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764. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 novembre 1885. »

Historiquement, son esthétique paraît tendre expressément à ressusciter l’ancien drame grec ; en soi elle constitue apparemment un système de condensation, mais d’autre part elle semble entièrement étrangère au progrès par la spécialisation et la définition des parties. […] Les drames de Wagner n’ont qu’une analogie tout extérieure avec le drame grec. […] De même que Wagner est en progrès sur ses contemporains, il dépasse et renouvelle la forme artistique qui représente le dernier développement du génie grec. […] Il publia des traductions de tragédies grecques, des traductions du latin, une étude sur « le système de la Mythologie » ; par une curieuse coïncidence, quelques-uns de ces écrits furent imprimés à Bayreuth.

765. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

Les premiers essais de composition littéraire, qu’on nous faisait écrire en grec, en latin, en français, ajoutèrent bientôt à ce plaisir passif le plaisir actif de produire nous-même, à l’applaudissement de nos maîtres et de nos émules, des pensées, des sentiments, des images, réminiscences plus ou moins heureuses des compositions antiques qu’on nous avait appris à admirer. […] Tous ces printemps étaient italiens ou grecs ; ils se ressemblaient les uns les autres, comme le même visage répété par vingt miroirs différents. […] XX Je me souviens surtout d’un soir d’été où M. de Vaudran, ayant apporté par hasard avec lui un Platon en grec, le lut en le traduisant à ses deux amis, jusqu’au moment où le crépuscule manqua sur la dernière page du Phédon, et où les premières étoiles scintillèrent dans le ciel autour du rocher, comme pour assister du ciel à la mort de Socrate. […] XXIII M. de Valmont avait eu l’occasion ainsi de me voir enfant dans le cabinet d’étude de mon oncle ; il m’avait même donné en passant quelques leçons de complaisance pour l’étude du grec et du latin.

766. (1855) Préface des Chants modernes pp. 1-39

Quoi, nous sommes ce peuple qui, à la fin du dernier siècle, — hier, au moment où nos pères venaient de naître, — illumine le monde entier par les éclats merveilleux de la plus sublime révolution qui se soit jamais accomplie ; nous sommes ce peuple qui, traversant l’Europe au bruit du canon, va porter à toutes les nations les germes d’une liberté encore endormie peut-être, mais que j’entends sourdre sous la terre ; nous sommes ce peuple qui se débat glorieusement à travers les neiges meurtrières et qui force, par sa défaite même, toutes les races à venir s’asseoir chez lui au grand banquet de la civilisation ; nous sommes ce peuple qui souffre d’une gestation d’avenir ; nous sommes ce peuple qui a eu tant de gloires magnifiques, tant de poignantes humiliations, et il faut donner des récompenses nationales à ceux qui chantent en français de cuisine les Grecs et les Romains ! […] N’en déplaise à ceux qui regrettent l’antiquité pour prouver qu’ils ont appris le grec au collège. […] La vie est impitoyable, elle marche, elle marche toujours ; comme le Juif errant, elle est condamnée à ne s’arrêter jamais ; aujourd’hui ici, demain là, elle ne reparaît jamais aux mêmes lieux sous la même forme ; elle va, toujours s’élargissant, se modifiant, s’agrandissant ; à chaque étape elle change de costume ; aujourd’hui c’est la ceinture de palmier des Égyptiens, demain c’est la robe des Persans, après-demain c’est la chlamyde grecque, c’est la toge romaine, c’est le sayon des barbares, c’est la gône de Charlemagne, c’est le vêtement de fer du moyen âge, c’est l’habit à la française, c’est le frac noir. […] Spiritualistes, matérialistes, idéalistes, panthéistes, catholiques, grecs, protestants, saint-simoniens, fouriéristes, mormons, économistes se heurtent dans le champ clos en agitant leur bannière. — Je ne parle pas des athées.

767. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

C’est la valeur, l’intelligence, l’héroïque personnalité grecque qui, dans cette lutte mémorable, a vaincu la lâcheté, l’ineptie, la mollesse des Perses. […] Les historiens latins n’ont point à cet égard une autre méthode que les Grecs. […] Pourquoi l’histoire a-t-elle été ainsi traitée par les historiens romains et grecs ? […] Qu’on lise les histoires grecque et romaine d’Otfried Muller, de Thirwall, de Grote, de Niebuhr, de Michelet, de Mommsen, de Fustel de Coulanges, après les classiques compositions des écrivains antiques, on sera tout surpris du nouvel aspect que prennent les choses dans l’exposition des historiens modernes.

768. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — III » pp. 90-104

De plus, il avait encore deux petits flacons de ce vin grec que le marquis de Marignan lui avait laissé parvenir : Je m’en frottai un peu les mains, puis m’en lavai fort le visage, jusques à ce qu’il eût pris un peu de couleur rouge, et en bus, avec un petit morceau de pain, trois doigts, puis me regardai au miroir. […] Messieurs mes compagnons, quand vous vous trouverez en telles noces, prenez vos beaux accoutrements, parez-vous, lavez-vous la face de vin grec, et la faites devenir rouge ; et marchez ainsi bravement parmi la ville et parmi les soldats, la care levée (la face levée), ne tenant jamais autre propos sinon que bientôt, avec l’aide de Dieu et la force de vos bras et de vos armes, vous aurez en dépit d’eux la vie de vos ennemis, et non eux la vôtre… Mais si vous allez avec un visage pâle, ne parlant à personne, triste, mélancolique et pensif, quand toute la ville et tous les soldats auraient cœur de lions, vous le leur ferez venir de moutons.

769. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

Après avoir, par ses premières œuvres, payé sa dette à la patrie allemande en vrai fils du Nord, il était allé « s’asseoir au banquet des Grecs », et il ne s’en était plus guère écarté. […] À la place des belles figures de la mythologie grecque, on voit des diables, des sorcières, des vampires, et les nobles héros du temps passé doivent céder la place à des escrocs et à des galériens.

770. (1894) Propos de littérature « Chapitre III » pp. 50-68

(Qu’on se rassure, je ne vais pas parler grec). […] Désormais complétée elle s’est découverte elle-même en son double mode, comme chez les lyriques grecs, art musique et art plastique, selon le temps et selon l’espace.

771. (1890) L’avenir de la science « XII »

Il serait peut-être assez difficile de trouver quelque philosophie dans la théorie de l’accentuation grecque : est-ce une raison pour la déclarer inutile ? Non certes, car, sans elle, la connaissance approfondie de la langue grecque est impossible.

772. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXIV. Arrestation et procès de Jésus. »

Pilate, averti de leur présence, monta au bima 1117 ou tribunal situé en plein air 1118, à l’endroit qu’on nommait Gabbatha ou en grec Lithostrotos, à cause du carrelage qui revêtait le sol. […] Le mot grec [Greek : bêma] était passé en syro-chaldaïque.

773. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

Au lendemain de la Révolution, Joseph de Maistre, de Bonald dressent dans toute son âpreté le dogme catholique, exaltent l’autorité paternelle et monarchique, vantent le moyen âge aux dépens de l’antiquité grecque et romaine : c’est le contrepied de l’esprit qui animait les philosophes du dix-huitième siècle. […] Malherbe a l’air de rompre en visière sur tous les points à Ronsard et à ses disciples ; par aversion de leur langue trop savante, il renvoie les poètes à l’école des crocheteurs du Port-au-Foin  ; par réaction contre un lyrisme qui lui semble de verve et de versification trop lâches, il soumet la poésie à une discipline sévère qui en régente et le fond et la forme ; mais, ce faisant, il reprend à son compte en les aggravant des critiques qui avaient été dirigées avant lui contre l’abus du grec et du latin, témoin la fameuse rencontre de Pantagruel avec l’écolier limousin  ; et, d’autre part, il consolide l’œuvre de la Pléiade, puisqu’il conserve l’emploi de la mythologie, les genres usités chez les anciens, l’imitation de l’antiquité.

774. (1899) Psychologie des titres (article de la Revue des Revues) pp. 595-606

En passant des mains des apôtres juifs en celles de Grecs et de Latins, possédant une plus profonde culture et soumis à de meilleures habitudes de discipline intellectuelle, le christianisme perdit pour un temps cette tendance qu’il tenait de ses origines orientales. […] Du même esprit participent encore les ouvrages pédagogiques du xviie  siècle qui s’intitulent par exemple le Thésaurus ou Gradus ad Parnassum, avec lequel plusieurs générations ont composé des vers latins ; ou bien c’est le Jardin des Racines Grecques, que cultivaient ces Messieurs de Port-Royal.

775. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Les deux cathédrales »

Pour le Grec, la vie est une joie ; pour le Chrétien, elle ne peut être qu’une douleur. […] Pas plus qu’un Hellène n’aurait pu tirer de l’âme égyptienne son inspiration, ni un artiste du moyen-âge de l’âme grecque, un moderne dont les sens et l’intelligence ne sont pas clos, ne peut, quelque soit son propre tempérament, faire que la vérité d’hier soit celle d’aujourd’hui.

776. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVIII et dernier. Du genre actuel des éloges parmi nous ; si l’éloquence leur convient, et quel genre d’éloquence. »

En suivant l’histoire des éloges, et cette branche de la littérature, depuis les Égyptiens et les Grecs jusqu’à nous, on a pu remarquer les changements que ce genre a éprouvés, les temps où il était le plus commun, l’usage ou l’abus qu’on en a fait, et les différentes formes que la politique, ou la morale, ou la bassesse, ou le génie lui ont données. […] Ainsi les Grecs, plus animés par leur climat, devaient être plus sensibles à l’éloquence que les Romains, et les Romains, plus que tous les peuples septentrionaux de l’Europe.

777. (1886) Le naturalisme

Laissons de côté les Latins qui ont calqué les Grecs : nous, nous avons imité les poètes italiens ; à son tour la France imita notre théâtre, notre roman. […] La période attique — on appelle ainsi tout le temps où fleurirent les lettres grecques, — n’a ni un autre romancier ni un autre roman, car on ignore si Xénophon a renouvelé sa tentative. […] Les héros de ces romans, tout en portant des noms grecs, turcs et romains, parlaient et sentaient comme des Français contemporains des Précieuses. […] Laissons de côté l’infatigable érudition que déploya Flaubert pour dépeindre la cité africaine, son voyage aux côtes de Carthage, son ardeur à fouiller les auteurs grecs ou latins. […] Il court dans ses veines du sang italien, grec et français.

778. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Baudelaire.] » pp. 528-529

Pourquoi cette pièce n’est-elle pas en latin, ou plutôt en grec, et comprise dans la section des Erotica de l’Anthologie ?

779. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Jouffroy.] » pp. 532-533

Ceci se passait en 1811 ; l’année suivante, Jouffroy nous quitta pour entrer au lycée de Dijon, où il fit sa rhétorique et apprit assez de grec et de philosophie pour se faire admettre en 1813 à l’École normale.

780. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Appendice. »

Quant au thème grec, il avait de brillants partisans, mais peu nombreux, parce que cette forme se prête mal à l’exposition des principes politiques et religieux.

781. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre XII. Demain »

Par la volonté de marbre, il est une statue grecque ; mais la pensée lui donne, avec le mouvement, la polychromie souriante de la vie.

782. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 329-336

Bossuet, [Jacques-Benigne] Evêque de Meaux, de l’Académie Françoise, né à Dijon en 1627, mort à Paris en 1704, le premier modele que nous ayons eu d’une éloquence égale & quelquefois supérieure à celle des plus célebres Orateurs Grecs & Latins.

783. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 348-354

Seroit-on bien reçu à dire que personne n’étoit plus capable de remplacer l’Abbé Desfontaines ; que, né avec autant d’esprit que son prédécesseur, il l’a emporté sur lui du côté du talent de la Poésie, & qu’on peut en juger par son Ode sur la Journée de Fontenoy, & par d’autres Pieces connues ; que les Auteurs Grecs & Latins lui étoient aussi familiers que ceux du siecle de Louis XIV ; qu’il a réuni la connoissance de plusieurs Langues étrangeres au mérite de bien écrire dans la sienne ; qu’il s’est montré supérieur dans l’art de faire l’analyse d’un Ouvrage, & sur-tout d’une Piece de Théatre, quand il a voulu s’en donner la peine ?

784. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre VIII. La Fille. — Iphigénie. »

Pourquoi la jeune Grecque se dévouerait-elle à Neptune ?

785. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 28, de la vrai-semblance en poësie » pp. 237-242

L’évenement étoit possible suivant la theologie des grecs de ce tems-là.

786. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Gérard de Nerval »

Ainsi, par exemple, quel illuminé était-ce donc que cet aventurier d’abbé de Bucquoy dont Gérard de Nerval nous raconte la vie, que ce païen Quintus Aucler, plus Grec et plus Romain, à lui seul, que tous les révolutionnaires, et qui voulait, dans un pays chrétien de tradition séculaire, rétablir officiellement le culte de Jupiter ?

787. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de l’Évangile » pp. 89-93

Pour les esprits qui ne passent pas leur vie à couper en quatre des fils de la Vierge avec de microscopiques instruments, il n’y a que trois femmes en nature humaine et en histoire : La femme de l’Antiquité grecque (car la matrone romaine, qui tranche tant sur les mœurs antiques, n’est qu’une préfiguration de la femme chrétienne), la femme de l’Évangile, et la femme de la Renaissance, — pire, selon nous, que la femme de l’Antiquité, pire de toute la liberté chrétienne dont la malheureuse a si indignement abusé.

788. (1888) Impressions de théâtre. Première série

Il y a plusieurs façons de prendre la mythologie grecque. […] C’est un Grec d’Euripide, avec quelque chose déjà de l’âme future de ces héros romantiques qui, malgré tout, nous restent chers. […] Ophélie ne tomberait plus dans l’eau en faisant des bouquets, mais peut-être s’immolerait avec le poignard des princesses grecques. […] Ils blaguent l’Ananké, ils en font le synonyme grec d’un tempérament joyeux et exigeant. […] Et il ne faut point s’indigner de ces libertés qu’ont prises d’aimables esprits avec ces dieux vénérables et charmants de l’antiquité grecque ; car ces dieux sont un peu les nôtres ; nous aimons à regarder les Grecs comme nos ancêtres intellectuels, et ce ne sont donc là qu’amusements de famille.

789. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Si vous lisez les marges de mes Grecs, je lis et conserve les adresses même des petits billets adressés chez mon Esculape. […] La lettre se termine ainsi par une dernière feuille datée du 17 au matin : « … J’ai repris mes petits Grecs qui grossissent à vue d’œil. […] Mais ce ne sont plus les petits Grecs que vous connaissez ; c’est un tout autre plan, un autre point de vue, d’autres objets à considérer. […] Ce que je fais sera une histoire de la civilisation graduelle des Grecs par les colonies égyptiennes, etc., depuis les premières traditions que nous avons sur la Grèce jusqu’à la destruction de Troie, et une comparaison des mœurs des Grecs avec les mœurs des Celtes, des Germains, des Écossais, des Scandinaves, etc. […] « Je relis ma lettre, et dans la seconde page je vois un de toutes mes forces, à propos de mes Grecs, qui n’est malheureusement pas tout à fait vrai.

790. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

Chez les Grecs, les premières images taillées furent celles des personnes divines ; la poésie chantée, c’est la religion qui l’inspira. […] La théorie de l’art chez les Grecs découla donc tout entière de la religion. […] C’est ainsi que l’imagination toujours tendue vers l’idéal les Grecs arrivèrent, dans l’expression du beau, à un point qu’on n’a jamais égalé, que peut-être on n’égalera plus. Il faudrait, pour égaler et surpasser les Grecs, qu’à leur exemple nous crussions aux dieux, que nous y crussions davantage : or, c’est là qu’est l’impossible. […] Ainsi la théorie de l’art, telle que la conçurent les Grecs, mène, d’idéalité en idéalité, c’est-à-dire d’abstraction en abstraction, droit à l’absurde ; elle ne s’y dérobe que par l’inconséquence.

791. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

Allons aux grands effets : songeons aux Grecs, à l’effet de leurs Furies, aux cris, aux gémissements véritables dont les Lekain et les Talma d’Athènes faisaient retentir leurs immenses théâtres et transir leurs spectateurs. […] une existence douce, aimable, à ses foyers ; une grâce simple dans les manières, quelquefois une espèce d’enfance qui joue sérieusement : et tout à coup ensuite sur la scène une existence immense, extraordinaire, terrible, avec une figure grecque et pure et les fureurs d’un lion réveillé. […] Elles produisent sur moi l’effet de cet idiome grec, dont les sons charmaient le malheureux Philoctète dans son désert. » Son âme, son imagination étaient montées dans le tous-les-jours à un très haut ton ; ses lettres, sa conversation étaient d’un pittoresque inépuisable : il y versait son âme en images continuelles ; il poétisait tout à coup : « L’air de ce globe n’est pas bon ; ce soleil-ci n’est pas le véritable, je m’attends à mieux. » Quelquefois un peu de singularité, un geste grandiose qui faisait sourire, quand lui-même il était en robe de chambre et en bonnet de coton : « J’habite dans la lune, je crache sur la terre. » « Je rêve en ermite et en pauvre ermite, mes pieds appuyés sur mes vieux chenets du temps du roi Dagobert et du bon évêque saint Éloi. » Puis à côté de ces airs antiques, le plus souvent des nuances toutes fraîches et charmantes.

792. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

En face, cette branche toujours verte de fraxinelle ou de chêne qui, au milieu des vases grecs et des brillantes délicatesses, sur le marbre de la cheminée, tenait lieu de l’heure qui fuit, n’était-ce pas comme une palme de Béatrix rapportée par l’auteur d’Orphée, comme un symbole de ce je ne sais quoi d’immortel qui trompe les ans ? […] On a comparé heureusement ce style aux blanches colonnes de Palmyre : ce sont en effet des fûts de style grec, mais avec les lianes des grands déserts pour chapiteaux. […] L’effet est souvent heureux, de ces mots gaulois rajeunis, mêlés à de fraîches importations latines, et encadrés dans des lignes d’une pureté grecque, au tour grandiose, mais correct et défini.

793. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « François Ier, poëte. Poésies et correspondance recueillies et publiées par M. Aimé Champollion-Figeac, 1 vol. in-4°, Paris, 1847. »

Il y a eu des degrés toutefois ; ce même Homère, de qui nous tenons l’adieu du vieux Pélée donnant à son fils cette royale leçon de prééminence et d’excellence généreuse, nous représente Achille dans sa tente, au moment où les envoyés des Grecs arrivent pour le fléchir, surpris par eux une lyre à la main et tandis qu’il s’enchante le cœur à célébrer la gloire des anciens héros. […] C’est une épigramme tout à fait à la grecque, mais la similitude de l’image reste frappante : Constiteram exorientem Auroram forte salutans, Quum subito a læva Roscius exoritur. […] Il les donne pour les avoir faites à l’imitation des anciens grecs, latins et modernes italiens voilà qui est franc ; mais, en ces termes généraux, l’indication reste bien vague.

794. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Et ses héroïnes, ses amoureuses, Géluta, Mila, Atala, Cymodocée, les indiennes et la grecque sont de jolies statuettes d’albâtre, dont l’élégance molle écœure vite : Chateaubriand ne connaît pas la femme ; il nous présente toujours des variantes du même type irréel ; toujours il a logé son fantôme d’amour 657 vague et insubstantiel, dans des corps charmants, entrevus un jour par lui en quelque lieu des deux mondes, et qui ont caressé ses yeux ou fait rêver son âme, sans qu’il ait jamais su ou daigné pénétrer la personnalité réelle qui s’y enveloppait. […] Le sublime de la forêt américaine, la grâce nette des montagnes grecques, la grandeur du cirque romain, le tohu-bohu bariolé du campement oriental, les ciels bas et brumeux de la Germanie et les riants soleils d’Italie, les architectures exquises et les vierges solitudes, toutes les formes que la nature et l’homme ont offertes à ses yeux, il a tout su voir et tout su rendre. […] Il y a des parties mortes dans l’œuvre de Chateaubriand : ses idées philosophiques, son style empire, et — ce qu’il faut regretter — son romantisme classique, sa vision pittoresque de la civilisation grecque et romaine.

795. (1889) Les premières armes du symbolisme pp. 5-50

On peut penser tout ce qu’on voudra de cette violence, en rire ou s’en alarmer, mais il nous semble qu’il ne s’en est point vu d’aussi curieuse depuis que Ronsard essaya de parler grec et latin en français, et qu’elle vaut la peine qu’on s’y arrête une fois. […] Un art que vous connaissez bien, car il est la gloire du pays adorable dont vous êtes originaire, la sculpture grecque n’a pas trop souffert de cet esprit d’imitation qui inspirait ses écoles. […] Les sculpteurs grecs répétaient à satiété les mêmes motifs.

796. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

» Dimanche 13 juin Le soir, après dîner, dans le jardinet de Charles Edmond, sur la petite terrasse contre la ruelle menant aux champs, Saint-Victor et nous, nous évoquons le passé, remontant aux Grecs et aux Latins, faisant de nos souvenirs de classe, jaillir les étincelles et les rapprochements, appréciant et commentant le latin de Tacite, le latin de Cicéron, le latin de M.  […] Ce Grec de la fin de la Grèce et du crépuscule de l’Olympe, est notre contemporain par l’âme et l’esprit. […] en le lisant, il me semble lire le grand-père de Henri Heine : des mots du grec reviennent dans l’allemand, et tous deux ont vu aux femmes des yeux de violettes.

797. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Du docteur Pusey et de son influence en Angleterre »

L’Église grecque soutient les églises grecques. […] L’évêque de Jérusalem n’est qu’un consul, un chargé d’affaires du gouvernement britannique, se liguant, selon des convenances diplomatiques ou commerciales, avec des musulmans contre des romains et des grecs.

798. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Le même Aristote à qui l’esclavage en général paraît chose toute naturelle, semble tenir l’asservissement des Grecs les uns par les autres pour une chose contraire à la nature90. […] Usages grecs ou cultes orientaux, les importations de l’étranger, usurpant la place des traditions familiales, marquent chacune des étapes de l’élargissement de l’esprit romain. — Et quant à nos sociétés modernes, où la fréquence et la rapidité des communications sont centuplées, qu’elles soient traversées de courants d’imitation encore plus larges et plus nombreux, ce n’est plus à démontrer : il n’y a qu’à ouvrir les yeux sur l’Europe pour noter, en même temps que les progrès de la démocratie, les progrès de l’assimilation par la mode. […] Curtius, Histoire grecque, I, 16, 361 ; V, 179.

799. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « L’obligation morale »

Nous parlons, en un mot, de ce qui caractérise principalement la morale des philosophes grecs. Mais il ne s’agirait plus de philosophie grecque ou orientale, nous aurions affaire à la morale de tout le monde, si nous considérions l’intelligence en tant que simplement élaboratrice ou coordinatrice des matériaux, les uns infra-intellectuels et les autres supra-intellectuels, dont il a été question dans le présent chapitre. […] Il eût fallu condamner l’esclavage, renoncer à l’idée grecque que les étrangers, étant des barbares, ne pouvaient revendiquer aucun droit. Était-ce d’ailleurs une idée proprement grecque ? […] Quand les philosophes grecs attribuent une dignité éminente à la pure idée du Bien et plus généralement à la vie contemplative, ils parlent pour une élite qui se constituerait à l’intérieur de la société et qui commencerait par prendre pour accordée la vie sociale.

800. (1905) Promenades philosophiques. Première série

Les Grecs, qui connurent tout, connurent la désespérance de vivre : le pessimisme d’Héraclite avait devancé l’optimisme de Platon. […] Nos maîtres, les Romains, le possédaient, quoique à un degré moindre que les Grecs, si amoureux, en toutes choses, de l’achèvement. […] Enfin, comme je l’ai déjà fait, elle donne pour ces réformes, très recommandables, l’exemple de l’italien, qui a su merveilleusement s’assimiler les mots d’origine grecque. […] Il y aurait cependant des corrections utiles ; elles porteraient principalement sur ces groupes inexprimables qui ont la prétention de figurer en français certaines lettres grecques. […] Lui, que l’on accusa, d’avoir, avec Ronsard, infecté le français de grec et de latin, il a une telle peur du sang aliène qu’il dit, à propos des mots de science em— puntés au grec : « Ces mots la donques seront en nostre langue comme étrangers en une Cité. » Il conseille de les traduire ou de les expliquer par d’élégantes tournures cicéroniennes.

801. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Laprade, Victor de (1812-1883) »

Il venait accomplir ce rêve d’André Chénier, traiter des sujets antiques avec une forme et une couleur grecques et revêtir de cette forme et de cette couleur des pensers nouveaux, en un mot interpréter poétiquement les mythes anciens.

802. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre X »

Il n’est pas possible qu’une langue littérairement aussi vivante ait perdu sa vieille puissance verbale ; il suffira sans doute que l’on proscrive à l’avenir tout mot grec, tout mot anglais, toutes syllabes étrangères à l’idiome, pour que, convaincu par la nécessité, le français retrouve sa virilité, son orgueil et même son insolence.

803. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Avant-Propos. » pp. -

L’objet du marquis d’Argens, partout ailleurs assez superficiel, est d’afficher, dans cet ouvrage, l’érudition la plus profonde, & de prodiguer fastueusement les citations Grecques & Latines, le tout pour prouver, ce qui n’a pas besoin de preuves, que les grands hommes sont hommes comme les autres.

804. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre VII. Suite du précédent. — Paul et Virginie. »

Il eût été absurde de faire mourir une Grecque, pour ne vouloir pas dépouiller ses vêtements.

805. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Lettre a monseigneur le duc de**. » pp. -

Vous savez, d’ailleurs, que nous sommes assez riches de nous-mêmes, pour pouvoir nous passer des richesses des Grecs & des Latins.

806. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 50, de la sculpture, du talent qu’elle demande, et de l’art des bas-reliefs » pp. 492-498

Nous ne voïons pas du moins dans les morceaux de la sculpture grecque ou romaine qui nous sont restez, que l’art des bas-reliefs ait été bien connu des anciens.

807. (1884) Cours de philosophie fait au Lycée de Sens en 1883-1884

[en grec dans le texte], comme dit Aristote. […] L’exemple [mot grec] donc mal choisi. […] Le plaisir de l’être c’est son action propre, [Phrase en grec]. […] De là un certain nombre d’inclinations que l’on caractériserait bien par le mot grec [en grec dans le texte]. […] Le [mot grec] ne fait, dit-il, que réfléchir le monde des idées.

808. (1902) Le chemin de velours. Nouvelles dissociations d’idées

Un dramaturge athénien, si son œuvre était bafouée par le peuple, à quelle époque de la civilisation grecque eut-il l’audace d’en appeler à la postérité ? […] Les Grecs n’ont pas été moins maltraités. Antoine avait fait cadeau à Cléopâtre de la bibliothèque de Pergame, qui se composait de deux cent mille ouvrages grecs à un seul exemplaire  : la littérature grecque, dans l’édition Didot, tient en soixante et un volumes ; on y ajoutera, sans beaucoup grossir le nombre des feuillets, tel traité d’Aristote, Hérondas, Bacchylide. […] Par sa persévérance à demeurer purement sexuelle, la statuaire grecque s’est mise pour l’éternité au-dessus de toutes les discussions. […] Elle est si étrangère à l’esprit grec, que pas plus en grec qu’en latin il n’y a de mot pour l’exprimer.

809. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DE LA MÉDÉE D’APOLLONIUS. » pp. 359-406

L’antiquité latine, plus rapprochée de nous que la grecque, nous est dès longtemps plus familière ; c’est sur elle que tombent d’abord les regards, et qu’aussi, à mesure qu’on s’éloigne, on a plus de facilité pour se reporter. […] Les Argonautes, dans les derniers jours de leur navigation, ont par bonheur rencontré de jeunes princes petits-fils d’Éétès et fils d’une de ses filles, lesquels, de leur côté, étaient partis un peu aventureusement pour aller en Grèce, car ils sont Grecs par leur père Phrixus ; avec le secours de ces auxiliaires précieux qu’ils ont sauvés du naufrage et qu’ils ramènent avec eux, les héros et Jason, leur chef, espèrent s’insinuer auprès d’Éétès et trouver jour à leur entreprise. […] Qu’il aille parmi son peuple bien loin faire sa cour à quelque jeune fille grecque ; mais qu’à nous la virginité et la maison de nos parents soient toujours chères ! […] En toute cette partie si dramatique, le poëte grec est presque l’égal de Virgile, et il a été l’un de ses modèles.

810. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

« Pouvoir se passer des Grecs dans l’étude de la philosophie sera sans doute glorieux pour les Romains : eh bien ! […] Une telle vie est la route qui te conduira au ciel et dans l’assemblée de ceux qui ont vécu, et qui, maintenant délivrés du corps, habitent le lieu que tu vois………………………………… « Mon père me montrait ce cercle qui brille par son éclatante blancheur au milieu de tous les feux célestes, et que vous appelez, d’une expression empruntée aux Grecs, la Voie lactée. […] Cependant, comme j’ai toujours, à mon grand profit, réuni les lettres grecques aux lettres latines, non seulement en philosophie, mais dans l’exercice de l’art oratoire, je crois que vous ferez bien de suivre la même méthode, pour en venir à posséder les deux langues avec une égale perfection. […] Grâce à mes travaux, ceux qui sont étrangers aux lettres grecques, même ceux à qui elles étaient familières, pensent avoir fait beaucoup de profit et dans l’art de la parole et dans la sagesse.

811. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — I. » pp. 381-397

Les chartes et traités ayant été dressés et scellés, on les apporta en cérémonie devant le doge, en présence du grand et du petit Conseil ; le doge, en les délivrant aux députés, s’agenouilla en pleurant derechef, et jura sur les saints Évangiles qu’il en observerait de bonne foi toutes les conditions ; ce que jurèrent également les membres des Conseils, puis les députés contractants : « Sachez, dit Villehardouin, que là y eut mainte larme plorée de pitié. » Nous avons déjà fait cette remarque à propos de Joinville ; ces pleurs naïfs et d’hommes naturels émus reviennent sans cesse chez ces historiens primitifs, comme chez Homère : « Il versa des larmes fraîches », est-il dit bien souvent d’un héros grec ou troyen dans l’Iliade ou dans l’Odyssée. […] Daru, que cette quatrième croisade n’eut guère pour résultat définitif que d’agrandir la suprématie maritime de Venise : « Le reste de l’Europe y perdit beaucoup de vaillants hommes et de monuments précieux, et n’y gagna que l’introduction de la culture du millet, dont le marquis de Montferrat envoya des graines en Italie. » S’il était vrai que la prise de Constantinople par les croisés et le sac de cette ville eussent fait périr, comme il est trop probable, des monuments de l’ancienne littérature grecque qui avaient échappé précédemment, il faudrait, nous les lettrés et les disciples des doctes, le déplorer avec regret, avec amertume : mais vouloir que toute une époque soit heureuse de la manière dont nous l’entendons, et que les chevaliers du siècle de Villehardouin conçoivent l’emploi de leurs facultés et de leur temps comme les hommes de cabinet de nos jours, c’est demander beaucoup trop.

812. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — I. » pp. 180-197

Son nez, presque droit, mince, délicatement sculpté, entre la mollesse grecque et l’énergie romaine, n’était ni relevé par l’impudence, ni abaissé par la pesanteur des sens. […] Et sans refuser la louange que méritent certains traits ingénieux et fins de ce portrait, je me permettrai de demander plus sérieusement : Est-il convenable, est-il bienséant de peindre ainsi Bossuet enfant, de caresser ainsi du pinceau, comme on ferait d’une danseuse grecque ou d’un bel enfant de l’aristocratie anglaise, celui qui ne cessa de grandir à l’ombre du temple, cet adolescent sérieux qui promettait le grand homme simple, tout esprit et toute parole ?

813. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Guillaume Favre de Genève ou l’étude pour l’étude » pp. 231-248

Le père de ce Marius, le célèbre François Philelphe, l’un des grands promoteurs et acteurs de la renaissance des lettres en Italie, et qui, pour mieux posséder le grec, alla étudier à Constantinople sous Jean Chrysoloras dont il épousa la fille, eût été un bien plus beau sujet ; mais il avait déjà été traité par Lancelot, de l’Académie des inscriptions. […] Favre énumère successivement ce que disaient de la sorte, de plus ou moins absurde et de controuvé, les Persans, les Turcs, les Grecs Alexandrins, les Byzantins, les Moldaves, les Arabes, etc.

814. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’Impératrice Catherine II. Écrits par elle-même. »

La condition première de son adoption par l’Impératrice de Russie était qu’il embrasserait le rit grec : il avait été élevé d’abord et baptisé dans le rit luthérien. […] « Il leur donnait des grades et des rangs, et les dégradait selon sa fantaisie. » Elle, à peine arrivée, elle se mit à se faire instruire dans la religion grecque et à apprendre le russe : les deux instruments essentiels pour réussir auprès de cette nation sur laquelle elle aspirait à régner.

815. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Halévy, secrétaire perpétuel. »

Quel dommage, encore une fois, qu’ayant à parler parmi des gens aussi susceptibles et légers que ceux d’Athènes, ce Grec de la grande époque, mais de mauvaise humeur, ait non-seulement négligé de plaire, mais qu’il ait même affecté souvent de mécontenter ! […] Il savait l’allemand, l’italien, l’anglais, le latin ; une teinture de grec, un peu d’hébreu.

816. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les Saints Évangiles, traduction par Le Maistre de Saci. Paris, Imprimerie Impériale, 1862 »

Ceux qui ont transmis les paroles du maître, à commencer par saint Matthieu le publicain, l’apôtre de la onzième heure, n’étaient pas des écrivains de profession ; il convenait même au rôle qu’ils remplissaient qu’ils ne le fussent pas, qu’ils n’eussent rien de la rhétorique ni de l’art des Grecs. […] La lecture de ce Mémoire dans son entier est dure, hérissée de grec, de termes techniques à dévorer et à digérer ; mais on y profita.

817. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite et fin.) »

Ses premiers vers imprimés sont de 1825 : les Grecs, dithyrambes (anonyme), 1825, suivis bientôt des Athéniennes, vendues au profit des Grecs, 1827.

818. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre III. Théorie de la fable poétique »

Achille n’est pas seulement la force héroïque : c’est le jeune fils d’une déesse, le plus beau des Grecs, qui, outragé, pleure comme un enfant dans le sein de sa mère ; qui sur la grève solitaire chante avec la lyre en contemplant la mer immense ; qui console son ami affligé avec un accent aussi tendre et aussi ému que celui d’une jeune mère : « Pourquoi pleures-tu, Patrocle, comme une enfant qui ne sait pas encore parler, qui court après sa mère afin qu’on la prenne, la tire par sa robe, et l’arrête, et la regarde en pleurant pour être portée dans ses bras ?  […] Les unes, lourdes, doctes, sentencieuses, vont, lentement et d’un pas régulier se ranger au bout de la morale d’Aristote, pour y reposer sous la garde d’Esope. — Les autres, enfantines, naïves et traînantes, bégayent et babillent d’un ton monotone dans les conteurs inconnus du moyen âge. — Les autres, enfin, légères, ailées, poétiques, s’envolent, comme cet essaim d’abeilles qui s’arrêta sur la bouche de Platon endormi, et qu’un Grec aurait vu se poser sur les lèvres souriantes de La Fontaine.

819. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Il a essayé, selon ses propres paroles, « de civiliser la doctrine en la dépaysant des collèges et la délivrant des mains des Pédants290 » ; à ceux qui n’étaient pas des savants, et ne lisaient latin ni grec, aux femmes, il a offert la substance de l’antiquité. […] Le soin de la forme, l’idée de la beauté furent maintenus par le respect des modèles grecs ou romains : grâce à cette influence, la littérature resta un art : et l’idée d’une vérité artistique, concrète et sensible, l’idée du vrai naturel et réel se superposa à l’idée de la vérité scientifique, nécessairement abstraite.

820. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Légendes françaises. Rabelais par M. Eugène Noël. (1850.) » pp. 1-18

Le caractère tout nouveau de cette éducation est dans le mélange du jeu et de l’étude, dans ce soin de s’instruire de chaque matière en s’en servant, de faire aller de pair les livres et les choses de la vie, la théorie et la pratique, le corps et l’esprit, la gymnastique et la musique, comme chez les Grecs, mais sans se modeler avec idolâtrie sur le passé, et en ayant égard sans cesse au temps présent et à l’avenir. […] Je me suis demandé quelquefois ce qu’aurait pu être Molière érudit, docteur, affublé de grec et de latin, Molière médecin (figurez-vous donc le miracle !)

821. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre II. Marche progressive de l’esprit humain » pp. 41-66

M. de Bougainville dit fort bien que la Grèce est en petit l’univers, et que l’histoire grecque est un excellent précis de l’histoire universelle. […] Les conquêtes d’Alexandre furent un torrent qui ne fit que passer ; toutefois elles répandirent au loin la connaissance de la langue grecque, destinée à servir d’organe aux premiers apôtres de la vérité, aux premiers martyrs de la foi chrétienne, comme elle avait servi auparavant à préparer, par la culture des lettres, et par des doctrines morales, un grand nombre de nations barbares à recevoir la semence de la parole.

822. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Seconde partie. Nouvelles preuves que la société a été imposée à l’homme » pp. 243-267

En grec et en latin le mot fable signifie parole. […] Trois grands hommes sont morts la même année, et ont laissé chacun un nom immortel, qui se rattache à un ordre différent d’idées : le dernier des Grecs, Philopœmen, enveloppé dans la gloire du guerrier qui défend ses foyers ; Scipion, qui venait de donner aux Romains le sceptre de la domination universelle ; et le plus grand des hommes de guerre qui ait jamais paru, Annibal, survivant, au sein de l’exil, à une patrie qu’il ne peut sauver.

823. (1874) Premiers lundis. Tome I « Œuvres de Rabaut-Saint-Étienne. précédées d’une notice sur sa vie, par M. Collin de Plancy. »

Il ne jugeait pas néanmoins impossible de ressaisir le sens naturel, physique, astronomique de ces traditions que les Grecs n’avaient pas comprises, et l’on sent qu’il y avait dans cette idée un fond de vérité suffisant pour la construction d’un roman ingénieux et agréable.

824. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. de Ségur. Mémoires, souvenirs et anecdotes. Tome II. »

M. de Ségur le mettait adroitement sur son sujet favori, qui était l’origine et les causes du schisme grec, et l’entendant patiemment discourir pendant des heures entières sur les conciles œcuméniques, faisait chaque jour de nouveaux progrès dans sa confiance.

825. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre premier. Idée générale de la seconde Partie » pp. 406-413

Les nouveaux progrès littéraires et philosophiques que je me propose d’indiquer, continueront le développement du système de perfectibilité dont j’ai tracé la marche depuis les Grecs.

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