Vingt fois il touche à ces brûlantes questions ; vingt fois il est sur le point de réformer nos idées sur le juste et l’injuste, sur le tien et le mien, mais il s’arrête, ce vrai philosophe !
Ce n’était ni verve ni saillie éblouissante, mais quelque chose de plus doux ; une pensée perpétuelle sans effort, de l’animation sans fumée ni flamme, la proportion juste des idées, chaque objet saisi à son point et avec détachement, tout le nonchaloir des loisirs. […] Dix justes sauvaient une ville : un pareil nombre de bons, et, s’il se peut, d’excellents écrivains, ne suffirait-il pas à sauver une époque ? […] Ces Portraits, dans lesquels je cherchais surtout la ressemblance et la fidélité par la mesure des dons naturels et du mérite, par le juste rapport des tons et des couleurs, étaient souvent une surprise pour le modèle lui-même qui avait posé sans s’en douter.
En se sentant valeureux soldats auxiliaires dans les armées de la France, ils se sont sentis dignes patriotes, nobles citoyens, capables d’indépendance et de toutes les libertés qui constituent l’homme moderne sur leur propre terre ; la France leur a inoculé la gloire ; la France a conçu tout à coup la noble idée de ressusciter l’Italie, l’Italie a conçu la juste volonté de revivre. […] Mais, si vous voulez ressusciter Gênes (et ce serait une des plus justes de vos résurrections), rendez-lui donc d’abord son indépendance, rendez-lui donc ses établissements maritimes tout autour de la mer Noire, depuis Caffa jusqu’à Trébizonde ! […] Machiavel, comme Montesquieu, voyait de loin et voyait juste.
Il disait un jour (on m’a rapporté son mot) : « J’ai un avantage sur Lamartine : c’est que je le comprends tout entier, et qu’il ne comprend pas la partie dramatique de mon talent. » C’était juste et c’était vrai. […] » Il entrouvrit enfin, juste assez pour me laisser entrer avec deux ou trois personnes, puis referma, aidé de nos épaules contre la pression croissante de la foule à laquelle nous venions d’échapper. […] « Les justes ont versé tout leur sang précieux ; « Et les peuples, troupeau qui dormait sous le glaive, « Ont vu, comme Jacob, dans un étrange rêve, « Des anges remonter aux cieux.
À chaque air nouveau qui sortait, avec des variations improvisées, sous mes doigts, cela m’excitait, monsieur, et je crois bien qu’après l’air au pied de la Madone, je n’ai jamais joué si juste et si fort de ma vie. […] Je cherchai à me souvenir juste de l’air qu’Hyeronimo et moi nous avions composé ensemble, et petit à petit, note après note, dans nos soirées d’été du dimanche sous la grotte, et qui imitait tantôt le roucoulement des ramiers au printemps sur les branches, tantôt les gazouillements argentins des gouttes d’eau tombant de la rigole dans le bassin du rocher, tantôt les fines haleines du vent de nuit qui se tamise, en se coupant sur les lames des joncs de la fontaine, aiguisées comme le tranchant de la faux de mon père ; tantôt le bruit des envolées subites des couples de merles bleus, quand ils se lèvent tout à coup du fourré, avec des cris vifs et précipités, moitié peur, moitié joie, pour aller s’abattre sur le nid où ils s’aiment et où ils se taisent pour qu’on ne puisse plus les découvrir sous la feuille. […] CLXXXI Les juges l’ont condamné : c’était juste ; mais quel est le cœur de père qui ne l’absout pas, et le cœur de fils qui n’adore pas ce criminel ?
Par malheur, la conversation vint à tomber sur la comédie, et le faux bailli s’échauffa sur l’éloge de Molière : il allait se trahir, si Racine ne l’eût emmené, juste à point pour n’être pas reconnu par Cotin, qu’ils rencontrèrent sur l’escalier. […] J’admettrai que Boileau a forcé la note, et que nous avons aujourd’hui un plus juste sentiment de la dignité personnelle. […] Outre qu’il était difficile de voir et d’écrire la vérité sur Louis XIV de son vivant, on n’avait pas en France au xviie siècle une idée fort juste des qualités et des devoirs de l’historien : quelques bénédictins savaient seuls alors ce qu’il faut de science, de critique et de détachement pour en bien faire le métier.
L’image est aussi juste qu’aimable. […] Les images, comme chez ceux-ci, y sont rares et justes ; le descriptif n’y a rien de l’inventaire ; il est de sentiment, comme tout le reste. […] Il leur apprend, par le détail approfondi et le tableau expressif des fautes qui minaient le gouvernement aristocratique à Rome, qu’il faut ne pas s’entêter ni s’opiniâtrer ; savoir ne garder du passé que ce qui en est vivant, et rompre avec ce qui en est caduc ; apercevoir de loin à l’horizon les intérêts nouveaux, et, le moment venu, leur faire leur juste part ; se convaincre enfin qu’au milieu des idées qui changent, des mœurs qui se renouvellent, des souffrances et des espérances qui travaillent les sociétés humaines, un gouvernement est tenu de ne pas vieillir.
Ce sont dans ces romans la Dea, de l’Homme qui rit, toute pureté, la duchesse Josiane, toute frivolité charnelle, Birkilphedro le perfide ; dans les Travailleurs, l’hypocrite Clubin, le noble Gilliatt ; dans les Misérables, Cosette, pure amante, Marius, le jeune premier type ; dans Quatre-vingt-treize, le marquis de Lantenac, Cimourdain, « l’effrayant homme juste » ; dans les drames, tous les amoureux d’Hernani à Sanche, et de Dona Sol à Rosa, tous les vieillards de Don Ruy à Frédéric de Hohenstaufen, plus quelques fourbes sans alliage. […] De même le poète s’exprime, en effet, par des mots justes, puis par des mots détournés, puis par des images. […] Mais cette localisation qui paraît juste pour le mécanisme musculaire de la parole, ne peut-être celle du langage.
Ses descriptions sont vives, ses comparaisons justes et choisies, ses figures variées ; mais il ne s’en permet jamais de trop hardies ; et sage jusques dans ses emportemens, comme l’a dit un grand critique, il a presque toujours fait voir qu’on peut être raisonnable, sans être froid. […] Le moyen que la mesure des vers, la tyrannie de la rime, jointe sur-tout à la contrainte de l’ode, ne nous arrachent quelquefois un mot que nous sentons bien n’être pas le plus juste, mais que nous nous pardonnons en faveur de quelque beauté que nous serions obligés de sacrifier avec lui ? […] Mais qu’on y prenne garde, je me tiens toujours dans de justes bornes : je releve les obligations qu’on a aux anciens, et je me contente d’animer les modernes à une émulation que je crois nécessaire, et sans laquelle le génie refroidi se contenteroit toujours du médiocre.
Sans parler des œuvres qui ne font que manifester telle ou telle faculté corporelle, il ne suffit pas de noter, par exemple, que l’homme seul a le langage pour donner une juste idée de la supériorité sur l’animal. […] C’est juste le contraire qui est vrai. […] Il retrouve enfin cet a priori de la connaissance humaine que Leibniz avait si bien vu, que Kant a si savamment décrit, qui, réduit à sa juste mesure, témoigne encore d’une manière si éclatante de la richesse naturelle de l’esprit humain.
On le sentait tout entier, pris par ce souci douloureux, en proie à cette ambition inquiète qu’eût dû apaiser un juste sentiment de légitime orgueil. […] Toujours il emploie l’expression exacte, le terme juste. […] Une fois la part faite aux justes récriminations de l’égoïsme, l’éducateur n’est-il pas récompensé de son sacrifice quotidien par la conscience du rôle qu’il accomplit et de la mission qui lui est confiée ? […] Lucien Muhlfeld disait ce qu’il pensait, et si parfois il atténuait son opinion, c’était pour dire de la mauvaise pièce ou du four indéniable plus de bien et moins de mal qu’il eût été rigoureusement juste d’en dire. […] Il les admire presque et, au fond, il est d’avis que, s’il importe de faire justice des voleurs, il est, après tout, juste aussi de la leur rendre !
La gloire des troubadours a trouvé sa juste fin dans les dessus-de-pendule empire. […] Et l’avenir aussi, le juste avenir, a dû ne pas voir en Corneille le plus définitif, le plus parfait de nos poètes dramatiques. […] Que si les panégyristes d’Alfred de Vigny se maintiennent en de justes bornes, on se gardera bien de les contredire. […] Notre peine vient de la leur, qui est juste. […] L’avenir remettra toute chose en juste place.
C’est-à-dire, il ne se pique en tout que de voir toujours parfaitement clair ; que de raisonner toujours parfaitement droit ; que de conclure toujours parfaitement juste, rien de plus ! […] Il y a, dans les dernières pages de son volume, quelques idées, assez justes sur le style ; et particulièrement sur la difficulté d’être naturaliste, si l’on ne s’efforce pas avant tout d’être naturel. […] Et, puisqu’on a si souvent rapproché son nom de celui de Balzac, il est maître à bien plus juste titre que l’auteur de la Comédie humaine. […] Il faut savoir être dupe en ce monde, non seulement pour être heureux, mais encore pour être juste. […] Elle ne blesse pas alors ; elle venge, et elle console, parce que, au travers du mépris déversé sur tout ce que l’on hait d’une juste haine, elle nous permet d’entrevoir ce qu’on aime ou ce qu’on aimerait.
c’est cette évolution que j’ai appelée naturalisme, et j’estime qu’on ne pouvait employer un mot plus juste. […] Il faut des oreilles justes, pas davantage. […] Cela doit lui sembler juste. […] Cela est très juste. […] Tous nos marivaudages, toutes nos quintessences de forme ne valent pas un mot juste mis en sa place.
— Il nous manque, pour savoir en quoi consistaient précisément les altérations que le peuple romain lui-même faisait subir à la langue de Cicéron, et pour nous faire une juste idée du latin vernaculaire, de posséder quelques-unes de ces petites comédies populaires que l’on désignait sous le nom d’Atellanes ; mais ce qu’on peut affirmer, c’est que, là comme partout, la multitude tronquait, altérait les formes des mots, les désinences caractéristiques destinées à en nuancer la valeur grammaticale17 ; ou plutôt elle continuait de faire comme avaient fait ses pères, elle suivait les habitudes commodes et la voie large de l’idiome vulgaire, lequel était probablement antérieur à la création du latin savant, qui s’était plus ou moins modelé sur le grec. […] Il faut dire que s’il a rencontré juste quelquefois, il s’est trompé souvent. […] J’ai voulu, messieurs, dans ce long exposé, vous donner une juste et pleine idée de l’importance du problème qui se présente d’abord à quiconque veut étudier la littérature française à son origine. […] Vitet, à s’occuper après lui des mêmes sujets et à y répandre, en le rectifiant, de justes, d’agréables lumières.
En ce temps-là, la femme est aussi active que l’homme246, dans la même carrière, et avec les mêmes armes, qui sont la parole flexible, la grâce engageante, les insinuations, le tact, le sentiment juste du moment opportun, l’art de plaire, de demander et d’obtenir ; il n’y a point de dame de la cour qui ne donne des régiments et des bénéfices. […] Des amis du prince de Ligne « partaient de Bruxelles après leur déjeuner, arrivaient à l’Opéra de Paris tout juste pour voir lever la toile, et, le spectacle fini, retournaient aussitôt à Bruxelles, courant toute la nuit » De ce bonheur tant recherché, nous n’avons plus que des copies informes, et nous en sommes réduits à le reconstruire par raisonnement. […] M. le duc de Bourbon a répondu en ôtant son chapeau : — Monsieur, je suis ici pour recevoir vos ordres. — Pour exécuter les vôtres, a reparti M. le comte d’Artois, il faut que vous me permettiez d’aller jusqu’à ma voiture. » Il revient avec une épée, le combat commence ; au bout d’un temps, on les sépare, les témoins jugent que l’honneur est satisfait. « Ce n’est pas à moi d’avoir un avis, a repris M. le comte d’Artois ; c’est à M. le duc de Bourbon de dire ce qu’il veut ; je suis ici pour recevoir ses ordres. — « Monsieur », a répliqué M. le duc de Bourbon en adressant la parole à M. le comte d’Artois et en baissant la pointe de son épée, « je suis pénétré de reconnaissance de vos bontés, et je n’oublierai jamais l’honneur que vous m’avez fait. » Se peut-il un plus juste et plus fin sentiment des rangs, des positions, des circonstances, et peut-on entourer un duel de plus de grâces Il n’y a pas de situation épineuse qui ne soit sauvée par la politesse. […] Mme de Pompadour est musicienne, actrice, peintre et graveur ; Madame Adélaïde apprend l’horlogerie et joue de tous les instruments, depuis le cor jusqu’à la guimbarde, pas très bien, à la vérité, à peu près comme la reine, dont la jolie voix n’est qu’à demi juste.
Nous venons de les lire en italien, pour y trouver quelques traces justes et vives de son intimité artistique avec Mozart. […] « Et vous, continue-t-il en prenant à témoin et en apostrophant leur protecteur commun, M. de Vetzlar, vous, monsieur le baron, qui venez de me donner des preuves récentes de votre fidèle et gracieux souvenir ; vous, qui avez tant aimé et tant apprécié cet homme vraiment céleste, et qui avez une si juste part dans sa gloire, dans cette gloire devenue plus grande et plus sacrée par l’envie qui l’a constatée et par notre siècle, qui la ratifie unanimement après sa mort, rendez-moi le témoignage que je revendique aujourd’hui de vous pour la postérité. […] Scudo en citant ces paroles si justes ; c’est la doctrine pratiquée par Phidias, par Virgile, par Raphaël, doctrine contraire à celle du musicien rival de Mozart, Gluck, qui voulait au contraire que la musique ne fût que la traduction littérale de la parole… Le principe de Gluck, qui est celui de la France, nous prouve, ajoute le commentateur, que si Mozart s’était fixé à Paris, il n’aurait jamais écrit le chef-d’œuvre de beauté et de sentiment de Don Juan. » XII Sous cette haute inspiration de Mozart nous avons vu comment d’Aponte, son poète, composait les scènes et les dialogues entre deux ivresses, le vin et l’amour, et en la présence nocturne des fantômes de Dante, ouvert sur sa table. […] Est-ce que la musique est autre chose que ce soupir, ce gémissement, ce cri mélodieux qui commence sur nos lèvres juste où l’inexprimable par les mots commence ?
Celui qui connaîtrait bien les œuvres de Cicéron connaîtrait à peu près tout ce que les hommes ont pensé, dit et écrit de plus juste et de plus parfait sur ce globe, avant l’Évangile. […] Et, quant aux compositions avec les événements et avec les tyrannies qu’on reproche de loin à Cicéron, il faut se reporter à l’état de la république romaine, à la corruption des mœurs, à la lâcheté du peuple, à l’énervation des caractères de son temps, pour être juste envers ce grand homme. […] C’étaient ensuite les affranchis, les prolétaires et les esclaves, rejetés par des lois jalouses en dehors des droits des citoyens, et toujours prêts à briser le cadre des lois qui ne s’élargissaient pas pour leur faire leur juste place. […] Les lieux sacrés eux-mêmes semblent s’être émus en voyant tomber l’impie, et avoir ressaisi le droit d’une juste vengeance.
Aristote, en effet, est un esprit juste (mérite immense) ; mais ce n’est pas un esprit haut. […] Dans ces législations imparfaites que les hommes sont obligés de faire à leur usage, il y a toujours dans leurs injonctions et dans leurs châtiments quelque chose de grossier et de brutal, même quand elles sont les plus justes. […] Ce qu’elles seront, c’est lui seul qui en a l’inviolable secret ; mais la science morale ne dépasse pas ses justes bornes en affirmant que cette justice définitive est indispensable, et que la vie de l’homme ici-bas ne peut se comprendre sans ce complément qui doit la suivre. […] Modérer le corps, le dompter dans une certaine mesure, lui faire la part de ses justes besoins, lui résister dans tout ce qui les dépasse, en un mot faire du corps un instrument docile et un serviteur soumis, voilà l’une des règles essentielles de la vie morale, et par conséquent, une des parties considérables de la science.
Je devais en même temps lui faire observer et le motif si juste qui l’avait dictée, et l’impossibilité pour le Pape d’agir d’une autre manière. […] Pie VII n’eut pas de peine à lui prouver combien sa détermination était juste ; il lui démontra qu’il ne pouvait accepter le plan de concordat tracé par le gouvernement français. […] On convint donc de tenir le jour suivant, à midi juste, au même lieu, cette nouvelle séance, comme on avait tenu la précédente, qui fut si amère et si déplorable. […] Elle a duré douze heures consécutives, car elle se termina juste au coup de minuit.
Rousseau et ceux qui ne veulent être que justes pour lui, c’est parmi ces derniers que je me range. […] Les mêmes forces ne suffisant pas aux deux tâches, la même vie ne suffit pas aux deux devoirs, et il est trop juste que le plus grand dispense du plus petit. […] Je sais bien que le s’il vous plaît ne s’attend pas plus à un refus que le faites cela ; mais pourquoi ne serait-il pas permis au maître juste et bienveillant d’ôter au commandement ce qu’il a de dur pour celui qui obéit ? […] Procès n’est pas justice, et peut-être envers qui a tant souffert est-ce trop peu de n’être que juste.
L’exécution de cette partition fut retardée par les projets de Bayreuth et par les travaux qu’ils entraînaient ; elle fut terminée, à Bayreuth, en novembre 1874, juste vingt et un ans après le commencement de la partition de Rheingold. […] Et je le répète, puisqu’il est impossible à Wagner de nous manifester à l’heure actuelle ce qu’est cet art, ce n’est qu’en le suivant, ce n’est qu’en étudiant attentivement ses écrits et sa vie, que nous pouvons arriver à savoir au juste ce qu’il a voulu, et à vouloir la même chose. […] Ce livre est juste le contraire de celui de M. […] Il va sans dire que je ne demande pas que tous les Wagnéristes admirent Wagner exactement de la même manière et se trouvent juste au même point de compréhension.
Ainsi est faite la misérable humanité ; elle ne s’arrête jamais dans le vrai et dans le juste, elle se précipite à l’excès, et elle ne se croit libre de l’oppression que quand elle opprime à son tour. […] J’avais cependant l’esprit aussi juste que le corps sain ; mais j’étais malade d’un poème que je voulais enfanter sans avoir eu encore la force de conception nécessaire à cet enfantement. […] Seulement je les engage à viser plus juste, et à ne pas tirer sur leurs meilleurs amis en croyant tirer sur leurs ennemis. […] Du haut du temple céleste, au milieu des âmes justes qui vont et viennent par la voie lactée, Scipion écoute les sept notes de cette musique éternelle que forment les astres ; il contemple les espaces où ils roulent, et, quand enfin il aperçoit la terre si petite, et sur la terre le point obscur qui est l’empire romain, il a honte d’une puissance qui trouve si tôt ses limites, il aspire à une félicité que rien ne circonscrive.
La littérature même du prince y trouve son compte ; lorsqu’il lira plus tard le Cours de La Harpe et qu’il y fera des annotations, souvent très fines et très justes, il reprendra le célèbre professeur sur le chapitre des Grecs : Si vous aviez vu, monsieur de La Harpe, et étudié les Grecs d’aujourd’hui comme moi, qui ai eu des affaires de politique à traiter avec eux, vous sauriez qu’ils ressemblent aux anciens. […] En y faisant appel, le prince de Ligne a touché juste, et il ne s’y est point trompé : la France nouvelle a vengé Marie-Antoinette de l’ancienne.
Des savants italiens, notamment le comte Tiepolo, ont adressé à l’auteur et publié des « Observations critiques » dont plusieurs paraissent fondées sur une connaissance plus exacte des mœurs et sur l’autorité de documents particuliers, mais dont un grand nombre sont évidemment dictées par un esprit de nationalité plus louable que juste. […] Il faut toutefois, pour être juste, ne pas oublier une distinction essentielle : les observations et la statistique de M.
Noblesse et vérité, c’est là toute la poétique de Léopold Robert, et qu’il ne songea à s’exprimer à lui-même que successivement et après l’œuvre : « La noblesse sans la vérité, pensait-il, n’est plus qu’une singerie qui ne peut plaire aux véritables connaisseurs. » La vérité sans noblesse est un autre écueil : Si je copie juste ce que je vois, je sens que je ferai un tableau plat… Si on se contentait de faire vrai, on se contenterait aussi de copier servilement le modèle que l’on a sous les yeux ; mais, aussitôt que l’on veut ajouter à cette qualité de l’élévation et de la noblesse, c’est une difficulté bien plus grande ; on peut tomber dans la manière, qui est l’opposé de ce qu’on doit chercher. […] Le premier jet frappe et attire : mais ensuite une expression juste, une pose sévère et vraie, un dessin serré et gracieux en même temps, ne conservent pas seulement cette première attention, mais ces qualités produisent le goût des arts et font les amateurs constants.
Tout s’élève ou s’abaisse suivant de justes proportions ; rien ne trouble l’harmonie d’un dessin dont la sévérité modère la hardiesse ; et une couleur transparente et pure, un gris clair légèrement animé de rose, sympathisant également avec la lumière et l’ombre dont il adoucit le contraste, accompagne dans l’azur du ciel des cimes qui en ont revêtu d’avance les teintes éthérées. […] Faisant allusion à certains termes assez impératifs de la lettre de nomination et qui laissaient peu la liberté du refus, Ramond aurait dit en riant : « Je suis préfet par lettre de cachet. » Cuvier n’a pas dédaigné d’égayer sa Notice de ces traits malins et de quelques autres qu’il faudrait avoir été contemporain pour accueillir et présenter dans leur juste mesure, sans rien exagérer ni forcer en les rapportant. — Cuvier et Ramond n’étaient pas au mieux ensemble ; ils avaient été en compétition pour la place de secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences.
Montalant-Bougleux est estimable par le sujet et par l’intention ; il y a des idées justes, mais non assez précises, mais trop mêlées de digressions étrangères, et exprimées dans un style qui est loin d’être celui de la correction ornée : et c’est là le style qui conviendrait si bien à ce genre de dissertations littéraires. […] Le portrait extérieur que l’on donne de l’homme, et qui va si aisément à faire grimacer ce gai visage, n’offre pourtant pas une juste idée de l’élégance et de l’esprit qu’il y avait souvent dans ces vers de Santeul, dignes d’une dernière anthologie latine.
Mais il y avait d’autres choses encore dans l’épitaphe ; il y disait d’Arnauld qu’il revenait de l’exil, ayant triomphé de ses ennemis, « exul, hoste triumphato » ; il l’appelait le défenseur de la vérité, l’oracle du juste, Arnaldus veri defensor, et arbiter aequi. […] C’est ce que M. le curé de Saint-Étienne, où il a été enterré honorablement dans le caveau des chanoines, déclara dimanche dernier en son prône, faisant un éloge succinct mais juste du défunt.
II n’aurait pas été juste que la curiosité littéraire qui se reporte en tous sens vers le passé, et qui ne laisse aucun nom d’autrefois dans la négligence et dans l’oubli, n’arrivât point jusqu’à Voiture, cette renommée longtemps réputée la plus charmante ; son moment devait revenir, et il est venu. […] À la différence de tant d’hommes distingués et d’écrivains de renom qui, ayant eu une partie de leur fortune viagère, en ont une autre partie durable et immortelle, Voiture a tout mis en viager : il n’a été qu’un charme et une merveillle de société ; il a voulu plaire et il y a réussi, mais il s’y est consumé tout entier ; et aujourd’hui, lorsqu’on veut ressaisir en lui l’écrivain ou le poète, on a besoin d’un effort pour être juste, pour ne pas lui appliquer notre propre goût, nos propres idées d’agrément, et pour remettre en jeu et dans leur à-propos ces choses légères.
Lucullus avait presque réduit Mithridate lorsque l’autre arriva, et lui ravit l’honneur de cette expédition ; mais je suis plus juste que cet orgueilleux romain, et, bien loin de rogner de votre réputation, je voudrais pouvoir accroître votre gloire et y contribuer moi-même. […] Il prédisait juste.
» Il n’est point propre d’ailleurs à être lu de suite, étant trop plein et trop dense de matière, c’est-à-dire d’esprit, pour cela ; mais, à quelque page qu’on l’ouvre, on est sûr d’y trouver le fond et la forme, la réflexion et l’agrément, quelque remarque juste relevée d’imprévu, de ce que Bussy-Rabutin appelait le tour et que nous appelons l’art. […] Cette idée, jetée en l’air et à l’étourdie par un homme de grand talent, qui sait sans doute autant et mieux que personne son xviie siècle, mais dont le premier jugement est rarement juste et précis, a été soigneusement ramassée et amplifiée par les disciples et les esprits à la suite.
Elle est comme lui intolérante de toute opposition, insultante dans la dispute, et très disposée à dire aux gens des choses piquantes, sans colère et seulement pour jouir de sa supériorité. » Ce n’est pas juste, et cela jure avec l’idée de bonté qui se trouvait dominer, en définitive, dans les jugements comme dans les actions de Mme de Staël ; mais enfin l’opinion d’un tel témoin n’est pas à négliger, sauf à être expliquée. […] Mais, pour être juste envers lui et envers Coppet, ajoutons bien vite que c’est le même homme qui, lorsqu’en juillet 1817 on rapportait les dépouilles de celle qui avait tout animé dans cette noble demeure, et qui, selon le mot de Byron, « l’avait rendue aussi agréable que lieu sur terre puisse le devenir par la société et par le talent », c’est le même Sismondi qui s’écriait dans sa douleur : « C’en est donc fait de ce séjour où j’ai tant vécu, où je me croyais si bien chez moi !
Craufurd qui avait dû, en quittant Paris, prendre des mesures pour que les lettres, à lui adressées, lui parvinssent sans retard, a pu fort bien recevoir celle-ci juste au moment où il partait pour Londres, ou même après y être arrivé ; et, cette lettre reçue, il dut écrire immédiatement à lord Castlereagh pour la lui envoyer. […] Demander aux hommes de sa trempe d’être des libéraux par goût, par penchant et préférence, c’est trop exiger de l’humaine nature : c’est bien assez s’ils le deviennent à une certaine heure par une juste appréciation de la nécessité et par raison d’État.
Mais avant d’en dire quelque chose, il est indispensable de parler du genre même des Mystères, duquel il n’est, après-tout, qu’une variante ; et cela nous mène à expliquer ce qu’était notre ancien théâtre ; car tout s’y tient, et il n’est pas possible d’en prendre une juste idée sans remonter aux origines et le suivre dans ses progrès et son développement. […] Ces deux formes si inégales ont éprouvé chez nous des destinées bien différentes : la dernière, une des plus nobles formes de l’art, une des créations choisies de l’esprit humain, a fourni d’immortels chefs-d’œuvre et a mis pour jamais en lumière les noms les plus glorieux de notre littérature et de notre poésie ; l’autre forme, au contraire, n’a promu à la célébrité (au moins chez nous) aucun nom d’auteur et de poëte, et n’a laissé, quoi qu’on s’efforce de faire aujourd’hui pour être juste, que des œuvres sans élévation, sans action durable et féconde.
On sentait qu’il y avait chez l’altier théocrate bien des vues justes et perçantes, au moins en ce qui était de l’appréciation du passé. […] Littré, et je ne serai que juste en indiquant aussi, pour une époque bien plus récente et dans une branche prolongée de la même école, le nom d’un savant très-estimé de tous ceux qui le connaissent, M.
A vingt-deux ans, il s’était complètement affranchi des croyances ; mais le principe d’exaltation était dans sa famille, et l’un de ses jeunes frères, entré également chez les Jésuites, et juste au moment de leur suppression en France, avait l’imagination si frappée qu’il n’avait cru trouver de salut et d’abri qu’en s’allant jeter de là à La Trappe. […] Il priait à sa manière : « D’autres invoquent les dieux avant le sommeil ; pour moi, je bénis mes amis. » — Il avait pourtant des jours et des heures où il exprimait le regret de ne plus sentir en lui aucune aspiration vers l’avenir, aucun recours à la récompense du juste ; il eût désiré plus de malheurs encore qu’il ne lui en était échu, s’il avait dû y puiser et y ressaisir une espérance d’immortalité : « Vous, écrivait-il à Rousseau, vous attendez une récompense qui vous serait bien due et dont je vous envie l’espoir délicieux au prix des persécutions qui le peuvent mériter.
Térence est la joie et les délices des esprits délicats et justes, qui n’aiment pas le fou rire, qui aiment un rire modéré qui aille avec les pleurs et qui ne dépare pas le sourire. […] Il serait juste aussi de le montrer un digne fils et un héritier direct de la civilisation et de la culture grecque à laquelle il appartient, de cette civilisation qu’on voit si humaine au temps de Gélon, et qui trahissait déjà son véritable esprit dans la lutte fabuleuse de Pollux, l’un des Argonautes, contre un roi brigand des bords de la Propontide.
Il faut, si l’on veut rester juste, introduire à chaque instant dans son esprit un certain contraire. […] Nous allions passer le Puerto de los perros (passage des chiens, ainsi nommé parce que c’est par là que les Maures vaincus sortirent de l’Andalousie) ; c’est une gorge étroite, une brèche faite dans le mur de la montagne par un torrent qui laisse tout juste la place de la route qui le côtoie.
Nul exemple ne me paraît plus propre à montrer à quel point des hommes, même énergiques de trempe et de volonté, sont assujettis et soumis au milieu où ils vivent, dépendant des circonstances, changeant de face sans changer de caractère ; combien il est juste, même après des excès et des torts, de ne pas désespérer de ceux qui ont une valeur réelle et un vertueux principe d’énergie ; comment le malheur éprouve et épure, même à leur insu, certaines natures restées saines au fond ; et ce que peuvent devenir d’honorable et d’utile pour la société et pour la patrie ceux qui, hors des cadres réguliers et durant l’orage des interrègnes, dans la convulsion des mouvements révolutionnaires, cherchaient vainement leur niveau et leur emploi. […] Cette histoire appartient à nos neveux… » Nous sommes de ces neveux ; répondons à son appel : soyons justes enfin, tâchons, s’il est possible, de nous montrer impartiaux et équitables, sans revenir à notre tour passionner et renflammer l’histoire à l’égal de la réalité.
Dans notre situation critique, je suis fâchée d’alarmer à si juste titre votre tendresse, mais l’occasion est pressante. […] On voit dans une lettre à sa fille, que celle-ci lui ayant demandé la mesure d’un de ses petits doigts pour une bague, elle répond : « Je vous envoie la mesure désirée du troisième doigt, et du petit, par un officier qui les remettra à Mercy ; vous serez étonnée de la mesure de mon doigt, et elle est « bien juste. » Le corps n’est pas ainsi chargé sans que l’esprit se ressente quelque peu du poids.
Un autre instrument fort désagréable aux enfants (pardon du détail et du mot, il s’agit d’un clysopompe) avait laissé en lui, comme de juste, une impression très forte. […] De même que, dans le fœtus, on voit tour à tour la tête disproportionnée se réduire à sa juste mesure, les fontanelles du crâne se boucher, les cartilages se changer en os, les vaisseaux rudimentaires se clore et se ramifier, la communication de la mère et de l’enfant se fermer, de même, dans le langage enfantin, on voit tour à tour les deux ou trois noms dominants perdre leur prépondérance absolue, les mots généraux limiter leur sens trop vaste, préciser leur sens trop vague, s’aboucher entre eux, acquérir des attaches et des sutures, se compléter par l’incorporation d’autres tendances, ordonner sous eux des noms de classes plus étroites, former un système correspondant à l’ordre des choses, et enfin agir par eux seuls et d’eux-mêmes sans l’aide des nomenclateurs environnants. — Un enfant a vu sa mère mettre pour une soirée une robe blanche ; il a retenu ce mot, et désormais, sitôt qu’une femme est en toilette, que sa robe soit rose ou bleue, il lui dit de sa voix chantante, étonnée, heureuse : « Tu as mis ta robe blanche ?
Cette même année, Racine touche 1 500 livres ; juste autant que Quinault et que le médecin Perrault ; Charles Perrault, qui va succéder à Chapelain dans la confiance de Colbert, est à 2 000 livres. […] On trouverait la juste expression du goût moyen et général de la bonne société, pendant le dernier tiers du xviie siècle, dans Bussy-Rabutin et son cercle, tel que sa correspondance nous les montre.
Formé à l’école des Montagnards, il continua leurs traditions : mais un juste instinct l’avertit de condenser le verbiage de la tribune, et de se régler plutôt sur la nette concision des rapports et la fermeté saisissante des proclamations, où certains Jacobins avaient donné de curieux modèles d’éloquence administrative ou militaire. […] Et ce qu’il a dicté à Sainte-Hélène, ce sont des mémoires oratoires ; ces récits de ses campagnes et de ses victoires sont de l’histoire tout juste comme le tableau de la politique athénienne dans le Discours pour la Couronne, de l’histoire arrangée pour persuader.
C’est en 1864 que le traité de Vienne consacre sa maîtrise, bientôt suivi par la victoire de Sadowa (1866), premier coup de tonnerre de l’orage qui s’amasse à nos frontières et dont les esprits clairvoyants prennent un juste sujet d’alarmes. […] Le mot est juste.
Pour juste pendant à la scène de Péronne, il y aurait à montrer une scène de paravent extrêmement comique, qui amène la perte du connétable de Saint-Pol. […] Il a raison de remarquer quelque part que presque tous ceux qui ont fait de grandes choses ont commencé fort jeunes ; mais ce qui est bien rare, c’est de conseiller si sagement et de voir si juste, de tenir la balance si exacte, dès cette première moitié de la vie.
C’est le cas de se former une idée juste du personnage célèbre qui nous est ainsi montré en pleine lumière. […] Le jugement de Cuvier, plus sévère, est beaucoup plus juste, a remarqué M.
Pour se faire une juste idée de ce qu’était alors la représentation, et de l’importance qu’on attachait à toutes ces choses, remplacées depuis par d’autres que nous croyons beaucoup plus sensées et qui le deviendront peut-être, il faut lire le récit de cette première entrevue, chez Dangeau : La princesse, dit l’historiographe fidèle, arriva sur les six heures. […] Il y a je ne sais quelle force cachée, a dit Lucrèce (ce que d’autres avec Bossuet nommeront Providence), qui semble se plaire à briser les choses humaines, à faire manquer d’un coup l’appareil établi de la puissance, et à déjouer la pièce, juste au moment où elle promettait de mieux aller.
La première fois qu’il le présenta à la reine après cette affaire de Casal : « Madame, lui dit-il, vous l’aimerez bien, il a l’air de Buckingham. » S’il se permit, en effet, une telle parole, il ne savait pas prédire si juste. […] Ne suffit-il pas qu’on reconnaisse leurs mérites et qu’on soit juste envers leur mémoire ?
Je n’insisterais pas à ce degré sur Carrel, si ce n’avait pas été l’homme le plus remarquable de l’opposition antidynastique dans la presse sous Louis-Philippe, l’adversaire le plus élevé et le plus redoutable, et celui qu’on dut regretter le plus de s’être aliéné ; si, à travers ses violences mêmes, il n’y avait pas en lui un fonds d’esprit juste et de bon sens sévère ; si, dans l’expression et dans le style enfin, il ne se trouvait pas être un écrivain de vieille roche et de la meilleure qualité. […] Carrel lui-même, si injuste avec lui dans le détail, lui niant perpétuellement ce qui allait se réaliser le lendemain, lui contestant l’énergie honorable qu’il montra en Belgique et à Ancône, et ces actes efficaces qui donnèrent alors au gouvernement de Juillet une attitude ; Carrel, si cruel une fois et si impitoyable pour lui, puisque, parlant du ministre déjà mourant, il disait (7 avril 1832) : « Espérons qu’il vivra assez pour rendre ses comptes à la France » ; Carrel fut plus juste le jour de la mort de Périer, et il écrivit ces lignes (17 mai), où il lui rend témoignage pour la qualité que lui-même prisait le plus : M.
Étienne, ramena d’un mot les choses dans leurs justes bornes ; il loua d’ailleurs le récipiendaire en des termes dignes et d’une parfaite convenance : « Les applaudissements du public, disait-il, ont déterminé nos suffrages plus que la bienveillance des illustres amis dont votre jeunesse a droit de s’honorer. » M. […] Et Cavois répond : Je n’en suis pas surpris, il aime les beaux-arts ; Un homme tel que vous doit fixer ses regards : Sous ce rapport du moins il prouve qu’il est juste.
Les sentiments de Franklin pour la France ont varié dans le cours de sa longue carrière et pendant le temps même de son séjour ; il est juste de tenir compte des divers moments pour ne pas faire de lui un moqueur ni un ingrat. […] Un homme n’est point né complètement jusqu’à ce qu’il ait passé par la mort. » La fin paisible de ses vieux amis qui avaient vécu en justes lui paraissait comme un avant-goût du bonheur d’un autre monde.
La connaissance que nous avions d’un caractère est juste sans doute, mais elle est générale ; elle est d’ensemble et par conséquent elle est flottante encore ; ce qui nous ravit, c’est d’avoir retrouvé dans le roman cette même connaissance sous un rayon plus vif qui fait sortir les traits de détail, qui met en relief les particularités significatives et qui nous fait dire : « Comme c’est vrai ! […] Le lecteur qui n’aime que le roman réaliste est généralement un esprit juste, droit, pondéré, qui a de bons yeux, un bon raisonnement, qui ne se trompera guère, que l’on ne trompera pas souvent et qui se tirera bien de l’affaire de la vie.
Le sentiment intense et profondément juste qu’un art vivant et large, large comme la nature, et comme l’homme, ne peut avoir sa source que dans une sympathie universelle, dans cette disposition qui est comme le génie d’aimer, de nous intéresser à tout, de découvrir à force de nous oublier, la beauté et le côté frappant de chaque chose ». […] Le portrait de femme par Burne-Jones, exposé au salon du Champ-de-Mars en 1896, celui auquel nous faisions allusion au début de cette étude, et qui présente tous les défauts de l’artiste poussés à leur plus haute puissance, fut l’objet, de la part d’un critique parisien37, d’un jugement cruel mais juste, que je prends plaisir a mentionner ici, en l’opposant aux louanges enthousiastes qui ont accablé l’artiste au cours de sa carrière : Hélas !
Fontenelle comparoit les frondeurs à ces animaux hargneux, qu’on se plaît à mettre en fureur ; & la comparaison est juste. […] Alors leur prévention, ou leur vivacité les aveugle, & pour débiter une méchanceté, ils ne sont pas toujours justes. […] Il est juste que le commerce ait ses douceurs, & que celui qui travaille sans relâche, prenne enfin du repos. […] Sans cela il ne va qu’à tâtons, & s’il rencontre juste, c’est qu’il a deviné. […] Il regne une juste émulation parmi les François qui ne leur permet pas de demeurer au-dessous de leurs voisins.
Ce mot semblait très juste et très élégant et ne scandalisait personne. […] Non seulement l’amour ne sait jamais au juste ce qui détermine son choix, mais il arrive que ce choix soit indigne et déshonorant sans qu’il s’en doute. […] Et Beppo resterait assis par terre entre deux « belles », et complètement quinaud : ce qui serait le juste châtiment de sa fourberie et de ses prétentions de psychologue. […] Si tous les personnages qu’on met sur la scène faisaient ce qui est bien, juste, réfléchi, mais il n’y aurait plus de théâtre possible ! […] non, — mais qui continuerait d’être juste.
Ceci nous confirme bien dans la pensée qu’il est juste et sage d’indiquer les sources où l’on puise. […] La beauté et l’humeur avenante de sa femme lui avaient procuré une juste mais malheureuse célébrité. […] Ce n’est point à un aussi pitoyable motif qu’il faut attribuer de si justes attaques. […] Ce raisonnement, qui, appliqué à d’autres sciences, pourrait se trouver juste, ne saurait l’être pour la médecine. […] Honteux du rôle qu’il avait joué, celui-ci essaya de redevenir juste envers l’auteur, s’il s’était montré ingrat envers l’homme.
Il médita d’aller instituer dans l’île de Corse la société juste et accusa Choiseul de concerter toute sa politique pour l’empêchement de ce dessein. […] Juste de Constant était un bien cruel ennemi de lui-même. […] Juste de Constant s’était revêtu de cette ironie douloureuse, arme des natures blessées et fines, qu’un obstacle empêche d’être elles-mêmes. […] De là la timidité de Juste de Constant, cette gaucherie presque tragique, cet effort souffrant pour briser le nœud. […] Juste n’était que déshumanisé, il est démoralisé.
Et si nous écrivons plus correctement, que ce soit pour exprimer surtout des sentiments droits ou des pensées justes.
Une jeune Espagnole aux grands yeux pénétrants ; Et sa voix se mêlait à la voix des rafales Qu’on entendait mugir au-dessus des torrents… Si j’osais conjecturer, je dirais que par toutes ces figures diverses qu’a évoquées autour d’elle l’imagination de l’ouvrière-poète, elle s’est plu à multiplier, comme dans un miroir légèrement enchanté, des images d’elle-même, et elle n’a changé que juste ce qu’il fallait pour pouvoir dire : Ce n’est pas moi !
L’art d’un roi qui, sans être supérieur, eût été pratique et prudent, c’eût été de pourvoir au plus tôt, de porter remède à cette fièvre soudaine, à cette chaleur de réforme qui avait saisi à la fois toute la nation, moins les classes privilégiées, et qui gagnait, jusque dans ces classes privilégiées, bien des têtes ardentes et généreuses ; c’eût été de donner à cet enthousiasme le temps et les moyens de se calmer ; c’eût été, par des réformes partielles vigoureusement suivies, de donner satisfaction à des intérêts justes et, par là, de décomposer petit à petit ce nuage gros d’illusions, qui renfermait des tonnerres.
Le caractère du style aussi bien que de la vie du marquis d’Argenson est le bon sens, comme on le croira sans peine ; ennemi du clinquant et de ce qu’il appelle les épigrammes politiques, il ne l’est pas moins des pointes et des épigrammes du langage ; avide avant tout de vérités proverbiales, de dictons populaires, et heureux d’en confirmer sa pensée, la trivialité même ne l’effraye pas, il ne l’évite jamais ; mais par malheur la raison n’est pas toujours triviale ; il arrive donc souvent aux saillies à force de sens, et beaucoup de ses comparaisons sont piquantes parce, qu’elles sont justes, Qu’Albéroni, par exemple, vivant à Rome après sa disgrâce, entreprenne, au nom du pape, souverain temporel, la conquête de la petite république de Saint-Marin ; M. d’Argenson, qui vient de nous exposer avec précision et peut-être sécheresse les travaux et les talents du cardinal, saura bien ici nommer cette entreprise une parodie des comédies héroïques qu’Albéroni a données à l’Espagne vingt ans auparavant, et, lui-même, le montrer joueur ruiné quoique habile qui se conduit en jouant aux douze sous la fiche, comme il faisait autrefois en jouant au louis le point.