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965. (1888) Poètes et romanciers

Il appartient à la philosophie religieuse, bien plus qu’à aucune forme de religion positive. […] Il poursuit dans la société un double travail de philosophie et d’harmonie universelle. […] Et pourtant, j’ai toujours été, je suis et je mourrai, je l’espère, ce qu’en philosophie on appelle un spiritualiste. […] En elles-mêmes et d’après leur nature, la poésie et la science, de même que la philosophie, ne sauraient être séparées. […] Excellente méthode en philosophie, dangereuse en poésie.

966. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

Mais la nature voluptueuse du créole s’imprégna en lui de bonne heure de la philosophie régnante, et tout d’abord cette philosophie semblait, en effet, n’être venue que pour donner raison à cette nature ; l’accord entre elles était parfait. Tandis pourtant que la nature, sans arrière-pensée, n’aurait eu que sa mollesse, sa tendre et gracieuse nonchalance, la philosophie avait son venin ; il se déclare chez Parny en avançant. […] Ainsi, dans cette fin de discours, il se mit à faire un magnifique éloge de la piété tendre et sensible, puis, en regard, un non moins magnifique portrait de la vraie philosophie ; puis, au sortir de ce parallèle, il s’échappa dans une vigoureuse sortie contre le fanatisme qui, seul, trouble la paix si facile à établir, disait-il, entre les deux parties intéressées ; s’animant de plus en plus devant cet ennemi, pour le moment du moins, imaginaire, l’orateur compara tout d’un coup le fanatique ou l’hypocrite à l’incendiaire Catilina lorsqu’il vint pour s’asseoir dans le sénat de Rome et que tous les sénateurs, d’un mouvement de répulsion unanime, le délaissèrent sur son banc, seul, épouvanté et furieux de sa solitude… On se retournait, on regardait de toutes parts pour chercher cet incendiaire, car il était bien évident que, dans la pensée de Garat, ce n’était point M. de Parny.

967. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

Ruccellai avait fait planter autour de son palais de délicieux jardins, semblables à ceux d’Académus, et il y rassemblait tous les jours ses amis pour y disserter platoniquement avec eux de philosophie, de religion, d’histoire, de poésie, de politique. […] Machiavel y est en philosophie politique égal à Newton en philosophie naturelle. […] L’esprit de Joseph II et de Léopold, ses frères, les deux souverains les plus hardis contre les routines de gouvernement, respirait dans ses propres actes ; elle avait autant de philosophie et de hardiesse : plus puissante, elle aurait été la Catherine II du midi de l’Europe ; mais, fille de Marie-Thérèse, elle était reine avant tout, et, femme autant que reine, elle mêlait le goût du plaisir à celui de la domination.

968. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

On y verrait la savante construction des Antonins crouler, la décadence de la civilisation antique devenir irrévocable, le christianisme profiter de sa ruine, la Syrie conquérir tout l’Occident, et Jésus, en compagnie des dieux et des sages divinisés de l’Asie, prendre possession d’une société à laquelle la philosophie et l’État purement civil ne suffisent plus. […] L’Asie-Mineure était alors le théâtre d’un étrange mouvement de philosophie syncrétique ; tous les germes du gnosticisme y existaient déjà. […] Prétendre qu’un événement ne peut pas s’être passé de deux manières à la fois, ni d’une façon impossible, n’est pas imposer à l’histoire une philosophie a priori. […] Ce n’est donc pas au nom de telle ou telle philosophie, c’est au nom d’une constante expérience, que nous bannissons le miracle de l’histoire.

969. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre IV. De l’amour. »

Pour quelque temps, du moins, les bornes de la destinée de l’homme, l’analyse de la pensée, la méditation de la philosophie, se sont perdues dans le vague d’un sentiment délicieux ; la vie qui pèse était entraînante, et le but, qui toujours paraît au-dessous des efforts, semblait les surpasser tous. […] Cette dépendance d’un seul objet affranchit si bien du reste de la terre, que l’être sensible qui a besoin d’échapper à toutes les prétentions de l’amour-propre, à tous les soupçons de la calomnie, à tout ce qui flétrit enfin dans les relations qu’on entretient avec les hommes, l’être sensible trouve dans cette passion quelque chose de solitaire et de concentré, qui inspire à l’âme l’élévation de la philosophie, et l’abandon du sentiment.

970. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre II. Le mouvement romantique »

La religion, jadis, drainait, canalisait dans la vie individuelle et dans le domaine littéraire, l’émotion et la pensée métaphysiques : quand, par le progrès de la philosophie, elle a cessé de faire son office pour les classes supérieures de la nation, alors tous les sentiments qu’elle enfermait dans certains actes de la vie et certains genres de littérature, ont inondé toute la vie et toute la littérature. […] Quinet,Idées sur la philosophie de l’histoire de Herder, 3 vol. in-8. 1828.

971. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Gaston Paris et la poésie française au moyen âge »

C’est par leurs découvertes que s’élargit, en somme, la philosophie des sages, et que se renouvellent l’inspiration des poètes et la curiosité des dilettantes. […] Enfin ce savant de tant de patriotisme et cet érudit de tant de philosophie est, par surcroît, un artiste, un poète.

972. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre VII. L’antinomie pédagogique » pp. 135-157

. — Quelle est la philosophie qui donne la formule supérieure pour le fonctionnaire de l’État ? […] « Cette philosophie de l’éducation, dit-il, pourra paraître à certains vide de satisfactions et incapable d’aider au plein développement de l’individu.

973. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Le symbolisme ésotérique » pp. 91-110

Est-ce bien cette même Église qui, au moyen âge, sauva, dans son sanctuaire, la littérature et tous les arts, et toutes les philosophies ?  […] « La philosophie de la nature, qui a servi de guide aux alchimistes, dit M. 

974. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre troisième. L’appétition »

Nous avons montré le contraire dans nos Principes d’une Philosophie des idées-forces. […] Voir nos Principes d’une philosophie des idées-forces.

975. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence de la chaire. » pp. 205-232

quel ton de vérité, de philosophie, d’humanité ! […] Son esprit de philosophie, de conciliation & de tolérance ne se manifesta jamais mieux, que lorsqu’il fut nommé à l’épiscopat.

976. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

, et d’appartenir à la grande philosophie du xviiie  siècle, à cette race « des vaillants athlètes, nos pères », qui ont combattu… Hélas ! […] s’il fut jamais un homme, au contraire, qui s’éloignât par tous ses instincts révoltés de la philosophie du xviiie  siècle, ce fut Sterne, cet esprit tout âme, qui n’eut peut-être de génie qu’à force d’avoir de cette âme qu’on niait si fort dans son temps ; ce fut cette délicate sensitive humaine, dont la racine trempait dans cette idée de Dieu qui fait pousser leurs plus belles fleurs aux plus beaux génies !

977. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre III. Les explications anthropologique, idéologique, sociologique »

Quant à la philosophie des stoïciens, qui devait pénétrer le Droit romain renouvelé, l’imagine-t-on ailleurs qu’à la fin du monde antique ? […] Barth, Philosophie der Geschichte als Soziologie, p. 219-225.

978. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVIII et dernier. Du genre actuel des éloges parmi nous ; si l’éloquence leur convient, et quel genre d’éloquence. »

Les panégyriques doivent donc être tombés : on lit beaucoup moins d’oraisons funèbres : les dédicaces deviennent rares ; elles ne s’ennoblissent que lorsque la philosophie sait parler avec dignité à la grandeur, ou lorsque la reconnaissance s’entretient avec l’amitié. […] Qu’ainsi, dans l’ordre politique, l’orateur se pénètre des grands rapports du prince avec les sujets, et des sujets avec le prince ; qu’il sente avec énergie et les biens et les maux des nations ; que, dans l’ordre moral, il s’enflamme sur les liens généraux de bienfaisance qui doivent unir tous les hommes, sur les devoirs sacrés des familles, sur les noms de fils, d’époux et de père ; que dans ce qui a rapport aux talents, il admire les découvertes des grands hommes, la marche du génie, ces grandes idées qui ont changé sur la terre la face du commerce, ou celle de la philosophie, de la législation et des arts, et qui ont fait sortir l’esprit humain des sillons que l’habitude et la paresse traçaient depuis vingt siècles.

979. (1896) Le IIe livre des masques. Portraits symbolistes, gloses et documents sur les écrivains d’hier et d’aujourd’hui, les masques…

Les Déracinés sont moins un roman qu’une thèse de philosophie sociale ou encore autre chose, les premiers mémoires d’un conspirateur qui analyse son système et inspecte son arsenal. […] Maeterlinck, de plusieurs modes d’art, de plusieurs philosophies, de toutes les manières nouvelles de vivre et de penser. […] Il agrandit un horizon que le clergé d’aujourd’hui a réduit aux dimensions d’un panorama, et, comme les mystiques catholiques de race grecque, il fait entrer dans sa religion la philosophie de son temps. […] Sa philosophie est une sorte de positivisme panthéiste et optimiste ; le monde évolue, du germe à la plénitude, de l’inconscience à l’intelligence, de l’instinct à la loi, du droit au devoir, ― vers le mieux. […] Pierre Quillard, avec un mysticisme supérieur, « la vanité de la joie et de la douleur », et il devait goûter également la vie et la philosophie nirvâniennes du philosophe de sa race.

980. (1875) Premiers lundis. Tome III « Maurice de Guérin. Lettre d’un vieux ami de province »

Vous connaissez l’Orphée, et je n’ai point à vous en parler ; mais à Ballanche, à Quinet (dans son Voyage en Grèce), il manque un peu trop, pour correctif de leur philosophie concevant et refaisant la Grèce, quelque chose de cette qualité grecque fine, simple et subtile, négligée et élégante, railleuse et réelle, de Paul-Louis Courier, ce vrai Grec, dont la figure, la bouche surtout, fendue jusqu’aux oreilles, ressemblait un peu à celle d’un faune.

981. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bataille, Henry (1872-1922) »

Remy de Gourmont Il y a, dans ce livre de l’enfance (La Chambre blanche), toute une philosophie de la vie : un regret mélancolique du passé, une peur fière de l’avenir.

982. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Béranger, Pierre-Jean de (1780-1857) »

Mais si l’on m’apprend que Lisette et le Chambertin ne sont que des figures de rhétorique, que ce chanteur insouciant qui prétend n’avoir d’autres soins que les dîners du caveau et sa maîtresse, a une philosophie, une politique, et, Dieu me pardonne !

983. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bouchor, Maurice (1855-1929) »

Art et philosophie : les vers, savants et froids, ne chantent pas ; les pensées, niant, ne créent pas.

984. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 329-336

Nous nous contenterons de dire qu’il étoit aussi peu fondé à insinuer que Bossuet avoit des sentimens philosophiques différens de sa Théologie, que nous le serions en assurant que M. de Voltaire a eu des sentimens théologiques différens de sa philosophie.

985. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XVI. Le Paradis. »

Les uns ont péché par timidité, comme le Tasse et Milton ; les autres par fatigue, comme le Dante ; par philosophie, comme Voltaire ; ou par abondance, comme Klopstock88.

986. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre VIII. Bossuet historien. »

Remarquons que Tacite a parlé des pyramides177, et que sa philosophie ne lui a rien fourni de comparable à la réflexion que la religion a inspirée à Bossuet ; influence bien frappante du génie du christianisme sur la pensée d’un grand homme.

987. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre III. Massillon. »

» Voilà où se réduit la philosophie sublime des impies ; voilà cette force, cette raison, cette sagesse qu’ils nous vantent éternellement.

988. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Mercier » pp. 1-6

Elle s’émeut beaucoup quand on lui déterre un poème de Milton ou une philosophie de Vico, mais les mérites relatifs sont pour elle peu de chose.

989. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « L’abbé Cadoret »

Sinon sans trahison, mais qui introduiraient l’ennemi au cœur de la place autant que s’ils étaient des traîtres, ces métis de la Philosophie et du Christianisme ne sont pas d’hier dans l’histoire.

990. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — V »

Ce qu’a donné ce naturalisme (sa soumission aux lois de la nature) dans sa philosophie et dans son esthétique, c’est un problème que je n’examine pas, mais dans son œuvre d’historien politique, cette vue gœthienne l’a mené à une doctrine par trop timide.

991. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre IV. De la morale poétique, et de l’origine des vertus vulgaires qui résultèrent de l’institution de la religion et des mariages » pp. 168-173

En effet, chez toutes les nations, la piété a été généralement la mère des vertus domestiques et civiles ; la religion seule nous apprend à les observer, tandis que la philosophie nous met plutôt en état d’en discourir.

992. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance. »

Regardez-y bien, Madame ; votre haine n’est-elle pas aussi éloignée de votre système de philosophie que l’enthousiasme de lady Holland ? […] Ceux que vous avez plaints et révérés dans le malheur, vous les aimez aussi dans la prospérité ; ceux que vous avez exécrés quand ils exerçaient la tyrannie, vous les exécrez encore quand ils sont tombés… En comparant ces deux manières de fidélité, l’une aux principes, l’autre aux personnes, je remarquerai, quoi que vous en puissiez dire, que la vôtre est beaucoup plus passionnée, beaucoup plus jeune que la mienne, et que, quelques efforts que vous ayez faits pour vous calmer par l’étude de la philosophie et une longue retraite, vous avez encore le cœur plus chaud et les sentiments plus ardents que celui que vous accusiez quelquefois de trop de jeunesse. » Bientôt la correspondance cessa, s’interrompit ; en la renouant l’année suivante, Sismondi s’y prit d’un ton fort digne, pas trop humblement, et sans faire son mea culpa du passé. […] Il expose nettement, sans prétendre tout justifier, comment est sorti le cri de guerre de la philosophie du XVIIIe siècle contre ce qui était réellement haïssable sous la forme tout oppressive où on l’avait devant soi et au-dessus de soi.

993. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre deuxième »

Le mot étudier est trop faible pour peindre cette ardeur de curiosité avec laquelle il se jeta sur tout ce qui avait été retrouvé de l’antiquité, philosophie, morale, médecine, anatomie, astronomie, marine, guerre, jeux, gymnastique, tout jusqu’à ces raretés de bibliographie qui ont été le produit de quelques cerveaux malades. […] La raison d’où elles tirent leur origine les reprenait à la philosophie qui n’en avait rien su faire, et à la théologie qui les avait confondues toutes en une seule, la vérité selon la foi. […] Le Nil admirari, dans la philosophie rabelaisienne, implique le Nil odisse.

994. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre VI. Premiers pas hors de Saint-Sulpice  (1882) »

Je vais m’examiner sur ces quatre points, non pour relever le moins du monde mes propres mérites, mais pour fournir, à ceux qui professent la philosophie du doute aimable, l’occasion de faire, à mes dépens, quelques-unes de leurs fines observations. […] Ma philosophie, selon laquelle le monde dans son ensemble est plein d’un souffle divin, n’admet pas les volontés particulières dans le gouvernement de l’univers. […] Une bonne humeur, difficilement altérable, résultat d’une bonne santé morale, résultat elle-même d’une âme bien équilibrée et d’un corps supportable, malgré ses défauts, m’a jusqu’ici maintenu dans une philosophie tranquille, soit qu’elle se traduise en optimisme reconnaissant, soit qu’elle aboutisse à une ironie gaie.

995. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

Je ne sais quelle escapade le fit sortir du collège des Grassins avant qu’il eût terminé sa philosophie. […] Dans les naïvetés d’un enfant bien né, il y a quelquefois une philosophie bien aimable. […] C’est par rapport au très grand monde seulement que Chamfort a pu dire : « Il paraît impossible que, dans l’état actuel de la société, il y ait un seul homme qui puisse montrer le fond de son âme et les détails de son caractère, et surtout de ses faiblesses, à son meilleur ami. » C’est ce grand monde uniquement qu’il avait en vue quand il disait : « La meilleure philosophie relativement au monde est d’allier, à son égard, le sarcasme de la gaieté avec l’indulgence du mépris. » C’est pour avoir trop vécu sur ce théâtre de lutte inégale, de ruse et de vanité, qu’il a pu dire son mot fameux : « J’ai été amené là par degrés : en vivant et en voyant les hommes, il faut que le cœur se brise ou se bronze. » J’ajouterai, pour infirmer l’autorité de certaines maximes de Chamfort et pour en dénoncer le côté faux, qu’elles viennent évidemment d’un homme qui n’a jamais eu de famille, qui n’a pas été attendri par elle ni en remontant ni en descendant, qui n’a pas eu de père et qui, à son tour, n’a pas voulu l’être.

996. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « II. M. Capefigue » pp. 9-45

Ils expriment, chacun à sa manière, et par leur contraste, ce développement fatal et suprême de la Libre Pensée, — la fantaisie, qui se joue de tout, à cette heure, dans les arts, la philosophie et les lettres ! […] Après les amateurs de magots, de dessus de portes, de cruchons de Sèvres, nous trouverons les amateurs de Contrats Sociaux et de Philosophies naturelles, et vous verrez la différence ! […] Et voilà comment, pour la première fois, la philosophie du Mondain : Il n’est jamais de mal en bonne compagnie, s’est introduite dans l’histoire sous une plume que le catholicisme de l’auteur (car l’auteur a toujours respecté le catholicisme dans ses ouvrages) aurait dû rendre plus sévère.

997. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Michelet » pp. 167-205

Physiologique, épaissement physiologique comme son livre de l’Amour, doublé de la même philosophie, qui est un naturalisme béat et béant, érotique d’accent comme un cerf qui brame, ce livre de la Femme, c’est l’Amour, moins, cependant, la première ivresse du sujet pour l’auteur et pour le public. […] , la malheureuse campagne d’aventurier physiologique qu’il avait commencée, l’événement c’est qu’il l’ait continuée avec moins de talent qu’il ne l’a ouverte, et qu’au lieu d’une question d’idées et de philosophie, il n’y ait plus entre lui et la Critique qu’une unique question de valeur littéraire. […] C’est moins de l’Histoire faite par lui, que sa Philosophie de l’Histoire… Il ne s’agit plus ici du passé, mais de l’avenir.

998. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 3665-7857

Quel fonds de philosophie ne faut-il point pour saisir ainsi le point fixe de la vertu ! […] voilà ce qui seroit de la philosophie. […] Pope, dans les épîtres qui composent son essai sur l’homme, a fait voir combien la poésie pouvoit s’élever sur les aîles de la philosophie. […] Nous parlons d’une philosophie sévere, mais honnête, sans amertume & sans poison, qui n’insulte personne, & qui s’adresse à tous : c’est précisément de celle-là qu’on s’offense. […] Les premiers maîtres du théatre sembloient avoir épuisé les combinaisons des caracteres, des intérêts, & des passions ; la Philosophie lui a ouvert de nouvelles routes.

999. (1892) Sur Goethe : études critiques de littérature allemande

Philosophie, lettres, politique, sciences, semblent ne former qu’un seul empire indivisible. […] Son malheur est d’avoir voulu étudier la philosophie. […] Si la philosophie avait fait de lui un idiot sans cœur, du moins serait-ce un idiot vraisemblable. […] mais vous compteriez sans la philosophie du mari. […] Inconséquence singulière de leur philosophie !

1000. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre III. De la comédie grecque » pp. 113-119

Mais cette délicatesse de goût, cette philosophie supérieure, que Molière a montrée dans ses comédies, il faut des siècles pour y amener l’esprit humain ; et quand un génie égal à celui de Molière eût vécu dans Athènes, il n’aurait pu deviner la bonne comédie.

1001. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Giraud, Albert (1848-1910) »

Comme rien ne le lui offrait autour de lui, ni le monde matériel, ni les philosophies, ni les religions, il a tenté l’entreprise gigantesque de se le forger lui-même.

1002. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Laforgue, Jules (1860-1887) »

Gustave Kahn Les Complaintes de Jules Laforgue parurent en 1885… C’était plein de philosophie personnelle, parfois satirique (dans le bon sens de la chose, et piquant aux travers généraux de l’espèce), plus cosmogonique qu’héroïque.

1003. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 512-518

Les Lettres ne rougiront-elles pas un jour d’avoir vu subsister, parmi elles, une Inquisition plus redoutable & plus odieuse que celle que la Philosophie reproche si amérement à certains pays qu’elle appelle Barbares ; une Inquisition que les Philosophes eux-mêmes exercent envers les Littérateurs qui ont assez de bon sens pour ne pas adopter leurs opinions, assez de droiture & de vigueur pour les réfuter ?

1004. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 92-99

C’est elle, ajoutoit-il, qui doit animer tous nos travaux, qui en adoucit la peine, & qui peut seule les rendre véritablement utiles * ; d’où il tiroit cette conséquence foudroyante pour les esprits forts & les cœurs corrompus, que la Religion est la vraie Philosophie **.

1005. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Avant-Propos. » pp. -

Quelle honte pour l’humanité que cette espèce de maladie règne principalement dans les siècles où brillent les grands talens, & que le nôtre, qu’on dit être celui de la philosophie, n’en soit pas même exempt.

1006. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Lettre a monseigneur le duc de**. » pp. -

Philosophie, Eloquence, Poésie, Histoire, rien n’est étranger à votre goût.

1007. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 1, de la necessité d’être occupé pour fuir l’ennui, et de l’attrait que les mouvemens des passions ont pour les hommes » pp. 6-11

Que ceux qui composent un cours de philosophie nous exposent la sagesse des précautions que la providence a voulu prendre, et quels moïens elle a choisi pour obliger les hommes par l’attrait du plaisir à pourvoir à leur propre conservation.

1008. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XIII »

Dans sa Philosophie de la composition, Poe ajoute textuellement ces paroles : « Le fait est que l’originalité … n’est nullement, comme quelques-uns le supposent, une affaire d’instinct ou d’intuition.

1009. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Remarque finale. Le Temps de la Relativité restreinte et l’Espace de la Relativité généralisée »

Elle confirmerait la distinction radicale de nature que nous établissions jadis entre le Temps réel et l’Espace pur, indûment considérés comme analogues par la philosophie traditionnelle.

1010. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Votre philosophie de l’art est, ma chère mère, une espèce de béatitude morale. […] Cette matière est l’esthétique ou la philosophie du beau. […] Une telle philosophie (si c’en est une) ne pouvait pas avoir un autre résultat. […] Avant de passer de la philosophie chrétienne à une philosophie plus avancée, la France a passé par la glorieuse expiation d’une révolution terrible. […] La forme est catholique, on le voit mais ce catholicisme est d’une philosophie plus audacieuse et plus avancée que le catholicisme légendaire de Faust.

1011. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

Historien de la philosophie plutôt que fondateur d’une philosophie nouvelle, il a démontré avec cette force et cette transparence qui n’appartiennent qu’à lui, à quels égarements et à quels abîmes ces quatre systèmes venaient aboutir. […] L’éclectisme est une des applications les plus importantes de la philosophie que nous professons, mais il n’en est pas le principe. […] Il triomphe des vices et des abus d’une époque chrétienne par le christianisme, tandis qu’Abailard les combat et les envenime par la philosophie. […] Albert de Broglie se divise en trois parties législation et économie sociale, critique littéraire, philosophie religieuse. […] Dans notre siècle, où la philosophie n’a rien inventé (qu’invente-t-elle ?)

1012. (1894) Études littéraires : seizième siècle

Elle repoussait le moyen âge non pas comme ayant rompu avec la philosophie ancienne, mais comme ayant altéré le premier esprit, chrétien. […] Elle a pour objet la conquête, et dans la philosophie de l’histoire des romanciers on sait que la conquête est le but des plus grands cœurs. […] Cette philosophie est la philosophie du bon sens, et certes ce n’est pas un méprisable mérite que d’avoir du bon sens au xvie  siècle ; mais elle n’a rien d’original, ni de profond, ni même de très utile. […] La philosophie de Rabelais, c’est lui qui l’a nommée, c’est le Pantagruélisme. […] Il devait devenir une libre philosophie, en s’abandonnant à ce « sens propre » que personne n’a plus redouté ni détesté que Calvin.

1013. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

Peu curieux de philosophie pure, il a un goût très prononcé pour une sagesse pratique et à portée de la main. […] C’est ce qu’on appelle en philosophie la question du mal moral. […] On y passe six années à faire, dans le latin le plus barbare, de la philosophie ou de la théologie la plus archaïque. […] Il est très renseigné, plus d’ailleurs pour ce qui touche à la philosophie que pour les questions de critique et d’histoire. […] Il a été l’un des principaux rédacteurs des Études de théologie, de philosophie et d’histoire, fondées en 1857 par les PP.

1014. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome II

Si la philosophie de Haeckel était la vraie, quels reproches serions-nous fondés à leur faire ? […] Élie Rabier, devenu lui-même un des professeurs distingués de l’Université, a reconnue dans ses Leçons de philosophie. […] Des écarts de philosophie ne suffiraient pas à expliquer un phénomène de cette violence et de cette étrangeté. […] Nous avions bien vu que Fichte et Hegel avaient exprimé autre chose qu’une philosophie de la nature. […] La philosophie de la guerre, qui a inspiré les ordres implacables dont je parlais, est issue de cet autre abus, celui du penser scientifique.

1015. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

Toute philosophie grecque était une cosmologie, une cosmogonie et une cosmographie. […] Il est philosophe, il est professeur de philosophie et de morale ; il est une manière de prêtre laïque. […] C’est un singulier chemin pour arriver à la philosophie que l’amour ; mais c’en est un et que plus d’un a parcouru. […] Les philosophies qui ont en elles de quoi devenir des religions ont ce caractère. […] La philosophie générale et les vues sur le système du monde ?

1016. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

Quelques personnes, nées avec un penchant insurmontable pour le vrai, excédées de toutes les rêveries Aristotéliciennes, adoptèrent la nouvelle philosophie. […] Il y donna des leçons de philosophie, de mathématique & d’astronomie, avec le plus grand succès. […] Ce vrai créateur de la nouvelle philosophie mettoit alors la dernière main à son monde, & tout son systême portoit sur le mouvement de la terre. […] Mais elle veut que les autres nations lui cédent pour l’érudition, la jurisprudence & la philosophie. […] Maldonat y enseigna la philosophie, & Vanège les humanités.

1017. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome IV pp. -328

Elle fut donnée, sous la régence, à l’abbé Fleuri, si célèbre par son Histoire ecclésiastique & par sa Philosophie. […] Selon lui, on y fait d’excellentes humanités : on y enseigne la plus saine philosophie. […] « Nous estimons, disent les ministres, & nous cultivons la philosophie : mais ce n’est point cette philosophie licencieuse & sophistique dont on voit aujourd’hui tant d’écarts. C’est une philosophie solide qui, loin d’affoiblir la foi, conduit les plus sages à être aussi les plus religieux ». […] L’avocat général examine les renvois, la clef du systême encyclopédique, le secret d’une mystérieuse philosophie, & cite ce morceau remarquable.

1018. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Homais d’arriver d’emblée et avec si peu de peine au dernier mot de la philosophie ». […] Il les avait déjà dépouillées, par admiration pour une philosophie qui l’avait littéralement enivré. […] Il demeurait la dupe du prestige d’une philosophie aujourd’hui délaissée avec justice comme si chimérique et si vaine. […] Autant dire qu’une œuvre littéraire suppose une expérience de la vie et une philosophie. […] Henry Bordeaux à la même philosophie.

1019. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

En faisant ma philosophie sous M.  […] Landry ayant changé de quartier et s’étant transportée rue Blanche (Chaussée-d’Antin), le jeune Sainte-Beuve suivit les classes du collège Bourbon, où il fit sa rhétorique et sa philosophie ainsi que des mathématiques. […] Il y débuta par un article sur Georges Farcy, jeune professeur de philosophie tué pendant les journées de Juillet. […] Landry, mon maître de pension, à ma mère, au moment où j’allais quitter la maison après ma philosophie pour faire mes études de médecine.

1020. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (1re partie) » pp. 337-416

De sales amours, plus semblables à des turpitudes qu’à des affections, souillent à chaque instant ces pages de jeunesse, ignoble philosophie des sens dont les images font rougir la plus simple pudeur ; sensualités grossières ; fleurs de vices dans un printemps de sensations que Rousseau fait respirer à ses lecteurs et à ses lectrices, et dont il infecte l’odorat des siècles. […] Une société corrompue alors jusqu’à la moelle sourit à ces contresens de la mauvaise humeur contre elle-même ; elle prend pour de la profondeur et pour de la vertu cette philosophie très éloquente et très absurde du monde renversé. […] Montesquieu avait mené une vie grave, studieuse, solitaire, et cependant affairée, à la tête d’une de ces hautes magistratures où se résument la philosophie des lois et l’administration de la justice des peuples. […] Voilà un théiste qui, après avoir feint la profession de déisme contemplatif et de religion pratique, en dehors de toute révélation surnaturelle, s’en va abjurer, dans une église de la Suisse, son catholicisme, son théisme, sa philosophie, et communier sous les deux espèces, de la main d’un pasteur de village ; Enfin voilà un nouveau converti qui se brouille avec son convertisseur, et qui revient faire des constitutions de commande à Paris, pour la Pologne et pour la Corse, dont il ne connaît ni le ciel, ni le sol, ni la langue, ni les mœurs, ni les caractères, constitutions de rêves pour ces fantômes de peuples !

1021. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

Nous préférons, dans le Bonheur, ce tableau enthousiaste de la philosophie grecque, où semble passer le grand souffle des Heraclite, des Empédocle, des Parménide : Par-dessus tout la Grèce aimait la vérité ! […] Par malheur, au lieu de ce lyrisme philosophique, nous trouvons bientôt un résumé abstrait de toute l’histoire de la philosophie, en vers mnémotechniques. […] Il importe aux philosophes de ne pas laisser certains littérateurs duper le public en lui faisant croire que la science actuelle, ou même que la philosophie naturaliste à laquelle elle semble tendre, ait les conséquences immorales et antisociales que les Veuillot ou les Richepin veulent en tirer. […] En tant que phénomène « sociologique », le succès de ces vers funambulesques, présentés comme une « philosophie » par ceux qui trouvent que Victor Hugo n’a pas d’idées, serait inquiétant pour l’avenir de notre pays, si les Français n’étaient aussi prompts à oublier ce qu’ils ont applaudi que les enfants à oublier la parade de la foire devant laquelle ils ont battu des mains.

1022. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIIe entretien » pp. 87-159

C’est par là que la France est plus policée, c’est par là qu’elle est moins originale ; c’est par là qu’en politique elle a Montesquieu et qu’elle n’a pas Machiavel ; c’est par là qu’en poésie elle a Racine et qu’elle n’a pas Shakespeare ; c’est par là qu’en philosophie elle a Voltaire et qu’elle n’a pas Bacon, Newton ou Leibnitz. […] C’est un mérite nul pour l’éloquence et pour la poésie, mais capital pour la philosophie et pour la science. […] une voix enfin qui ne parle ni au nom de l’opinion, chose fugitive ; ni au nom de la philosophie, chose discutable ; ni au nom de la patrie, chose locale ; ni au nom de la souveraineté du prince, chose temporelle ; ni au nom de l’orateur lui-même, chose transformée ; mais au nom de Dieu, autorité de langage qui n’a rien d’égal sur la terre, et contre laquelle le moindre murmure est impiété et la moindre protestation blasphème ! […] Il était dans la nature que ces foules convoquées dans les temples, au pied de ces tribunes, y prissent l’habitude d’un certain discernement des choses d’esprit ; qu’un orateur leur parût supérieur à un autre ; qu’un langage leur fût fastidieux, un autre langage sympathique ; qu’elles s’entretinssent en sortant du temple des impressions qu’elles avaient reçues ; que leur intelligence et leur oreille se façonnassent insensiblement à la langue, aux idées, à l’art de ces harangues sacrées, et qu’entrées sans lettres dans ces portiques de la philosophie des prédicateurs chrétiens, elles n’en sortissent pas illettrées.

1023. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — I. » pp. 279-295

Félix Vicq d’Azyr, né en avril 1748 à Valognes en Normandie, d’un père médecin, commença ses études dans sa ville natale et vint les achever à Caen, où il fut condisciple en philosophie de Laplace, le grand géomètre. Le professeur de philosophie, M. 

1024. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — I. » pp. 343-360

Il retrouva la grâce, la légèreté qui sont inséparables de notre nation, et la philosophie qui naissait pour suppléer à tout ce que nous perdions. […] Le vertueux Mairan, qui a aperçu le feu central, était né pour les champs Élysées, où sa philosophie douce eût amusé les ombres du récit de ses hypothèses ingénieuses.

1025. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — III » pp. 476-491

Les hardiesses de la philosophie, devenues plus tard des instruments de destruction, n’étaient alors que des stimulants pour la pensée. […] La philosophie n’avait point d’apôtres plus fervents que les grands seigneurs.

1026. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Guillaume Favre de Genève ou l’étude pour l’étude » pp. 231-248

Il était sous l’influence des grandes découvertes scientifiques de cette fin du siècle, il était disciple des méthodes et de la philosophie naturelle de Lavoisier. […] » Pour Guillaume Favre le bonheur n’était point si court qu’un brûlant été, ni si passager qu’un jour d’orage ; il sut le fixer autant qu’on le peut ici-bas, et il se serait plu sans nul doute à répéter et à s’appliquer à lui-même, s’il l’avait connue, cette page riante et modérée que je lisais dernièrement dans le journal familier d’un homme de son âge, et qui y est inscrite sous ce titre assez naïf, Le Paradis sur terre 42 : En faisant ce matin, de bonne heure, une promenade agréable et par le temps le plus délicieux, respirant l’air le plus pur et admirant la tranquille et paisible gaieté du paysage, je me disais : Un homme de Moyen Âge, jouissant d’une bonne santé et d’une fortune un peu au-dessus de ses besoins stricts, et par là dans une situation sociale indépendante, pouvant se donner le séjour de la campagne en été, celui d’une grande ville en hiver, ayant quelque goût pour la littérature et les beaux-arts, usant de tous ces avantages qui peuvent cependant se trouver réunis assez facilement, et les appréciant avec un peu de philosophie, ne pourrait-il pas dire qu’il serait ingrat de penser avec le sage Salomon : Vanité des vanités, tout n’est que vanité ?

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