordre ancien s’est écroulé et que l’ordre nouveau n’est pas encore enfanté, dans ces sublimes et affreux interrègnes de la raison et du droit,… tout change ; la scène est envahie, les hommes ne sont plus des acteurs, ils sont des hommes… Tout a son règne, son influence, son jour ; l’un tombe, parce qu’il porte l’autre ; nul n’est à sa place, ou du moins nul n’y demeure ; le même homme, soulevé par l’instabilité du flot populaire, aborde tour à tour les situations les plus diverses, les emplois les plus opposés ; la fortune se joue des talents comme des caractères ; il faut des harangues pour la place publique, des plans pour le Conseil, des hymnes pour les triomphes… On cherche un homme !

1868. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre II. Des tragédies grecques » pp. 95-112

Ce découragement profond dans lequel tombe l’infortuné, cet abattement si douloureusement exprimé par Shakespeare, les Grecs ne pouvaient le peindre ; ils ne l’éprouvaient pas.

1869. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XX. Du dix-huitième siècle, jusqu’en 1789 » pp. 389-405

qui n’éprouve pas, en effet, qu’il vaut mieux descendre dans la tombe avec des affections qui font regretter la vie, que si l’isolement du cœur nous avait d’avance frappés de mort ?

1870. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre IV. La langue française au xviie  »

Les lettres parasites tombent ; on écrira tête pour teste, auteur pour autheur, purêt pour paroist, indontable pour indomptable, acomode pour accommode, etc. : les signes simplifiés n’en seront que plus maniables.

1871. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XV. Les jeunes maîtres du roman : Paul Hervieu, Alfred Capus, Jules Renard » pp. 181-195

Même il ne tomba pas à la renverse quand il découvrit un boudoir, comme fit, aux temps qu’il préparait des adolescents au bachot, tel actuel académicien, à monocle aujourd’hui.

1872. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXIV. Conférence sur la conférence » pp. 291-305

Et s’il allait tomber ?

1873. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Préface »

Mais le vrai a une grande force, quand il est libre ; le vrai dure ; le faux change sans cesse et tombe.

1874. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les traductions. » pp. 125-144

. ; car, parmi les auteurs où il y a le plus à changer, c’est assurément chez les romanciers Anglois, & nommément chez le docteur Swift, écrivain plein d’esprit & original ; mais à qui l’on reproche, en Angleterre même, d’être un à low author, un auteur qui tombe souvent dans le bas.

1875. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre III : Le problème religieux »

Sans entrer ici dans le débat assez compliqué de la morale dite indépendante, nous nous contenterons de rappeler qu’il y a dans l’homme deux tendances : l’une par laquelle il tend à tomber au-dessous de lui-même, l’autre à s’élever au dessus.

1876. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Renou » pp. 301-307

Lorsque Denys d’Halicarnasse me tomba pour la première fois dans les mains, j’étais bien jeune ; j’avoue que ce grand homme, ce rhéteur d’un goût si exquis, me parut un insensé.

1877. (1799) Dialogue entre la Poésie et la Philosophie [posth.]

Je pars de là ; et quand une pièce de vers me tombe sous la main, je ne la lis guère, à moins que je ne sois prévenue qu’elle le mérite ou par elle-même, ou par son auteur.

1878. (1757) Réflexions sur le goût

Il est une autre espèce d’erreur dont le philosophe doit avoir plus d’attention à se garantir, parce qu’il lui est plus aisé d’y tomber.

1879. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IV. Mme Émile de Girardin »

Ce n’est plus là la fée aux pieds de qui tous ceux qui aiment la grâce tomberaient pour lui rendre hommage, si ces pieds étaient encore là !

1880. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVII. Le Retour du Christ. Appel aux femmes ! »

Certes, je ne dis pas que le bas-bleu qui implore la Vierge Marie dans son livre et qui a entraîné le père Didon comme les torrents de la Guyon entraînèrent un plus grand et plus fort que lui ; je ne dis pas que ce bas-bleu aberre à ce point et tombe en ces lamentables folies ; mais je dis que son livre le Retour du Christ n’a ni la santé ni le parfum des œuvres chrétiennes.

1881. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Louis XIV. Quinze ans de règne »

C’est l’histoire du plus lent et du plus orageux coucher de soleil qu’on ait jamais vu luire sur le monde ; car Napoléon ne s’est pas couché au bout de sa course, mais il est tombé au milieu, comme une foudre, que Dieu pouvait éteindre seul.

1882. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Paix et la Trêve de Dieu »

Il n’est plus permis à un historien de tomber dans de telles erreurs.

1883. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de la Révolution » pp. 73-87

Ainsi encore, après Théroigne de Méricourt, une figure moins terrible, une sainte plus douce, mademoiselle Kéralio, madame Robert, une fille noble, mal mariée, devenue ambitieuse, et tombée, à force d’abjection et de folie, dans le mépris de madame Roland, et si bas que Michelet, ému jusqu’aux entrailles dans la personne de cette petite madame Robert, se risque à protester contre le portrait déshonorant qu’en fait madame Roland dans ses Mémoires : « Ce qui prouve — ajoute-t-il mélancoliquement — que les plus grands caractères ont leurs misères et leurs faiblesses ! 

1884. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Si j’avais une fille à marier ! » pp. 215-228

Il y a été placé pour les prunes du succès facile et de la publicité immédiate à faire tomber dans son chapeau !

1885. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVII. Mémoires du duc de Luynes, publiés par MM. Dussieux et Soulier » pp. 355-368

L’amour des faits nous a-t-il donc fait tomber si bas que nous nous intéressions à des choses aussi insignifiantes, et, lâchons le mot !

1886. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Th. Carlyle » pp. 243-258

Augustin Thierry, le saule pleureur de la tombe de tous les vaincus, versait des pleurs systématiques sur les Saxons, si méchamment mis à mort par les fiers Normands.

1887. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Balzac »

Je ne sache que Lope de Vega, qui, avec ses dix-huit cents pièces de théâtre, ait plus écrit que Balzac, mais Lope de Vega est plus un nom qu’on prononce qu’une chose intégrale qui se lit, et il n’a pas fait, dans ses œuvres, vingt volumes qui puissent égaler les vingt volumes de la Comédie humaine, qui sont immortels, et qui, si le vieux monde ne tombe pas en enfance, resteront, comme l’Iliade, sous les yeux et dans les préoccupations de l’humanité.

1888. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « G.-A. Lawrence »

Comme Byron, Georges Lawrence a le rire gastralgique et saccadé dans lequel tombent les larmes et qui les dévore, et cette passion infinie qui fait trembler le feu de l’esprit dans des plaisanteries désespérées et qui ressemble à une pâmoison de la flamme !

1889. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Byron »

Au milieu du discrédit singulier dans lequel les poètes du mot seul, jaloux comme des bouteilles vides contre des bouteilles pleines, ont essayé de faire tomber Byron, le poète du sentiment et du mot aussi, quoi qu’ils disent, quelques voix ont protesté ; et je sais mieux qu’une protestation, je sais presque une œuvre sur Lord Byron.

1890. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XX. M. de Montalembert »

Après avoir tâté ce fier sujet de saint Bernard, qui n’est pas un aérolithe tombé dans l’histoire, mais qui a des racines dans le passé, qu’il faut découvrir, et d’autres racines dans l’avenir, qu’il faut suivre encore, M. de Montalembert, à qui les habitudes oratoires ont ôté le degré d’attention nécessaire pour approfondir un sujet, a laissé là le sien, mais du moins a voulu utiliser les lectures qu’il avait faites pour le traiter.

1891. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVIII. M. Flourens »

Je me permettrai de vous faire remarquer cette poudre étincelante, tombée des ailes de cette érudition d’abeille, qui a le vagabondage de l’abeille, qui en a le miel, mais qui n’en a pas l’aiguillon !

1892. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « L’abbé Monnin. Le Curé d’Ars » pp. 345-359

L’abbé Monnin n’a jamais entendu, ni personne que ceux auxquels le Curé d’Ars s’adressait dans ce tête-à-tête sublime de la confession entre le prêtre et son pénitent, les paroles irrésistibles qui ont dû lui tomber des lèvres, à cet Inspiré de la conscience, mais il l’a entendu souvent dans ses instructions et ses catéchismes, et ce qu’il s’en rappelle et en cite est d’une beauté de langage qui défie les plus beaux langages de la terre.

1893. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Guizot »

Effrayante alternative pour Guizot, qui n’a même guères abordé que par la main des autres la vie publique de Calvin et son gouvernement spirituel, mais qui, pour le reste, pour cet abîme de la moralité d’un homme, qu’il faut pénétrer et sonder dans tout homme, quand on se charge de son histoire, a fait ce qu’on fit à la mort de Calvin, dont on s’empressa de clouer vite dans le cercueil le cadavre, qui aurait parlé, et de le jeter dans la tombe… Prudence terrible, qui dit même plus qu’on n’ose penser.

1894. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Maurice de Guérin »

Les Études de Bernardin avaient été le vase vivant dans lequel il avait commencé de boire le lait des tendresses humaines pour la Nature… Mais, comme l’enfant grandi, qui a essuyé sa ronde bouche rose du lait maternel et qui n’a plus là que son propre souffle à lui, sa virginale haleine, Guérin ne fut plus que Guérin, et il ne resta pas dans les flots de sa chevelure ambroisienne, livrée à tous les vents de ses paysages, une seule des fleurs tombées de ce lilas de Bernardin sous lequel il s’était une minute assis.

1895. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Musset »

… Né dans les premières années du siècle, quand le canon de Wagram fêtait le baptême de ceux-là qui pouvaient avoir l’espérance de mourir un jour en héros, et qui, l’Empire tombé, ne surent que faire de la vie, Alfred de Musset se jeta aux coupes et aux femmes de l’orgie comme il se serait jeté sur une épée si on lui en eût offert une, et il a peint cette situation dans les premières pages qui ouvrent les Confessions d’un enfant du siècle, avec une mélancolie si guerrière !

1896. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Mme de Girardin. Œuvres complètes, — Les Poésies. »

Et aux yeux de la Critique elle-même, aux yeux de la Critique qui vient trente ans après faire tomber de son doigt glacé la poudre rose, or et argent qui saupoudre encore ce que Delphine Gay a écrit, pour voir le vrai de ce qui est tracé sous cette poussière étincelante, ce moment est aussi le meilleur de sa pensée, et ce moment de Delphine Gay, Mme de Girardin a pu le regretter sans cesse, car elle ne le retrouva jamais !

1897. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Jean Richepin »

C’est le sentimental, ce ne peut être que le sentimental, l’Amadis tombé, on ne sait d’où, dans M. 

1898. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Armand Pommier » pp. 267-279

Mais, quand nous savons qu’il n’y en a pas, que c’est là tout simplement un monstre, impénétrable au regard du moraliste comme au scalpel du chirurgien, l’intérêt, soulevé à l’aide d’invraisemblances prodigieuses, comme un poids difficile à enlever à l’aide de cabestans faussés, l’intérêt tombe à plat…, et on s’accuse même d’être inférieur et presque puéril de l’avoir un instant éprouvé !

1899. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « G.-A. Lawrence » pp. 353-366

Georges Lawrence a le rire gastralgique et saccadé dans lequel tombent les larmes et qui les dévore, et cette passion infinie qui fait trembler le feu de l’esprit dans des plaisanteries désespérées et qui ressemble à une pâmoison de la flamme !

1900. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

Quand la force tombe, quand le flambeau se déplace, quand une nation, usée de lassitude et de souffrance, ne sent plus palpiter en elle les grandes fibres de la vie sociale, un autre peuple a déjà recueilli son héritage.

1901. (1884) L’art de la mise en scène. Essai d’esthétique théâtrale

À partir de ce moment, jusqu’à celui où Thésée tombe sur son siège en apprenant la mort de son fils, jamais il ne doit plus s’asseoir. […] La toile tombe sur ce tableau qui est ainsi très bien pondéré. […] Quand le rideau tombe, l’esprit du spectateur, dégagé de l’étreinte du poète, redevient immédiatement libre. […] Dans la nature, il en est de même : chaque goutte d’eau qui tombe ne laisse pas de trace visible, mais au bout d’un certain temps on s’aperçoit que le roc le plus dur s’est creusé sous l’effort incessant des gouttes d’eau. […] Ce n’est pas la musique qui fait couler nos larmes, ce sont celles qui tombent goutte à goutte des yeux et du cœur de la reine.

1902. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

Il est une synthèse de l’abbé Dumont et du Cédar tombé, de l’ange créé par Dieu, défait par sa propre volonté, refait par l’épreuve et la douleur. […] Le bruit des samovars qui bouillent, des petites cuillers qui tombent, du vin qui dans les verres fait glouglou, ne pourra plus me réjouir. […] Partout un gazon, un blé, un orge dru et ras ; un enfant au galop pouvait traverser la France sans tomber. […] Dans la vie de campagne je tombais toujours, en arrivant dans un nouveau pays, sur cette impression : tout ce que je voyais, je l’avais déjà vu. […] Le « Ce n’est pas composé » est tombé incessamment et tombe encore des chaires universitaires, tantôt sur un écolier de troisième, tantôt sur une thèse d’histoire, tantôt sur MM. de Goncourt.

1903. (1906) La rêverie esthétique. Essai sur la psychologie du poète

Toute parole exprimant des sentiments égoïstes ou antipathiques a des intonations sèches : elle semble tomber, isolée, dans un silence froid. […] On s’irrite contre la nuit qui tombe, et l’on se crève les yeux dans le crépuscule en attendant la lampe qui ne vient pas. […] Tantôt en effet la phrase tombe parfaitement en mesure avec le vers ; tantôt elle est avec lui en différence de phase, et ce sont des effets de contretemps d’une singulière intensité d’expression. […] Quelle valeur incomparable prennent les mots par la façon dont ils tombent en mesure ou à contretemps, en fin de vers ou en rejet ! […] « L’arbre décrépit se rompt ; il tombe.

1904. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

Il languit, tombe malade. […] » Il continue, dénonçant « l’indifférence du sourire du ciel pacifique », accusant « la cruauté de cette coupole lumineuse étendue tour à tour sur les générations qui tombent, comme le dais d’un enterrement banal ». […] Là, parmi les palais, les églises, les tours, Témoins d’un fier destin aboli pour toujours, Tu connaîtras le charme attirant de la tombe, Et dans la douce paix du soir doré qui tombe, La pâle mort viendra, d’un geste gracieux, T’offrir son lis, ainsi que les tableaux pieux Nous montrent l’ange avec une branche fleurie, Qui s’agenouille en terre et dit : Salut, Marie. […] C’est une des poésies tragiques du destin que cette subite tombée dans la nuit de ces nobles ambitions intellectuelles dont on fut le confident. […] S’il est légitime d’honorer, comme nous le faisons aujourd’hui, la foule anonyme des dévoués de la guerre, en saluant la tombe du Soldat inconnu, il ne l’est pas moins d’élever des monuments personnels aux chefs, sans lesquels cette foule, toute brave qu’elle fût, n’aurait été qu’une horde.

1905. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

La nature, c’est tout ce qui tombe sous nos sens ; et tout ce qui tombe sous nos sens apporte à notre âme une représentation de quelque chose qui réside en dehors de ce que nos sens perçoivent, une révélation de l’idée, une image de l’invisible. […] De beaux talents s’y développèrent parallèlement à de belles amitiés que la tombe seule a vues finir. […] L’homme n’a pas débuté par l’état bestial, il y est tombé en certaines contrées par une suite de fautes. […] Cette servitude était nécessaire pour empêcher de tomber encore plus bas et jusqu’à la pure animalité des hommes dont la liberté morale ne savait plus résister aux bas instincts. […] L’art est la physionomie d’une époque, c’est son âme devenue visible, c’est son caractère qui tombe sous les sens.

1906. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 3665-7857

Les anciens voyoient tomber une pierre, & les flots de la mer s’élever ; ils étoient bien loin d’attribuer ces deux effets à la même cause. […] En évitant cet excès de froideur dans les silences du dialogue, on peut tomber dans l’excès opposé. […] Par exemple, de ce qu’un gland, & non pas une citrouille, tombe sur le nez de Garo, s’ensuit-il que tout soit bien ? […] c’est ce qui n’a pû tomber que dans l’idée d’un spéculateur qui veut mener, s’il est permis de le dire, le génie à la lisiere. […] Aujourd’hui ce sont les corps sanglans de vos voisins qui tombent épars dans l’arene ; demain ce sera votre tour.

1907. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

Puis, Catin survient, déclare à Gilles qu’il est par trop benêt, et tombe dans les bras de Léandre. […] (Elle tombe. […] je ne peux pas vivre comme ça… Adieu… » Il enjambe la fenêtre, tombe sur un monsieur, remonte sain et sauf un instant après ; et Armand s’étant permis cette remarque : « Ah ! […] Mais il est à remarquer qu’ils ne sont plus intéressants que dans les moments où leur vertu, leur générosité, leur noblesse morale s’accompagne de passion, tombe dans quelque excès. […] Après la mort de Lazare, elle tombe aux pieds de Jésus (toujours ! 

1908. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Desjardins tombe dans une confusion inextricable. […] Notre devoir est de la bien régir, de l’empêcher de tomber en faillite ou de se précipiter dans la mort. […] Et sur le sol de feuilles mortes, sur cette tombe des automnes, les ombres marchaient. […] Mais voilà que ce pauvre Boche tombe dans son escalier et en garde quelque temps une certaine excitation cérébrale. […] Mais une fortune énorme lui tombe dans les bras ; et il ne peut plus songer qu’à se plaindre des embarras inextricables où l’administration d’une fortune jette un malheureux millionnaire et qui l’empêchent de songer à quoique ce soit en dehors d’elle.

1909. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

» Le premier article du Mercure est terminé par ce post-scriptum mémorable : « Quand cet article allait à l’impression, le hasard a fait tomber entre nos mains un ouvrage qui n’est pas encore publié, et qui a pour titre : des Beautés morales et poétiques de la Religion chrétienne. […] Dans son noble attachement pour l’amie intime de cette âme de génie, pour la dépositaire de tant de pensées aimantes, M. de Chateaubriand a modifié et agrandi ses premiers jugements sur un caractère et un talent mieux connus ; toutes les barrières précédentes sont tombées. […] Il y a du moins, entre tant de tristesses, cela de bon à survivre à ses contemporains illustres, illustre soi-même, et quand on a la piété de la gloire : c’est de pouvoir à loisir couronner leur image, réparer leur statue, solenniser leur tombe. […] La seconde lettre tombe plus particulièrement sur le style ; elle est parfois fondée, et d’un tour cavalier assez agréable : « Quel sentiment que l’amour ! […] On pourrait reprendre dans le détail de Delphine des répétitions, des consonnances, mille petites fautes fréquentes que Mme de Staël n’évitait pas, et où l’artiste écrivain ne tombe jamais.

1910. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

En le prenant dès le berceau, dans son éducation, dans sa carrière et sa nationalité extérieures et contiguës à la France, nous aurons déjà fait la part de bien des exagérations où il a paru tomber, et sur lesquelles, d’ici, le parti adversaire l’a voulu uniquement saisir. […] On cite son mot presque affreux à Mme de Staël, qui le voyant à Saint-Pétersbourg, le voulut mettre sur l’Église anglicane et sur ses beautés : « Eh bien, oui, madame, je conviendrai qu’elle est parmi les Églises protestantes ce qu’est l’orang-outang parmi les singes. » Ce qui doit choquer dans ce mot n’est pas ce qui tombe sur l’Église anglicane, laquelle cumule en effet toutes les cupidités et les hypocrisies. […] qui se monte d’autant plus fort et qui tombe dans l’excentrique, dans le particulier, dans le paradoxe spirituel, étincelant, mystique et hautain, encore semé d’aperçus, de lueurs merveilleuses, mais non plus fécond ni frappant en plein dans le but. […] Les chefs de l’école éclectique régnante n’ont pas été fâchés de voir tomber sur la joue du précurseur de Locke ce soufflet solennel qu’ils ne se seraient pas chargés eux-mêmes de lui donner212. […] Voilà un vers qui est tombé de ma plume, mais n’ayez pas peur de la rime, c’est bien assez de la raison. » « Que vous aurez de choses à nous dire (1813), et que j’aurai pour mon compte de plaisir à vous entendre !

1911. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « L’obligation morale »

Et ensuite on a beau raisonner dans chaque cas particulier, formuler la maxime, énoncer le principe, déduire les conséquences : si le désir et la passion prennent la parole, si la tentation est forte, si l’on va tomber, si tout à coup ou se redresse, où donc était le ressort ? […] C’est l’agitation de la sensibilité par une représentation qui y tombe. […] Mais ce que nous appelons un ensemble de moyens employés n’est en réalité qu’une série d’obstacles tombés ; l’acte de la nature est simple, et la complexité infinie du mécanisme qu’elle paraît avoir construit pièce à pièce pour obtenir la vision n’est que l’entrecroisement sans fin des antagonismes qui se sont neutralisés les uns les autres pour laisser passer, indivisible, l’exercice de la fonction. […] Mais l’âme qui s’ouvre, et aux yeux de laquelle les obstacles matériels tombent, est toute à la joie. […] Mais le paradoxe tombe, la contradiction s’évanouit, si l’on considère l’intention de ces maximes, qui est d’induire un état d’âme.

1912. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

Rien n’était plus juste : des victimes aussi illustres, quoiqu’elles eussent compromis leur pays, méritaient des hommages ; mais il suffisait de jeter des fleurs sur leur tombe, il n’y fallait pas de sang. […] Il a montré que, si le système est tombé, ce n’est point par le vice de son principe, mais par des fautes d’exécution…. […] L’historien de la révolution française faisait déjà ses adieux à ses amis et allait s’embarquer, quand le ministère Martignac tomba. — « Ah !

1913. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

» Les nuages devenaient plus menaçants, on entendait un sourd tonnerre, quelques gouttes tombèrent, et Goethe pensa qu’il était sage de retourner à la ville. […] Nous autres Allemands, lorsque nous ne regardons pas au-delà du cercle étroit de notre entourage, nous tombons beaucoup trop facilement dans cette présomption pédantesque. […] Il ne poussera sur ses côtés que quelques faibles rameaux, qui même dans le cours du siècle doivent dépérir et tomber.

1914. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

C’est l’Andromaque d’Hector agenouillée sur une tombe vide, gardant un amour unique et la fidélité du coeur dans l’involontaire infidélité d’un corps d’esclave ; l’amoureuse amitié de Nisus et d’Euryale ; Pallas, ou la grâce de la jeunesse fauchée ; la blonde amazone Camille, la jeune aïeule des « travestis » héroïques, de Clorinde à Jeanne d’Arc… Et c’est, partout, l’ombre de la grande Louve, la majesté du peuple romain, régulateur et pacificateur du monde, le sentiment de sa mission, de sa « vocation » terrestre, crue et révérée comme un dogme religieux : Excudent alii… Tout cela ramassé, condensé en expressions choisies, d’une brièveté profondément significative, et qui se prolongent et qui retentissent dans le coeur et dans l’imagination. […] … » C’est sans doute par un coucher de soleil, l’été, à l’heure où, pour parler comme Hugo,     Une immense bonté tombe du firmament que, pris d’attendrissement, il écrivait : « Il n’y a point de créature, si petite et si vile qu’elle soit, qui ne représente la bonté de Dieu. » Et peut-être, rassuré par cette pensée, il se permettait pour une fois d’admirer sans scrupule cette nature intempérante, immortifiée, païenne, qui n’est pas cloîtrée, qui n’est pas chaste, qui aime la vie, et qui ne prie pas, sinon dans les vers des poètes. […] Il pouvait tomber de la poésie parnassienne dans l’héliogabalisme, et de l’héliogabalisme dans le symbolisme, le mysticisme et la kabbale.

1915. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Abolir le christianisme, c’est peut-être faire place au papisme, car le peuple livré à lui-même cherchera quelque nouveau culte, et tombera dans la superstition. […] Swift racontait l’histoire d’un duc qui, jouant à un jeu de hasard, entassait devant lui des monceaux d’or, et tout entier au jeu, n’apercevait pas derrière lui un voleur qui, passant la main sous son bras, faisait tomber l’or dans son chapeau. […] Il priait Oxford d’obtenir pour lui une gratification de 1000 l. pour ses frais d’installation ; Oxford, toujours lent, tomba avant de l’avoir obtenue ; Swift s’adressa à Bolingbroke qui, pendant sa courte domination, obtint cette faveur lucrative.

1916. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

Mais s’il est certain que de la simple action réflexe par laquelle l’enfant tette, jusqu’aux raisonnements compliqués de l’homme adulte, le progrès se fait chaque jour par degré infinitésimal ; il est certain aussi qu’entre les actes automatiques des êtres les plus bas et les plus hautes actions conscientes de la race humaine, on peut disposer toute une série d’actions manifestées par les diverses tribus du règne animal, de telle façon qu’il soit impossible de dire à un certain moment de la série : Ici commence l’intelligence. » Si du savant qui poursuit ses recherches avec la pleine conscience des procédés de raisonnement et d’induction qu’il emploie, nous descendons à l’homme d’une éducation ordinaire, qui raisonne bien et d’une manière intelligente, mais sans savoir comment ; si de là nous descendons au villageois, dont les plus hautes généralisations ne dépassent guère les faits locaux ; si de là nous tombons aux races humaines inférieures qu’on ne peut considérer comme pensantes, dont les conceptions numériques dépassent à peine celles du chien ; si nous mettons à côté les plus élevés des primates, dont les actions sont tout aussi raisonnables que celles d’un petit écolier ; si de là nous arrivons aux animaux domestiques ; puis des quadrupèdes les plus sagaces à ceux qui le sont de moins en moins, c’est-à-dire qui ne peuvent plus modifier leurs actions selon les circonstances et sont guidés par un immuable instinct ; puis si nous remarquons que l’instinct, qui consistait d’abord en une combinaison compliquée de mouvements produits par une combinaison compliquée de stimulus, prend des formes inférieures dans lesquelles stimulus et mouvements deviennent de moins en moins complexes ; si de là nous en venons à l’action réflexe et « si des animaux chez qui cette action implique l’irritation d’un nerf et la contraction d’un muscle, nous descendons encore plus bas chez les animaux dépourvus de système nerveux et musculaire, et que nous découvrions qu’ici c’est le même tissu qui manifeste l’irritabilité et la contractilité, lequel tissu remplit aussi les fonctions d’assimilation, sécrétion, respiration et reproduction ; et si, finalement, nous remarquons que chacune des phases de l’intelligence, énumérées ici, se fond dans les voisines par des modifications trop nombreuses pour être distinguées spécifiquement, et trop imperceptibles pour être décrites, nous aurons en une certaine mesure montré la réalité de ce fait : qu’on ne peut effectuer de séparation précise entre les phénomènes de l’intelligence et ceux de la vie en général. » L’autre base de la doctrine, c’est la corrélation nécessaire de l’être et de son milieu, que l’auteur exprime en disant que la vie est une correspondance, « un ajustement continu des rapports internes aux rapports externes. » L’être vivant quel qu’il soit, arbre, infusoire ou homme, ne peut subsister s’il n’y a harmonie entre son organisme et son milieu ; et si à la vie physique s’ajoute la vie psychique, l’ajustement deviendra plus complexe. […] Chez l’être inférieur, où le tissu tout entier a la propriété de répondre aux changements marqués dans la quantité de lumière qui tombe sur lui, il y a comme une ébauche de la faculté visuelle et des correspondances qui en résultent. […] Mais en parlant de lui, comme de quelque chose distinct du groupe d’états psychiques, qui a produit l’impulsion, il tombe dans l’erreur de supposer que ce n’est pas l’impulsion qui a déterminé l’action.

1917. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre deuxième. Les opérations intellectuelles. — Leur rapport à l’appétition et à la motion. »

Tout jugement d’expérience est d’abord, nous l’avons dit, l’aperception d’une nouveauté, d’une différence ; par exemple, un rocher que l’animal avait toujours vu immobile au-dessus de sa retraite se met à tomber et le blesse. […] Mais au conflit succède la fusion entre le rocher autrefois immobile et le rocher qui maintenant tombe. […] Quand nous nous rejetons en arrière pour éviter de tomber dans un trou, c’est à la fois action réflexe, instinct et induction spontanée.

1918. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VII : Instinct »

Mais on tomberait dans une grave erreur si l’on supposait que le plus grand nombre des instincts ont été acquis par habitude, et transmis ensuite héréditairement aux générations suivantes. […] On ne saurait contester que de jeunes Chiens couchants ne tombent souvent d’arrêt dès la première fois qu’on les lance, et mieux parfois que d’autres depuis longtemps exercés. […] Il serait fort étrange que quelqu’un se fût jamais imaginé d’apprendre à un Chien à tomber d’arrêt, si quelques Chiens n’avaient montré une tendance naturelle à le faire ; or l’on sait qu’une pareille tendance se manifeste quelquefois chez diverses races, et je l’ai constatée moi-même chez un pur Terrier.

1919. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre II. Principale cause de la misère : l’impôt. »

C’est pour eux qu’on sème, qu’on récolte, qu’on travaille, qu’on se prive ; et, si les liards épargnés péniblement chaque semaine finissent au bout de l’an par faire une pièce blanche, c’est dans leur sac qu’elle va tomber. […] Cette législation tombe sur les contribuables comme un rets serré aux mille mailles, et le commis qui le lance est intéressé à les trouver en faute.

1920. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

Mais la Toscane, ce merveilleux phénomène de la richesse, cette royauté de l’intelligence, cette monarchie du travail à l’époque où l’industrie européenne n’était pas née, devait décroître et tomber d’elle-même aussitôt que l’industrie de la laine, de la soie, de la banque, cesserait d’être le monopole, le brevet d’invention de Florence, et que les mêmes industries, mères du même commerce et sources des mêmes richesses, s’établiraient à Lyon, à Venise, à Londres, à Birmingham, à Calcutta, et que le travail européen et asiatique ne laisserait au peuple des Médicis, de Dante, de Michel-Ange, que cette primauté du génie des arts qui fait la gloire, mais qui ne fait pas la puissance militaire et politique des nations. […] Absorbés, vous tomberez avec la faible monarchie qui vous enserre ; ligués, vous resterez debout dans toutes les secousses de l’Europe.

1921. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (1re partie) » pp. 305-364

Un tas de pierres, me servant d’échelle, me permit d’enjamber un mur de clôture, d’où je tombai dans une ruelle aussi silencieuse et aussi déserte qu’un cloître de chartreux pendant que les religieux sont au service. […] « Il sera rejeté comme ce noir génie « Effrayant par sa gloire et par son agonie, « Qui tomba jeune encor, dont ce siècle est rempli.

1922. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

Par malheur, la conversation vint à tomber sur la comédie, et le faux bailli s’échauffa sur l’éloge de Molière : il allait se trahir, si Racine ne l’eût emmené, juste à point pour n’être pas reconnu par Cotin, qu’ils rencontrèrent sur l’escalier. […] Despréaux arrive, récite de ses vers ; on dîne, on médit d’une tragédie de La Serre ; et en prenant le café sous un berceau, dans le jardin, la conversation tombe sur la déclamation dramatique : Boileau, évoquant les souvenirs d’un temps qui lui est cher, montre comment la Champmeslé disait un vers du rôle de Monime, ou Molière une tirade du Misanthrope.

1923. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série «  Leconte de Lisle  »

Quant aux Grecs, ils s’occupaient médiocrement de l’avenir de l’homme par-delà la tombe et pensaient que cette vie peut être à elle-même son propre but. […] On me dit une mère et je suis une tombe.

1924. (1839) Considérations sur Werther et en général sur la poésie de notre époque pp. 430-451

Cet ange tombé, se soutenant dans sa révolte, est encore dans la vie. […] L’amour de l’Humanité à un haut degré et dans un large sens lui faisant défaut, et l’amour individuel se trouvant lui manquer aussi, en apparence par le simple effet d’un hasard, mais en réalité par l’imperfection des choses d’ici-bas, il tombe sous l’empire exclusif de ce sentiment d’artiste qu’il a pour la Nature.

1925. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre quatrième »

Mais sa muse, en français parlant grec et latin, Vit dans l’âge suivant, par un retour grotesque Tomber de ses grands mots le faste pédantesque. […] Ici il se vante d’avoir imité Pindare, et de n’être pas pour cela tombé dans la mer, malgré la menace d’Horace ; beaucoup moins hardi que lui, remarque-t-il, parce qu’il était de moins bonne souche : Par une chute subite, Encor je n’ay fait nommer Du nom de, Ronsard la mer, Bien que Pindare j’imite.

1926. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

L’Écriture dit que le juste tombe sept fois par jour ; mais on ne connaissait pas encore Flaubert à l’époque où la Bible fut rédigée. […] Lisez les traductions des classiques grecs et latins, comme vous y engagent ces excellents professeurs ennemis des langues anciennes ; vous ne trouverez dans Aristophane, dans Euripide, dans Sophocle, dans Virgile, dans Horace et dans tous, que des niaiseries et des platitudes ; ces traductions, quand elles ne sont pas faites par un poète ou un artiste, sont comme la momie d’une belle femme, comme les pétales desséchés d’une fleur : c’est du génie tombé en putréfaction.

1927. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre deuxième. Le développement de la volonté »

D’autre part, les réactions extérieures de ces cellules tombent, comme il est inévitable, sous les lois du mécanisme. […] Surpris, on les recherche ; parfois on tombe juste, quand elles sont suffisamment conscientes pour qu’on les puisse retrouver ; sinon, de bonne foi, on les invente.

1928. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

Là, nous prenons machinalement un numéro de l’Illustration, et sous nos yeux tombe le mot du dernier rébus : Contre la mort, il n’y a pas d’appel ! […] Et je revois l’hôpital, et je revois le concierge rougeaud, obèse, puant la vie comme on pue le vin ; et je revois ces corridors où de la lumière du matin tombe sur la pâleur de convalescentes souriantes… Dans un coin reculé, je sonne à une porte aux petits rideaux blancs.

1929. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — La déformation  »

Il reste dans l’anodin et dans l’anecdote, vitupère castrole et note que, remplacé par gerbe, le mot bouquet tombe en désuétude. […] Une langue ressemble à un jardin où il y a des fleurs et des fruits, des feuilles vertes et des feuilles tombées, où, à côté du définitif, il y a la vie, la croissance, le devenir.

1930. (1902) La métaphysique positiviste. Revue des Deux Mondes

Nous ne la connaissons pas, cette diversité ; l’apparence en tombe seule sous nos sens ; mais nous pouvons affirmer qu’elle existe ; et sans nous embarrasser ici de subtilités assez inutiles, c’est ce qui nous suffit pour être en droit d’affirmer, ou de « poser », ainsi qu’on dit, « l’objectivité du monde extérieur. » Il n’y a pas, on le sait, de problème que la philosophie, depuis son origine, ait plus souvent agité, ni, si l’on en croyait du moins les historiens, résolu plus diversement, et, certes, c’est un bel exemple de l’art de compliquer ou d’embrouiller les questions. […] Les grands « métaphysiciens » du début du XIXe siècle, ceux dont on loue dans les histoires la force ou le génie d’invention, un Fichte, un Schelling, un Hegel, — pour ne rien dire des moindres, — ne sont peut-être au fond que des arrangeurs de mots, et tout en les admirant, pour les ressources de leur dialectique, je me suis demandé quelquefois si leurs « palais d’idées » n’étaient pas destinés à tomber un jour dans le même dédain ou le même oubli, mutatis mutandis, que les constructions de Duns Scot, « le docteur subtil » ou l’Ars magna du Majorquain Raymond Lulle14.

1931. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre VI. L’espace-temps à quatre dimensions »

. — Confusion spéciale où l’on risque ici de tomber. — Le réel et le virtuel. — Ce que représente effectivement l’amalgame Espace-Temps. […] L’artifice dont nous allons user a pour unique objet de fournir un support imaginatif à la théorie, de la rendre ainsi plus claire, et par là de faire mieux apercevoir les erreurs où des conclusions hâtives nous feraient tomber.

1932. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Appendices de, la deuxième édition »

La vérité est que le paradoxe tombe, quand on fait la distinction qui s’impose. […] On tombe d’ailleurs dans une confusion analogue, admissible chez le physicien, dangereuse pour le philosophe, quand on dit que, dans un système tel que le disque tournant, « il n’est pas possible de définir le temps au moyen d’horloges immobiles par rapport au système ».

1933. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie militaire du général comte Friant, par le comte Friant, son fils » pp. 56-68

À la bataille de Sediman, où Mourad Bey à la tête de ses mameluks se brisait contre les carrés français, mais où un feu de quatre pièces tiré des hauteurs emportait bien des hommes, qui une fois tombés et laissés sur le champ de bataille étaient massacrés, le général Desaix, affligé de voir ces braves périr d’une mort horrible, eut un moment l’idée de rejoindre les barques pour les y déposer ; il demanda l’avis de Friant qui lui répondit aussitôt, en lui montrant les retranchements ennemis : « Général, c’est là-haut qu’il faut aller ; la victoire ou la mort nous y attend, nous ne devons pas différer d’un moment l’attaque. » — « C’est aussi mon sentiment, répliqua le général Desaix, mais je ne puis m’empêcher d’être ému en voyant ces braves gens périr de la sorte. » — « Si je suis blessé, repartit le général Friant, qu’on me laisse sur le champ de bataille ! 

1934. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — I » pp. 219-230

Écoutez-le : sans morgue, sans emphase, et tout en badinant, il va insinuer l’égalité de l’esprit en face des puissances ; il va, sans dire les grands mots, avertir qu’il y a là aussi un ministère de la pensée à respecter, et, comme nous dirions, un sacerdoce : « Mais, madame, faut-il que la fille d’Ernest-le-Pieux veuille par ses générosités me faire tomber dans le péché de la simonie ?

1935. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger, 1833. Chansons nouvelles et dernières »

En sa spirituelle préface, le chansonnier semble regretter qu’aucun de nos jeunes talents ne se soit essayé dans une voie qu’il croit fertile encore ; ce conseil et ce regret, j’ose le dire, tombent à faux.

1936. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Paroles d'un croyant »

Il croit au bien, et il croit au mal ; il s’indigne ingénument, et il aime avec transport ; il maudissait tout à l’heure les ennemis des hommes, et voilà qu’il tombe en pleurs entre vos bras. 

1937. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, romans (1832) »

Le héros, fils d’un ennemi mortel, fils d’un prince, garde le plus qu’il peut l’incognito ; pour sauver celle qu’il aime et le vieillard que des félons veulent perdre, il ne voit rien de mieux que d’aller par monts et par vaux attaquer dans son antre un monstre effroyable, et de lui ravir les preuves d’une machination odieuse, qui, retirées des mains où elles sont tombées, pourront démasquer les traîtres.

1938. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « FLÉCHIER (Mémoires sur les Grands-Jours tenus à Clermont en 1665-1666, publiés par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont.) » pp. 104-118

Ainsi, pour leur exemple d’éclat, ils firent tout d’abord tomber la tête de ce pauvre vicomte de La Mothe de Canillac, le plus innocent de tous les Canillacs, ce qui ne veut pas dire qu’il fût très-innocent.

1939. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Appendice sur La Fontaine »

Un critique éclairé du Journal des Débats, séduit par quelques traits de vague ressemblance, et cédant aussi à cette influence secrète qu’exerce le paradoxe sur les meilleurs esprits, estime que La Fontaine doit beaucoup « et à nos contes, et à nos poëmes, et à nos proverbes, depuis le Roman de Renart, dont on ne me persuadera jamais qu’il n’ait pas eu connaissance, jusqu’aux farces de ce Tabarin qu’il cite si plaisamment dans une de ses fables. » Quant aux farces de Tabarin, quant à nos contes, à nos poëmes imprimés, je pourrais tomber d’accord avec le savant critique ; mais le Roman de Renart, alors manuscrit et inconnu, où le bonhomme l’eût-il été déterrer ?

1940. (1875) Premiers lundis. Tome III « Nicolas Gogol : Nouvelles russes, traduites par M. Louis Viardot. »

La petite histoire intitulée un Ménage d’autrefois, et qui peint la vie monotone et heureuse de deux époux dans la Petite-Russie, est pourtant d’un contraste heureux avec les scènes dures et sauvages de Boulba : rien de plus calme, de plus reposé, de plus uni ; on ne se figure pas d’ordinaire que la Russie renferme de telles idylles à la Philémon et Baucis, de ces existences qui semblent réaliser l’idéal du home anglais et où le feeling respire dans toute sa douceur continue : Charles Lamb aurait pu écrire ce charmant et minutieux récit ; mais vers la fin, lorsque le vieillard a perdu son inséparable compagne, lorsque le voyageur, qui l’a quitté cinq années auparavant, le revoit veuf, infirme, paralytique et presque tombé en enfance, lorsqu’à un certain moment du repas un mets favori de friandise rappelle au pauvre homme la défunte et le fait éclater en sanglots, l’auteur retrouve cette profondeur d’accent dont il a déjà fait preuve dans Boulba, et il y a là des pages que j’aimerais à citer encore, s’il ne fallait se borner dans une analyse, et laisser au lecteur quelque chose à désirer. — En homme, le nom de M. 

1941. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Préface de la seconde édition » pp. 3-24

Lorsque Bossuet dit cette superbe phrase : Averti par mes cheveux blancs de consacrer au troupeau que je dois nourrir de la parole de vie les restes d’une voix qui tombe et d’une ardeur qui s’éteint , il s’est trouvé sûrement quelques malheureux critiques qui ont demandé ce que c’était que les restes d’une voix et d’une ardeur, ce que c’était que des cheveux qui avertissent.

1942. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre III. Les dieux »

L’aigle pond dans le giron de Jupiter, et l’irrévérencieux escarbot « sur la robe du dieu fait tomber une crotte. » Le dieu, la secouant, jeta les oeufs à bas.

1943. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre III. Association des mots entre eux et des mots avec les idées »

Sully-Prudhomme dit à l’hirondelle : Toi qui peux monter solitaire Au ciel, sans gravir les sommets, Et dans les vallons de la terre Descendre sans tomber jamais…, ce mot de ciel traîne après lui pour tout le monde les mêmes images : l’espace libre, profond, sans limites, d’un bleu intense ou laiteux, baigné de soleil, ou traversé de nuages.

1944. (1895) Histoire de la littérature française « Avant-propos »

Qu’il y ait toujours des curieux et des savants qui s’enferment dans le moyen âge, comme il y en a qui se cantonnent dans le xviiie  siècle ou dans le xviie , rien de plus légitime, et rien de plus utile : mais il est temps que tombe le préjugé par lequel le professeur, le critique, qui prétend embrasser dans son étude et son goût toute notre littérature nationale, est autorisé à en ignorer, à en mépriser quatre ou cinq siècles.

1945. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Armand Silvestre »

Comme un cygne émergeant D’un grand fleuve d’azur, l’Aube, parmi la brume, Secoue à l’horizon les blancheurs de sa plume Et flagelle l’air vif de son aile d’argent… Et plus loin : Luisante à l’horizon comme une lame nue, Sur le soleil tombé la mer en se fermant De son sang lumineux éclabousse la nue Où des gouttes de feu perlent confusément… Cette aube qui est un cygne, ce soleil qui est un dieu décapité, et bien d’autres images que je pourrais citer…, alors que M. 

1946. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Baudelaire, Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique, par Eugène Crépet. »

Le plus tôt possible, avant de tomber plus bas… Que de pressentiments et de signes envoyés déjà, par Dieu, qu’il est grandement temps d’agir !

1947. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre V. Le théâtre des Gelosi (suite) » pp. 81-102

Son mari, Francesco Andreini, fit graver sur sa tombe une épitaphe qu’on voyait encore à la fin du dernier siècle, et qui se terminait ainsi : « … Religiosa, pia, musis amica, et artis scenicæ caput, hic resurrectionem exspectat.

1948. (1888) Demain : questions d’esthétique pp. 5-30

S’ils cherchent par-delà tout Évangile précis à cette heure où tous lès Évangiles tombent en ruines  une religion qui satisfasse à la fois leur cœur et leur raison dans le fonds commun de toutes les religions et de toutes les métaphysiques, dans le frisson de mystère dont certaines questions ont toujours fait frémir toute l’humanité, dans les hiéroglyphes de l’ancienne Egypte, dans les grimoires de Paracelse et dans les méditations de Spinoza  ne les condamnez pas si vite : êtes-vous bien sûr qu’ils aient tort ?

1949. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVII. Romans d’histoire, d’aventures et de voyages : Gebhart, Lemaître, Radiot, Élémir Bourges, Loti » pp. 201-217

C’est Les oiseaux s’envolent et les fleurs tombent.

1950. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre III. L’antinomie dans la vie affective » pp. 71-87

Les intellectualistes oublient que les idées n’ont d’influence que si elles tombent sur un sol favorable ; si elles ont une résonance dans l’organisme, que si elles ne sont pas seulement apprises et comprises, mais senties.

1951. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre I. Place de Jésus dans l’histoire du monde. »

Ce n’est qu’à partir du IIIe siècle, quand le christianisme est tombé entre les mains de races raisonneuses, folles de dialectique et de métaphysique, que commence cette fièvre de définitions, qui fait de l’histoire de l’Église l’histoire d’une immense controverse.

1952. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VIII. Quelques étrangères »

Leur ridicule ne se révèle qu’avec le temps et, leur ridicule reconnu, elles tombent dans l’oubli.

1953. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre III, naissance du théâtre »

C’étaient les Cendres de ce carnaval, le Memento de la tombe jeté sur l’Evohé de l’orgie.

1954. (1902) L’humanisme. Figaro

Peut-être se récriera-t-il à ce mot : il s’en allait en guerre contre un parti d’athées, et le voici qui tombe dans une assemblée de poètes.

1955. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre troisième. De la sympathie et de la sociabilité dans la critique. »

C’est un but beaucoup plus élevé ; on peut sans doute tomber plus lourdement encore en cherchant à y atteindre, mais on ne peut pas donner cette raison de ne pas poursuivre un but, qu’il est trop haut.

1956. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre II. Le dix-neuvième siècle »

Un jour, tout à coup, brusquement, le gonflement du vrai a abouti, l’éclosion a eu lieu, l’éruption s’est faite, la lumière les a ouverts, les a fait éclater, n’est pas tombée sur eux, mais, plus beau prodige, a jailli d’eux, stupéfaits, et les a éclairés en les embrasant.

1957. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre III : Le présent et l’avenir du spiritualisme »

Peut-être périrons-nous dans cette révolution dont nous n’aurons été que les obscurs préparateurs, simples chaînons entre ce qui tombe et ce qui s’élève ; mais qu’importe qu’une école périsse, si l’idée qui repose en elle renaît plus vivante et plus jeune, revêtue de son immortel éclat !

1958. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VIII. Des romans. » pp. 244-264

Les grands Romans furent en vogue vers le milieu du dernier siécle ; mais ils commencerent à tomber vers la fin.

1959. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Deshays » pp. 208-217

Celui qui peut rendre la vie, peut aussi facilement donner la mort… Pas un qui se soit avisé de faire pleurer une des sœurs du ressuscité, de joie ; pas un des parents qui tombe en faiblesse !

1960. (1860) Ceci n’est pas un livre « Mosaïque » pp. 147-175

Il y a quelque mille ans, on le jetait dans la fosse aux lions — et voilà qu’aujourd’hui il va tomber dans la fosse aux ours !

1961. (1811) Discours de réception à l’Académie française (7 novembre 1811)

Je l’avoue, Messieurs, ma tâche est douce à remplir ; je moissonne dans un champ de fleurs sans épines, et je puis les prendre au hasard pour en former la couronne que je dépose aujourd’hui sur la tombe du moderne Anacréon.

1962. (1760) Réflexions sur la poésie

Le peuple des versificateurs voit avec chagrin le progrès sensible du discrédit où il tombe.

1963. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VI. Du trouble des esprits au sujet du sentiment religieux » pp. 143-159

Il laisse avec mélancolie errer ses regards en arrière ; il porte au-dedans de lui une vague inquiétude dont il ignore la cause ; il se crée des sentiments factices, et qu’il sait être ainsi, pour suppléer aux émotions qu’il ne retrouvera plus ; il s’étonne du désenchantement où il est plongé ; il a beau être séparé de la religion, ou par les passions dont il est devenu le jouet infortuné, ou par les séductions d’un esprit raisonneur, qui, à force de vouloir approfondir, égare ; il ne peut être sourd aux plaintes touchantes d’une mère, qui ne devait pas s’attendre à lui voir trahir ce qu’elle regardait comme ses plus chères espérances, ni aux terribles accusations de ses aïeux, qui lui reprochent, du fond de la tombe, d’avoir abandonné la portion la plus précieuse de leur héritage.

1964. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre premier. Mme de Staël »

c’est cette Mme de Staël, restituée à la vérité de sa nature par un éditeur qui serait capable de la comprendre et de l’expliquer, que je voudrais voir revenir en pleine lumière, dans quelque splendide édition, où nous trouverions de ces lettres qui, comme plusieurs de celles de Weymar et Coppet, mais en trop petit nombre, éclairent le génie par la vie — comme les neiges tombées éclairent le ciel par en dessous !

1965. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXI. Mme André Léo »

Elle a, dans ses livres, l’œil baissé, la contenance pudique… quelque chose d’opiniâtrement subsistant et de ressemblant à, la décence romaine ; mais le fuseau de la Matrone est tombé dans l’encre moderne et elle l’a taché de cette encre.

1966. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIV. Mme Claire de Chandeneux »

On ne la hait point ; elle n’ennuie pas, mais elle n’attache pas non plus, et je dirai pourquoi… Elle a la plume légère, mais c’est une plume enlevée à l’aile de cet oiseau que La Fontaine a surnommé « Caquet-bon-bec. » Elle l’a légère et infatigable ; infatigable à effrayer les esprits qui veulent que d’une plume, il tombe quelque chose qui ne soit pas une phrase connue… Les romans de Mme de Chandeneux, qu’on lit sur leurs titres, qui sont séduisants comme le visage d’une jolie femme qui serait sotte, ne sont ni meilleurs ni plus mauvais que tous ces romans de femmes qui se ressemblent, comme les gravures de mode se ressemblent.

1967. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Chine »

Les autres, moins persuadés que le Céleste Empire soit céleste, ont fait du peuple-phénomène qui l’habite une nation de la date de beaucoup d’autres dans la chronologie asiatique, malgré ses prétentions exorbitantes à l’antiquité ; ni plus grand, ni plus fier, ni plus sage que tous les idolâtres de la terre, que toutes les races tombées et dispersées aux quatre vents de la colère de Dieu, abominablement corrompu, — ce qui lui donne ce petit air vieux qui nous fait croire à sa vieillesse, car la corruption vieillit le multiple visage des peuples comme la chétive figure de l’homme, — laid jusqu’à la plus bouffonne laideur, et, si l’on s’en rapporte aux œuvres qui sortent des mains patientes et industrieuses de ce peuple stationnaire, encagé dans son immuable empire du Milieu, ces œuvres de prisonnier qui s’ennuie et qui apparaissent comme des prodiges à notre fougue occidentale, ayant l’intérieur de la tête aussi étrangement dessiné que le dehors, le cerveau conformé comme l’angle facial !

1968. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le Sahara algérien et le Grand Désert »

Ni la peste, ni les hivers, ni les tempêtes, ni le climat d’une ville perpétuellement ravitaillée, ni des soldats cuirassés de leurs murailles de granit et qui réalisent le mot sublime de l’Empereur à Eylau : « Quand on les a tués, il faut les pousser pour qu’ils tombent », rien n’a pu nous désarmer de cette patience qui résiste et qu’il est plus difficile d’avoir, à ce qu’il paraît, quand on est Français, que le courage qui va en avant.

1969. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’ancien Régime et la Révolution »

Seulement, nous disons qu’il n’a pas creusé dans cette tombe.

1970. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les civilisations »

Et cela malgré la plus sauvage barbarie, cachée sous ces enchantements de la richesse et de la politesse d’un peuple si avancé dans les sciences et dans les arts ; car ils furent, entre eux, les plus grands égorgeurs, et leurs tueries, les plus grandes tueries que le soleil, accoutumé au sang comme à la mer dans laquelle tous les soirs il tombe, ait jamais éclairées de ses rayons épouvantés !

1971. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Odysse Barot »

Byron tomberait dans l’oubli, le déplaisir, le mépris de toute l’Angleterre, de tous les peuples et de toutes les démocraties à la fois, qu’il n’en serait pas moins toujours ce qu’il est, — lord Byron !

1972. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le colonel Ardant du Picq »

Mais la tristesse a dû tomber sur ce cœur de soldat, droit et ferme, en le prévoyant !

1973. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Louis Vian » pp. 373-387

Depuis sa mort, tout a été englouti et noyé dans le flot de gloire qui a déferlé sur sa tombe pour avoir fait ses deux chefs-d’œuvre, qui ne sont pas les chefs-d’œuvre de tous les siècles, mais les chefs-d’œuvre du xviiie , et par lesquels tous les livres du xviiie  siècle (par qui soient-ils faits)peuvent se tenir vaincus.

1974. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Grèce antique »

Quoi qu’il en soit, après Fénelon, contre lequel le cœur lui a manqué un peu, Lerminier retrouve toute l’indépendance de sa pensée ; et, suivant l’erreur qui tombe, d’esprit en esprit, toujours plus bas et toujours plus large, de Fénelon en Montesquieu, de Montesquieu en Mably, de Mably en Barthélemy, de Barthélemy en Saint-Just et en Robespierre, et de ces derniers en toute cette plèbe de démocrates timbrés encore de République, il dresse admirablement le compte de cette longue lignée d’adorateurs de la Grèce, qui l’aiment, il est vrai, à la manière grecque, avec un bandeau sur les yeux, et qui ont cru, soit dans leurs livres, soit dans leurs essais d’organisation politique, qu’on pouvait détremper et pétrir les cendres des civilisations consumées pour en faire le ciment des institutions des peuples vivants !

1975. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Les Césars »

Comme le livre de Lerminier sur les Législateurs et les Constitutions de la Grèce antique, le livre du comte de Champagny sur les Césars 8, ou plutôt sur le monde romain au commencement de l’Empire, est destiné à faire tomber tout ce qui reste de préjugés ou de confusion touchant ce qu’on appelait autrefois la classique Antiquité.

1976. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Jacques Cœur et Charles VII »

Et quand il a taillé dans tout ce marbre, on n’en regrette pas les éclats tombés aux pieds de la statue… car on les retrouve autour du socle même, dans des notes de la plus vigilante et de la plus sûre érudition.

1977. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Montmorency » pp. 199-214

… Dans ce fouillis de gloire qu’on appelle les Montmorency, il doit y avoir, si on fait l’histoire de chaque tombe, bien de hautes vertus, de fières et chastes physionomies de femmes, de destinées sublimes de grandeur et de simplicité, qu’on pourrait nommer aussi : Madame de Montmorency, comme l’héroïne de Renée, et qu’on ne distinguerait pas, à la première vue, sous ce nom collectif porté comme un pavois par soixante générations, et qui nous brouille tout de sa splendeur.

1978. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Sévigné » pp. 243-257

Il est tombé, lui aussi, amoureux de cette créature si légère d’esprit, de conduite et de tout, qu’il n’a pas osé mettre, il est vrai, dans ses Femmes vertueuses du grand siècle, mais dont il a parlé comme si elle était une vertu, elle qui n’était qu’une coquetterie !

1979. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes et la société au temps d’Auguste » pp. 293-307

c’est un moderne, qui se jette et tombe dans son sujet avec son armature moderne, — et c’est d’une originalité et d’une sensation surprenantes que cette langue moderne, hardie, familière, pittoresque, cette langue que nous parlons tous dans le plain-pied de notre vie : à souper, entre les portants de deux coulisses, partout ; la langue du monde et non de la littérature, qui touche presque à l’argot et au néologisme, qui ne craint ni le mot plaisant, ni le mot débraillé, ni le mot cru, ni le mot nu, et que voici parlée comme les chroniqueurs de notre temps la parleraient dans un journal de notre temps, et appliquée hardiment aux plus hauts sujets et aux plus majestueuses figures, avec une aisance, un sans-façon et un brio dignes de Fervacques et de Bachaumont dans des chroniques d’hier !

1980. (1880) Goethe et Diderot « Note : entretiens de Goethe et d’Eckermann Traduits par M. J.-N. Charles »

qui n’a pas fini avec la vie de Gœthe et qui continue jusqu’après la tombe, jusqu’après même ce livre d’Eckermann, que je maintiens, moi, une ignorante et aveugle déposition contre Gœthe, et qu’on interprète en faveur de son génie et de sa gloire… Je me demande toujours pourquoi… 7.

1981. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IV. M. Henri Martin. Histoire de France » pp. 97-110

Il vaut bien mieux la faire tout doucement couler du pressoir de la Science désintéressée, comme une huile d’olive d’impartialité, qui ne pèse, ne souille et n’étouffe que quand enfin elle est tombée !

1982. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XI. MM. Mignet et Pichot. Charles Quint, son abdication, son séjour et sa mort au monastère de Yuste. — Charles V, chronique de sa vie intérieure dans le cloître de Yuste » pp. 267-281

Sans doute, la chronique est encore une forme intéressante de l’histoire, mais Charles-Quint, comme tous les personnages qui font question dans les Annales du monde, échappe à la chronique par la profondeur de son caractère ; et quelque dévoué que l’on soit à ramasser les épingles que l’histoire laisse parfois tomber, il y a mieux pourtant que ce travail de bésicles et de flambeau par terre, quand il s’agit d’un homme qu’il faut regarder en plein visage pour le pénétrer.

1983. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. le vicomte de Meaux » pp. 117-133

Seulement, il fallait s’y prendre comme l’Église, et, au xvie  siècle, le Pouvoir politique était tombé dans les mains de princes exceptionnellement abominables, qui, n’ayant ni sa vue surnaturelle des choses, ni la fermeté de sa justice tempérée de miséricorde, ne pouvaient pas agir comme elle.

1984. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 201-216

plus grande encore pour de malheureux cœurs tombés comme nous, les fils d’Ève !

1985. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Auguste Vacquerie » pp. 73-89

Toujours poète, c’est là son défaut, comme Μ. des Mazures : « Je me penche sur ses yeux profonds, — dit-il (les yeux de la chatte), — et il me semble voir là-bas, — tout au fond, — je ne sais quoi qui se débat, comme un malheureux tombé dans un puits et qui s’efforce de remonter, et qui appelle à l’aide, et qui se raccroche aux parois, et qui retombe toujours, — une âme, je le crois.

1986. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Alexandre de Humboldt »

Les deux à trois jugements plus ou moins durs et comme tout le monde en prononce dans sa vie, les deux à trois jugements qu’on trouve en ces lettres intimes, n’ont fait les blessures qui ont crié que parce qu’ils venaient de Humboldt ; que parce qu’ils tombaient de très haut !

1987. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIV. Alexandre de Humboldt »

Les deux à trois jugements plus ou moins durs et comme tout le monde en prononce dans sa vie, les deux à trois jugements qu’on trouve en ces lettres intimes n’ont fait les blessures qui ont crié, que parce qu’ils venaient de Humboldt ; que parce qu’ils tombaient de très haut !

1988. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXI. Sainte Térèse »

Soumis à la loi qui régit les choses pesantes, les hommes sont plus près de tomber dans les gouffres d’obscurité qui sont en bas, qu’ils ne sont capables de s’élancer aux gouffres de lumière qui sont en haut, et voilà pourquoi Sainte Térèse, qui monta et ne descendit jamais, Sainte Térèse, la Ravie et la Ravissante, l’emporte sur Pascal, dans les œuvres que nous avons d’elle, autant qu’elle l’emporta dans sa vie sur le farouche Solitaire qui ne réussit pas à être un Saint.

1989. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « E. Caro »

Au point de vue des amours-propres, c’est une opération, et une opération qui serait très douloureuse sans les ressources du chloroforme de la politesse et les inhalations du compliment… Après Renan, Taine et Vacherot, — les hures de saumon relatives après celle d’Hegel, — nous tombons dans la grenouillère et dans le fretin.

1990. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Edgar Quinet »

C’est pour me faire place que ces monarques d’un jour sont tombés, depuis les trilobites cuirassés, depuis les royales ammonites, jusqu’aux grands vertébrés… « Moi seul je suis le dominateur suprême en qui s’achève toute vie », — ce qui ne l’empêche pas de dire, quelques lignes plus haut ou plus loin, que l’homme pourrait bien n’être qu’un monarque éphémère, et que le temps approche où il sera détrôné.

1991. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Edgar Quinet. L’Enchanteur Merlin »

Par son Jacques Bonhomme, qu’il donne pour Sancho-Pança à Merlin transformé en Don Quichotte, nous glissons en Cervantes ; et enfin, nous tombons en plein dans le Dante, pèlerin aussi dans les trois vies, comme Merlin, et nous retournons, pour faire croire à la nôtre, la création de ce fier inventeur, en faisant, dans les limbes avant la vie, ce que Dante fait, lui, dans son triple monde d’expiation ou de récompense après la mort !

1992. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Agrippa d’Aubigné »

Les Romantiques de 1830, qui ont tant tourné et retourné le xvie  siècle, avaient trouvé, au milieu des os et des armures de cet ancien champ de batailles et de poésie, cette espèce de torse à la Michel-Ange, en corselet, qu’on appelle Agrippa d’Aubigné, — le poète-capitaine, — et ils avaient jeté un cri d’admiration devant la grande tournure de ses vers… Ce fut une surprise ; il était à peu près tombé dans l’oubli.

1993. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Le Sage » pp. 305-321

Au degré de corruption et d’abaissement où était, au xviiie  siècle, tombée la société française, on ne pouvait plus amuser cette société basse que par des peintures aussi basses qu’elle… III Misérable occupation, pour gagner sa vie, d’un homme médiocre qui n’a pas relevé par le talent ce qu’il a fait !

1994. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IV. »

Aujourd’hui ils sont tombés sur nous, et nous voilà tout haletants de notre plaie sanglante ; ensuite ils passeront à d’autres.

1995. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Les larmes qui tombent de ses yeux ne sont plus des larmes de regret et d’humiliation, mais des larmes de joie et de fierté ; car le soldat mutilé compte bientôt venger la défaite de nos vieilles légions. […] Tous les noms glorifiés aujourd’hui par une foule ignorante et désœuvrée tomberaient en cendres, si la sobriété du style reprenait dans la littérature le rang qui lui appartient. […] Régina et Saluce agenouillés sur la tombe de Clotilde, ravis dans une mutuelle extase, Régina évanouie emportée dans les bras de Saluce, seront toujours, aux yeux d’un goût sévère, une déplorable invention. […] Adrienne tombe frappée mortellement : dénouement qui ne dénoue rien, car, si le spectateur pressent l’issue de la lutte, le poète ne conclut pas. […] Elle proclame et démontre la nécessité des faits accomplis, et ressemble volontiers aux bergers qui attendent la fin de la journée, pour dire s’il doit tomber de la pluie à midi.

1996. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Nous repartîmes à bride abattue, traversant les champs, les baies ; longtemps il me resta dans l’oreille, ce son renvoyé par la tombe. […] Les gens qui ont beaucoup d’esprit tombent sous ce soupçon. […] Le soir tombe. […] Nous y tombons tous à un moment donné. […] Le pauvre petit, rejeton dégénéré d’une forte race, est adoré de la pauvre vieille tombée en enfance.

1997. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

Or il n’est pas sûr, mais il est très probable que, comme les hommes l’ont toujours cru, l’âme est immortelle et que la Divinité punit et récompense au-delà de la tombe. […] Nous dirons donc aux jeunes gens : goûtez les plaisirs étant jeunes pour ne point tomber sous leur servitude étant plus âgés et pour ne point même être étonnés et surpris par eux. […] L’erreur que l’on fait sur les arts, l’illusion dans laquelle on tombe à leur sujet, vient toute de là. […] Mais, en somme, ma loi, la loi de mon art, je la connais : la Comédie, par ce seul fait qu’elle peint des hommes et des hommes en tant qu’ils pensent et qu’ils sentent, tombe sous l’empire de la moralité et a à compter avec elle. […] De toutes les contrées, les plus favorables à la vertu sont celles où règne je ne sais quel souffle divin et qui sont tombées en partage à des divinités locales qui accueillent toujours avec bonté ceux qui viennent s’y établir.

1998. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Non : le génie n’est pas une névrose, mais il ne suffit pas à nous préserver d’en avoir une ; et, inversement, pour avoir une névrose, nous ne tombons pas au-dessous d’un lourdaud, d’un enfant, d’une bête. […] Marivaux, au rebours : c’est aux Fausses Confidences, c’est au Legs, c’est à l’Épreuve, c’est au Jeu de l’amour et du hasard que ses romans doivent de vivre ou, pour parler plus exactement, de n’être pas tombés tout à fait dans l’oubli. […] Je tâchai pourtant de la rassurer et de diminuer ses charmes en lui disant que bien des personnes qui ne la valaient pas avaient été reçues par des tritons et des naïades quand elles étaient tombées à l’eau. […] Il n’y a point de cœur à qui elle n’ait destiné quelque autre cœur ; elle n’a pas pris soin d’assortir toujours ensemble toutes les personnes dignes d’estime ; cela est fort mêlé, et l’expérience ne fait que trop voir que le choix d’une femme aimable ne prouve rien ou presque rien en faveur de celui sur qui il tombe. […] Ce ne sont donc pas seulement quelques inventions romanesques, — ou quelques-unes de ces suggestions qui n’en sont qu’autant qu’elles tombent dans un esprit déjà tout préparé, — ce sont vraiment certains principes, certaines théories même, dont on peut dire que Rousseau est redevable à Prévost.

1999. (1911) L’attitude du lyrisme contemporain pp. 5-466

Mais je courais le risque de tomber dans le système et la thèse, en voulant trop prouver. […] Bien des critiques tomberaient, entre autres le reproche de manquer de précision. […] Nos deux pèlerins sont tombés sanglants. […] Le sens de la vie nous empêche de tomber dans l’abstraction et de suivre notre logique jusqu’à ses limites. […] Appelons simplement Sully Prudhomme : le poète du Vase brisé, et que le reste tombe eu oubli.

2000. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion statique »

Une fois engagée dans cette voie, il n’est guère d’absurdité où ne puisse tomber l’intelligence. […] Qu’une pierre tombe et vienne écraser un passant, c’est qu’un esprit malin l’a détachée : il n’y a pas de hasard. […] Une énorme tuile, arrachée par le vent, tombe et assomme un passant. […] Entre nous soit dit, cela ne me faisait pas grand mal, car il s’agissait de dents qui seraient tombées d’elles-mêmes ; mais je n’étais pas encore installé dans le fauteuil à bascule que je poussais déjà des cris épouvantables, pour le principe. […] Supposons qu’il en ait été ainsi au départ, et que l’exogamie soit tombée en route dans beaucoup de cas.

2001. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

. — Qui vint combattre sous vos murs, ô mes concitoyens, les derniers et sublimes efforts de la liberté mourante, incendier vos habitations, massacrer votre jeunesse, présider aux plus féroces exécutions, tomber le sabre à la main sur des malheureux échappés aux mitraillades ? […] Et en général, même quand il s’agit des meilleurs écrits de Camille Jordan, parlons moins de son style que de son langage soutenu, toujours noble, de sa parole même : elle a l’ampleur, l’abondance, le flumen ; elle se présente par de larges surfaces et se déroule d’un plein courant, comme il sied à ce qui tombe et s’épanche du haut d’une tribune : elle n’offre pas la nouveauté, l’imprévu, l’éclat, la finesse, qu’on aime à distinguer chez un écrivain proprement dit, les expressions créées, les alliances heureuses, la fleur du détail et ce qui accidente à chaque pas la route. […] Il me semblait mettre une barrière éternelle entre moi et tous ceux que j’aime, et j’étais si souffrante en arrivant à Turin que j’ai cru tomber tout à fait malade. […] » Mme de Staël l’avait précédé dans la tombe : si elle lui avait survécu, elle l’aurait approuvé et applaudi jusqu’au terme ; elle l’eût de plus en plus admiré.

2002. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DAUNOU (Cours d’Études historiques.) » pp. 273-362

Il avait défendu qu’aucun discours ne fût prononcé sur sa tombe, mais il n’a pu réprimer également les voix du lendemain. […] Ce qui ne tombe pas immédiatement sous les sens, ou ne peut s’en déduire avec précision, est absolument pour nous comme n’existant pas. […] Daunou n’a pas laissé de railler l’ancien, le très-ancien Boulogne sur le peu de littérature du cru : sous le pseudonyme de James Humorist, il rend compte des singulières inscriptions qu’on avait mises à Wimille sur la tombe des infortunés aéronautes Pilâtre de Rosier et Romain, et il en prend occasion de décocher son trait malin à ses compatriotes d’avant 89. […] Le procès-verbal officiel ajoute à cet endroit : « Une d’elles, succombant à l’oppression du sentiment, s’évanouit et tombe dans les bras de ses compagnes. » 110.

2003. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre V. Swift. » pp. 2-82

Ils vivent en rois tombés, toujours insultants et blessés, ayant toutes les misères de l’orgueil, n’ayant aucune des consolations de l’orgueil, incapables de goûter ni la société ni la solitude, trop ambitieux pour se contenter du silence, trop hautains pour se servir du monde, nés pour la rébellion et la défaite, destinés par leur passion et leur impuissance au désespoir et au talent. […] Il est à craindre que, six mois après l’acte du Parlement pour l’extirpation de l’Évangile, les fonds de la banque et des Indes-Orientales ne tombent au moins de 1 pour 100. […] Quand, dans sa jeunesse, il a essayé des odes pindariques, il est tombé déplorablement. […] Il amène « des témoins, des questions de fait, des sentences avec dépens. » On crie si fort que la déesse craint de tomber en discrédit, d’être chassée de l’Olympe, renvoyée dans la mer, sa patrie, « pour y vivre parquée avec les sirènes crottées, réduite au poisson, dans un carême perpétuel. » Quand ailleurs il raconte la touchante légende de Philémon et Baucis, il l’avilit par un travestissement.

2004. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

Elle le sait, elle n’en est point troublée, elle reste toujours maîtresse de soi, elle ne donne jamais de prise, elle n’a point d’éblouissements, elle combat pied à pied, sentant que tout le monde est pour lui, que personne n’est pour elle, qu’elle perd du terrain, qu’elle en perdra davantage, qu’elle tombera, qu’elle tombe. […] Vous tombez dans les phrases emphatiques et bien écrites1074 ; vous ne voulez pas montrer la nature telle qu’elle est, telle que la montre Shakspeare, lorsque, piquée par la passion comme par un fer rouge, elle crie, se cabre et bondit par-dessus vos barrières. […] L’un flageole debout, écœuré, pendant qu’un hoquet entr’ouvre ses lèvres vomissantes ; l’autre hurle rauquement, en mauvais dogue ; celui-ci, crâne chauve et fendu, raccommodé par places, tombe en avant, précipité sur la poitrine, avec un sourire d’idiot malade.

2005. (1904) Zangwill pp. 7-90

Il ne faut pas trop se hasarder en conjectures, mais enfin c’est parce qu’il y a une France, ce me semble, qu’il y a eu un La Fontaine et des Français. » Mon Dieu oui ; seulement il y a une France pour tout le monde, la France luit pour tout le monde, et tous les Français, s’ils seront toujours français, ne sont pas La Fontaine ; je n’insiste pas sur toutes ces difficultés, sur toutes ces contrariétés ; je m’en tiens pour aujourd’hui à la forme même du connaissement ; la méthode ne se révèle pas dans toutes les œuvres modernes partout avec une aussi haute audace ; elle ne fait pas dans toutes les œuvres modernes partout l’objet d’une aussi manifeste déclaration que dans cet éminent La Fontaine ; elle est ailleurs plus ou moins dissimulée, plus ou moins implicite ; mais c’est essentiellement, éminemment, la méthode historique moderne, obtenue par le transport, par le transfert direct, en bloc, des méthodes scientifiques modernes dans le domaine de l’histoire ; l’auteur, en bon compagnon, commence par faire son tour de France ; il ferait son tour du monde, s’il était meilleur compagnon ; et quand il a fini son tour du pays, il commence l’autre tour, afin de ne point tomber par mégarde au cœur de son sujet, il commence le tour le plus cher à tout historien bien né, le tour des livres et des bibliothèques ; avec ce tour commencera le paragraphe deux. […] Incroyable naïveté savante, orgueil enfantin des doctes et des avertis ; l’humanité a presque toujours cru qu’elle venait justement de dire son dernier mot ; l’humanité a toujours pensé qu’elle était la dernière et la meilleure humanité, qu’elle avait atteint sa forme, qu’il allait falloir fermer, et songer au repos de béatitude ; ce qui est intéressant, ce qui est nouveau, ce n’est point qu’une humanité après tant d’autres, ce n’est point que l’humanité moderne ait cru, à son tour, qu’elle était la meilleure et la dernière humanité ; ce qui est intéressant, ce qui est nouveau, c’est que l’humanité moderne se croyait bien gardée contre de telles faiblesses par sa science, par l’immense amassement de ses connaissances, par la sûreté de ses méthodes ; jamais on ne vit aussi bien que la science ne fait pas la philosophie, et la vie, et la conscience ; tout armé, averti, gardé que fût le monde moderne, c’est justement dans la plus vieille erreur humaine qu’il est tombé, comme par hasard, et dans la plus commune ; les propositions les plus savamment formulées reviennent au même que les anciens premiers balbutiements ; et de même que les plus grands savants du monde, s’ils ne sont pas des cabotins, devant l’amour et devant la mort demeurent stupides et désarmés comme les derniers des misérables, ainsi la mère humanité, devenue la plus savante du monde, s’est retrouvée stupide et désarmée devant la plus vieille erreur du monde ; comme au temps des plus anciens dieux elle a mesuré les formes de civilisation atteintes, et elle a estimé que ça n’allait pas trop mal, qu’elle était, qu’elle serait la dernière et la meilleure humanité, que tout allait se figer dans la béatitude éternelle d’une humanité Dieu. […] Mais, si on l’ouvre pour examiner l’arrangement intérieur de ses organes, on y trouve un ordre aussi compliqué que dans les vastes chênes qui la couvrent de leur ombre ; on la décompose plus aisément ; on la met mieux en expérience ; et l’on peut découvrir en elle les lois générales, selon lesquelles toute plante végète et se soutient. » Je me garderai de mettre un commentaire de détail à ce texte ; il faudrait écrire un volume ; il faudrait mettre, à chacun des mots, plusieurs pages de commentaires, tant le texte est plein et fort ; et encore on serait à cent lieues d’en avoir épuisé la force et la plénitude ; et je ne peux pas tomber moi-même dans une infinité du détail ; d’ailleurs nous retrouverons tous ces textes, et souvent ; c’était l’honneur et la grandeur de ces textes pleins et graves qu’ils débordaient, qu’ils inondaient le commentaire ; c’est l’honneur et la force de ces textes braves et pleins qu’ils bravent le commentaire ; et si nul commentaire n’épuise un texte de Renan, nul commentaire aussi n’assied un texte de Taine ; aujourd’hui, et de cette conclusion, je ne veux indiquer, et en bref, que le sens et la portée, pour l’ensemble et sans entrer dans aucun détail ; à peine ai-je besoin de dire que ce sens, dans Taine, est beaucoup plus grave, étant beaucoup plus net, que n’étaient les anticipations de Renan ; ne nous laissons pas tromper à la modestie professorale ; ne nous laissons d’ailleurs pas soulever à toutes les indignations qui nous montent ; je sais qu’il n’v a pas un mot dans tout ce Taine qui aujourd’hui ne nous soulève d’indignation ; attribuer, limiter Racine au seul dix-septième siècle, enfermer Racine dans le siècle de Louis XIV, quand aujourd’hui, ayant pris toute la reculée nécessaire, nous savons qu’il estime des colonnes de l’humanité éternelle, quelle inintelligence et quelle hérésie, quelle grossièreté, quelle présomption, au fond quelle ignorance ; mais ni naïveté, ni indignation ; il ne s’agit point ici de savoir ce que vaut Taine ; il ne s’agit point ici de son inintelligence et de son hérésie, de sa grossièreté, de son ignorance ; il s’agit de sa présomption ;  il s’agit de savoir ce qu’il veut, ce qu’il pense avoir fait, enfin ce que nous voyons qu’il a fait, peut-être sans y penser ; il s’agit de savoir, ou de chercher, quel est, au fond, le sens et la portée de sa méthode, le sens et la portée des résultats qu’il prétend avoir obtenus ; ce qui ressort de tout le livre de Taine, et particulièrement de sa conclusion, c’est cette idée singulière, singulièrement avantageuse, que l’historien, j’entends l’historien moderne, possède le secret du génie. […] De la réalité nous avons reçu trop de rudes avertissements ; au moment même où j’écris, l’humanité, qui se croyait civilisée, au moins quelque peu, est jetée en proie à l’une des guerres les plus énormes, et les plus écrasantes, qu’elle ait jamais peut-être soutenues ; deux peuples se sont affrontés, avec un fanatisme de rage dont il ne faut pas dire seulement qu’il est barbare, qu’il fait un retour à la barbarie, mais dont il faut avouer ceci, qu’il paraît prouver que l’humanité n’a rien gagné peut-être, depuis le commencement des cultures, si vraiment la même ancienne barbarie peut reparaître au moment qu’on s’y attend le moins, toute pareille, toute ancienne, toute la même, admirablement conservée, seule sincère peut-être, seule naturelle et spontanée sous les perfectionnements superficiels de ces cultures ; les arrachements que l’homme a laissés dans le règne animal, poussant d’étranges pousses, nous réservent peut-être d’incalculables surprises ; et sans courir au bout du monde, parmi nos Français mêmes, quels rudes avertissements n’avons-nous pas reçus, et en quelques années ; qui prévoyait qu’en pleine France toute la haine et toute la barbarie des anciennes guerres civiles religieuses en pleine période moderne serait sur le point d’exercer les mêmes anciens ravages ; derechef qui prévoyait, qui pouvait prévoir inversement que les mêmes hommes, qui alors combattaient l’injustice d’État, seraient exactement les mêmes qui, à peine victorieux, exerceraient pour leur compte cette même injustice ; qui pouvait prévoir, et cette irruption de barbarie, et ce retournement de servitude ; qui pouvait prévoir qu’un grand tribun, en moins de quatre ans, deviendrait un épais affabulateur, et que des plus hautes revendications de la justice il tomberait aux plus basses pratiques de la démagogie ; qui pouvait prévoir que de tant de mal il sortirait tant de bien, et de tant de bien, tant de mal ; de tant d’indifférence tant de crise, et de tant de crise tant d’indifférence ; qui aujourd’hui répondrait de l’humanité, qui répondrait d’un peuple, qui répondrait d’un homme.

2006. (1928) Les droits de l’écrivain dans la société contemporaine

La Cour de Cassation n’a-t elle pas jugé, affirme-t-on, que l’on a le droit de reprendre des lettres confidentielles, si elles sont sorties des mains du destinataire et tombées, par exemple, dans celles des héritiers d’une succession ou dans celles d’un marchand d’autographes ? […] Car, en fait, qu’arrive-t-il lorsque l’œuvre tombe dans le domaine public ? […] La Cour de Cassation a même jugé qu’à la mort du destinataire, le signataire d’une lettre confidentielle peut la réclamer ; elle a décidé qu’une lettre confidentielle ne tombe pas dans l’hérédité de celui qui la reçut. […] Du plus haut au plus infime écrivain, chacun a consenti jusqu’ici à laisser le marchand d’autographes, l’échotier, l’historien, le critique, vivre des miettes qui tombent de notre table ou en nourrir le public.

2007. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Catholiques ou protestants, c’est un point dont on ne tardera pas à tomber d’accord, et là est le bénéfice net, si l’on ose ainsi parler, du mouvement de la Réforme et des guerres de religion. […] Il n’y tombe pas encore tout à fait dans les Poèmes ; — et c’est qu’il lui faut auparavant passer par l’alexandrinisme, — [Cf.  […] XXV, p. 261]. — Son intention déclarée de réagir contre le paganisme ambiant. — La Première Sepmaine, 1579, et La Seconde, 1584. — La Première est une adoration de Dieu dans les merveilles de la nature ; — la Seconde est une sorte d’histoire universelle. — La description et l’éloquence dans les poésies de Du Bartas. — Du style de Du Bartas et de l’absence d’art qui le caractérise. — Qu’il est responsable avec Baïf du discrédit où est tombé Ronsard. — De Du Bartas comme caricature de Ronsard. — Efforts inutiles de la critique pour le relever. — Son influence est aussi difficile à saisir que son œuvre a été populaire en son temps. — Explication de cette singularité. […] 2º L’Homme et l’Écrivain. — Injuste oubli dans lequel est tombé Du Vair ; — quoique d’ailleurs il ait été évêque-comte de Lisieux, — premier président du parlement de Provence ; — et deux fois garde des sceaux de France ; — ou peut-être pour l’avoir été. — Son rôle politique ne semble pas en effet avoir ajouté beaucoup à sa réputation [Cf. 

2008. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

Elles sont tombées toutes très rapidement, non pas uniquement par leurs fautes, mais en grande partie par leurs fautes. Elles sont tombées par l’effet de leur égoïsme ; elles sont tombées parce qu’elles ont commis cette erreur du cœur et de l’esprit de croire qu’une victoire est une curée. […] Ce n’est pas lui qui tombera dans le ridicule qu’ont les Français de ne rien trouver plus beau que leur patrie. […] Il ne tombe pas de haut, il ne monte pas précisément d’en bas, il nous entoure, nous circonvient et nous enlace de tous les côtés. […] Descendons sur notre globe : est-ce que la quantité de pluie qui tombe chaque année en tout pays n’est pas sensiblement égale ?

2009. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome II

Dans la soirée, le tube d’argent tomba avec la ligature. […] Le lendemain, le tube d’argent tomba avec sa ligature, et quelques jours après le chien était parfaitement guéri. […] Tous mes efforts pour obtenir ces sortes de fistules ont été infructueux, toujours le tube est tombé et la continuité du canal pancréatique s’est rétablie. […] Le lendemain, le tube était tombé et l’animal guérit très rapidement. […] Le 16 septembre, il tomba dans le coma et mourut le lendemain.

2010. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Le roi, qui avait déjà franchi les ports1, retourna en toute hâte sur ses pas ; mais la nuit tombait quand il parvint au lieu du désastre : les montagnards s’étaient dispersés, et on ne pouvait même savoir où les poursuivre. […] Tu sais, Seigneur, que j’ai toujours désiré mourir pour ta sainte foi. » Il fit deux ou trois pas et tomba de nouveau à genoux, et, inclinant la tête, les bras tendus en croix, les regards vers le ciel, il rendit l’âme. […] Peut-être même une entaille accidentelle dans un rocher voisin suggéra-t-elle dès lors l’idée qu’il avait voulu briser sa bonne épée, pour qu’elle ne tombât pas aux mains de l’ennemi, et n’avait réussi qu’à entamer la pierre. […] « Les villes et les châteaux tombent en décadence quand ils viennent aux mains d’héritiers indignes. » 215. […] « Tombèrent. » 311.

2011. (1896) Les Jeunes, études et portraits

Aujourd’hui, en dépit de l’adoucissement des mœurs et malgré l’usure du temps, ce qui reste caractéristique de la sensibilité espagnole, c’est le cri que jette au ciel chaque petite ville assemblée dans son cirque quand tombe le taureau. […] Comment est-elle tombée ? […] Jacques est enfin tombé, peu s’en faut, aussi bas que Tullio. […] Les hommes disent que les sirènes n’existent pas, qu’il n’y a pas de faune accroupi dans les blés, et que les hêtres tombent sans que la hache qui les frappe rougisse du sang de la dryade. […] Et comme elle se penchait vers lui, sa chevelure se répandit et, du haut de la tour, inonda le jeune homme : « Toute ta chevelure, Mélisande, toute ta chevelure est tombée de la tour !

2012. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. » pp. 124-157

» Sa sœur Eugénie, qui habite Rouen, tombe mortellement malade, et l’on n’attend plus que sa fin ; Mme Valmore écrit à sa nièce, fille d’Eugénie, de respecter ce qui peut lui rester encore d’espérance de guérison : « (5 septembre 1850)… J’attends une lettre avec la plus grande anxiété, et votre silence me jette dans l’effroi. […] Quand il faut de part et d’autre travailler durement pour ne pas tomber dans la dernière indigence, les ailes de l’âme se replient et remettent tous les élans à l’avenir. » Pour l’anniversaire de la mort de sa sœur Eugénie, elle écrit à cette même nièce : « (6 septembre 1854)… Il me serait bien difficile de penser à ton adorable mère sans te mêler aussi dans les larmes que mon cœur lui donne, ma pauvre enfant, toi qu’elle a tant aimée ! 

2013. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Charles Labitte »

et voilà que je suis entré tout savant dans la tombe, tout jeune dans l’Érèbe !  […] Si Lucrèce nous rend avec une saveur amère les angoisses des mortels, nul aussi n’a peint plus fermement et plus fièrement que lui la majesté sacrée de la nature, le calme et la sérénité du sage ; à ce titre auguste, le pieux Virgile lui-même, en un passage célèbre, le proclame heureux : Félix qui potuit rerum , etc… Quoi qu’il en soit cependant de l’énigme que le poëte nous propose, et si tant est qu’il y ait vraiment énigme dans son œuvre, c’était aux expressions de trouble et de douleur que s’attachait surtout notre ami ; le livre III, où il est traité à fond de l’âme humaine et de la mort, avait attiré particulièrement son attention ; dans son exemplaire, chaque trait saillant des admirables peintures de la fin est surchargé de coups de crayon et de notes marginales, et il s’arrêtait avec réflexion sur cette dernière et fatale pensée, comme devant l’inévitable perspective : « Que nous ayons vécu peu de jours, ou que nous ayons poussé au-delà d’un siècle, une fois morts, nous n’en sommes pas moins morts pour une éternité ; et celui-là ne sera pas couché moins longtemps désormais, qui a terminé sa vie aujourd’hui même, et celui qui est tombé depuis bien des mois et bien des ans : Mors aeterna tamen nihilominus illa manebit ; Nec minus ille diu jam non erit, ex hodierno Lumine qui finem vitaï fecit, et ille Mensibus atque annis qui multis occidit ante. » Notre ami était donc en train d’attacher ses travaux à des sujets et à des noms déjà éprouvés, et les moins périssables de tous sur cette terre fragile ; il voguait à plein courant dans la vie de l’intelligence ; des pensées plus douces de cœur et d’avenir s’y ajoutaient tout bas, lorsque tout d’un coup il fut saisi d’une indisposition violente, sans siège local bien déterminé, et c’est alors, durant une fièvre orageuse, qu’en deux jours, sans que la science et l’amitié consternées pussent se rendre compte ni avoir prévu, sans aucune cause appréciable suffisante, la vie subitement lui fit faute ; et le vendredi 19 septembre 1845, vers six heures du soir, il était mort quand il ne semblait qu’endormi.

2014. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

Il y a, entre autres, une mémorable scène, c’est quand Bernier, le loyal vassal, qui a retrouvé sa mère religieuse dans un couvent de ce même pays du Vermandois qu’on va ravager, est tout d’un coup surpris par l’incendie de l’abbaye, à laquelle Raoul, le fougueux baron, avait pourtant la veille accordé la paix ; mais un incident survenu a retourné soudainement sa volonté aveugle et enflammé sa colère ; il a commandé qu’on mit le feu, et il a été trop bien obéi : Brûlent les cellules, s’effondrent les planchers ; Les vins s’épandent, s’enfoncent les celliers ; Les jambons brûlent et tombent les lardiers ; Le sain-doux fait le grand feu redoubler ; Il (le feu) s’attache aux tours et au maître-clocher : Force est bien aux couvertures de trébucher ; Entre deux murs est si grand le brasier, Que toutes cent (les nonnains) brûlent écrasées ; Marcens y brûle, qui fut mère à Bernier, Et Clamados, la fille au duc Renier… De pitié pleurent les hardis chevaliers. […] Dans Raoul de Cambrai, au commencement et le matin d’une bataille, ces barons qui chevauchent si serrés que, si l’on jetait un gant sur les heaumes, il ne tomberait pas à terre d’une grande lieue.

2015. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (4e partie) » pp. 1-63

Aux derniers coups de canon, aux cris de victoire du peuple, à la vue de ses écrins, de ses bijoux, de ses portefeuilles, de ses secrets étalés et profanés sous ses yeux comme les dépouilles de sa personne et de son cœur, elle était tombée dans un abattement immobile, mais toujours fier. […] IX On accusa le général de perfidie envers le gouvernement, qu’il voulait, disait-on, remplacer en se rendant nécessaire, pendant que ce général, coupable seulement d’imprévoyance et de lenteur dans le rassemblement des troupes qu’on lui avait prodiguées, voyait avec désespoir tomber ses braves lieutenants, et se prolonger l’inexplicable conflit de toute une nation contre une émotion de faubourg, mal réprimée le matin, formidable le soir.

2016. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (1re partie). Littérature scientifique » pp. 221-288

L’épave s’élevait comme une tombe couverte de gazon — où devaient être les restes de ceux que la cruelle tempête avait vus exhaler leur vie dans une suprême lutte contre la mort ! […] Puisse le destin, que notre affection implore en tremblant pour toi, t’accorder toujours la même faveur, toutes les fois que l’autre hémisphère attirera tes pas ; puisse-t-il te ramener toujours heureusement aux rivages de ta patrie, le front ceint d’une nouvelle couronne… Pour moi, dans le sein de l’amitié, je ne demande qu’une maison tranquille, où ton nom réveille dans mon fils le désir d’atteindre ta renommée, une tombe qui me recouvre, un jour, avec ses frères… Allez maintenant, mes vers, allez dire à celui que j’aime que ces chants vont timidement à lui, des collines d’Albano ; d’autres porteront plus haut sa gloire, sur les ailes de la poésie… » Pendant qu’Alexandre de Humboldt, faisant collaborer à son œuvre tous les savants français, par un concours de travaux spéciaux dont il leur donnait les sujets, et dont il payait les frais de sa fortune, formait une œuvre sur les régions équinoxiales, dont le prix dépassait déjà 5 ou 6 mille francs l’exemplaire, monument plus digne d’une nation que d’un particulier, Guillaume, chassé de Rome par Bonaparte, rentrait attristé dans sa patrie.

2017. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

Henri Baude est parfois étonnant d’audace naturaliste, dans sa manière sobre et mordante, où il détache d’un mot sec et saisissant la réalité qu’il veut montrer : et Dieu sait sur quelles réalités tombe son œil implacable d’observateur et de peintre ! […] Tout le secret du mépris où les meilleures œuvres du moyen âge tombèrent injustement, est là : le moyen âge lui-même ne les a pas respectées.

2018. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre cinquième »

Un récit de la pomme eût fait tomber son Guillaume Tell ; la scène en action le fit réussir. […] Piron disait d’une pièce de Voltaire qui n’avait pas réussi : « Il voudrait bien que j’en fusse l’auteur » ; mot charmant, parce qu’il contient à la fois une épigramme contre le poète tombé et un hommage au goût du critique.

2019. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, le 8 décembre 1885. »

ou est il le nocturne monde de merveille, duquel un lierre et une vigne, en un intime enlacement, sur la tombe de Tristan et Isolde s’élevèrent, — comme le Dire nous le conte ! […] — dans la vue divinement punissante de la tombe doit se plonger, à lui, Amfortas, le gardien pécheur du Sanctuaire, nous sommes préparés : y aura-t-il à sa rongeante souffrance d’âme une rédemption ?

2020. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

Elle peint industrieusement les affres de la mort, le cadavre, le ver de la tombe, la décomposition de nos misérables restes ; en même temps elle éclaire toute cette pourriture d’un rayon d’immortalité1, et nous montre les héros abattus par la mort, mais relevés par Dieu qui pardonne, plus triomphants qu’à Rocroy ou Austerlitz. […] Mais, à notre tour, prenons garde à ne pas tomber dans l’exagération.

2021. (1913) La Fontaine « I. sa vie. »

Fouquet, pour les raisons que vous savez, pour des raisons très sérieuses, les historiens en sont sûrs, Fouquet tomba, cet homme que nous ne pouvons pas nous empêcher, non seulement de plaindre mais d’aimer ; car il était charmant, Fouquet ; il était tout à fait un Italien, un grand seigneur italien du seizième siècle : il aimait les arts, il aimait les lettres, il aimait les choses somptueuses, il aimait les grandes architectures, les appartements magnifiques, il aimait la conversation des femmes élégantes et distinguées, il aimait la conversation des poètes, tout ce qui était beauté était l’objet des amours et des passions de Fouquet. […] Son discours n’a rien de très remarquable, si ce n’est qu’il y prenait déjà formellement l’engagement de ne plus tomber dans ses erreurs littéraires.

2022. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

Il est parti de Madame Bovary pour descendre à Salammbô, de Salammbô pour descendre à L’Éducation sentimentale, de L’Éducation sentimentale pour tomber à La Tentation de saint Antoine, et de La Tentation de saint Antoine pour rouler jusqu’à Bouvard et Pécuchet, brutalement interrompu par la mort ! […] il n’a pas, malheureusement, emporté avec lui son livre de Bouvard et Pécuchet, qui nous reste, et qu’on peut mettre sur sa tombe comme une croix.

2023. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre II. Axiomes » pp. 24-74

C’est là la source inépuisable des erreurs où sont tombés toutes les nations, tous les savants, au sujet des commencements de l’humanité ; les premières s’étant mises à observer, les seconds à raisonner sur ce sujet dans des siècles d’une brillante civilisation, ils n’ont pas manqué de juger d’après leur temps, des premiers âges de l’humanité, qui naturellement ne devaient être que grossièreté, faiblesse, obscurité. […] Le même axiome nous montre que les philosophes sont restés à moitié chemin en négligeant de donner à leurs raisonnements une certitude tirée de l’autorité des philologues ; que les philologues sont tombés dans la même faute, puisqu’ils ont négligé de donner aux faits le caractère de vérité qu’ils auraient tiré des raisonnements philosophiques.

2024. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — II. (Fin.) » pp. 330-342

Sa passion ne l’empêche pas de rendre justice aux ennemis et adversaires quand ils tombent ; et celui qui s’est montré pamphlétaire envenimé dans la Confession de Sancy, implacable insulteur dans Les Tragiques, parle de Charles IX et de Henri III dans son Histoire en des termes qui ne sont que modérés : Voilà la fin de Henri troisième, dit-il après l’assassinat de Saint-Cloud, prince d’agréable conversation avec les siens, amateur des lettres, libéral par-delà tous les rois, courageux en jeunesse, et lors désiré de tous ; en vieillesse, aimé de peu ; qui avait de grandes parties de roi, souhaité pour l’être avant qu’il le fût, et digne du royaume s’il n’eût point régné : c’est ce qu’en peut dire un bon Français.

2025. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. Louis de Viel-Castel » pp. 355-368

Chaque régime qui a ses raisons d’être amène à sa suite et fait plus ou moins surgir son cortège naturel, les générations nées en même temps, éveillées au même signal, qui en ont l’esprit, le sentiment, l’intelligence, les espérances d’abord avec les ambitions, et plus tard, s’il tombe, les regrets.

2026. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. »

A sa forme, on sentait la femme gracieuse ; On la saluait reine à son air froid et doux ; Et quand elle marchait, ombre silencieuse, Devinant la déesse, on tombait à genoux.

2027. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mémoires de Casanova de Seingalt. Écrits par lui-même. »

De nouvelles chances l’avaient ramené de Corfou à Venise, où, tombé dans la misère et presque dans l’avilissement, il s’était relevé à temps par la connaissance qu’il avait faite du bon M. de Bragadin, riche sénateur, qui l’avait adopté pour son fils.

2028. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VII. Du style des écrivains et de celui des magistrats » pp. 543-562

C’est ce qu’Horace recommande dans son Art poétique, lorsqu’il dit : « Il est permis, et il le sera toujours, de donner cours à des mots nouveaux dans la langue ; et comme lorsque les bois changent de feuilles, les premières tombent pour faire place aux suivantes, de même les mots anciens s’usent par le temps, tandis que les nouveaux ont toute la fraîcheur et toute la force de la jeunesse. » Ce serait nuire au style français que d’établir qu’il n’est pas permis de se servir à présent d’un mot qui ne se trouve pas dans le Dictionnaire de l’Académie.

2029. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre III. L’écrivain »

Les personnages y sont généraux ; dans les circonstances particulières et personnelles, on aperçoit les diverses conditions et les passions maîtresses de la vie humaine, le roi, le noble, le pauvre, l’ambitieux, l’amoureux, l’avare, promenés à travers les grands événements, la mort, la captivité, la ruine ; nulle part on ne tombe dans la platitude du roman réaliste et bourgeois.

2030. (1858) Cours familier de littérature. V « Préambule de l’année 1858. À mes lecteurs » pp. 5-29

Lorsque, après la révolution de 1830, que j’avais vue avec douleur, je voulus entrer dans les assemblées publiques pour y défendre à la tribune, selon mes forces, non cette révolution, mais la liberté, un poète fameux alors, tombé depuis, relevé aujourd’hui par sa noble résipiscence, écrivit contre moi une satire sous le titre de Némésis.

2031. (1861) Cours familier de littérature. XI « Atlas Dufour, publié par Armand Le Chevalier. » pp. 489-512

Des écailles tombent de vos yeux à chaque nouvelle mappemonde dessinée par le compas des grands géographes.

2032. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre II. Signes de la prochaine transformation »

« Je juge le monde et le considère comme les ombres chinoises… Je pense au néant de la gloire… Je pense au néant de l’ambition. » Et la nuit descend, enveloppant le songeur ; les Tartares font rentrer leurs moutons ; une voix tombe du haut minaret : recueillant ses pensées, l’homme s’enfonce dans la nuit sur un cheval tartare611 .

2033. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « I. Leçon d’ouverture du Cours d’éloquence française »

Mais, Messieurs, cette surabondance de notes mise à part, le reproche de la Faculté tombait à faux.

2034. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Baudelaire, Charles (1821-1867) »

Pierre Louÿs Fleurs du mal : La tombe t’environne et le vol des harpies Tourne autour de sa main ténébreuse, où fleurit Comme un bouquet mauvais, le mortel manuscrit Lié d’affreux fils blancs qu’il applique en charpies.

2035. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Leconte de Lisle, Charles-Marie (1818-1894) »

Mais c’est le mal du siècle tombé dans une nature intellectuelle, et c’est une poésie dont le tissu premier est une trame d’idées.

2036. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Avertissement sur la seconde édition. » pp. 23-54

Une telle accusation ne peut tomber avec justice que sur l’esprit caustique qui s’exerce à mortifier l’amour-propre, sans se proposer d’autre but que celui de mortifier : le nôtre a été constamment d’instruire & de corriger, s’il étoit possible ; tout ce que nous avons dit a été animé par ce désir, & dirigé vers cet objet.

2037. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Montalembert orateur. » pp. 79-91

Fils d’une mère anglaise, on croirait sentir dans sa voix, à travers la douceur apparente, une certaine accentuation montante qui ne messied pas, qui fait tomber certaines paroles de plus haut et les fait porter plus loin.

2038. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Police générale d’une Université et police, particulière d’un collège. » pp. 521-532

La facilité d’entrer dans les écoles publiques, l’ambition des parents, leur avarice qui leur fait préférer à tout apprentissage celui qui ne coûte rien, tire une multitude d’enfants de la profession de leurs pères, de grandes maisons de commerce s’éteignent, d’importantes manufactures tombent ou dégénèrent, des corps de métiers s’appauvrissent, et pourquoi cela ?

2039. (1860) Ceci n’est pas un livre « Décentralisation et décentralisateurs » pp. 77-106

Elles s’en vont — à petit bruit — relever pieusement les éclopés du champ de bataille parisien, tombés sous les coups de la cabale et des coteries.

2040. (1912) L’art de lire « Chapitre V. Les poètes »

« Comme un aigle qu’on voit toujours, soit qu’il vole au milieu des airs, soit qu’il se pose sur le haut de quelque rocher, porter de tous côtés ses regards perçants, | et tomber si sûrement sur sa proie qu’on ne peut éviter ses ongles non plus que ses yeux ; | aussi vifs étaient les regards, aussi vite et impétueuse était l’attaque, aussi fortes et inévitables, | étaient les mains du prince du Condé. » Au point de vue de la tenue de l’haleine, il faut scander, je crois, comme j’ai fait ; mais au point de vue de l’harmonie expressive il faut accentuer les mots airs, rocher, perçants, proie, yeux, regards, attaque et inévitables, et alors nous voyons que les choses sont peintes par les mots, et c’est-à-dire, ici, par le rythme général, par les sonorités et par les silences.

2041. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le capitaine d’Arpentigny »

C’est un formicaleo d’idées, qui fait tomber toutes les notions et les connaissances qu’il a recueillies dans la théorie qu’il s’est creusée.

2042. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Buloz »

III Aussi eut-elle, sinon immédiatement, un succès qui se consolida, et avec une telle force qu’on put le croire indestructible… Pendant vingt-cinq ans pour le moins, en effet, ni les fautes de Buloz, — de piéton modeste et incomparable devenu directeur assis et incompétent, — ni ses humeurs peccantes qui feraient le bonheur d’un médecin de Molière, ni sa tyrannie bourrue et tracassière, ni son orgueil durci par la fortune, ni les bornes sourdes de son esprit, ni ses procédés hérissons, ni ses grognements ursins, ni l’horreur de ses meilleurs écrivains mis en fuite par cet ensemble de choses charmantes, ni l’ennui enfin le plus compacte qui soit jamais tombé d’un recueil périodique sur le lecteur assommé, rien n’a pu le diminuer, ce succès étrange, ou l’interrompre un seul jour… C’est à n’y pas croire !

2043. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. de Lacretelle » pp. 341-357

Mais il essaya d’en descendre, de ce plafond d’Homère, et pour lui, ce fut là tomber !

2044. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Sainte Térèse » pp. 53-71

Soumis à la loi qui régit les choses pesantes, les hommes sont plus près de tomber dans les gouffres d’obscurité qui sont en bas qu’ils ne sont capables de s’élancer aux gouffres de lumière qui sont en haut, et voilà pourquoi sainte Térèse, qui monta et ne descendit jamais, sainte Térèse, la Ravie et la Ravissante, l’emporte sur Pascal, dans les œuvres que nous avons d’elle, autant qu’elle l’emporta dans sa vie sur le farouche Solitaire qui ne réussit pas à être un Saint.

2045. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Fustel de Coulanges » pp. 15-32

Et tombe ici le grand reproche de bassesse !

2046. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Gaston Boissier » pp. 33-50

Ses dogmes ne seraient alors que des outrages à la raison, et il tomberait jusqu’à n’être plus qu’une religion de cérémonies et de rites comme le furent les religions païennes, ou, comme chez les Romains, une antiquité historique et la consigne des ancêtres.

2047. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Le Comte de Gobineau »

le radicalisme intégral de cette misanthropie, qui ne tombe plus ici maigrement sur une société ou sur l’homme d’une société, mais sur l’humanité tout entière, et que dis-je ?

2048. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre X. Des Romains ; de leurs éloges, du temps de la république ; de Cicéron. »

Ainsi les ennemis de la patrie, tombés sous vos coups, expieront encore leur parricide dans les enfers : mais vous qui êtes morts en vainqueurs et en citoyens, vos âmes habitent à jamais dans le séjour de la vertu.

2049. (1924) Souvenirs de la vie littéraire. Nouvelle édition augmentée d’une préface-réponse

Voilà le danger des Mémoires : ils permettent de s’embusquer derrière une tombe, pour dire du mal des vivants.‌ […] Nous tombions d’accord que le mariage ne convient pas à tout le monde. […] Les roses sont froides et les marrons tombent dans le silence des jardins. […] La naïve Hélène tomba dans le panneau. […] Les sentiments d’égoïsme tombent devant elle comme un hommage.

2050. (1904) En lisant Nietzsche pp. 1-362

Et Schiller est sorti maintenant des mains des jeunes gens pour tomber dans celles des petits garçons, de tous les petits garçons allemands. […] Alors il lui faudrait s’arrêter pour toute éternité ; cloué à la déception et devenu lui-même l’hôte de pierre, il aura le désir d’un repas du soir de la connaissance, repas qui jamais plus ne lui tombera en partage ! […] Peu à peu le dogme est tombé ; mais la morale est venue en premier plan. Remarquez qu’elle y est d’autant plus venue que le dogme tombait. […] Un attendrissement qui vous saisit en présence des malheurs où vous pouvez tomber vous-mêmes.

2051. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Tout le monde parviendra à aimer le libertinage ; la gêne du commandement fatiguera, comme celle de l’obéissance… Il n’y aura plus de mœurs, plus d’amour de l’Ordre, et enfin plus de vertu… Le peuple tombe dans ce malheur lorsque ceux à qui il se confie, voulant cacher leur propre corruption, cherchent à le corrompre. […] Tant do richesses tombent, pour ainsi dire, en paralysie ; plus de circulation, plus de commerce, plus d’arts, plus de manufactures.  » Ce rude réquisitoire contient beaucoup de vérités et quelques erreurs. […] Mais vous insultez de jour un temple ou une église devant témoins, vous excitez un haro, vous troublez la tranquillité publique, et vous tombez sous la loi de Montesquieu comme sous celle de Frédéric. […] S’il reste des traces, il y a clameur, il y a tranquillité publique troublée, et vous tombez sous la loi, et de Montesquieu et de Frédéric, si l’on vous découvre. […] Voltaire donne, dans ce chapitre xii, une multitude d’exemples de la facilité avec laquelle les Juifs tombaient ou retombaient dans l’idolâtrie, de l’impureté avec laquelle, parfois, ils s’y abandonnent et aussi des terribles châtiments qu’ils s’attiraient par elle.

2052. (1890) Nouvelles questions de critique

Que les mers, en effet, soient tombées un beau jour sur la terre des hauteurs de l’espace infini, cela sans doute est « merveilleux » et cependant cela ne l’est pas plus que le retour des saisons, que la croissance d’un brin d’herbe, que la vie même et que la mort ; — ou, en d’autres termes, il n’y a là de merveilleux que notre étonnement même. […] Cependant, et tandis que madame de Staël, faisant tomber ainsi les frontières de l’esprit français, le rendait concitoyen du monde, Chateaubriand, lui, de son côté, le rendait contemporain de la cathédrale gothique, et le ramenait, par l’histoire, à la conscience de ses origines chrétiennes. […] En même temps que le goût de l’observation et de la vérité reprenait ainsi possession de la scène où venaient de tomber les Burgraves, il s’emparait aussi du roman, pour en devenir bientôt le principal et au besoin l’unique mérite. […] On doit imiter la nature ; et, de cette obligation, tout le monde en tombe d’accord ; mais, cette obligation, quelle part laisse-t-elle à la liberté ou à la personnalité de l’artiste ? […] Mais, dans ces conditions, il n’est pas étonnant — et il est d’ailleurs heureux, j’entends pour nous, simples mortels, — que l’on ne puisse pas réussir à s’entendre : « Les Égyptiens, dit Montesquieu, les meilleurs philosophes du monde, tuaient tous les hommes roux qui leur tombaient entre les mains » ; et je ne me rappelle plus si c’est Ribera ou un autre que l’on accuse d’avoir fait mourir le Dominiquin.

2053. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

Là fut le crime de nos trouvères, et là le secret du dédain on plus exactement de l’indifférence dans laquelle ils tombèrent. […] Aussi bien, ces études de droit, qu’il faudrait faire tomber vers 1642, auraient-elles eu fort à souffrir des distractions de Molière. […] L’envie, disaient les anciens, est comme la foudre, qui ne tombe que sur les hauteurs. […] Un public parisien, le plus amoureux de théâtre qu’il y ait peut-être jamais eu dans l’histoire d’aucune littérature, cherche un auteur favori qui remette en honneur l’antique tragédie, tombée de Pradon en Campistron et de Campistron en Lamotte ? […] Je suis comme saint Pacôme, qui, récitant ses matines sur sa chaise percée, disait au diable : Mon ami, ce qui va en haut est pour Dieu, ce qui tombe en bas est pour vous.

2054. (1939) Réflexions sur la critique (2e éd.) pp. 7-263

Une simple portière de cuir tombe entre leur plaisir contemplatif et la rue, dont elle n’arrête même pas le bruit. » Est-ce particulièrement tolédan ? […] Paul Adam sont tombées, sur quelques points, plus juste qu’il ne paraît. […] Il le loue, il est vrai, d’avoir « un style impeccable », et ce n’est peut-être pas très bien tomber. […] Elles sont courtes et timides, avec des qualités scolaires, et à la moindre tentative de haute école elles tomberaient par terre. […] Au lecteur surtout de faire l’échenillage nécessaire, et, en laissant tomber telle naïveté dont le journaliste n’a pas eu tort de sourire, de retenir le renseignement utile qui mettra une œuvre dans son atmosphère historique.

2055. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Louis Veuillot »

VII Il l’était, et si parfaitement, que ses adversaires les plus assidus furent d’autres chrétiens, et qu’il reste plus illustre peut-être pour avoir lutté contre le catholicisme libéral que pour avoir « tombé », durant quarante ans, la Révolution et le rationalisme. […] Vos préjugés contre l’homme, si vous en avez, tomberont. […] Je relis les vers que vous écrivîtes, un jour, pour votre tombe :     Placez à mon côté ma plume : Sur mon front le Christ, mon orgueil ; Sous mes pieds mettez ce volume ; Et clouez en paix le cercueil.

2056. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre huitième »

On le voit par les fadeurs où Racine lui-même est quelquefois tombé. […] Par cette force de méditation qu’il sait si bien cacher sous la facilité de l’exécution, en suivant ses personnages là où les entraînaient invinciblement leurs caractères, leurs intérêts et leurs passions, il tomba pour ainsi dire sur la règle des trois unités. […] Les premiers aiment mieux le génie qui fait des chutes, parce qu’au moment où il tombe il se rapproche d’eux.

2057. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

L’Empire tomba, le livre reparut, illustré par un châtiment qu’on avait appelé une persécution, et la France vécut plus de trente ans famélique-ment sur les idées de madame de Staël. […] Il laisse froid parce qu’il est froid lui-même, comme son procédé, et il l’est malgré les mots qu’il choisit les plus passionnés et les plus brûlants, comme dans Stella, où l’ennui filtre encore, cet ennui mystérieux, inexplicable, qui vient sur nous à travers des beautés relatives, secondaires, obtenues par le travail et l’effort dans la plupart des œuvres de Gœthe, et, pour quelques-unes d’entre elles que nous signalerons, tellement insupportable que l’admiration des plus fanatiques en est déconcertée et que le livre leur en tombe des mains. […] Le seul chagrin de la vie de Gœthe, de cet insolent de bonheur, de ce Nabuchodonosor qui resta sur pied et à qui Dieu n’a pas fait manger l’herbe à laquelle il avait droit, a été le peu de succès de sa Critique de Newton et le mépris dans lequel elle est tombée.

2058. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

Il tombera de l’un ou de l’autre côté dans un travers dangereux. […] Par cette raison le professeur La Harpe est tombé, à ce sujet, dans une suite d’erreurs plus grandes que toutes celles qu’il m’a semblé indispensable de lui reprocher. […] Qu’auprès du fourbe couvert d’un masque d’humanité, il mette un vrai philosophe, parlant peu de vertus et les pratiquant bien : le ridicule ne tombe que sur le nouveau genre d’imposture, et non sur la morale. […] Le ridicule frappe d’autant mieux que sa rivale présumée est une honnête demoiselle qu’un hasard fit tomber évanouie entre les bras de son mari. […] « Si nos femmes sans nous ont un commerce infâme, « Il faut que tout le mal tombe sur notre dos !

2059. (1837) Lettres sur les écrivains français pp. -167

Gare à moi, pourtant, pauvre habitant du pays des contrefaçons, que ces lignes, qui après tout cependant ne sont guère que la sténographie de ce qui m’a été conté par mon compatriote, l’auteur d’un acte de vaudeville, ne tombent sous les yeux de M.  […] Il me parla d’une commission qui s’occupait de cette grave question, et il me répéta vingt fois que la propriété littéraire était une propriété, ce qui résumait, à son avis, la question secondaire du domaine public, dans lequel, par la législation actuelle, tombent les ouvrages dix ans après la mort de leur auteur. […] — Et il tomba sur le dos, baigné dans son sang, avant que ses amis n’aient pu le rejoindre. […] Je tâcherai de vous amuser… Adieu, le jour tombe, je n’y vois plus clair. […] Si jamais ce livre vous tombe sous la main, parcourez-le, mon cher Monsieur ; assez sur M. 

2060. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

J’ai connu la sœur d’un poète, qu’il est préférable de ne pas nommer, car cette omission permettra à plusieurs de se retrouver en son exemple : elle ne le quittait presque jamais et l’accompagnait dans ses démarches extérieures ; ses yeux tendres et voilés, constamment fixés sur lui, disaient l’admiration, le dévouement du chien fidèle, et seuls faisaient écho à sa parole, car elle eût craint d’affaiblir d’un seul mot ce qu’elle jugeait définitif, étant tombé de ses lèvres à lui. […] Les doigts se touchent, les genoux se touchent : tout un être attire l’autre être, et dans la saison chaude, les femmes tristes ou légères ne tombent-elles point, comme les fruits las sur la prairie ?  […] Ce n’est pas moi, non certes, ce n’est pas moi, qui viendrai m’inscrire en faux contre une doctrine qui, après avoir connu tant de faveur, tomba par la suite dans le plus injuste discrédit. […] Tout d’un coup mes yeux tombèrent sur une figure de femme qui força mon attention pour l’absorber dans une de ces contemplations qui vous arrachent à la vie extérieure. […] Si la prédestination de la Femme, envisagée comme elle l’est par nos auteurs, à la façon d’une antique Fatalité, est bien de succomber dès l’instant qu’on l’attaque ; si toujours elle doit, en vertu de la faiblesse inhérente à son être, « comme le fruit mûr tomber sur la prairie », qui ne voit que du même coup s’affaisse le ressort d’intérêt qui nous attachait à ses actes ?

2061. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre IV. Le mécanisme cinématographique de la pensée  et l’illusion mécanistique. »

Dans la première proposition, « devient » est un verbe à sens indéterminé, destiné à masquer l’absurdité où l’on tombe en attribuant l’état « homme » au sujet « enfant ». […] L’obscurité se dissipe, la contradiction tombe dès qu’on se place le long de la transition, pour y distinguer des états en y pratiquant par la pensée des coupes transversales. […] S’agit-il d’un corps qui tombe ? […] Mais Galilée estima qu’il n’y avait pas de moment essentiel, pas d’instant privilégié : étudier le corps qui tombe, c’est le considérer à n’importe quel moment de sa course. […] Une loi qui reliait l’espace parcouru par un corps qui tombe au temps occupé par la chute.

2062. (1864) Études sur Shakespeare

Qui ne se représente l’écolier de treize ou quatorze ans, la tête remplie de ses premières connaissances littéraires, l’esprit frappé peut-être de quelque représentation théâtrale, élevant, dans un transport poétique, l’animal qui va tomber sous ses coups à la dignité de victime, ou peut-être à celle de tyran ? […] » À coup sûr, rien n’est plus bizarre que de refuser à Shakespeare l’instinct de la tragédie ; et si Johnson en eût eu lui-même le sentiment, jamais une telle idée ne fût tombée dans son esprit. […] Mais l’homme en butte aux événements ne tombe point sous leur servitude ; si l’impuissance est sa condition, la liberté est sa nature ; les sentiments, les idées, les volontés que lui inspireront les choses extérieures émaneront de lui seul ; en lui réside une force indépendante et spontanée qui repousse et brave l’empire que subira son sort. […] Mais le temps a fourni sa carrière ; la Providence est à son terme ; les événements que Hamlet a préparés se précipitent sans son concours ; ils se consomment par lui et contre lui ; et il tombe victime des décrets dont il a assuré l’accomplissement, destiné à montrer combien l’homme compte pour peu de chose, même dans ce qu’il a voulu. […] Aucun détail de ces tristes préparatifs n’est perdu pour le sentiment qu’ils excitent ; l’insensible grossièreté des hommes voués aux habitudes d’un pareil métier, leurs chansons, leurs quolibets, tout porte coup ; et les formes, les moyens du comique rentrent ainsi sans effort dans la tragédie, dont les impressions ne sont jamais plus vives que lorsqu’on les voit près de tomber sur l’homme déjà frappé à son insu et se jouant en présence du malheur qu’il ignore.

2063. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Après quoi elles se mettent à l’œuvre, et cette feuille imprimée, que la ville entière ouvrait, au matin, frémissante de curiosité et d’impatience… arrive, à la tombée du jour, un homme armé d’un crochet, qui de cette feuille jetée aux immondices fait sa proie et l’emporte, dédaigneux de savoir ce que ce vil chiffon peut contenir. […] Despréaux que Molière, qui peint avec tant de force et de beauté les mœurs de son pays, tombe trop bas quand il imite le badinage de la comédie italienne. » Et Fénelon cite, pour finir, les deux vers de Boileau à propos du sac ridicule où Scapin s’enveloppe. […] Il mourut sur le théâtre, ou pour mieux dire il tomba sur son champ de bataille. […] Voilà pourtant (ceci est l’anankè des papillons et du style de la même famille,) le sort des belles phrases éclatantes, parées et nouvelles, dont la critique habillait les petits drames, les petits vaudevilles, les petits chefs-d’œuvre précieux. — Le chef-d’œuvre est tombé en poudre dans son linceul, et le linceul est devenu une fumée. […] Il allait saluer madame Scarron, il est tombé chez mademoiselle de Lenclos.

2064. (1911) Nos directions

Par malheur, Musset fut joué trop tard et passé le moment propice : on n’y goûta que de l’esprit, et son œuvre isolée ne suscita peut-être, et seulement plus tard, que les bluettes de Banville… Tombèrent Les Burgraves ; en vain la tragédie tenta de revivre en Ponsard. […] Et le son pathétique de la rêverie de Phocas creusant sa tombe avant l’aurore : Comme la nuit est calme et sans émoi. […] …………………………………………………………………… Souvent, quand la beauté d’un sujet vous enivre On se met au travail, mais le feu tombe, mais Les vers vont faiblissant si l’on veut les poursuivre. […] Songez qu’à la tombée du soir, un des héros des Romanesques murmurait autrefois ceci : On ne voit plus les fleurs, mais on les sent bien mieux. […] Enfin nous en tombons d’accord, voici mots et jeux de mots à leur place.

2065. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

Il n’est pas du tout exact de dire, je le crois, que la duchesse de Bouillon ait d’emblée loué la salle pour faire tomber la pièce. […] Il y a plus d’une manière de tomber d’une position élevée avec dignité, avec décence ; mais il n’en est certes pas de plus douce, de plus accorte et de plus humaine que celle-là.

2066. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

Il en tombe quelque chose dans l’étage inférieur, ne serait-ce que la poussière, je veux dire l’espérance, la confiance en l’avenir, la croyance à la raison, le goût de la vérité, la bonne volonté juvénile et généreuse, l’enthousiasme qui passe vite, mais qui peut s’exalter parfois jusqu’à l’abnégation et au dévouement. […] Sans doute il y a beaucoup de déistes, surtout depuis Rousseau ; mais je ne crois pas que, sur cent personnes du monde, on trouve encore à Paris dix chrétiens ou chrétiennes. « Depuis dix ans514, dit Mercier en 1783, le beau monde ne va plus à la messe ; on n’y va que le dimanche pour ne pas scandaliser les laquais, et les laquais savent qu’on n’y va que pour eux. » Le duc de Coigny515 dans ses terres auprès d’Amiens, refuse de laisser prier pour lui, et menace son curé, s’il prend cette licence, de le faire jeter en bas de sa chaire ; son fils tombe malade, il empêche qu’on apporte les sacrements ; ce fils meurt, il interdit les obsèques et fait enterrer le corps dans son jardin ; malade lui-même, il ferme sa porte à l’évêque d’Amiens qui se présente douze fois pour le voir, et meurt comme il a vécu. — Sans doute un tel scandale est noté, c’est-à-dire rare ; presque tous et presque toutes « allient à l’indépendance des idées la convenance des formes516 ».

2067. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVIe Entretien. Marie Stuart (reine d’Écosse) »

Le jour où elle cessait de faire partie du grand système catholique constitué sur le continent, elle tombait à la mer, elle n’avait plus pour alliée que son ennemie mortelle et naturelle, l’Angleterre. […] Elle fait défendre, par ses proclamations, d’imputer à Darnley toute participation au meurtre de Rizzio, elle fait trancher la tête à tous les complices tombés sous sa main ; Ruthven, Douglas, Morton s’enfuient d’effroi hors des frontières ; elle rappelle à la tête de ses conseils l’habile et vertueux Murray, qui s’était assez compromis dans la conspiration pour sa popularité, assez réservé pour sa vertu.

2068. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

C’est le laisser-aller d’un esprit qui s’abandonne naïvement à toutes ses idées, se fiant, pour ne pas tomber dans l’excès, à une certaine modération naturelle. […] C’était une si grande nouveauté, et si hardie, que de marcher seul et de ne pas tomber !

2069. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

Donnez à tous ces personnages un cœur si tendre, si tendre qu’ils tombent en pâmoison à la première émotion vive ; prêtez-leur avec prodigalité un talent merveilleux pour jouer de la flûte, composer de petits vers galants et débiter des madrigaux comme celui-ci : Si je dis qu’elle est la plus belle Des bergères de ce hameau, Je n’aurai rien dit de nouveau : Ce n’est un secret que pour elle. […] Que l’amant meure d’amour… plusieurs fois et envoie à son amante ces adieux éplorés : « Dites-lui que mon dernier soupir sera pour elle, qu’en expirant je prononcerai son nom, que son image adorée me suivra jusque dans la tombe. », ce qui n’est pas trop mal rédigé pour un berger : Que des torrents de larmes arrosent les prairies et gonflent les ruisseaux ; car, comme le dit un poète compatissant : Ainsi toujours les cœurs sensibles Sont nés pour être malheureux.

2070. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

Plus les sens sont amortis par le courage de l’âme, plus l’âme voit sa vertu et se soutient par son travail ; mais dans la suite Dieu se réserve à lui-même d’attaquer le fond de cette âme et de lui arracher jusqu’au dernier soupir de toute vie propre… Alors elle tombe en défaillance ; elle est, comme Jésus-Christ, triste jusqu’à la mort. […] Si ces attributs tombaient directement sous l’œil de la conscience, tout le monde les verrait et le doute serait impossible.

2071. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Appendice aux articles sur Roederer. (Voir page 393.) » pp. 533-543

Ainsi partait à toute bride le jeune général, pour arriver à temps au terme glorieux de sa destinée, pour s’illustrer à Essling, et, plein d’un pressentiment de mort, pour tomber frappé d’une balle au front l’après-midi de Wagram, à l’heure du triomphean.

2072. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — II. (Suite.) » pp. 147-161

On voit dans les Mémoires de Sully comment ce traité de la Ligue avec l’Espagne, écrit de la main du président et contenant les conditions arrêtées, fut un jour pris sur des coureurs du côté du village de Marolles et tomba aux mains de Sully, qui en fit fête à Henri IV.

2073. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Variétés littéraires, morales et historiques, par M. S. de Sacy, de l’Académie française. » pp. 179-194

voilà qu’il craint de tomber dans un paradoxe, quand il ne s’agit que du plus ou moins d’admiration au sein de Bossuet, et d’un simple classement dans les Oraisons funèbres ; c’est bien de celui qui tout à l’heure a fait, en tremblant, une révolution sur le Télémaque.

2074. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat »

Bossuet, doué par la nature d’une parole puissante, abondante, qui se verse d’elle-même et tombe comme les fleuves « du sein de Jupiter », n’a pas besoin de chercher des idées si loin ni d’inventer un ordre de choses autre que celui qu’il trouve tout fait autour de lui.

2075. (1875) Premiers lundis. Tome III « Sur le sénatus-consulte »

Un des plus grands politiques, et qu’il est bon quelquefois de relire, le cardinal de Retz faisant le récit de la Fronde, ne peut s’empêcher de se demander, lui aussi, comment de l’état de somnolence et de léthargie où l’on était tombé, où l’on était encore « trois mois avant la petite pointe des troubles » qui faillirent bouleverser tout l’État et l’ordre même de la monarchie en France, on passa presque subitement à une commotion violente et universelle.

2076. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre III »

« Le Horla, l’être fantastique, l’invisible puissance dont on subit d’abord le voisinage mystérieux, le Horla intangible mais réel, qui possède les âmes et abolit les volontés, tue le courage ; “ce rôdeur d’une race surnaturelle”, n’est-ce pas la folie qui rôde sans cesse autour du lettré, le guette, prête à fondre sur lui pour en faire sa chose, un dément qu’on enfermera vivant dans une cellule qui s’ouvre sur une tombe ? 

2077. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre premier. De la première époque de la littérature des Grecs » pp. 71-94

Les premiers écrivains qui nous sont connus, dirait-on, et en particulier le premier poète, n’ont point été surpassés depuis près de trois mille ans, et souvent même les successeurs des Grecs sont restés bien au-dessous d’eux ; mais cette objection tombe, si l’on n’applique le système de perfectibilité qu’aux progrès des idées, et non aux merveilles de l’imagination.

2078. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre II. De l’ambition. »

sans que le succès soit élevé plus haut, le revers vous fait tomber plus bas, vous enfonce plus avant dans le néant de votre destinée.

2079. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre premier. Les signes — Chapitre III. Des idées générales et de la substitution à plusieurs degrés » pp. 55-71

En effet, cette formule serait rigoureusement la même, si l’objet était tombé sous notre expérience.

2080. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre V. De la lecture. — Son importance pour le développement général des facultés intellectuelles. — Comment il faut lire »

Ils ont dans le livre une confiance touchante : ils n’oseraient le soupçonner de mensonge ni d’erreur ; la pensée imprimée, devenue comme impersonnelle, et n’ayant plus pour leurs oreilles le son de la voix humaine, prend par ce détachement l’apparence d’une vérité qui tombe du ciel.

2081. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Barbey d’Aurevilly. »

La duchesse, qui est innocente, se fait fille publique pour se venger. « Je veux mourir, dit-elle à l’un de ses clients d’une nuit, où meurent les filles comme moi… Avec ma vie ignominieuse de tous les soirs, il arrivera bien qu’un jour la putréfaction de la débauche saisira et rongera enfin la prostituée et qu’elle ira tomber par morceaux et s’éteindre dans quelque honteux hôpital.

2082. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Verlaine, Paul (1844-1896) »

Après avoir erré toute une nuit d’hiver, le divin misérable tombe mourant dans la neige.

2083. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre premier. La critique et la vie littéraire » pp. 1-18

Et je suis assez entêté dans mon système de critique, pour tomber des nues s’ils ·s’en fâchent.

2084. (1842) Essai sur Adolphe

À force de penser à Ellénore et de publier partout son admiration, Adolphe se convaincra, ou croira se convaincre de la réalité de son amour, et Ellénore tombera dans le même piège.

2085. (1890) L’avenir de la science « XXI »

Un livre n’a de succès que quand il répond à la pensée secrète de tous ; un auteur ne détruit pas de croyances ; si elles tombent en apparence sous ses coups, c’est qu’elles étaient déjà bien ébranlées.

2086. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VI. Jean-Baptiste  Voyage de Jésus vers Jean et son séjour au désert de Judée  Il adopte le baptême de Jean. »

En Judée, Jean ne paraît pas avoir été inquiété par Pilate ; mais dans la Pérée, au-delà du Jourdain, il tombait sur les terres d’Antipas.

2087. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Les Confidences, par M. de Lamartine. (1 vol. in-8º.) » pp. 20-34

Tantôt ses traits sont si délicats, ses yeux noirs ont un regard si candide et si pénétrant ; sa peau transparente laisse tellement apercevoir sous son tissu un peu pâle le bleu des veines et la mobile rougeur de ses moindres émotions ; ses cheveux très noirs, mais très fins, tombent avec tant d’ondoiements et des courbes si soyeuses le long de ses joues jusque sur ses épaules, qu’il est impossible de dire si elle a dix-huit ou trente ans.

2088. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre I : Philosophie religieuse de M. Guizot »

De l’unité de la vérité, il conclut à l’unité de l’être ; il confond l’idée et la réalité, la science et l’existence, et abolit tous les êtres en les concentrant dans un seul, lequel n’est plus qu’une notion impersonnelle, un nom stérile qui tombe à son tour dans le néant.

2089. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXVI. La sœur Emmerich »

Il faut donc renvoyer à ces livres qu’il est impossible d’analyser, car ils tombèrent, émiettés par les douleurs qui la broyaient, des lèvres pâles de la Visionnaire sous la pieuse plume de Brentano !

2090. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Jules Janin » pp. 137-154

Un jour, comme Hylas, mais il était moins jeune, il s’en alla, l’amphore à la main, puiser à la source d’Horace, et il y tomba avec sa cruche.

2091. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « De Stendhal »

Mais lorsque la creuse vague humaine aura cessé de jeter le peu de bruit et d’écume qu’elle jette toujours sur l’écueil d’une tombe quand un homme vient tout récemment d’y descendre, la gloire de Stendhal ne sera guères saluée dans l’avenir que par les esprits plus ou moins analogues au sien par la force.

2092. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Stendhal » pp. 43-59

Mais, lorsque la creuse vague humaine aura cessé de jeter le peu de bruit et d’écume qu’elle jette toujours sur l’écueil d’une tombe, quand un homme vient tout récemment d’y descendre, la gloire de Stendhal ne sera guère saluée dans l’avenir que par les esprits plus ou moins analogues au sien par la force.

2093. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Eugène Fromentin ; Maxime du Camp »

— et il n’en est pas moins descendu de la hauteur de ce mépris qu’il a fait justement tomber sur l’Académie pour aller s’asseoir humblement dans un de ces fauteuils méprisés, où l’on ne s’assied qu’en s’aplatissant.

2094. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre V. Les figures de lumière »

Ici, avec des tiges élastiques et déformables de lumière qui sont représentatives du temps ou plutôt qui sont le temps lui-même, la relation des trois points dans l’espace va tomber sous la dépendance du temps.

2095. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XX. De Libanius, et de tous les autres orateurs qui ont fait l’éloge de Julien. Jugement sur ce prince. »

« Ô toi, dit l’orateur, élève et disciple de ces êtres qui occupent le milieu entre la Divinité et l’homme ; toi dont la tombe n’occupe qu’une petite portion de terre, mais qui par ta gloire remplis le monde ; toi qui en commençant ta carrière, as surpassé tous les grands hommes qui ne sont pas Romains, qui en la finissant, as surpassé ceux même de Rome ; toi que les pères regrettent plus que leurs propres enfants, et que les enfants regrettent plus que leurs pères ; toi qui as exécuté de grandes choses, mais qui devais en exécuter encore de plus grandes ; toi qui foulais aux pieds tous les genres de voluptés, excepté celles qui naissent du charme inexprimable de la philosophie, protecteur et ami des dieux de l’empire ; ô prince !

2096. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VIII. »

Tu feras tomber la fougue des vents indomptés, qui, lancés sur la terre, tuent les moissons de leur souffle ; et de nouveau, si tu le veux, lu ranimeras leur violence.

2097. (1910) Études littéraires : dix-huitième siècle

Il est tombé, à la fin, à peu près d’accord sur un certain nombre d’idées. […] Le pessimisme, la misanthropie, ou simplement l’humeur chagrine consisteraient à montrer Gil Blas tombant dans le malheur du fait de ses bonnes qualités Il y tombe du fait de ses petits défauts. […] Chaque page laisse un germe là où elle tombe. […] Le meilleur moyen, en matière d’histoire, de combattre et d’extirper le surnaturel, c’est donc de montrer qu’elle est absurde, qu’elle ne porte la marque d’aucune intelligence, que les révolutions des empires y dépendent d’un verre d’eau qui tombe, d’un nez trop court, d’un grain de sable, — et c’est ce que Voltaire a aimé à faire. […] De la Bible il ne reste rien (Boileau la comprenait) ; de l’antiquité grecque les deux tiers, au moins, tombent ; et Homère lui est, à l’ordinaire, un prétexte à parler de l’Arioste.

2098. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

Il porte envie aux fleurs qui émaillent les rives bénies de ce ruisseau, aux fleurs qu’elle a foulées, à celles qui sont tombées sur ses blanches épaules, sur les tresses dorées de sa chevelure. […] Plus blanche que la neige qui tombe à flocons sur une belle colline sans être chassée par le vent, elle paraissait se reposer comme une personne fatiguée. […] Aujourd’hui que ses vers sont tombés dans le domaine public, chacun peut parler de lui en toute liberté, en Italie comme en France, sans s’exposer au reproche d’injustice. […] Ce ressort, diversement employé par trois écrivains, est tombé depuis longtemps dans le domaine public. […] Ailleurs, parlant de la ruine des institutions carlovingiennes, il dit que ces institutions, par la nature même des choses, ne pouvaient manquer de tomber dans une prompte décadence .

2099. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

L’enfant doute si peu de l’absolu qu’il n’a pas, jusqu’aux fatales dépravations sociales de l’éducation, la notion du relatif ; et l’homme fait, quelles que soient ses tristes ou rassurantes convictions, projette et agit comme s’il ne devait pas mourir, a le sentiment inné de la permanence du plus réel de son être dans ses descendants, dans les œuvres de son esprit ou de ses mains, dans le bruit de sa parole, jusque dans les lettres de son nom gravé sur une tombe. […] Il est constant qu’une fièvre les prend de rendre de leur Humanité un grand témoignage et que l’Art leur apparaît comme un moyen vénérable, et qu’il ne faut pas profaner, de témoigner de leur race et d’eux-mêmes, — peut-être pour laisser à une race plus jeune l’héritage résumé de tous les trésors spirituels entassés par les siècles, peut-être pour répondre à la question qui semble tomber d’en haut […] Elles s’étaient substituées à la profonde psychologie classique : quand elles tombèrent, il ne resta rien, — ce rien dont le Bon-sens et la Thèse firent des drames. […] Éloquente et subtile, et poétique, austère et passionnée ; comme des ciselures dans un mur très ancien et qui s’effrite, mais dont les pans ruineux restent debout par un sortilège et ne tomberont jamais ; sombre, avec tout à coup des mots de lumière qui tyrannisent (cette définition de l’Enfer : « Le ciel en creux » !) 

2100. (1933) De mon temps…

Je ne me souviens plus de la façon dont le spirituel critique des Débats traita l’irascible poète des Erinnyes, mais bientôt après cette rencontre odéonesque et ce retour en fiacre, j’eus, pour mon humble part, l’occasion de tomber sous sa férule. […] Parfois aussi son instinct critique le faisait tomber juste. […] Valvins et Samois se font presque face, et souvent la « yole », où Mallarmé aimait courir les bordées à la voile sur la Seine, portait le poète d’Hérodiade vers le romancier de Les Oiseaux s’envolent et les fleurs tombent. […] Et ce corps penché en avant, ces mains croisées, ces épaules étroites et hautes, cette poitrine creuse, ce cou engoncé, ce visage anxieux et contracté, ce menton proéminent, ce front bombé, ces yeux inquiets et scrutateurs, cette attitude à la fois méditative et vigilante, n’étaient-ce pas l’image véridique de Francis Poictevin, l’auteur de Ludine, de Paysages, de Songes et d’une dizaine de volumes qui méritaient mieux que l’injuste oubli dans lequel ils sont tombés ?

2101. (1914) L’évolution des genres dans l’histoire de la littérature. Leçons professées à l’École normale supérieure

Mais, pour que cette recherche ne s’égare pas, pour que nous soyons assurés que les conclusions n’en demeurent pas suspendues dans le vide, qu’elles tombent au contraire dans la réalité, il faudra les vérifier. […] Boileau s’efforce de montrer que, si les règles sont conformes à l’usage de Pindare ou d’Homère, elles le sont bien davantage encore à la vérité de la nature, telle que l’observation nous la révèle, et à l’autorité de la raison, telle que tous les hommes tombent d’accord pour la reconnaître. […] La perfection de la forme, ils l’entendaient d’une autre manière, sans doute, et, vous l’avez vu, très différente de la sienne, mais enfin, quant au principe : que les choses valent surtout de la manière qu’on les dit et par la façon qu’on y donne ; ils eu tombaient d’accord avec lui. […] Toutes ses velléités de révolte sont tombées. « Conservateur en tout, sauf en religion », comme on l’a si bien dit, voilà sa devise et sa définition. […] Aussi, je le répète, n’a-t-il eu garde d’y tomber.

2102. (1910) Rousseau contre Molière

— Je suis tombé du haut d’un toit ; ma cuisse est cassée ! […] C’est une erreur dans laquelle on est souvent tombé, avec Molière et avec quelques autres, à cause des habitudes du théâtre et à cause aussi d’un penchant naturel de l’esprit humain. […] On rit de celui qui est assez sot, assez vain, pour tomber dans des pièges grossiers, sans pour cela approuver celui qui les tend ni avoir pour lui aucune sympathie. […] George Dandin est ridicule surtout par sa vanité ; il l’est aussi par la gaucherie avec laquelle, voulant s’élever dans l’échelle sociale, ce qui n’est pas blâmable, il ne réussit qu’à y tomber trois ou quatre degrés plus bas que là d’où il est parti. […] Elle n’a jamais lu de livre que Barrème et Télémaque qui lui tomba par hasard dans les mains ; mais une fille capable de se passionner pour Télémaque a-t-elle un cœur sans sentiment et un esprit sans délicatesse ?

2103. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

Aucune parole qui fût plus éloquente n’était tombée même du haut de la chaire. […] Une dernière coïncidence, de celles que l’on ne peut prévoir, et qui font, pour cette raison même, l’attrait changeant et toujours nouveau de l’histoire, allait sauver ce principe des conséquences abusives qu’on en eût pu tirer en d’autres temps : Mazarin venait de mourir ; Anne d’Autriche allait bientôt le suivre dans la tombe ; et Louis XIV venait d’inaugurer par trois ou quatre coups d’éclat son gouvernement personnel. […] Bertrand, dans la Revue des Deux Mondes, 1891]. — Il fait paraître ses Méditations métaphysiques, 1641 ; — ses Principes de philosophie, 1644. — « Il tombe dans des dégoûts pour la qualité d’auteur qui lui font perdre toute envie de rien imprimer » [Cf.  […] Malebranche. — Fénelon réfute le Traité de la nature et de la grâce. — Qu’ils en ont surtout à la théorie de l’action de Dieu par « les voies générales », — à l’abri de laquelle ils voient poindre la théorie de la « stabilité des lois de la nature » ; — c’est-à-dire la négation du surnaturel ; — et tomber du même coup la possibilité du miracle ; — la nécessité de la révélation ; — et l’utilité de la religion. […] Les dernières années de Fénelon. — Une fois tombées les espérances qui l’avaient soutenu pendant quinze ans, — il ne s’abandonne pas lui-même ; — et au contraire il en accepte l’anéantissement comme un décret de Dieu sur lui [Cf. sa Correspondance, années 1712, 1713, 1714]. — Son mot au duc de Chaulnes : « Ô mon cher duc, mourons de bonne foi » [mars 1712] ; — et on peut dire qu’à dater de moment, il ne fait plus que se préparer passionnément à la mort. — Il essaie bien de se distraire ; — et compose sa Lettre sur les occupations de l’Académie française, 1714 ; — peut-être aussi retouche-t-il ses Dialogues de l’éloquence ; — et son Traité de l’existence de Dieu. — Il continue encore de combattre les restes du jansénisme ; — et administre admirablement son diocèse. — Mais il est touché à mort ; — et d’année en année, presque de mois en mois, rien n’est un plus beau spectacle que son dépouillement successif de lui-même.

2104. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

Il nous devient aisé d’expliquer le fait étrange, constaté par le professeur Owen, que chaque particule de nourriture solide ou liquide que nous avalons doit passer sur l’orifice de la trachée, avec risque de tomber dans les poumons, nonobstant l’admirable combinaison au moyen de laquelle se ferme la glotte. […] J’ai déjà donné, dans un des chapitres qui précèdent, quelques exemples de particularités peu importantes en apparence, telles que le duvet des fruits ou la couleur de leur chair et la couleur de la peau ou des poils des quadrupèdes, qui, par suite de corrélations cachées avec certaines différences de constitution, ou parce qu’ils provoquent les attaques de certains insectes, tombent assurément sous l’action sélective de la nature. […] L’oiseau peut avoir puissamment aidé les grands reptiles dans l’œuvre si complète de destruction des Ammonites et des Bélemnites de la période secondaire, et peut-être s’est-il chargé seul de détruire beaucoup de petits reptiles marins, souche de nos reptiles d’eau douce, qui nous sont restés inconnus, parce qu’ils ont pour la plupart trouvé leur tombe dans les entrailles des nombreux représentants de cet ordre devenu prédominant.

2105. (1899) Musiciens et philosophes pp. 3-371

Il accuse cet art, surtout en ces derniers temps, de tomber dans la complication excessive, dans la recherche des moyens exceptionnels et, par là même, de devenir obscur et insaisissable, si ce n’est à une élite. […] Des œuvres s’occupant de la vie des riches peuvent être aussi profondes, aussi générales, aussi universelles que celles émanant de la vie des pauvres, cela tombe sous le sens ; tout dépend de l’auteur et de ses facultés. […] Lui qui malmène si vivement les critiques — « les sots jugeant les sages » — il ne s’aperçoit pas qu’il tombe dans un de leurs plus fâcheux travers, celui de parler des choses de l’art malgré une préparation insuffisante, avec une assurance toute doctorale. […] Au point de vue dramatique, j’en tombe d’accord, cette scène se peut discuter ; mais Tolstoï ne l’examine pas à ce point de vue. […] Il tombe un peu plus loin dans un verbiage qui ne vaut guère mieux que celui de Tolstoï.

2106. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

Toutes les jeunes filles que l’Angleterre envoie chaque année à la débauche insatiable de Londres, comme Athènes envoyait au Minotaure les vierges désignées par le sort, se disent l’une à l’autre, avec une simplicité pathétique, avec une confusion qui touche au repentir et presque à l’expiation, comment elles sont tombées dans l’abîme où elles se débattent sans espoir de salut. […] Comment l’auteur, dont les débuts datent déjà de sept ans, est-il tombé dans cette singulière méprise ? […] S’il méconnaît cette condition, il tombe dans la mesquinerie du procès-verbal ; il abdique son caractère poétique et se fait chronique. […] Dans l’intimité de ses épanchements qui ne connaissent ni la honte ni l’embarras, n’ayant rien à cacher, rien à taire, ne rougissant pas de livrer sa pensée inachevée, il s’aperçoit, au moment même où il parle, de la faute où il allait tomber, il se corrige en se révélant, et souvent ne veut déjà plus ce qu’il annonce vouloir. […] Si la société refuse de le consulter sur ses prochaines destinées, elle tombera dans le désordre et la confusion ; mais il est généreux et magnanime, et à l’heure du péril sa voix ne refusera pas de se faire entendre.

2107. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. RODOLPHE TÖPFFER » pp. 211-255

L’œuvre d’Hogarth, qui lui tombait sous la main, lui déroulait l’histoire du bon et du mauvais apprenti, et les expressions de crime et de vertu, que ce moraliste-peintre a si énergiquement burinées sur le front de ses personnages, lui causaient, dit-il, cet attrait mêlé de trouble qu’un enfant préfère à tout. […] Mais je ne fais qu’indiquer ces passages, tout charmants qu’ils sont, pour ne pas tomber moi-même dans l’inconvénient de prolonger.

2108. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (2e partie). Littérature de l’Allemagne. » pp. 289-364

C’est elle qui tend à faire tomber les barrières que des préjugés et des vues intéressées de toute sorte ont élevées entre les hommes, et à faire envisager l’humanité dans son ensemble, sans distinction de religion, de nation, de couleur, comme une grande famille de frères, comme un corps unique, marchant vers un seul et même but, le libre développement des forces morales. […] Je demeure anéanti de la petitesse des considérations littéraires, après ces divagations éthérées et infinies ; c’était une vaste philosophie que j’attendais, je tombe dans des phrases sans fond et sans suite.

2109. (1890) L’avenir de la science « X » pp. 225-238

La linguistique tombe dans le même défaut quand, au lieu de prendre les langues dans leurs variétés individuelles, elle se borne à l’analyse générale des formes communes à toutes, à ce qu’on appelle grammaire générale. […] Il y a dans le demi-jour une teinte plus douce et plus triste, un horizon moins nettement dessiné, plus vague et plus analogue à la tombe.

2110. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mars 1886. »

Mais, je le répète, on n’aura rien fait pour l’Art tant qu’on permettra de faire du wagnérisme une religion fermée, pratiquée dans un petit coin par quelques convaincus et des extatiques qui confinent à l’hystérie ; la plus grande injure qu’on puisse faire au maître c’est de tomber en pâmoison devant n’importe quelle de ses doubles croches. […] Ecraser le génie sous prétexte qu’il n’était pas chez Wagner doublé d’un grand caractère, c’est une besogne ingrate : peut-être bien, en allant au fond des choses, tomberons-nous d’accord sur un point, à savoir que la ville réputée la plus intelligente du monde, et que la nation réputée la plus chevaleresque du globe se compromettent singulièrement aux yeux de l’Europe attentive en se montrant si cruelles pour la mémoire d’un grand compositeur qui a fait craquer toutes les musiques, même la musique française, et qui, qu’on le veuille ou non, a sa place marquée dans notre admiration d’artiste.

2111. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Introduction. Le problème des idées-forces comme fondamental en psychologie. »

Tout ce que peut faire une représentation, c’est non pas d’agir, mais de ressembler ou de ne pas ressembler : une représentation ne tombe que sous la catégorie de la ressemblance et de la différence. […] Le reste tombe nécessairement dans le domaine de la représentation, par cela même de l’objectif ; et c’est ce qui explique l’illusion de ceux qui nient le subjectif.

2112. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

Les positions relatives font dans la société l’estime, la considération, la vertu… Dans les accès du désespoir et dans les délires du succès tout sentiment de l’honnête s’éteint, avec cette différence que le parvenu conserve ses vices et l’homme tombé perd ses vertus. » (Essai, etc., p. 466 et 601.) […] quel cœur si mal fait n’a tressailli au bruit des cloches… Tout se retrouve dans les rêveries enchantées, où nous plonge le bruit de la cloche natale : religion, famille, patrie, et le berceau et la tombe, et le passé et l’avenir. » Les révolutionnaires avaient proscrit les sonneries des cloches et coulé des canons avec leur métal.

2113. (1870) La science et la conscience « Chapitre I : La physiologie »

Contre les premières, la conscience proteste ; il n’y a pas d’hypothèse, si ingénieuse qu’elle soit, qui ne tombe devant un fait de conscience, tel que le sentiment de notre causalité libre. […] Qu’en ce sens le libre arbitre ne soit qu’une hypothèse inintelligible et démentie par les faits, nous en tombons facilement d’accord.

2114. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

Malgré Cicéron, Caton et Brutus, la république romaine tombe entre les mains des maîtres qui en font l’empire. […] On l’a bien vu quand la nôtre, perdant dans les excès de la terreur le meilleur de son génie, son humanité, sa conscience du droit, son profond désintéressement national, est tombée, de violences en violences, sous les pieds d’une dictature militaire.

2115. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — II. (Fin.) » pp. 398-412

Il conduit sa chronique avec exactitude jusqu’au moment où le marquis de Montferrat, son ami et son seigneur de prédilection, périt à son tour dans une rencontre en poursuivant les féroces Bulgares (1207) : « C’est alors, dit Gibbon, c’est à cet accident funeste que tombe la plume de Villehardouin et que sa voix expire ; et, s’il continua d’exercer l’office de maréchal de Romanie, la suite de ses exploits n’est point connue de la postérité. » On suppose qu’il mourut cinq ou six ans après, vers 1213, et il paraît certain qu’il ne retourna jamais en France.

2116. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

Semblable à ce météore terrible qui, formé de mille courants divers, menace du haut de la nue les sommets escarpés et semble être destiné par la nature à maintenir l’égalité physique sur le globe, la foudre révolutionnaire qui est en vos mains, et que dirige habilement votre génie, continuera de renverser les trônes, fera tomber les têtes superbes qui voudraient s’élever au-dessus du niveau que vous avez tracé ; elle établira l’égalité politique et (l’égalité) morale, qui sont les bases de notre liberté sainte… Voilà jusqu’où l’exaltation de la peur et l’espoir de se faire pardonner de Couthon, Saint-Just et consorts, pouvaient conduire le ci-devant médecin de la reine, un écrivain académique élégant.

2117. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — I » pp. 56-70

Prisonnier à Pavie, il fut relâché par ceux des victorieux entre les mains de qui il était tombé : « Car ils voyaient bien, dit-il, qu’ils n’auraient pas grand’finance de moi. » Ayant eu ordre de vider le camp des impériaux avec tous les autres prisonniers jugés insolvables, il regagne ses foyers et sa Gascogne.

2118. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Les Chants modernes, par M. Maxime du Camp. Paris, Michel Lévy, in-8°, avec cette épigraphe. « Ni regret du passé, ni peur de l’avenir. » » pp. 3-19

Quand ceux que j’ai nommés, continue M. du Camp, se levèrent, semblables à des prêtres de régénération, les vieilles murailles du monument littéraire s’ébranlèrent à leur voix, et tombèrent comme les murailles de Jéricho au bruit des trompettes israélites.

2119. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Appendice » pp. 453-463

, — que la nécessité, dis-je, aiguillonne et arrache à la douce paresse, que l’occasion encourage et multiplie, et qui, une fois voué à cette vie de labeur et de publicité incessante, ne déroge point pour cela, ne tombe point par là même en décadence, mais a chance de se varier, de s’élever, de se perfectionner parfois.

2120. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers (tome xviie ) » pp. 338-354

Se décidant aussitôt à se placer entre Schwarzenberg et Blucher, il laisse quelques corps et divisions échelonnés sur la Seine, et il se porte en secret, en toute diligence, vers la Marne, où il compte bien (car de son coup d’œil supérieur il a tout deviné) tomber en plein à travers les corps en marche de Blucher, dispersés et distants, et faire bombe au milieu d’eux.

2121. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Mémoires du duc de Luynes sur la Cour de Louis XV, publiés par MM. L. Dussieux et E. Soulié. » pp. 369-384

Imaginez un observateur exact et patient qui, habitant une contrée sujette à de grandes variations de température, consulte deux ou trois fois dans les vingt-quatre heures le baromètre, le thermomètre, l’hygromètre ; qui, pendant plus de vingt ans, note et mesure la quantité d’eau qui tombe chaque semaine, chaque mois ; qui dresse de tout cela des tables météorologiques sur les chiffres desquelles on peut compter : il aura rendu service au savant futur qui en tirera des inductions, des résultats peut-être et des lois.

2122. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 44-63

C’est l’œuvre d’un La Bruyère ligueur, voisin des halles, vengeur des paroisses, qui profite habilement de la languerévolutionnaire et s’en fait un ragoût de plus ; qui s’en donne à cœur-joie et à lèche-doigts ; qui, à défaut de Versailles où il n’est pas allé, se rabat et tombe sur la haute et basse bourgeoisie, sur la gent parlementaire, la gent écriveuse, grosse et menue, le fretin des journaux, la province ; mais qui, jusque dans le trivial et l’injurieux, dans ce qui dégoûte et repousse, a gardé l’art de l’imprévu, l’art de réveiller à chaque coup son lecteur par la variété des tons, le contraste des fragments, le brûle-pourpoint des apostrophes, tout ce qui supplée au manque de transitions.

2123. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 64-81

Mes pas suivent encor le char qui les emporte ; Dans la fosse mon cœur tombe encor par lambeaux ; Et comme les cyprès plantés sur leurs tombeaux, Ma douleur chaque jour croît et devient plus forte… Je recommande aussi le beau et triste sonnet qui exprime une pensée d’agonie : J’ai passé quarante ans.

2124. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Mélanges scientifiques et littéraires, (suite et fin.) »

Bertrand, dans l’excellent discours qu’il a prononcé sur la tombe de son illustre confrère, a relevé avec raison ce trait caractéristique.

2125. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite et fin.) »

Être pris de la sorte et tomber dans les filets du divin chasseur, c’est la meilleure chasse qu’il puisse faire.

2126. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Non pas qu’il ait rédigé ses Mémoires ou son Journal dans le moment même où il agissait et administrait : il paraît n’y avoir songé que tard et après sa retraite des intendances ; mais il a rédigé ses notes sur pièces, à mesure que, dans la révision qu’il faisait de ses papiers, chaque lettre, chaque copie ou minute lui tombait sous la main et fixait ses souvenirs.

2127. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. » pp. 31-51

Sa lyre tomba, elle se tut ; — et, pressant son cœur à deux mains, elle resta quelques minutes les paupières closes à savourer l’agitation de tous ces hommes. » C’est alors que l’Africain Mâtho se penche involontairement vers elle.

2128. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Pas tout le vrai, j’en tombe d’accord ; mais jamais le faux !

2129. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

Et dans la version de M. de Belloy : Mais elle, lui cédant, tout en pleurant plus fort, Sur le sein de mon fils tombe à demi pâmée, Comme reprenant là sa place accoutumée.

2130. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

Le jeune Cervantes était passionné pour la lecture, et dévorait tout ce qui lui tombait sous la main.

2131. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite et fin.) »

Il suffit de jeter les yeux sur les singuliers autographes qui nous viennent de Berny pour mesurer en un clin d’œil toute la distance : on était tombé de la langue si pure encore et si juste des dernières années de Louis XIV à celle que parlaient Mlle Leduc et ses pareilles.

2132. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires de madame de Staal-Delaunay publiés par M. Barrière »

Enfin j’avois acquis, quoique infiniment petite, tous les défauts des grands : cela m’a servi depuis à les excuser en eux. » Ainsi élevée, ainsi traitée jusqu’à l’âge de vingt-six ans sur le pied d’une perfection et d’une merveille, lorsqu’elle tomba plus tard en servitude, ce fut comme une petite Reine déchue, et elle en garda les sentiments, « persuadée qu’il n’y a que nos propres actions qui puissent nous dégrader », dit-elle ; aucun fait de sa vie n’a démenti cette généreuse parole.

2133. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VII. De l’esprit de parti. »

Mais dans l’esprit de parti, l’on aime mieux tomber, en entraînant ses ennemis, que triompher avec quelqu’un d’entre eux.

2134. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Préface » pp. 1-22

Très probablement, la nouvelle loi mécanique sur la conservation de la force est une dérivée peu distante de cette loi suprême ; car elle pose que tout effet engendre son équivalent, c’est-à-dire un autre effet capable de reproduire le premier sans addition ni perte, que la chute d’un poids engendre son équivalent, c’est-à-dire la quantité de chaleur nécessaire et suffisante pour faire remonter le poids jusqu’à la hauteur d’où il est tombé, que la quantité de chaleur dépensée pour élever un poids engendre son équivalent, c’est-à-dire l’ascension du poids jusqu’à la hauteur qu’il lui faut atteindre et qu’il lui suffit d’atteindre pour que sa chute régénère la quantité de chaleur dépensée.

2135. (1900) L’état actuel de la critique littéraire française (article de La Nouvelle Revue) pp. 349-362

Il est certain que l’homme sur la tombe duquel on pourra inscrire : « Il ne fit rien, sinon dire chaque lundi durant trente années que tel livre valait et que tel autre ne valait rien », il est certain que cet homme ne vaut même pas qu’on s’en irrite de son vivant.

2136. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

Lorsqu’il a été manié par des acteurs de quelque génie, il a fait les délices des plus grands rois et des gens du meilleur goût ; c’est un caméléon qui prend toutes les couleurs. » Arlequin, s’il n’était jadis naïf qu’à demi, devient alors tout à fait scélérat : « Arrogant dans la bonne fortune, dit M Jules Guillemot48, traître et rusé dans la mauvaise ; criant et pleurant à l’heure de la menace et du péril, en un mot Scapin doublé de Panurge, c’est le type du fourbe impudent, qui se sauve par son exagération même, et dont le cynisme plein de verve nous amuse précisément parce qu’il passe la mesure du possible pour tomber dans le domaine de la fantaisie. » Arlequin, avec ses nouvelles mœurs, court fréquemment le risque d’être pendu ; il n’y échappe qu’à force de lazzi.

2137. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre III. Grands poètes : Verlaine et Mallarmé, Heredia et Leconte de Lisle » pp. 27-48

Défions-nous de prétendre saisir le charme grec… Il reste à Leconte de Lisle d’avoir composé d’admirables vers, ce qui est bien la seule œuvre qu’on puisse demander à un poète, de les avoir faits non seulement avec âme, avec intelligence, avec adresse, mais encore avec cette rare loyauté d’homme qu’on louangea justement sur sa tombe.

2138. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Le symbolisme ésotérique » pp. 91-110

Le Vice Suprême de Péladan lui tombe entre les mains et lui révèle sa vocation.

2139. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre II. L’analyse interne d’une œuvre littéraire » pp. 32-46

Qu’il s’agisse de contes de fées qui émerveillent les enfants ou d’histoires de revenants qui leur font si grand’peur, qu’il s’agisse d’hymnes religieuses essayant de percer le mystère de la tombe ou d’utopies sociales s’efforçant d’esquisser l’avenir de l’humanité, qu’il s’agisse de méditations métaphysiques sur l’origine et la fin des choses ou de poèmes paradisiaques et prophétiques, nous rencontrons là des qualités nouvelles, des élans d’imagination, des envolées dans le vaste champ du possible, voire même de l’impossible, dans le royaume des hypothèses et des chimères, en un mot de l’idéal.

2140. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

L’anarchie débridée conduit au despotisme cru ; le naturalisme, tombé dans la platitude et la vulgarité, fait surgir les rêveries mystiques du symbolisme et de l’occultisme.

2141. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre II : L’intelligence »

Si l’on ne perd point de vue que les diverses facultés ne sont aussi que des causes inconnues de phénomènes connus, qu’elles ne sont qu’un moyen commode de classer les faits et d’en parler ; si l’on ne tombe pas dans le défaut si commun d’en faire des entités substantielles, des sortes de personnages qui tantôt s’accordent, tantôt se querellent, et forment dans l’intelligence une petite république ; on ne voit point ce qu’il y aurait de répréhensible dans cette distribution en facultés, très conforme aux règles d’une saine méthode et d’une bonne classification naturelle.

2142. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

Je crois que notre duchesse vous en entretiendra ; je voudrais que vous puissiez tomber d’accord de quelque chose de précis.

2143. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

Jean-Jacques Rousseau n’aurait pu l’entendre, j’ose le croire, sans éclater en sanglots, et peut-être tomber à genoux.

2144. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIII. Des éloges ou panégyriques adressés à Louis XIV. Jugement sur ce prince. »

On sait qu’il mourut l’année suivante ; et tandis que le peuple, toujours extrême, était loin de témoigner, pour sa cendre, le respect qu’il lui devait, et comme à son souverain, et comme à un homme qui avait fait de grandes choses pour la France, les orateurs sacrés et les gens de lettres portèrent leurs derniers hommages sur sa tombe.

2145. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome I

L’expérimentateur, guidé par cette lueur provisoire des théories actuelles, doit se considérer comme un aveugle, et n’avancer qu’avec circonspection, en donnant toujours la main à l’expérience qui, seule, peut l’empêcher de tomber dans l’erreur et de s’égarer. […] Au bout de trois ou quatre jours, les adhérences seront établies, les fils tomberont, et nous aurons une fistule permanente. […] Mais ces expériences sont défectueuses, non pas au point de vue de l’observation, car les observateurs ne se sont pas trompés sur ce qu’ils ont vu, seulement ils sont tombés souvent dans l’inconvénient de ne pas se placer dans des conditions vraiment physiologiques. […] En un mot, les cellules organiques animales et végétales doivent donc se développer dans un liquide où se passent des phénomènes de fermentation empêchant les matières de tomber à l’état de produits fixes et d’acquérir une stabilité ou indifférence chimique, qui est le caractère de tout ce qui ne vit plus. […] Vous voyez qu’il n’y a pas trace de réduction, et cependant, si nous faisons tomber dans ce mélange une goutte de la solution que nous avons injectée, la coloration du liquide apparaît aussitôt.

2146. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Il avait pour lui le savant abbé Nicaise, de Dijon, le correspondant de Leibniz, qui, chose remarquable, attaquait les nouveaux quiétistes comme « ennemis des belles-lettres143. » C’est à l’abbé Nicaise que Mlle de Scudéry, dont l’esprit valait beaucoup mieux que les livres, écrivait ces paroles si sages : « Je ne veux point me mêler dans une dispute d’une matière si élevée, et je me tiens en repos, en me bornant aux commandements de Dieu, au Nouveau Testament et au Pater ; car je crois, ajoute-t-elle, qu’une prière que Jésus-Christ a enseignée ne contient pas un intérêt criminel, quoique Mme Guyon la regarde comme une prière intéressée ; ce qui renverserait les fondements du christianisme. » Un autre correspondant de l’abbé Nicaise, l’abbé Bourdelot, lui écrit : « Depuis la Relation sur le quiétisme, M. de Cambrai est tombé dans le dernier mépris, et l’on en veut mal à M. l’archevêque de Paris et à M. de Meaux de l’avoir laissé faire archevêque, sachant tout ce qu’ils en savaient… Tant qu’il n’a été question que du dogme, il partageait les esprits ; mais l’histoire et les faits l’ont accablé. » Il n’y a rien là que de vrai. […] Quoique le coup l’eût frappé au cœur, nul ne s’aperçut qu’il était blessé ; et pareil à ce lutteur rhodien de son Télémaque, qui, renversé par le fils d’Ulysse, tâche encore de le mettre dessous154, il sut faire à son vainqueur un dernier tort de la grâce même avec laquelle il tomba. […] On ne rencontre pas ces violences de paroles chez le défenseur de l’universel ; loin qu’il tombe dans l’excès d’engager son sang, il ne daigne pas même prendre acte de l’offre que Fénelon fait du sien. […] Bossuet tombe toujours sur le vrai, dans quelque voie qu’il le cherche.

2147. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

… Bientôt sa fougue tombe, lasse de créer dans le vide. […] Lorsque la vulgarité tombe, on peut trouver dessous le naturel ; c’est ce qui arriva. […] Comment, en décriant le mot, Bataille est tombé dans l’abus des mots, dans la fausse émotion, dans la fausse poésie, dans la pire littérature, c’est ce que ses ouvrages, avec des qualités certaines, nous prouvent surabondamment. […] Mais s’essayant sur des chefs-d’œuvre consacrés, les metteurs en scène devaient tomber dans une virtuosité inféconde, dans une sorte de cabotinage dont le privilège exclusif cessa d’appartenir au comédien.

2148. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre I. De l’évolution de la vie. Mécanisme et finalité »

Je reconnais que, lorsque j’ai vu plusieurs tiroirs tomber d’un meuble, je n’ai plus le droit de dire que le meuble était tout d’une pièce. […] Ainsi, la preuve tirée de l’observation pure et simple va toujours se renforçant, tandis que, d’autre part, l’expérimentation écarte les objections une à une : c’est ainsi que les curieuses expériences de H. de Vries, par exemple, en montrant que des variations importantes peuvent se produire brusquement et se transmettre régulièrement, font tomber quelques-unes des plus grosses difficultés que la thèse soulevait. […] Dans la doctrine de Leibniz, le temps se réduit à une perception confuse, relative au point de vue humain, et qui s’évanouirait, semblable à un brouillard qui tombe, pour un esprit place au centre des choses. […] Dès que nous sortons des cadres où le mécanisme et le finalisme radical enferment notre pensée, la réalité nous apparaît comme un jaillissement ininterrompu de nouveautés, dont chacune n’a pas plutôt surgi pour faire le présent qu’elle a déjà reculé dans le passé : à cet instant précis elle tombe sous le regard de l’intelligence, dont les yeux sont éternellement tournés en arrière.

2149. (1923) Critique et conférences (Œuvres posthumes II)

De plus, il me déplaît particulièrement, et me peine de voir l’auteur du Dandysme et de l’Ensorcelée, un artiste après tout et quoi qu’il en dise, parler sérieusement des « droits et des devoirs » de la critique, ni plus ni moins qu’un Prudhomme de la Revue des Deux-Mondes, alors que tout le monde, depuis tantôt vingt ans, tombe d’accord qu’elle n’a pour but et pour fonction, cette bonne critique, que de constater les qualités et les défauts d’un ouvrage, en émettant bien modestement quelques avis bien discrets, et encore ! […] Barbey d’Aurevilly juge cette œuvre, honneur de notre époque, et qui sera tantôt l’honneur du siècle : « Salammbô est tombée définitivement dans le plus juste oubli. […] Flaubert m’a fait l’effet de n’avoir plus rien dans le ventre… » Les bras en tombent, n’est-ce pas ? […] Extraordinaire deux fois décadence, assimilable à aucune comme chute terrible et magnifique, au point qu’on est tenté de lui appliquer le premier vers de la Fin de Satan : « Depuis quatre mille ans il tombait », que la postérité peut-être la plus lointaine redira en parlant de lui, comme aussi sa gloire peut sombrer sous nos yeux, et à coup sûr s’éclipsera pour un temps comme nous la voyons commencer à le faire.

2150. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Deuxième série

Et dès lors, voilà Lamennais engagé dans un immense effort pour prouver que le christianisme a toujours été la pensée de l’humanité ; car il s’agit de montrer que l’humanité a été chrétienne non seulement depuis le Christ, mais auparavant, ou tout le système tombe. […] S’il n’était pas tombé, il ne ferait pas d’efforts vers un plus haut. […] L’humanité, une fois tombée par une première faute, est obligée au progrès. […] Quinet qui, du reste, n’a jamais écrit un livre comme William Shakespeare, tombe bien souvent dan » ce défaut. […] Nous avons besoin de l’ordre universel, et nous avons besoin aussi, jusqu’à présent, que l’ordre universel ressemble à un ordre humain bien établi, ou qui est tombé juste.

2151. (1769) Les deux âges du goût et du génie français sous Louis XIV et sous Louis XV pp. -532

Il le représenta prêt à lancer la foudre ; toute la Grece tomba aux pieds de son image. […] Les stances avec grace apprirent à tomber, Et le vers sur le vers n’osa plus enjamber. […] Le Génie tomba d’abord sur les plus licencieuses. […] Je contemple, & mon cœur soupire ; De ma main tombe le pinceau. […] Il doit pleinement réussir, ou tomber ; alternative qui semble annexée au génie.

2152. (1895) Hommes et livres

Je retournai à l’auberge, et après un triste repas, ne sachant que devenir, je me jetai sur mon lit, où, contre mon habitude, je tombai dans un profond sommeil. […] Et, pour achever de venger les martyrs, quand de bons chanoines veulent recueillir la dîme, des gens de Montpellier, à cheval et masqués, tombent sur leurs gens, enlèvent leur blé : le roi ne peut leur faire justice de leurs pillards ; c’est piété, pour ces huguenots, de dépouiller des chanoines. […] Il faudrait citer ces chœurs, qui sont des méditations chrétiennes, rêveries mélancoliques sur la vie et sur la mort, où les images semblent se détacher comme les feuilles d’automne et tomber coup sur coup avec un bruissement doux et triste. […] Il fût tombé moins doucement, il eût vécu moins vieux s’il n’eût été que l’abbé Alberoni. […] Ainsi tombera le reproche trop souvent, et sans doute injustement, adressé aux héritiers d’un grand homme, d’avoir été les ennemis de sa réputation littéraire, par un faux orgueil de race, et comme si la littérature n’avait pas fait toute l’illustration de leur nom.

2153. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Les choses mêmes rayonnèrent d’une splendeur depuis longtemps oubliée, à cause de la clarté qui était sortie d’une tombe. […] Il y a toujours, dans nos fiançailles avec l’avenir, un souvenir de funérailles, une odeur de tombe dans nos lits de nouvel hymen. […] Le fabliau, trotte-menu parmi la boue, s’accommode d’un vers plus bref dont les huit syllabes tombent l’une sur l’autre comme des capucins de cartes qui courraient tout en trébuchant. […] La plupart subissent inconsciemment le poids des existences anciennes qui les courbe vers la tombe. […] Il était comme un Christ qui, vingt fois crucifié au sommet du calvaire sans avoir sauvé les hommes, voudrait bien tomber mort au bas de la montée, puisque l’ascension s’arrête au gibet, loin du ciel !

2154. (1903) La pensée et le mouvant

Il semble vraiment, à entendre certains théoriciens, que l’esprit soit tombé du ciel avec une subdivision en fonctions psychologiques dont il y a simplement à constater l’existence : parce que ces fonctions sont telles, elles seraient utilisées de telle manière. […] Toutes ces théories tombaient, avec l’illusion qui leur avait donné naissance. […] Ce qui est perçu par nous comme une succession d’états est conçu par notre intelligence, une fois le brouillard tombé, comme un système de relations. […] Des difficultés philosophiques, qu’on juge insurmontables, tomberaient. […] En un mot, notre présent tombe dans le passé quand nous cessons de lui attribuer un intérêt actuel.

2155. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre premier. Les fonctions des centres nerveux » pp. 239-315

L’oubli complet de quelque langue étrangère est un des effets les plus ordinaires de la commotion… Les malades ne se souviennent jamais de la manière dont leur accident leur est survenu ; s’ils sont tombés de cheval, ils se souviennent bien qu’ils sont montés et descendus, mais ils ne se rappellent pas les circonstances de leur chute. […] Si leur action s’annule, toute image, et partant toute idée ou connaissance s’annule ; le malade tombe dans cet état d’engourdissement et de stupeur profonde où le retranchement des mêmes lobes met les animaux. […] Transmise par les fibres rayonnantes des couches optiques, l’action qui, dans les tubercules quadrijumeaux et la protubérance annulaire, a éveillé la sensation brute, arrive par les fibres de la substance blanche aux cellules de l’écorce cérébrale, et, par les fibres intermédiaires, se propage d’un point à l’autre de la substance grise ; cette action des cellules corticales est la condition suffisante et nécessaire des images, partant de toute connaissance ou idée. — Le scalpel, le microscope et l’observation physiologique ne peuvent pas aller plus loin sans tomber dans les hypothèses ; nous ne pouvons ni définir cette action, ni préciser cette propagation, et tout ce que nous savons, c’est qu’il s’agit ici d’un mouvement moléculaire.

2156. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre troisième. La connaissance de l’esprit — Chapitre premier. La connaissance de l’esprit » pp. 199-245

Si nous ne sommes pas détrompés par une analyse sévère, nous tombons dans l’illusion métaphysique ; nous sommes enclins à le concevoir comme une chose distincte, stable, indépendante de ses modes et même capable de subsister après que la série d’où il est tiré a disparu. […] Cette fois, nous ne nous trompons plus par addition, mais par retranchement ; au lieu d’insérer dans notre série des événements qui ne nous appartiennent pas, nous projetons hors de notre série des événements qui nous appartiennent. — Telle est l’erreur dans laquelle nous tombons à propos des couleurs et des sons ; on en a décrit le mécanisme.

2157. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VIII. La littérature et la vie politique » pp. 191-229

Mais, de même qu’aux environs de 1661, la hiérarchie sociale un instant bouleversée se reforme plus sévère ; de même que les classes superficiellement mêlées se séparent, si bien qu’il se constitue deux Frances, l’une aristocratique, l’autre bourgeoise et populaire, ayant chacune ses mœurs et ses intérêts ; de même les mots de la langue se divisent en deux castes, ceux-ci nobles et réservés à une petite élite, ceux-là roturiers et abandonnés à la foule ; les genres littéraires un moment confondus s’écartent l’un de l’autre ; la comédie et la tragédie sont parquées dans deux domaines différents avec défense formelle de franchir les barrières qui les isolent ; le mélange des tons, accepté ou recherché comme quelque chose de piquant, répugne au goût nouveau ; le burlesque, où les deux faces de la vie étaient violemment confrontées de façon à faire rire aux dépens des choses graves et des grands de la terre et du ciel, tombe dans le mépris et l’oubli. […] Or, ainsi que l’a dit un écrivain moderne73, « les grands poètes naissent comme les bluets dans les blés ; mais dans les moissons humaines que faisait Napoléon, les bluets tombaient avec les épis »

2158. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Un refuge des idées qui régnaient au temps de Louis-Philippe ; le temple des regrets orléanistes ; un rendez-vous pour les débris du régime tombé. […] Tel « qui cuide pindariser » et se hasarde en plein ciel sur des ailes fragiles tombe, nouvel Icare, d’une chute d’autant plus lourde qu’il a voulu s’élever plus haut.

2159. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 mai 1885. »

C’est que, dans le même temps où Beethoven élevait à sa plus haute puissance la musique, tombée au simple rôle d’un art agréable, il a ouvert, devant nous, le spectacle de cet Art qui, à toute conscience, révèle l’univers de la vie suprême, aussi nettement, que la plus profonde philosophie le pourrait faire au penseur le plus voyant. […] Mais il est impossible, je le vois, de discuter froidement l’essence caractéristique de cet art, sans tomber, aussitôt, dans le ton du lyrisme.

2160. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juin 1885. »

Les conditions de la souscription ayant été, exactement, observées de part et d’autre, les souscripteurs-patrons n’avaient rien à savoir du déficit, qui tomba, tout entier, sur Wagner : il alla donner, à Londres, une série de concerts, au printemps de 1877 ; il laissa un impressario prendre les décors de Bayreuth et colporter la Tétralogie de ville en ville : la générosité du roi de Bavière et de quelques anciens patrons fit le reste, et Wagner se trouva libéré, ayant accompli, grâce à la souscription et grâce à l’appui du roi, la fondation du Théâtre de Fête, et la représentation de sa première pièce de Fête. […] La force revécue de ce charme, à lui propre, il l’exerce, à présent, (Andante 5/4) sous une forme adorablement douce ; il y retrouve, ravi, le signe divin de l’Innocence intérieure, et il poursuit, sans cesse, cette mélodie, avec des variations toujours nouvelles et inouïes, laissant tomber sur elle, sans arrêt, les rayons de l’Eternelle Lumière.

2161. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

Dans La Petite Dorrit, quand Arthur Clennam, au retour d’une longue absence, parcourt la sombre et décrépite maison de sa mère, c’est l’idée que ce morne édifice est tombé en léthargie qui le hante et, s’il constate que tout, dans les silencieuses chambres, est terne, c’est pour se demander à quelle fleur, quel papillon, quelle gemme sont allées les couleurs mortes au mur. […] Plus tard, dans les romans que nous préférons, quand Dickens, plus las et plus calme, se fut fatigué de se trop mêler à ses livres, dans Les Grandes Espérances, dans L’Ami commun, il a réussi à peindre, dans le gris et le glauque, quelques beaux sites de marais, de grandioses tombées de nuit sur le lent cours de la Tamise.

2162. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Nouveaux voyages en zigzag, par Töpffer. (1853.) » pp. 413-430

Près de mourir, Töpffer reviendra sur cette idée d’assujettissement, d’acquiescement intime et volontaire qui était le trait essentiel de sa foi : « Qui dispute, doute ; qui acquiesce, croit… Je crois et je me confie, deux choses qui peuvent être des sentiments vagues, sans cesser d’être des sentiments forts et indestructibles. » Dès le temps où il visitait la Grande-Chartreuse, Töpffer, voyant ce renoncement absolu qui imprime le respect et une sorte de terreur, s’était posé dans toute sa précision le problème qui est fait pour troubler une âme préoccupée des destinées futures : le chartreux, le trappiste, en effet, le disciple de saint Bruno ou de Rancé vit chaque jour en vue de sa tombe, tandis que d’autres, la plupart, ne vivent jamais qu’en vue de la vie et comme s’ils ne devaient jamais mourir : Destinée étrange que celle de l’homme !

2163. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Marivaux, voyant que j’avais découvert le mystère, me battit froid, tomba dans la mélancolie, et mourut quelques mois après.

2164. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

[NdA] Ainsi, dans le Sermon pour la fête de l’Épiphanie, on trouve ce mot souvent cité : « L’homme s’agite, mais Dieu le mène. » Et dans le second point du même sermon, dans cette seconde partie qui est d’une grande beauté morale, il y a sur la corruption des mœurs et sur la décadence de la foi, de ces traits de vigueur qui sembleraient appartenir à Bossuet : Les hommes gâtés jusque dans la moelle des os par les ébranlements et les enchantements des plaisirs violents et raffinés ne trouvent plus qu’une douceur fade dans les consolations d’une vie innocente : ils tombent dans les langueurs mortelles de l’ennui dès qu’ils ne sont plus animés par la fureur de quelque passion.

2165. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — I. » pp. 91-108

Le jeune administrateur, comme on l’appelait encore, s’y montre avec tous ses avantages de physionomie, de regard, de représentation : il est peint assis, jusqu’à mi-jambe, en habit habillé, avec dentelles, coiffure du temps ; la main gauche est étendue sur une console d’où tombe en se déroulant une carte de la province : ses doigts distraits s’y posent et s’y déploient quelque peu complaisamment.

2166. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — III. (Fin.) » pp. 162-179

Sully, lui écrivant dans les derniers mois, n’avait pu s’empêcher de le louer : J’ai toujours fort estimé la vivacité de votre esprit et la solidité de votre jugement, lui disait ce témoin difficile, mais ces dernières actions m’en donnent meilleure opinion que jamais, ayant su vous débarrasser de tant de diversités et opinions différentes qui tombent d’heure à autre dans l’esprit de toutes les parties avec lesquelles vous avez à traiter ; car non seulement il faut concilier deux ou trois partis fort éloignés de désirs et intentions les uns des autres, mais il semble que vous ayez à faire autant de traités qu’il y a de personnes d’autorité de tous bords, y ayant autant d’opinions que de têtes.

2167. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — I. » pp. 279-295

Gessner tomba de fatigue et s’endormit au milieu d’une atmosphère glacée.

2168. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — I. » pp. 446-462

Il l’accompagnait, en le publiant, d’une lettre explicative qui peut faire juger des hardiesses et des espiègleries littéraires du temps : Je vous envoie, madame, disait Dorat, l’extrait (il aurait pu dire la presque totalité) de cette singulière brochure, que le hasard a fait tomber entre mes mains, et qui, malgré la confusion des idées, l’oubli de tous les principes et de toutes les règles du théâtre, m’a paru mériter votre attention.

2169. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — I » pp. 1-17

Nous sommes au moment où Mme de Montespan décline ou plutôt est déjà tombée ; où Mme de Maintenon va régner ou règne déjà.

2170. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Eugénie de Guérin, Reliquiae, publié par Jules Barbey d’Aurevilly et G.-S. Trébutien, Caen, imprimerie de Hardel, 1855, 1 vol. in-18, imprimé à petit nombre ; ne se vend pas. » pp. 331-247

Déchirante apparition du passé : berceau et tombe… Maurice, mon ami, qu’est-ce que le ciel, ce lieu des amis ?

2171. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — I » pp. 107-125

Les deux champions, montés sur des coursiers de différentes couleurs, l’un en armure noire sur un cheval blanc, l’autre sur un cheval noir avec l’écharpe blanche, brisèrent l’un contre l’autre leurs lances du premier coup : Marolles, atteint en plein dans la cuirasse, résista ; Marivaut, frappé à l’œil dans la grille de la visière, tomba roide mort.

2172. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance de Buffon, publiée par M. Nadault de Buffon » pp. 320-337

j’ai quelque regret d’assister à ces menus détails, je ne blâme point qu’on s’y livre, et même il le faut bien, puisqu’on les exige aujourd’hui et qu’une étude n’est pas censée complète sans cela : mais je regrette qu’ils soient devenus possibles ; je regrette qu’on n’ait pas brûlé, une bonne fois, tous ces brouillons, aussitôt employés, que tous ces copeaux tombés à terre n’aient pas été jetés au feu.

2173. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — I » pp. 1-17

Un jour (le 24 mars 1833), étant assis derrière la chapelle sous les deux pins d’Écosse qui s’élevaient à cet endroit, il avait pris son bâton et dessiné une tombe sur le gazon, en disant à l’un de ses disciples qui était près de lui : « C’est là que je veux reposer ; mais point de pierre tumulaire, un simple banc de gazon.

2174. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — II » pp. 231-245

La chaleur était à peine tombée avec le soleil ; les oiseaux, déjà retirés et non encore endormis, annonçaient, par un ramage languissant et voluptueux, le plaisir qu’ils goûtaient à respirer un air plus frais ; une rosée abondante et salutaire ranimait déjà la verdure… Ici une de ces descriptions naturelles dont il a le premier dans notre littérature donné le parfait exemple, mais où il a été depuis surpassé par ses grands disciples, par Bernardin de Saint-Pierre, par Chateaubriand, par George Sand, tous bien autrement particuliers, nuancés et neufs, et qui ne se contentent pas de peindre la nature en traits généraux devenus trop aisément communsy ; — et il continue : À ce concours d’objets agréables, le philosophe, touché comme l’est toujours en pareil cas une âme sensible où règne la tranquille innocence, livre son cœur et ses sens à leurs douces impressions : pour les goûter plus à loisir, il se couche sur l’herbe, et appuyant sa tête sur sa main, il promène délicieusement ses regards sur tout ce qui les flatte.

2175. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Essais de politique et de littérature. Par M. Prevost-Paradol. »

Le journal belge a commis une contravention en disant : « Les pluies tombées depuis dimanche ont fait subir à nos rivières une crue de plus de sept pieds », employant ainsi illégalement une dénomination ancienne pour déterminer la hauteur des eaux de la Meuse.

2176. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourgogne, par M. Michelet »

» Puis les deux Oiseaux inspirés reprirent ensemble : « Il aime nos douces chansons ; elles entrent dans son cœur, comme la rosée tombe sur nos gazons brûlés par le soleil.

2177. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourg, par M. Michelet. (suite.) »

Le duc de Bourgogne l’admira si fort qu’il en traduisit de beaux morceaux et les fit lire à Louis XIV, qui là-dessus reprit en gré l’abbé négociateur, depuis quelque temps tombé en disgrâce.

2178. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Halévy, secrétaire perpétuel. »

Il lui était souvent difficile d’y chercher un mot : comme on ouvre un dictionnaire à une page quelconque dans les environs du mot qu’on cherche, son œil tombait d’abord sur n’importe quel mot ; il le lisait, puis le suivant, puis un autre et un autre encore, tant qu’il oubliait quelquefois le mot qu’il voulait chercher.

2179. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poème des champs, par M. Calemard de Lafayette (suite et fin) »

Mais le poète se garde de tomber dans le panthéisme à la mode aujourd’hui ; il grave au seuil de son poème le nom du Seigneur et du Créateur, et dans le cours de ses récits et de ses peintures on le voit aimer à retracer le culte de la Vierge, toutes les croyances populaires et les chrétiennes espérances.

2180. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « M. de Pontmartin. Les Jeudis de Madame Charbonneau » pp. 35-55

On tombe dans le personnage de Molière.

2181. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Daphnis et Chloé. Traduction d’Amyot et de courier »

L’amour vient à Chloé d’avoir vu Daphnis au bain, un jour qu’étant tombé dans une fosse à loup, il a dû, au sortir de là, se laver et montrer, sans y songer, son beau corps.

2182. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Gisors (1732-1758) : Étude historique, par M. Camille Rousset. »

C’est en combattant à leur tête qu’il tomba. « Rien n’a été aussi absurde et aussi courageux que la charge de ce corps », a dit le marquis de Voyer, présent à l’action, et qui blâmait cette manœuvre d’une course de cavalerie violente à travers l’infanterie hanovrienne.

2183. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. EDGAR QUINET.— Napoléon, poëme. — » pp. 307-326

Le public, qui ne lit pas ces ébauches plus ou moins téméraires et malheureuses, ne sait pas ce qu’il en coûte pour arriver jusqu’à lui, et dans ces marches forcées de l’intelligence, pour un qui atteint au but ou qui obtient du moins d’être nommé et discuté, combien d’autres tombent obscurément le long du chemin, sans une mention, sans un regard.

2184. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Jean-Baptiste Rousseau »

Le comte du Luc, son patron, tombe malade ; Rousseau en est touché ; il veut le lui dire et lui souhaiter une prompte convalescence, rien de mieux ; c’était matière à des vers sentis et touchants ; mais Rousseau aime bien mieux déterrer dans Pindare une ode à Hiéron, roi de Syracuse, qui, vainqueur aux jeux Pythiques par son coursier Phérénicus, n’a pu recevoir le prix en personne pour cause de maladie.

2185. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre II »

Il résista un peu, puis céda, et, se levant pour sortir de la chambre avec moi, je le vis trébucher et aller tomber sur un fauteuil.

2186. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VIII. De l’invasion des peuples du Nord, de l’établissement de la religion chrétienne, et de la renaissance des lettres » pp. 188-214

C’est au milieu de cet affaissement déplorable, dans lequel les nations du Midi étaient tombées, que la religion chrétienne leur fit adopter l’empire du devoir, la volonté du dévouement et la certitude de la foi.

2187. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre II. Rapports des fonctions des centres nerveux et des événements moraux » pp. 317-336

. — D’autre part, nous avons vu que les sensations, en apparence simples, sont des totaux ; que ces totaux, en apparence irréductibles entre eux, peuvent être composés d’éléments semblables ; qu’à un certain degré de simplicité leurs éléments ne sont plus aperçus par la conscience ; qu’ainsi la sensation est un composé d’événements rudimentaires capables de dégradations indéfinies, incapables de tomber sous les prises de la conscience, et dont les actions réflexes nous attestent non seulement la présence, mais encore l’efficacité.

2188. (1899) Le préjugé de la vie de bohème (article de la Revue des Revues) pp. 459-469

De plus en plus, tombe avec le romantisme, l’idée qui en autorisait les oripeaux et les déclamations, l’idée que la littérature et l’art sont des carrières brillantes, honorifiques et amusantes, alors que ce sont des missions lourdes, graves, appauvrissantes et pleines de désenchantement, qui incombent à certains êtres et ne portent pas en elles de quoi les pousser à la ripaille et au costume rodomont.

2189. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVI. Les derniers temps de la comédie italienne en France » pp. 311-338

L’avocat Braillardet, dans Le Divorce, de Regnard, plaide la cause de son client Sotinet contre Isabelle, femme de Sotinet : On ne manquera pas de vous dire que celui pour qui je suis est un brutal : j’en tombe d’accord.

2190. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IX. Inquiets et mystiques » pp. 111-135

Il sera bon, pendant deux ou trois ans encore, qu’ils se limitent à un mouvement d’opinion ; il faut faire tomber dans le mépris les produits de la littérature infâme (sans doute celle des négatifs : Renan, Taine, Zola, etc.).

2191. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Oscar Wilde à Paris » pp. 125-145

Mendès parlait, laissant tomber ses mots comme des oracles, la tête renversée en arrière, avec, par intervalles, le geste de secouer sa crinière léonine ou de rajuster les plis de sa cravate flottante.

2192. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

Je vois lancer une bombe, je la suis de l’œil, je la vois tomber, causer des dégâts : association successive.

2193. (1785) De la vie et des poëmes de Dante pp. 19-42

L’âme était une portion de l’esprit qui anime l’univers, une subtile quintessence, un rayon très-épuré : mais c’était toujours de la matière ; et quoiqu’elle ne tombât point sous les sens, on ne la croyait pas pur esprit : tout alors avait une forme et occupait un lieu quelconque.

2194. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mme de Graffigny, ou Voltaire à Cirey. » pp. 208-225

Je pense le plaisir, je le sens presque, et je ne suis pas gaie ; je crois que je ne le serai jamais. » C’est cette personne encore inconnue dans les lettres, n’ayant rien écrit, rien publié, qui un jour, par suite de quoique circonstance tenant à ses persécutions domestiques, tombe brusquement au château de Cirey, aux portes de la Lorraine, et vient demander asile et hospitalité à Mme du Châtelet, à Voltaire.

2195. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Les Gaietés champêtres, par M. Jules Janin. » pp. 23-39

La nuit tombe, le voiturier approche du gîte, mais une femme acariâtre qu’il a au logis l’empêche d’offrir l’hospitalité au jeune couple.

2196. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame la duchesse d’Angoulême. » pp. 85-102

Tout change, tout meurt ou se renouvelle ; les races les plus antiques et les plus révérées ont leur fin ; les nations elles-mêmes, avant de tomber et de finir, ont leurs manières d’être successives et revêtent des formes diverses de gouvernement dans leurs divers âges ; ce qui était religion et fidélité dans un temps n’est plus que monument et commémoration du passé dans un autre ; mais à travers tout, tant que la dépravation n’est pas venue, il y a quelque chose qui reste : l’humanité et les sentiments naturels qui la distinguent, le respect pour la vertu, pour le malheur, surtout immérité et innocent, la pitié qui elle-même n’est que le nom de la piété envers Dieu en tant qu’elle se retourne vers les infortunes humaines.

2197. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Ducis. » pp. 456-473

Au moment où je vous écris, disait-il à Bernardin de Saint-Pierre, à qui la plupart de ces jolies lettres de la fin sont adressées, je suis seul dans ma chambre : la pluie tombe, les vents sifflent, le ciel est sombre, mais je suis calme dans mon gîte comme un ours qui philosophe dans le creux de sa montagne.

2198. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre III. Le Bovarysme des individus »

Margueritte, pour s’identifier avec les mouches qui bruissent autour de son lit, veut monter comme elles le long des murs de sa chambre jusqu’au plafond ; elle saule, tente avec ses mains de se retenir, glisse et s’étonne ; pour favoriser ses premiers essais, elle drosse des chaises contre le mur, monte sur cet échafaudage qui s’effondre, tombe et se fait une bosse au front.

2199. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Th. Dostoïewski »

Ainsi ces romans sont imbus de condoléance, depuis la scène où une petite enfant raconte à des parents endurcis pour leur fille, l’histoire de l’abandon de sa mère jusqu’à tous les actes évangélique de l’idiot, jusqu’à l’inoubliable entrevue de Raskolnikoff et de Sonia, irrités tous deux l’un contre l’autre, chargés des pires souillures et égaux dans le douloureux abandon de tout orgueil, qui tombent agenouillés l’un devant l’autre et pleurent sur leur souffrance et sur celle qui, diffuse dans la nuit du monde, fait sourdre de toute chair en toute terre, le même murmure de lamentations, et la même pluie lente de larmes.

2200. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Observations générales, sur, l’art dramatique. » pp. 39-63

Il faut éviter aussi d’y faire périr l’homme de bien et prospérer le méchant ; mais il faut observer la règle contraire, c’est-à-dire, que le méchant tombe dans l’infortune, et que le juste, le vertueux, pour qui on s’intéresse, passe du malheur à la prospérité.

2201. (1912) L’art de lire « Chapitre IV. Les pièces de théâtre »

mais parce qu’il a montré comme représentant de la cause de Dieu un imbécile et particulièrement parce que, tout en raisonnant, Sganarelle tombe par terre et que Don Juan lui dit : « Voilà ton raisonnement qui se casse le nez ».

2202. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Maurice Rollinat »

Ils étaient les rois de cette poésie qui s’est assise sur la tombe de la poésie du Passé, — la poésie sereine, idéale, lumineuse !

2203. (1923) Au service de la déesse

Que de vieux hommes d’État, lassés du pouvoir ou lâchés par lui, accusent la littérature de tous les crimes et la rendent responsable de tous les malheurs arrivés à l’État, c’est bien : ces gens, vaille que vaille, cherchent un alibi ; et n’ayant pas su gouverner, ils feraient volontiers tomber la faute sur le prochain. […] Claudel comme un poète du moyen âge : vos critiques tombent, vos critiques d’humanistes fieffés. […] Le vent du Sud tombait sur le vent d’Est, perpendiculaire, et des souffles Nord-Ouest-Sud-Est vous caressaient dans l’angle droit. […] Si vous n’avez pas de chance, vous y tomberez sur de telles pages, qui ne sont pas du tout satisfaisantes. […] Toute parole tombait lourdement sur mon cœur.

2204. (1930) Physiologie de la critique pp. 7-243

Elle arrive vite à tomber et à tromper faute de lecture. […] Je sais bien que la critique et l’histoire littéraire, cela aussi fait deux rives distinctes ; mais le critique qui ignore l’histoire littéraire n’a aucune chance de durer lui-même dans l’histoire littéraire, et l’historien de la littérature qui manque de goût critique tombe à plat dans un morne pédantisme. […] « La critique, écrivait Leconte de Lisle, en 1864, à peu d’exceptions près, se recrute communément parmi les intelligences desséchées, tombées avant l’heure de toutes les branches de l’art et de la littérature. […] Son office est de savoir, étant donné le tempérament d’un auteur, le défaut où il doit tomber, mais dont il est capable de se garantir, pour peu qu’il y mette de diligence ; celui au contraire où il est inévitable qu’il donne, mais dont encore il peut au moins dissimuler et atténuer un peu la gravité. […] Ceux qui connaissent la géographie littéraire savent que le monde de la plume comporte à Paris une étrange variété de quartiers séparés par des chaînes, dominés par des tours, d’où toutes sortes de diurnales tombent comme plomb fondu et flèches barbelées.

2205. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Si la littérature est tombée dans de fâcheuses mains en Angleterre, c’est bien pis en Allemagne. […] Du moins j’ai pu admirer sa haute taille, la noblesse de sa démarche, et ce port de tête droit et assuré qui faisait tomber sur le collet de sa redingote ses beaux cheveux d’argent. […] « La lumière tombait en plein sur le visage de Mary, tandis qu’elle l’écoutait, les yeux fixés sur lui. […] Encore aurait-il pu guérir, avec un peu de soin ; mais son article le tourmentait : il se remit au travail, tout grelottant de fièvre, essaya vainement d’achever une phrase, se releva, et tomba mort sur l’escalier de sa maison. […] Élémir Bourges, l’Oiseau s’envole et la Fleur tombe, pour ne point parler d’Hamlet et des variations sans nombre qu’on en a tirées.

2206. (1925) Portraits et souvenirs

Laclos mourut à Tarente en 1805.Sa tombe s’y voit encore. […] Pourquoi ne pas se borner à signaler et à distinguer provisoirement sa tombe par quelque figure ou quelque inscription qui rappellerait ses traits et son œuvre ? […] J’ai vu le rire illuminer ses yeux bleus, faire tomber son monocle, l’épigramme contracter sa bouche sinueuse. […] Et il ajoute, après avoir décrit les arabesques de pierre fleurie, qui enlacent les colonnettes des mausolées : Aux reflets des vitraux, la tombe réjouie, Sous cette floraison toujours épanouie, D’un air doux et charmant sourit à la douleur. […] Au bout d’un moment, la causerie tomba sur un poème que Leconte de Lisle avait publié, quelques semaines auparavant, dans une revue.

2207. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre premier. La perception extérieure et les idées dont se compose l’idée de corps » pp. 69-122

Je crois que Calcutta existe, quoique je ne perçoive pas cette ville, et je crois qu’elle existerait encore si tout habitant capable de perception quittait tout d’un coup la place ou tombait mort. […] Il crée ainsi la substance vide ; sur cette entité, la métaphysique travaille et bâtit ses châteaux de cartes ; pour les faire tomber, ce n’est pas trop de l’analyse la plus rigoureuse. — Il reste alors pour constituer la perception d’un corps, d’abord une sensation actuelle, et un groupe associé d’images, ensuite la conception, c’est-à-dire l’extraction et la notation au moyen d’un signe, d’un caractère commun à toutes les sensations représentées par ces images, caractère permanent qui, interprété par l’illusion métaphysique, s’isole et semble un être à part.

2208. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

Que votre nom seul soit gravé sur le marbre blanc de ma tombe ! […] » XXVIII De ce jour tout ce qu’il y avait d’humain et de frivole encore dans la poésie amoureuse des sonnets de Pétrarque revêtit, pour ainsi dire, le deuil éternel de son âme : ses chants devinrent des cantiques, et la mort de celle qu’il aimait lui donna l’accent de la tombe et de l’éternité.

2209. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

Mais des circonstances qui lui étaient personnelles ayant alors empêché mon amie de me rejoindre à notre maison de campagne, et me voyant condamné à soupirer encore après son retour, seule consolation que j’eusse au monde, je tombai dans un trouble d’esprit, qui pendant plus de trois mois obscurcit mon entendement. […] J’ai essayé d’exprimer dans les sonnets qu’on va lire les sentiments que j’ai apportés sur la tombe de notre ami. » Et comme en Italie tout commence et tout finit par des sonnets, l’abbé de Caluso, oncle de la comtesse Mazin, femme très distinguée du Piémont, avec laquelle j’ai eu des rapports aimables, dédie, en finissant, trois sonnets infiniment médiocres à la comtesse d’Albany.

2210. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

On dirait une joyeuse mascarade où de temps en temps un masque qui tombe laisse voir un visage d’homme. […] Je sais qu’en parlant ainsi de Regnard, je tombe sous le coup de la sentence de Voltaire.

2211. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre onzième »

Rousseau ne veut pas voir l’aumône tomber de la petite main de l’enfant dans la main du pauvre. […] Et quant à nous, qui n’avons ni la folie de nous tant idolâtrer, ni sujet de nous tant mépriser, si nous ne prétendons pas nous élever si haut, nous prétendons bien ne pas tomber si bas.

2212. (1890) L’avenir de la science « XV » pp. 296-320

On les lira lorsque les œuvres intermédiaires seront tombées dans l’oubli ; ce seront à jamais les livres sacrés de l’humanité. […] Puis, quand l’enthousiasme est tombé, quand la force originale et native s’est éteinte, on commence à définir, à combiner, à spéculer ce que les premiers croyants avaient embrassé de foi et d’amour.

2213. (1890) L’avenir de la science « XVII » p. 357

Mais le flot de derrière pousse toujours ; les premiers rangs tombent dans le gouffre, et, quand leurs cadavres ont comblé l’abîme, les derniers venus passent de plain-pied par dessus. […] Honte à ceux qui fondent leurs espérances sur la stupidité, qui se réjouissent de la multitude des sots comme de la multitude de leurs partisans et croient triompher quand, grâce à une ignorance qu’ils ont faite et qu’ils entretiennent, ils peuvent dire : « Vous voyez bien que le peuple ne veut pas de vos idées modernes. » S’il n’y avait plus d’imbéciles à jouer, le métier des sycophantes et des flatteurs du peuple tomberait bien vite.

2214. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VIII »

. — Et on trouvera dans ce premier acte un troisième genre de précision de la parole : c’est dans les récits d’Isolde, qui nous racontent ce qui a précédé, comment elle a soigné Tantris, comment elle a découvert que c’était lui le meurtrier de Morold, comment elle a voulu le tuer, mais que son regard lui fit tomber l’épée de la main. […] C’est le plus délicieux chef-d’œuvre. — Mais voici qu’ils tombent dans les bras l’un de l’autre.

2215. (1894) Textes critiques

Ames solitaires heurtées sans pénétration — mêlée sans mélanges— en éclats douloureux, d’autant moins conscientes de leur solitude que moins intellectuelles, le vieux Vockerat et sa femme, simples par l’esprit, souffrent le moins — et ils ont où se cramponner, Kaethe, l’Idolâtré englouti, tombe les mains s’effarant au vide du piédestal. […] La coiffe et la guimpe tombent dans le triangle d’une tente autour des joues et du cou de sablier de sa Bretonne, dont les traits fins de sanguine matelassent de l’ombre gravure.

2216. (1884) Articles. Revue des deux mondes

Mais, sans tomber dans ces excès de l’analogie, il est bien difficile de renoncer à la vieille comparaison entre les quatre âges de la vie individuelle et les diverses périodes de la vie de l’humanité, — comparaison toujours trompeuse et toujours reproduite, tant est naturelle et puissante chez l’homme cette tendance à chercher partout les conditions de sa propre existence, à se faire, comme disait le sophiste Protagoras, la mesure de toutes choses. […] Elles tomberont d’elles-mêmes, comme une feuille morte ou mourante qui ne tire plus rien du tronc qui l’a nourrie. » Ce que M. 

2217. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — II. (Fin.) » pp. 254-272

elle revenait quelquefois au duc de Marlborough tombé en enfance et jouant avec ses pages ; et un jour qu’un de ses portraits, devant lequel il passa, la lui rendit, il arrosa de pleurs ses mains qu’il porta sur son visage.

2218. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Il la perdit après peu d’années de mariage, et tomba dans un abattement et un désespoir qu’il crut éternel ; on lui doit cette justice qu’il fit tout son effort pour conserver et consacrer cette disposition d’âme, et il eût volontiers écrit alors à M. de Tréville, ou à tel autre de ses amis avancé dans la pénitence, cette belle parole qui résume toute la piété d’un deuil vertueux : « Priez Dieu d’accroître mon courage et de me laisser ma douleur. » On a dans plusieurs lettres de lui, et dans des réflexions écrites en ce temps-là, l’expression très naturelle et très vive de ses sentiments ; il s’écriait : Dieu a rompu la seule chaîne qui m’attachait au monde ; je n’ai plus rien à y faire qu’à mourir ; je regarde la mort comme un moment heureux… Que je me trouve jeune !

2219. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — III. (Suite et fin.) » pp. 454-472

. — En parlant ainsi, il ne saurait me venir à la pensée de faire injure à la Restauration, dont j’apprécie les mérites et les hommes : je ne songe qu’à l’unité dominante qu’on aime à voir dans l’étude d’une vie, à cette lumière principale qui tombe sur un front, et si en ceci je parais sentir un peu trop l’histoire en artiste, qu’on me le pardonne.

2220. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — II. (Fin.) » pp. 495-513

Je sais bien qu’il y en a qui gémissent de cet attentat… Il est à remarquer, en effet, que l’Académie française qui, depuis, a été une sorte de sanctuaire classique et d’où sont partis en sens inverse, d’où sont tombés sur des têtes que nous savons bien des anathèmes, était alors un lieu beaucoup plus neutre et dans lequel les adversaires et les contradicteurs de Despréaux, et, ce qui était plus grave, les contempteurs d’Homère, avaient eu pied en toute circonstance : J’avertis ici Mme Dacier, disait La Motte dans sa réponse, qu’elle a une idée fausse de l’Académie française.

2221. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

À propos du bœuf, il commet une singulière inadvertance en croyant que les cornes de cet animal tombent à trois ans : ce sont là des détails qu’il n’avait pas vus de près.

2222. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Mais la fatigue inaccoutumée d’une telle vie se fit bientôt sentir à Maucroix ; il tomba gravement malade avant la fin de la session, et il vit en face la mort.

2223. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — I. » pp. 312-329

Ou plutôt qui n’a vu l’un de ces braves guerriers et intrépides serviteurs de l’Empire, mais serviteurs vers la fin moroses et grondeurs envers leur grand chef trop infatigable, et qui, dès qu’ils l’eurent perdu et vu tomber, retrouvèrent l’enthousiasme pur et le culte ?

2224. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — II. (Fin.) » pp. 361-379

Un petit écrit d’un genre bien différent m’est tombé entre les mains70 et nous ramène au Bailly bon, juste, honnête, sensible et lettré, tel que nous le connaissons.

2225. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — II » pp. 18-35

Dangeau lit si bien que Corneille se mit à cette pièce de Bérénice, sans soupçonner la concurrence de Racine, et qu’il tomba dans le piège : aussi était-ce bien le bonhomme Corneille.

2226. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — I » pp. 236-253

Le premier mouvement de Charron, frappé d’apoplexie foudroyante dans une rue de Paris où il tomba et où il mourut, fut de se jeter à genoux pour prier Dieu.

2227. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

De peur qu’elle ne tombât de si haut que le dos de ses bêtes, je le lui ai refusé… » On peut rapprocher ce passage d’un autre qui se lit dans une lettre par lui écrite à la même Mme de Grammont au lendemain des scènes ensanglantées de Blois (1er janvier 1589) : « … Je n’attends que l’heure de ouïr dire que l’on aura envoyé étrangler la feue reine de Navarre.

2228. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — I » pp. 20-38

Quand on parle de Santeul, l’inconvénient et le péril à chaque instant est de tomber dans la caricature ; aussi faut-il avoir sous les yeux le portrait qu’a tracé de lui La Bruyère et n’en jamais sortir.

2229. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Sénecé ou un poète agréable. » pp. 280-297

Il correspondait volontiers avec le Mercure galant : « Un peu de critique, disait-il, exerce l’esprit et raffine le goût, et j’en use ainsi pour ma propre instruction dans toutes les nouveautés qui me tombent entre les mains. » Il avait gardé des relations avec l’évêque de Fréjus, le cardinal de Fleury ; il l’appelait son patron et son protecteur, et lui adressait de temps en temps des vers.

2230. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — III » pp. 337-355

Et cependant, lui-même il tombe gravement malade à Sondrio (août-septembre 1636), d’une maladie qualifiée de léthargie profonde tellement que le bruit de sa mort se répand et dans son armée qui le pleure, et chez l’ennemi qui s’en réjouit.

2231. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — I » pp. 356-374

Je me trouve à présent la plus heureuse mère du monde, qu’ils me sont tous rendus, et il me semble qu’une pierre du cœur m’est ôtée. » À Potsdam, deux ans après, il se montre plein de sollicitude et d’angoisse pour le prince Henri qui a failli être victime d’un accident, de la chute d’un cadre qui lui est tombé sur la tête.

2232. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — II » pp. 414-431

Grâce à Dieu, je n’ai pas eu cent hommes de morts. » Mais il avait le droit d’ajouter : « À présent je descendrai en paix dans la tombe, depuis que la réputation et l’honneur de ma nation est sauvé.

2233. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « La princesse des Ursins. Ses Lettres inédites, recueillies et publiées par M. A Geffrot ; Essai sur sa vie et son caractère politique, par M. François Combes » pp. 260-278

Elle l’avait réellement façonné, créé, lui avait (au moral aussi, et jusqu’à un certain point) redressé la taille ; la fermeté récente dont il avait donné des marques dans ses lettres en France, dans toute sa conduite, était en effet son ouvrage : il avait acquis une sorte de caractère, de la volonté. « On ne connaît pas assez le roi d’Espagne », disait-elle à ceux qui paraissaient en douter : cela était vrai en plus d’un sens ; elle devait elle-même le vérifier quatre ans plus tard, lorsque, lui ayant trop fait sentir son joug, elle fut renversée traîtreusement en un clin d’œil et tomba de cette chute soudaine et ridicule dont sa renommée historique s’est ressentie.

2234. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — II » pp. 435-454

Toi, le concitoyen et l’ami d’un Haller, un bonnet de conseiller flatte plus ton orgueil que les larmes de la patrie versées sur ta tombe et les monuments honorables que t’élèverait la postérité !

2235. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mémoires de Mme Elliot sur la Révolution française, traduits de l’anglais par M. le comte de Baillon » pp. 190-206

Tout cela, me dit-il, semble facile à faire dans votre salon ; je voudrais bien que cela le fût autant en réalité ; mais je suis dans le torrent, je dois m’élever ou tomber avec lui.

2236. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

Jouvin au Figaro dansdes articles de véritable critique, reprirent et poussèrent l’attaque : George Sand, dans le Siècle, sans répondre à personne en particulier, évoqua un Béranger noble, élevé, sérieux, fier, idéalisé et encore ressemblant, plusgrand que nature, une figure d’au-delà, telle qu’elle sort de la tombe à l’heure du réveil, en dépouillant toutes les petitesses humaines et les chétives misères.

2237. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres publiées par M. de Falloux. »

 » J’ai relu une page de l’illustre Mme de Condorcet, cherchant dans les plaisirs vrais de la bienveillance, de l’estime et de l’intimité affectueuse, les seules consolations possibles, à un certain âge, « pour ce sexe comblé à un moment des dons les plus brillantsde la nature, et pour lequel elle est ensuite si longtemps marâtre » ; car il est une heure (et c’est au milieu de la carrière) où la coupe enchantée lui tombe des mains et se renverse pour toujours.

2238. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

» on lui oppose un candidat suscité à l’improviste et qui tombe vraiment des.

2239. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poëme des champs par M. Calemard de Lafayette. »

Je t’adore, mais dans un moment j’aimerai plus que toi le bruit du vent dans ces rochers, un nuage qui vole, une feuille qui tombe.

2240. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier »

Et puis cette grande dame française qui leur tombe là comme la foudre, brillante, causante, interrogeante, représentant si bien de sa personne cette nation que William Cowper appelle « la nation ingérante » ou qui aime à se mêler de tout, cela les dérange dans leur travail et les tire de leurs habitudes ; ils ne s’y prêtent d’abord qu’en rechignant ; ils s’en inquiètent, jusqu’à ce qu’ils l’aient connue et qu’ils sortent de son entretien fixés et rassurés.

2241. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier (suite et fin.) »

Cette première et cette seconde Charte, ne l’ont-ils pas, l’un violée, l’autre éludée et faussée tant qu’il a pu, et ne sont-ils pas tombés pour cela ?

2242. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Journal de la santé du roi Louis XIV »

Fagon s’est lassé, et la plume lui est tombée des mains ; lui-même, ce médecin si probe, si exact, à ses devoirs, si attentif, il était un malade en effet ; il avait été taillé autrefois de la pierre ; il était sujet à un asthme violent, et il le fallait voir la nuit dans l’antichambre royale, sur un fauteuil, appuyé sur sa canne, ni plus ni moins que dans sa chambre à coucher ; car il ne se déshabillait jamais et ne dormait que sur son séant : « Sa santé ou plutôt sa vie, dit Fontenelle, ne se soutenait que par une extrême sobriété, par un régime presque superstitieux ; et il pouvait donner pour preuve de son habileté, qu’il vivait. » J’ai besoin d’une conclusion sérieuse, et je la réitère.

2243. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

Les génies purement d’art et de forme, et de phrases, dénués de ce germe d’invention fertile, et doués d’une action simplement viagère, se trouvent en réalité bien moins grands qu’ils ne paraissent, et, le premier bruit tombé, ils ne revivent pas.

2244. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

Le choix tombe sur le fils d’Hamilcar, le petit Hannibal, qui n’a pas plus de dix ans.

2245. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Il y a des mots qui sont vivants comme des hommes, redoutables comme des conquérants, absolus comme des despotes, impitoyables comme le bourreau ; enfin il y a des mots qui pullulent, qui, une fois prononcés, sont aussitôt dans toutes les bouches… « Il est d’autres mots qui, pris dans une mauvaise acception, énervent, glacent, paralysent les plus forts, les plus ardents, les plus utiles, les plus éminents, tous ceux enfin sur qui ils tombent, mots plus funestes au pays qui ne les repousse pas que la perte d’une bataille ou d’une province… 70» Je ne demande rien de plus, et, cela dit et réservé, je conçois, j’admets volontiers que dans un pays aguerri au feu des discussions, chez un peuple de bon sens solide, raisonneur, calculateur, entendant ses intérêts, d’oreille peu chatouilleuse, qui ne prend pas la mouche à tout propos, une grande part de ce qui n’est qu’imaginaire dans le danger d’une presse libre disparaisse et s’évanouisse ; que les inconvénients puissent même s’y contre-balancer de manière à laisser prévaloir grandement les avantages.

2246. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. »

La prudence est encore plus nécessaire aux princes qu’aux simples particuliers… » Et il parlait avec sensibilité de la prochaine réunion des États Généraux, exhortant chacun de ceux qui y étalent appelés à faire effort pour le bien dans sa ligne et dans sa mesure, à concourir au règlement de la chose publique, au rétablissement de l’ordre dans les diverses parties de l’administration, « afin de redonner à notre bon roi, disait-il, la tranquillité et le bonheur qu’il a perdus et dont il est si digne. » Celui qui lui aurait prédit alors, et ce jour-là, que trois ans et demi après, nommé membre d’une Convention avec mandat de juger ce même roi, il aurait hâte d’en finir au plus tôt avec lui et de faire le plus sommairement tomber sa tête, — celui qui lui aurait prédit que son premier discours à cette Convention nationale serait non plus pour louer ce bon roi, mais pour célébrer « le bon peuple » qui l’y avait porté et qui venait de lui conférer à ses collègues et à lui une mission terrible, souveraine, une mission de nivellement estimée par lui légitime, irrésistible et régénératrice, l’aurait certainement bien étonné.

2247. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, — Antiquité et Moyen Âge — Par M. J. Zeller. (Suite et fin.) »

Zeller) tombe sous le couteau pour avoir voulu faire subsister dans la tolérance les communions et les sectes ennemies qui s’égorgeaient la veille.

2248. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Observations sur l’orthographe française, par M. Ambroise »

Les mots en ayant été prononcés et parlés par le peuple, des siècles durant, avant d’être notés et écrits, toutes ou presque toutes les lettres inutiles ont eu tout le temps de tomber et de disparaître.

2249. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Affaires de Rome »

Il fallait ou en sortir et tomber à la démocratie pure et à un christianisme librement interprété, ou bientôt être réduit à se taire en vertu de défense supérieure.

2250. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

Qu’ils suivent chacun leur ligne pour les œuvres individuelles, et consentent à coexister dans de certains rapports de communauté et de confins dans les jugements ; qu’on pratique ainsi la vraie égalité et indépendance, l’estime mutuelle du fond avec les réserves permises : voilà des mœurs littéraires de juste et saine démocratie, ce semble, et qui seraient d’un utile exemple à offrir aux jeunes hommes survenants, lesquels ne trouvent rien où se rattacher, que l’ambition illimitée égare ou déprave, dont quelques-uns tombent du second jour aux vices littéraires, les plus bas de tous, et dont on voit quelques autres plus généreux rôder dans la société comme de jeunes Sicambres, des Sicambres plume en main et sans emploi.

2251. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

C’est alors qu’un soir, après avoir assez mal dîné à Covent-Garden, dans Hood’s tavern, comme il était de trop bonne heure pour se présenter en aucune société, il se mit, au milieu du fracas, à écrire, dans une prose forte et simple, tout ce qui se passait en son âme : qu’il s’ennuyait, qu’il souffrait, et d’une souffrance pleine d’amertume et d’humiliation ; que la solitude, si chère aux malheureux, est pour eux un grand mal encore plus qu’un grand plaisir ; car ils s’y exaspèrent, ils y ruminent leur fiel, ou, s’ils finissent par se résigner, c’est découragement et faiblesse, c’est impuissance d’en appeler des injustes institutions humaines à la sainte nature primitive ; c’est, en un mot, à la façon des morts qui s’accoutument à porter la pierre de leur tombe, parce qu’ils ne peuvent la soulever ;— que cette fatale résignation rend dur, farouche, sourd aux consolations des amis, et qu’il prie le Ciel de l’en préserver.

2252. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre IV »

Tombe un jour d’une toiture, se fracture la jambe droite.

2253. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre I. Composition de l’esprit révolutionnaire, premier élément, l’acquis scientifique. »

Lorsque nous voyons un homme un peu faible de constitution, mais d’apparence saine et d’habitudes paisibles, boire avidement d’une liqueur nouvelle, puis tout d’un coup, tomber à terre, l’écume à la bouche, délirer et se débattre dans les convulsions, nous devinons aisément que dans le breuvage agréable il y avait une substance dangereuse ; mais nous avons besoin d’une analyse délicate pour isoler et décomposer le poison.

2254. (1892) Boileau « Chapitre VII. L’influence de Boileau » pp. 182-206

répétait malicieusement Collé : « bien malheureuse », en effet, d’être tombée aux mains d’un traducteur si coquet.

2255. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jean Richepin »

Et le voilà qui « tombe » Dieu et les dieux dans des vers d’un athéisme carnavalesque et forain.

2256. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « La génération symboliste » pp. 34-56

Ils tombaient bien mal ; en pleine crise de désenchantement.

2257. (1890) L’avenir de la science « V »

Les Hébreux supposaient le ciel semblable à un miroir d’airain (Job, XXXVII, 18), soutenu par des colonnes (Job, XXVI, 11); au-dessus sont les eaux supérieures, qui en tombent par des soupapes ou fenêtres munies de barreaux, pour former la pluie (Ps., LXXVIII, 23 ; Gen.

2258. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre V. La littérature et le milieu terrestre et cosmique » pp. 139-154

Alfred de Vigny voit en elle une étrangère inquiétante : On me croit une mère et je suis une tombe, dit-elle par la bouche du poète, qui a peur de son impassible beauté. « La nature pour moi est ennemie, s’écrie Edmond de Goncourt54.

2259. (1886) De la littérature comparée

Cependant, le développement des études historiques, en favorisant la connaissance des milieux et la comparaison entre les époques, attira bientôt l’attention sur le phénomène, longtemps négligé des variations du goût : on remarqua qu’un siècle ne ratifie pas toujours les jugements du siècle précédent ; que telle tragédie portée aux nues à son apparition peut cependant tomber dans un oubli définitif ; que des gloires illustres entre toutes s’éclipsent pendant des périodes entières et ne reparaissent ensuite dans leur éclat que sous l’influence de circonstances qu’il est possible de déterminer ; que les poètes préférés d’une nation demeurent souvent incompris par la nation voisine.

2260. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVI » pp. 413-441

Cette imputation est contraire à tous les documents que nous avons de ce temps-là ; et il importe à l’opinion que j’ai à cœur d’établir, de faire tomber cette erreur.

2261. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

En un mot, échauffer et entretenir le sentiment patriotique en l’éclairant, sans tomber dans le lieu commun national, qui est une autre sorte d’ignorance qui s’infatue et qui s’enivre, ce serait là l’esprit dont je voudrais voir animé cet humble et capital enseignement.

2262. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres inédites de la duchesse de Bourgogne, précédées d’une notice sur sa vie. (1850.) » pp. 85-102

C’est à propos de ces représentations de Saint-Cyr que Mme de Maintenon écrivait : Voilà donc Athalie encore tombée !

2263. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Le Palais Mazarin, par M. le comte de Laborde, de l’Institut. » pp. 247-265

Brienne eut peur qu’il ne tombât dans le feu, et appela le valet de chambre Bernouin, qui le secoua assez vivement.

2264. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Droz a été marqué et comme gravé sur sa tombe dans un très beau discours de M. 

2265. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. de Lamartine. (Les deux premiers volumes. — Pagnerre.) » pp. 389-408

Son front semblait s’être élargi sous la nudité de ses cheveux noirs effilés à demi tombés sous la moiteur d’une pensée continue.

2266. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — II. » pp. 494-514

Il mourut à l’œuvre, je l’ai dit, au printemps de 1800, et la plume lui tomba des mains de défaillance, comme l’épée aux plus vaillants.

2267. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Patru. Éloge d’Olivier Patru, par M. P. Péronne, avocat. (1851.) » pp. 275-293

Quand la Grande Mademoiselle, avec Mmes de Fiesque et de Frontenac, ses maréchaux de camp, s’en alla faire son expédition d’Orléans, Patru disait « que, comme les murailles de Jéricho étaient tombées au son des trompettes, celles d’Orléans s’ouvriraient au son des violons ».

2268. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — I. » pp. 441-459

Mais le moment de ces maximes de conservation et de guérison sociale n’était point encore venu : les paroles de Portalis tombaient dans une atmosphère enflammée, et s’y altéraient au gré des passions.

2269. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — II. » pp. 460-478

Un législateur isolerait ses institutions de tout ce qui peut les naturaliser sur la terre, s’il n’observait avec soin les rapports naturels qui lient toujours plus ou moins le présent au passé et l’avenir au présent, et qui font qu’un peuple, à moins qu’il ne soit exterminé, ou qu’il ne tombe dans une dégradation pire que l’anéantissement, ne cesse jamais, jusqu’à un certain point, de se ressembler à lui-même.

2270. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — I. » pp. 201-219

Les larmes de tendresse qui tombent de mes yeux sur ce papier en sont bien la preuve.

2271. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

Pas une larme ne coula sur sa tombe ; les services qu’il avait rendus à son pays étaient depuis longtemps oubliés.

2272. (1912) Le vers libre pp. 5-41

Nous avions le même motif de haïr une technique tombée au pire chez les zélateurs ininspirés de Hugo, de Banville et de leurs amis.

2273. (1912) L’art de lire « Chapitre VIII. Les ennemis de la lecture »

De même que l’honnête homme est satisfait d’avoir vu clair dans le manège d’un charlatan et de n’être pas tombé dans ses pièges, de même le pococurante considère les artistes, les auteurs, les poètes et les jolies femmes comme des thaumaturges et faiseurs de prestiges qui empaument adroitement l’humanité.

2274. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Seconde partie. Des mœurs et des opinions » pp. 114-142

Ainsi l’excommunication admise par les traditions du clergé de France contre les spectacles paraît être en opposition avec les opinions actuelles, avec les progrès de la société : cependant elle est tellement dans nos habitudes de bienséance, que si elle tombe devant la force de l’opinion il restera toujours cette sorte d’excommunication civile dont les Romains, avant nous, avaient déjà frappé cette classe qui se dévoue aux plaisirs du public, cette profession où ceux qui l’exercent immolent leur personne même à la multitude.

2275. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre premier. Le problème des genres littéraires et la loi de leur évolution » pp. 1-33

On pourrait aller plus loin, et, sans tomber dans le fétichisme des formes et des règles, étudier les rapports intimes du contenu avec le contenant.

2276. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIII : De la méthode »

Aussitôt les êtres métaphysiques sont tombés, et il n’est plus resté que des portions, des combinaisons ou des rapports de faits.

2277. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Mais tous ces reproches tombent, nous dit M.  […] Ce n’est donc pas sur moi, mes Pères, que tombe le fort de cette accusation, mais sur le Port-Royal, et vous ne m’en chargez que parce que vous supposez que j’en suis. […] C’est la question à laquelle on aurait depuis longtemps répondu, si nous n’avions été nourris dans le respect de l’une des paroles certainement les plus absurdes qui soient jamais tombées de la bouche d’un doctrinaire. […] Il ne perd pas sa matière de vue, mais elle lui échappe d’elle-même, et les « mains paternelles », selon son expression, lui en tombent de découragement : Bis pairiæ cecidere manus. […] On voit aisément que, si l’auteur de l’Esprit des lois avait résolu la question, une moitié de son livre tombait, pour ainsi dire, cessait d’être, n’avait plus de raison d’exister.

2278. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

Les hommes qui le pratiquent ne peignent pas les objets avec précision, ils tombent aisément dans la rhétorique vague. […] Là il serait demeuré, torturé par son humeur diabolique, affamé de mettre au pilori et de mutiler les protestants, tourmentant les cavaliers, faute d’autres, par sa sottise et son aigreur, s’acquittant dans la cathédrale de ses génuflexions et de ses grimaces, continuant cet incomparable journal que nous ne regardons jamais sans que l’imbécillité de son intelligence nous fasse oublier les vices de son cœur, notant minutieusement ses rêves, comptant les gouttes de sang qui coulaient de son nez, surveillant de quel côté tombait le sel et écoutant les cris de la chouette. […] Cela surprend et déroute tout d’un coup le lecteur ; on tombe brusquement sous quelque détail familier et grotesque ; le choc est violent ; on éclate de rire sans beaucoup de gaieté ; la détente part si soudainement et si durement qu’elle est comme un coup d’assommoir.

2279. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

« J’attends qu’on m’apporte de la cire et je continue : « Je lis Rétif de La Bretonne, qui enseigne aux femmes à prévenir les libertés qu’elles pourraient permettre, et qui, pour les empêcher de tomber dans l’indécence, entre dans des détails très-intéressants130, et décrit tous les mouvements à adopter ou à rejeter. […] Tout à l’heure je vous ferai part de mes impressions ; mais pour l’instant je suis pressé de vous donner des nouvelles de vos compatriotes que j’extrais de la Gazette de Brunswick, le premier objet qui me tombe sous la main. […] c’est pour relever la conversation qui tombe. […] Cette conviction et le sentiment profond et constant de la brièveté de la vie me fait tomber le livre ou la plume des mains, toutes les fois que j’étudie… Nous n’avons pas plus de motifs pour acquérir de la gloire, pour conquérir un empire ou pour faire un bon livre, que nous n’en avons pour faire une promenade ou une partie de whist… » 178.

2280. (1891) Esquisses contemporaines

La démocratie ne s’édifiera que pour s’effondrer bientôt dans l’anarchie, ou pour tomber en dictature, car elle porte en elle le germe de sa dissolution. […] Et si l’on y regarde, il est étonnant combien le monde nouveau, issu de la Révolution, a vieilli rapidement, et combien il est tombé plus caduc même que le monde ancien n’avait jamais été. […] Tombée du ciel, sans attache aucune avec le cœur humain, l’autorité du texte se dressait, incompréhensible et formidable, comme un roc abrupt se dresse au sein des flots. […] Toute la sève évangélique est corrompue par l’infiltration de cette philosophie, et la réalité profonde du salut tombe avec la réalité tragique de la chute. […] Aveuglément butté contre un fait péremptoire, mais incompréhensible, il tombe dans un nominalisme phénoméniste qui n’est qu’un autre nom du scepticisme.

2281. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — II. (Suite.) » pp. 155-174

Partant, jugez si je mérite d’être ainsi traité, et si je dois plus longtemps souffrir que les financiers et trésoriers me fassent mourir de faim, et qu’eux tiennent des tables friandes et bien servies… Rosny introduit, après bien des retards, dans le Conseil des finances, y trouva une conjuration et complicité tacite des autres membres qui tendaient à le déjouer et à le faire tomber en faute : Or sus, mon ami, lui avait dit le roi au moment de l’y installer, c’est à ce coup que je me suis résolu de me servir de votre personne aux plus importants Conseils de mes affaires, et surtout en celui de mes finances.

2282. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — II. (Fin.) » pp. 213-233

Un courrier expédié au duc qui était alors à Soissons, courrier dont les dépêches avaient pour objet de l’apaiser et de le retenir, ne put partir faute de vingt-cinq écus, et le duc passa le Rubicon : Telle est, dit Mézeray, la condition des plus grandes affaires, que, lorsqu’elles sont à un certain point où elles ne peuvent pas subsister longtemps, il ne faut que le moindre incident pour les faire tomber d’un côté ou d’autre ; et, si la fortune permettait qu’il fût évité, les choses pourraient se mieux tourner et prendre toute une autre pente.

2283. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — I. » pp. 234-253

Dans les entretiens qu’il eut avec Frédéric au camp de Neustadt (1770), la conversation étant venue à tomber sur la religion, le roi se mit à en parler librement et peu décemment, comme il faisait avec les La Mettrie et les d’Argens : « Je trouvai, dit le prince de Ligne, qu’il mettait un peu trop de prix à sa damnation et s’en vantait trop… C’était de mauvais goût au moins de se montrer ainsi… Je ne répondis plus toutes les fois qu’il en parla. » Avec Voltaire, autre souverain, chez qui il va faire un séjour à Ferney, et dont il nous rend la conversation, les gestes, les incongruités même dans tout leur déshabillé et leur pétulance, il a plus d’un propos sérieux : « Il aimait alors, dit-il de Voltaire, la Constitution anglaise.

2284. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

Figurez-vous un doctrinaire de ce temps-là, le plus ingénieux et le plus délicat, la fleur du genre, mais tombé ou monté d’une mondanité exquise dans une dévotion non moins exquise et tout exclusive.

2285. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — II » pp. 159-177

je la brisai : — elle tomba à terre.

2286. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Une Réception Académique en 1694, d’après Dangeau (tome V) » pp. 333-350

Il dut attendre que l’archevêque de Paris, M. de Harlay, qui tenait à lui être désagréable, l’éclairât là-dessus, et lui fit tomber les écailles des yeux.

2287. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — I » pp. 249-267

Toutes les réflexions tombent sous la sensation de l’immense, croupes monstrueuses qui s’étalent, gigantesques échines osseuses, flancs labourés qui descendent à pic jusqu’en des fonds qu’on ne voit pas.

2288. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

Il me tomba, en même temps, un Sénèque dans les mains, je ne sais par quel hasard ; puis des lettres de Brutus à Cicéron, dans le temps qu’il était en Grèce, après la mort de César : ces lettres sont si remplies de hauteur, d’élévation, de passion et de courage, qu’il m’était bien impossible de les lire de sang-froid ; je mêlais ces trois lectures, et j’en étais si ému, que je ne contenais plus ce qu’elles mettaient en moi ; j’étouffais, je quittais mes livres, et je sortais comme un homme en fureur, pour faire plusieurs fois le tour d’une assez longue terrasse (la terrasse du château de Vauvenargues), en courant de toute ma force, jusqu’à ce que la lassitude mît fin à la convulsion.

2289. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance inédite de Mme du Deffand, précédée d’une notice, par M. le marquis de Sainte-Aulaire. » pp. 218-237

Je serais étonné si ces légers accidents typographiques étaient tombés exclusivement sur des évêques.

2290. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

Les trônes qui s’écroulent, les ministres qui tombent et se succèdent, l’intéressent moins que le courant profond de la société qui continue de couler sous toutes ces arches de pont.

2291. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Histoire du roman dans l’Antiquité »

Psyché a désobéi à l’Amour, elle a cédé aux conseils perfides de ses deux méchantes sœurs jalouses ; elle a voulu voir de ses yeux le monstre qui était son époux ; elle l’a vu, elle l’aime de ce moment plus que jamais, mais au même instant elle l’éveille par la goutte d’huile brûlante qui tombe de sa lampe, et elle le perd.

2292. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Étienne-Jean Delécluze, (suite et fin) »

Je conçois qu’un homme qui laisse des ouvrages achevés, des monuments peu accueillis d’abord et peu compris de ses contemporains, mais remplis de beautés ou de vérités qui éclatent après lui, soit proclamé, homme de génie sur sa tombe, tandis qu’il ne passait de son vivant que pour un original distingué.

2293. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

 » Mais ces anciens papiers sont relégués, entassés dans des greniers, dans des arrière-chambres où l’on n’a pas pénétré depuis des années ; il faut ouvrir et desceller des placards remplis et regorgeant de dossiers, morts dès longtemps à la lumière ; pour trouver un seul acte, il faut étaler, dépouiller tout cela, il faut tout parcourir ; car la pièce qu’on cherche, si elle s’y trouve, sera enfouie, comme il arrive souvent, dans la dernière liasse, et cette liasse sera peut-être elle-même tombée au plus profond recoin de l’armoire où elle gît et où elle resterait à jamais, si l’on n’y plongeait de toute la longueur du bras.

2294. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Oeuvres inédites de la Rochefoucauld publiées d’après les manuscrits et précédées de l’histoire de sa vie, par M. Édouard de Barthélémy. »

Croyez que je ne m’exagère pas le mérite d’une phrase bien faite ou qui, tant bien que mal, tombe d’aplomb sur ses pieds ; un galant homme peut fort bien soléciser ; mais qui diantre l’oblige à imprimer ses solécismes ?

2295. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’Audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. »

Coëffeteau, qui conserve toujours le rang glorieux qu’il s’est acquis par sa traduction de Florus et par son Histoire romaine, quoiqu’il y ait quelques mots et quelques façons de parler qui florissaient alors et qui depuis sont tombées comme les feuilles des arbres.

2296. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois par M. Camille Rousset. Victor-Amédée, duc de Savoie. (suite et fin.) »

L’infortuné marquis tomba du coup sans connaissance : ce fut une exécution.

2297. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Mme Roland avait péri le 9 novembre 1793 : Robespierre tombait le 9 thermidor (27 juillet 1794) ; moins d’un an après, dans l’été de 1795, parurent les Mémoires de Mme Roland ; ils avaient pour titre : Appel à l’impartiale Postérité par la citoyenne Roland, femme du ministre de l’intérieur ; ou Recueil des écrits qu’elle a rédigés pendant sa détention aux prisons de l’Abbaye et de Sainte-Pèlagie ; imprimé au profit de sa fille unique, privée de la fortune de ses père et mère, dont les biens sont toujours séquestrés.

2298. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

Elle fut éprouvée dans cet intervalle par une vive douleur : le premier Dauphin, tombé depuis quelque temps dans une sorte de rachitisme, mourut le 2 juin 1789 à l’âge de sept ans.

2299. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre »

On sait qu’à l’occasion d’une tabatière donnée par le duc de Noailles à la duchesse de Bourgogne, le matin du jour où elle tomba malade, et qui ne s’est plus retrouvée depuis, il s’est laissé aller à des soupçons diaboliques.

2300. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre (suite et fin) »

Tel était l’état moral où était tombée une armée française mal exercée, médiocrement commandée.

2301. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DISCOURS DE RÉCEPTION A L’ACADÉMIE FRANÇAISE, Prononcé le 27 février 1845, en venant prendre séance à la place de M. Casimir Delavigne. » pp. 169-192

Mais en prolongeant, Messieurs, je m’aperçois que je cours risque de répéter involontairement ceux qui lui ont payé ce jour-là sur sa tombe le tribut de douleur de la France, et que je rencontre surtout cette parole gravement éloquente57 qui fut alors votre organe, qui l’est encore aujourd’hui, et devant laquelle il est temps que je me taise.

2302. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SOUZA » pp. 42-61

Ces types de beaux jeunes gens mélancoliques, comme le marquis de Fargy, comme ailleurs l’Espagnol Alphonse, comme dans Eugénie et Mathilde le Polonais Ladislas, tombent volontiers dans le romanesque, tandis que le reste est de la vie réelle saisie dans sa plus fine vérité.

2303. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre troisième. Les sensations — Chapitre premier. Les sensations totales de l’ouïe et leurs éléments » pp. 165-188

Mais, comme on vient de le voir, chacune de celles-ci comprend elle-même au moins deux sensations élémentaires successives, lesquelles, isolées, ne tombent pas sous la conscience et ont besoin, pour être perceptibles, de s’agglutiner deux à deux en un total.

2304. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIIe entretien. Tacite (1re partie) » pp. 57-103

« À côté du lac Curtius, dit Tacite, le tremblement des porteurs de Galba le fait tomber de sa litière et rouler à terre.

2305. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

C’est pourquoi il s’est élevé, superbe en sa hauteur, beau en sa verdure, étendu en ses branches, fertile en ses rejetons ; les oiseaux faisaient leurs nids sur ses branches ; les familles de ses domestiques, les peuples se mettaient à couvert sous son ombre. » Ailleurs Bossuet compare l’homme à un édifice ruiné, et ajoute : « Il est tombé en ruine par sa volonté dépravée », ce qui ne peut se dire d’un édifice et déplaît à Condillac.

2306. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre I. La tragédie de Jodelle à Corneille »

Il y a dans son Ecossaise, et ailleurs, des couplets d’une sensibilité pénétrante ; et dans certains de ses chœurs, les strophes tombent avec une grâce mélancolique et molle, avec une douceur d’élégie lamartinienne.

2307. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Henry Rabusson »

Il est vrai que, justement à cause de cette indécision et de cette variété, il reste toujours au descripteur des mœurs mondaines quelque chance d’être tombé juste.

2308. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IV. Ordre d’idées au sein duquel se développa Jésus. »

Tant pis pour l’homme pieux qui tombait à une époque d’impiété ; il subissait comme les autres les malheurs publics, suite de l’impiété générale.

2309. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

On sent si bien une puissance qui, du haut de cette chaire, est dans la sincérité de sa direction et dans la plénitude de sa nature, une parole qui a cru entendre son mot d’ordre d’en haut : « N’interrogez pas le cours des fleuves ni la direction des montagnes, allez tout droit devant vous ; allez comme va la foudre de Celui qui vous envoie, comme allait la parole créatrice qui porta la vie dans le chaos, comme vont les aigles et les anges. » Il va donc et nous emporte mainte fois sur les crêtes et sur les cimes ; on frémit, mais il ne tombe pas.

2310. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

Tombé hier, il relève aujourd’hui son drapeau ; seulement, il le relève sous la forme historique.

2311. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « La Mare au diable, La Petite Fadette, François le Champi, par George Sand. (1846-1850.) » pp. 351-370

Nous, s’écrie l’auteur, nous n’avons plus affaire à la mort, mais à la vie ; nous ne croyons plus ni au néant de la tombe, ni au salut acheté par un renoncement forcé ; nous voulons que la vie soit bonne, parce que nous voulons qu’elle soit féconde.

2312. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres de la marquise Du Deffand. » pp. 412-431

Les hommes ne jouaient pas de meilleurs rôles, et moi j’étais abîmée dans les réflexions les plus noires : je pensais que j’avais passé ma vie dans les illusions ; que je m’étais creusé moi-même tous les abîmes dans lesquels j’étais tombée ; que tous mes jugements avaient été faux et téméraires, et toujours trop précipités, et qu’enfin je n’avais parfaitement bien connu personne ; que je n’en avais pas été connue non plus, et que peut-être je ne me connaissais pas moi-même.

2313. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

Tour à tour bruyant et joyeux, silencieux et triste, je rassemblais autour de moi mes jeunes compagnons ; puis, les abandonnant tout à coup, j’allais m’asseoir à l’écart, pour contempler la nue fugitive, ou entendre la pluie tomber dans le feuillage… Et encore : Jeune, je cultivais les Muses ; il n’y a rien de plus poétique, dans la fraîcheur de ses passions, qu’un cœur de seize années.

2314. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand. (Berlin, 1846-1850.) » pp. 144-164

« Un homme qui ne se croit pas tombé du ciel, dit-il, qui ne date pas l’époque du monde du jour de sa naissance, doit être curieux d’apprendre ce qui s’est passé dans tous les temps et dans tous les pays. » Tout homme doit au moins se soucier de ce qui s’est passé avant lui dans le pays qu’il habite.

2315. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

… Le livre m’est tombé sous la main l’autre jour ; vous le dirai-je ?

2316. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

C’est Ovide qui lui est tombé sous la main, et qu’il a lu en deux ou trois endroits ; et il interprète l’oracle gaiement, concluant de l’un de ces passages qu’il ne faut suivre, en matière de vertu et de maniement de fortune, ni la secte trop dissolue des épicuriens, ni celle, trop rigide et trop nue, des stoïques ou des cyniques, mais se rapporter tant qu’on peut, ici-bas, à la maxime du sage mondain Aristote, qui est de jouir de la vertu en affluence de biens : « Voilà comment, petit père, ajoute-t-il en parlant de lui-même, j’ai commencé à dorloter mon enfant. » Les Lettres de Pasquier, qu’il commença lui-même de publier en dix livres (1586), et qui ont été complétées après lui jusqu’au nombre de vingt-deux livres, sont d’une lecture très instructive, plus attachante à mesure qu’on s’y enfonce, et qui nous le rend tout entier avec son monde et son époque.

2317. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Histoire du chancelier d’Aguesseau, par M. Boullée. (1848.) » pp. 407-427

« Évitez, mon cher fils, s’écrie d’Aguesseau, de tomber dans le même inconvénient (la négligence de l’histoire), et fuyez comme le chant des sirènes les discours séducteurs de ces philosophes abstraits, etc., etc… » On voit déjà, à ce ton, quel est le goût littéraire fleuri et cicéronien de d’Aguesseau.

2318. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Maintenon. » pp. 369-388

Tout tombe juste, il n’y a pas un pli dans ce style-là.

2319. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Saint François de Sales. Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M. Sayous. 1853. » pp. 266-286

les conceptions descendraient et pleuvraient dru et menu ainsi que les neiges y tombent en hiver. » En ce moment saint François de Sales concevait l’idéal de la vie contemplative comme saint Anselme, et il l’exprimait naïvement comme Homère.

2320. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre deuxième. La force d’association des idées »

Ainsi vont à la rencontre l’une de l’autre les deux ondulations produites dans une masse d’eau par deux pierres tombées à une faible distance.

2321. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre III. L’art et la science »

Je tombai sur ces vers puissants et sereins4 : — « La religion n’est pas de se tourner sans cesse vers la pierre voilée, ni de s’approcher de tous les autels, ni de se jeter à terre prosterné, ni de lever les mains devant les demeures des dieux, ni d’arroser les temples de beaucoup de sang des bêtes, ni d’accumuler les vœux sur les vœux, mais de tout regarder avec une âme tranquille. » — Je m’arrêtai pensif, puis je me remis à lire.

2322. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

C’est lui qui prendra la parole, sur la tombe, au nom de la Comédie.

2323. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre V. Séductions pour la compréhension de la psychologie indigène. — Conclusion »

Il ne méconnaît pas le parti fructueux que tirent les marabouts et prêtres de toute sorte des sentiments religieux des naïfs… ce qui ne l’empêche pas, à l’occasion, de tomber dans leurs filets.

2324. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

La question de la forme et de la composition tombe naturellement sous des juridictions possibles.

2325. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Xavier Aubryet » pp. 117-145

Renan, c’est « le Français du xixe  siècle » ; Émile Augier, c’est Molière « tombé en ses petits-fils » ; Jules Simon, « c’est le Robinson des croyances » ; Scribe, « le génie de l’opéra-comique » ; Octave Feuillet, « la littérature fashionable » ; etc.

2326. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

, épouvanté de ne pas trouver le mot de ce monde, qui, s’il n’est pas tombé, n’est plus que l’œuvre d’un diable devenu fou, — comme disait Byron, — c’est-à-dire une absurdité, finit pourtant par accepter.

2327. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre IV. L’unification des sociétés »

La doctrine des states rights a été ébranlée par la guerre de sécession : dans la « période de reconstruction » qui l’a suivie, bien des divisions provinciales sont tombées, comme surannées ou dangereuses210.

2328. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

C’est un vainqueur qui, sur ses ennemis tombés, étale la pourpre éclatante de son manteau.

2329. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Quant aux marques jaunes et noires que Pierre portait sur les deux yeux et aux régions zygomatiques, Jean en rendait responsable un des tas de cailloux destinés à l’entretien de la route, et disposés en monticules réguliers d’un mètre sur lequel Pierre ivre serait tombé (sans, ô miracle, se meurtrir en quoi que ce soit le bout du nez). […] Même il se l’exagéra au point d’écrire (Sagesse) : Un grand sommeil noir Tombe sur ma vie : Dormez, tout Espoir, Dormez, toute Envie ! […] Le crépuscule tombait. […] Quant à cette dernière, dans quels abîmes d’obscurité ne tomba-t-elle pas, quand après la République indifférente à l’art, absorbée par d’autres soucis, et plutôt hostile en sa qualité de Puritain, vint la Restauration, plus nuisible encore, si l’on envisage son influence sur l’Art, Dès lors « le goût classique » régna en maître, et quel goût ? […] Mais félicitons-la de l’hommage, tardif à la vérité, rendu à Shakespeare dans Leicester Square, naguère si sordide avec son gazon grillé et son cheval de zinc, d’où l’un des Georges était tombé, et que des joyeux plaisants barbouillaient chaque nuit d’une couleur différente, parfois même avec des substances nauséabondes, aujourd’hui, après avoir dessiné un joli jardin dans le square, elle l’a orné d’une belle statue en marbre blanc de son premier poète et de son plus grand homme… Mais félicitons notre Paris, parfois si blâmable, si frivole, et sans cesse calomnié, de posséder une rue Milton, et une statue de Shakespeare.

2330. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

Elles sont si nettes qu’il faut se donner le plaisir de les méditer : « Il faut d’abord distinguer la rosée de la pluie aussi bien que des brouillards, et la définir en disant qu’elle est l’apparition spontanée d’une moiteur sur des corps exposés en plein air, quand il ne tombe point de pluie ni d’humidité visible. » La rosée ainsi définie, quelle en est la cause et comment l’a-t-on trouvée ? […] Une pierre lancée, un pendule qui oscille finissent par s’arrêter, et on est tenté de croire qu’ils s’arrêtent d’eux-mêmes ; un mélange détone, une pomme tombe de son arbre, sans que nos sens démêlent la circonstance nouvelle qui, s’ajoutant à l’ancien état, a provoqué le nouveau. […] chez les divers corps, la tendance vers le bas pour la pierre qui tombe, la tendance vers le haut pour l’air et le feu qui montent, la tendance au mouvement parfait ou circulaire pour les astres qui tournent, l’horreur du vide, etc.

2331. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Gabriel Naudé »

C’est peut-être parce que Richelieu a fait tomber la tête du duc de Montmorency, qu’il a été plus loisible à tel bon bourgeois de vivre honnête homme en sa rue Saint-Denis. […] Campanella y est taxé d’ingratitude, de légèreté, de charlatanisme effronté et d’insupportable orgueil ; ce sont les inconvénients de plus d’un grand esprit, et on en a connu de tout temps qui avaient peu à faire pour tomber dans ces défauts-là.

2332. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Le Chevalier de Méré ou De l’honnête homme au dix-septième siècle. »

Il était tombé évidemment dans la confusion. […] Je crois en avoir bien assez dit pour montrer qu’il ne méritait pas le mépris et l’oubli total où il est tombé, et que c’est un de ces personnages du passé qu’il n’est pas inutile ni trop ennuyeux de rencontrer une fois dans sa vie, quand on sait les prendre par le bon coté.

2333. (1813) Réflexions sur le suicide

On s’accoutume à se juger soi-même, comme si l’on était un autre : à placer sa conscience en tiers entre ses intérêts personnels et ceux de ses adversaires : on se calme sur son propre sort, certain qu’on ne peut le diriger : on se calme aussi sur son amour-propre, certain que ce n’est pas nous-mêmes, mais le Public qui nous fera notre part : on se calme enfin sur ce qu’il est le plus difficile de supporter, les torts de ses amis, soit en reconnaissant nos propres imperfections, soit en confiant à la tombe de l’être qui nous a le plus aimé, nos pensées les plus intimes : soit enfin en reportant vers le Ciel la sensibilité qu’il nous a donnée. […] Je me rappelai combien de fois nous avions admiré ensemble de certaines morts volontaires parmi les anciens, et je tombai dans des réflexions profondes comme si les lumières du Christianisme s’étaient tout à coup éteintes en moi, et que je fusse livrée à cette indécision, dont l’homme même dans les plus simples occurrences a tant de peine à se tirer.

2334. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIIIe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (1re partie) » pp. 5-96

Peut-être verrait-on encore, dans le dix-septième livre de Diodore de Sicile, ces reproches faits par Hermolaüs à Alexandre, si la grande lacune de ce livre ne tombait pas précisément à l’endroit où il devait être question du meurtre de Clitus et de la conjuration qui causa la perte de Callisthène. […] La justice est une nécessité sociale car le droit est la règle de l’association politique, et la dérision du juste est ce qui constitue le droit. » XIX Ici il tombe, pour la seule fois, de sa logique dans le sophisme d’habitude du paganisme et même du christianisme, la justification de l’esclavage, instrument, dit-il, donné par la nature pour faciliter au maître l’usage de la propriété.

2335. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

C’est une dégradation de teintes, une poussière de rais, un mica de sons, qui se meurent avec le dernier écho du cantique perdu au loin ; — et la nuit tombe sur cette immatérielle nature, créée par le génie d’un homme, maintenant repliée sur elle-même dans une inquiète attente. […] Inondé d’ineffables promesses et d’ardents effluves, il tombe, délirant, dans les bras des polluantes Nuées qui l’enlacent ; sa personnalité mélodique s’efface sous l’hymne triomphant du Mal — puis la démoniaque tempête de la chair qui rugit, les éclairs sulfureux et les jets phosphoriques qui grondent dans l’orchestre s’apaisent ; l’incomparable éclat de ces grands cuivres qui semblent une transposition des aveuglantes pourpres et des somptueux ors de Delacroix, s’affaissent — et un susurrement d’une ténuité délicieuse, un frôlement presque deviné de sons adorablement bleus et aériennement roses, frissonne dans l’éther nocturne qui déjà s’éclaire. — Puis l’aube apparaît, le ciel hésitant blanchit comme peint avec des sons blancs de harpe, se teint de couleurs encore tâtonnantes qui peu à peu se décident et resplendissent dans le magnifique alléluia, dans la fracassante splendeur des timbales et des cuivres.

2336. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

Lorsqu’elle eut fait rentrer les glaives dans leurs fourreaux, la contenance audacieuse de Tannhseuser se change en un abattement désolé, et il tombe prosterné à ses pieds, Élisabeth achève son imploration de suprême amour et de suprême douleur, d’une voix que l’épuisement éteint. […] Le récit amer et poignant qui tombe avec de douloureux sarcasmes de la lèvre plissée par le désespoir du malheureux excommunié, se poursuit à travers des émotions si navrantes, qu’il s’est rencontré des personnes hors d’état d’y assister jusqu’au bout.

2337. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre V : Lois de la variabilité »

Wollaston a observé que les Coléoptères de Madère se tiennent bien cachés jusqu’à ce que le vent tombe et que le soleil brille, et que la proportion des espèces dépourvues d’ailes est plus grande dans les îles désertes, exposées au vent de mer, qu’à Madère même. […] Si de tels caractères tombent si évidemment sous une même loi, c’est sans doute une conséquence de leur grande variabilité, qui ne saurait, je pense, être contestée, que, du reste, ils soient ou non extraordinairement développés.

2338. (1753) Essai sur la société des gens de lettres et des grands

Philoxène, après avoir entendu des vers de Denys-le-Tyran, disait, qu’on me ramène aux carrières  ; combien de gens de lettres arrachés à leur obscurité, et tombés tout à coup dans un cercle de courtisans, devraient dire presque en entrant : qu’on me ramène à ma solitude ? […] L’ouvrage dont il s’agit m’est tombé entre les mains depuis la première édition de cet essai : l’exécution m’a paru bien indigne du projet : on ne saurait faire un plus mauvais livre avec un meilleur titre.

2339. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Nous n’imiterons pas ces jeunes Français de 1780, et nous nous garderons de la confusion où ils tombaient.

2340. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De l’état de la France sous Louis XV (1757-1758). » pp. 23-43

Ce n’est plus un ministre ni un homme d’État, c’est un malade qui écrit et qui nous énumère les symptômes dont il est atteint : coliques d’estomac qui durent dix heures, étourdissements fréquents et qui augmentent, insomnies opiniâtres : « Mon visage est quelquefois comme celui d’un lépreux, parce que la bile arrêtée s’est portée à la peau. » Son cri perpétuel est qu’il n’en peut plus, et que son moral même est ébranlé : Je vous en avertis, ma tête est malade (septembre 1758) : avec du repos et l’espérance de ne me pas déshonorer, je me rétablirai ; sans cela, je tomberai dans un état où il ne me sera plus possible de faire aucun travail… Mais qu’on me sauve du déshonneur si on veut conserver ma tête et ma vie !

2341. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Une petite guerre sur la tombe de Voitture, (pour faire suite à l’article précédent) » pp. 210-230

Une petite guerre sur la tombe de Voitture (pour faire suite à l’article précédent) [Samedi 5] janvier 1856.

2342. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Il y a un côté par où M. de Mirabeau tomba dans la secte et fut un dévot au docteur Quesnay ; mais, en laissant ce côté particulier et ce coin de paradoxe économique, que d’idées fines et justes dans ses écrits, que de vues justifiées par l’expérience et que ne désavouerait pas le bon sens politique, soit qu’on le prenne dans son mémoire de début sur L’Utilité des États provinciaux (1750), soit dans maint chapitre de L’Ami des hommes (1756), soit dans la Théorie de l’impôt (1760) qui le fit mettre cinq jours au donjon de Vincennes, par un simulacre de châtiment et une concession faite aux puissances financières du temps !

2343. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Sa chapelle, placée sous la protection de Notre-Dame-Auxiliatrice, dont la fête tombe le 24 mai, joue un grand rôle parmi les habitués de son monde.

2344. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

Dom Colignon avait reçu de l’éducation ; il était bel homme, fort aimable, parlant bien ; procureur de la maison de Metlach, il allait succéder à l’abbé tombé en imbécillité, quand la cure de Valmunster était venue à vaquer ; le presbytère était joli et commode, le pays riche, peuplé, fort agréable, arrosé par la Sarre : sacrifiant l’ambition à la liberté, il avait fait nommer abbé un de ses amis, qui lui avait ensuite conféré la cure, la seigneurie et les revenues de Valmunster.

2345. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

M. de Pontmartin dut voir souvent là, à ce foyer hospitalier et intime, le Lamennais dès longtemps déchu et non pas moins intéressant à entendre ; et je suis étonné qu’il se soit plu depuis à nous représenter « la société polie, sans acception de culte ou de croyance, laissant M. de Lamennais tomber de chute en chute dans le trou à fumier de l’impiété démagogique.

2346. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

Le peuple n’a au gouvernement que la part qu’il doit avoir, c’est-à-dire dont il est susceptible, et, quoiqu’on prétende qu’il est acheté aux élections, son choix tombe sur des personnes qui ne voudraient pas se déshonorer en soutenant une mauvaise cause, nuisible à la nation et contraire à leurs propres intérêts.

2347. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

Tu te seras déjà fait toi-même la leçon ; n’importe, il est bon de la repasser souvent, et si je pouvais trouver la bague de la fée qui piquait le doigt chaque fois qu’on risquait de tomber en faute, je te l’enverrais pour plus de sûreté.

2348. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Tout cela trouve sa place, son usage ; et l’excès, quand il y en a, tombe de lui-même.

2349. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Collé. »

Ici on touche aux bornes de l’esprit de Collé ; il ne sent pas que Rousseau a donné un heurt à l’esprit français, à l’imagination française, à bout de voie et tombés à la fin dans l’ornière, et qu’il a dû faire un grand effort, qu’il a dû mettre en avant la torche et le flambeau pour les faire avancer.

2350. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette »

Les trois tantes, filles du roi, Mesdames Adélaïde, Victoire et Sophie (il n’est plus question de Madame Louise la carmélite) sont assez difficiles à définir dans leur insignifiance, tantôt démonstratives à l’égard de la Dauphine, tantôt froides et piquantes, surtout la moins jeune (Madame Adélaïde) : « Ma tante Adélaïde m’intimide un peu ; heureusement que je suis favorite de ma tante Victoire, qui est plus simple ; — pour la tante Sophie, elle n’a pas changé ; c’est au fond, j’en suis sûre, une âme d’élite, mais elle a toujours l’air de tomber des nues : elle restera quelquefois des mois sans ouvrir la bouche, et je ne l’ai pas encore pu voir en face… » Cette tante Sophie, qu’on ne pouvait voir en face et qui était si habile à se dérober, est bien celle dont Mme Campan a dit que « pour reconnaître, sans les regarder, les gens qui étaient sur son passage, elle avait pris l’habitude de voir de côté à la manière des lièvres.

2351. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.). Guerre des Barbets. — Horreurs. — Iniquités. — Impuissance. »

Enfin le masque tomba, l’épée sortit du fourreau ; les hostilités s’ouvrirent le 4 juin 1690.

2352. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

Les deux ou trois premiers qui tranchent par le ton sont les seuls qui soient légèrement cérémonieux ; le monsieur tomba vite entre nous.

2353. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Boileau »

Il eût été trop dur d’appliquer à lui seul des observations qui tombent sur tout son siècle, mais auxquelles il a nécessairement grande part en qualité de poëte critique et de législateur littéraire.

/ 2579