Mardi 17 janvier Enfin, Dieu merci, c’est fini, des répétitions, des représentations… Quel retour hier ! […] Villard m’entretenait d’un voyage qu’il avait fait en Norvège, où il était tombé dans une verrerie, qui était une colonie française, réfugiée là, à la suite de la révocation de l’édit de Nantes, ayant conservé très reconnaissable le type français, mais n’ayant gardé de leur ancienne langue, que le mot « Sacré nom de Dieu ».
Ordres et défenses, quand le devoir est clair, simple permission dans le cas contraire, sentiment dramatisé du démérite, aucun phénomène moral ne manque au tableau, si ce n’est peut-être le moins moral de tous, le sentiment du mérite, la satisfaction du devoir accompli ; encore peut-on le voir dissimulé sous une forme discrète, la seule qu’admette une conscience scrupuleuse, dans la promesse du secours de Dieu et dans l’annonce du succès final. […] Ainsi, dans la Bible, la prière d’Anne, la femme stérile, qui, « le cœur plein d’amertume », demande un fils à Dieu, scandalise tout d’abord le sacrificateur Héli : « Il observait le mouvement de ses lèvres ; elle parlait en son cœur ; elle ne faisait que remuer ses lèvres, et l’on n’entendait point sa voix.
Elle fuit en pleurant son étrange démence ; Son voile jaune s’enfle au vent du matin bleu, Et ses yeux sont remplis de la terreur immense D’avoir vu cet amour… qu’elle croyait un Dieu ! […] Dans ces communions pourtant je reste femme Et ma douceur sourit ; peut-être je suis Dieu, De me trouver ainsi tout entière en tout lieu, D’être une et d’être mille avec des yeux sans nombre… Mais, davantage encore : elle est toute la nature, et sa poésie sera une vivification de la formule de Schopenhauer : « Le monde est ma représentation. » Une autre pensée pèse sur elle : on est en prison sur la terre ; jamais on ne pourra s’en évader que pour mourir. […] Son immoralisme consiste à vouloir redresser cette morale faussée et restituer à la vie son importance en soi au lieu de la plier à une vérité abstraite, Dieu ou Raison.
Dieu merci ! […] Puis le professeur s’est fait journaliste, et Dieu ou le diable sait avec quel entrain il a fait voler sa toque par-dessus les moulins de Montmartre. […] « Dieu sait, dit-il quelque part, que je ne suis pas suspect d’une dévotion exagérée aux règles », et il faut avouer que le fait d’applaudir des œuvres si diverses n’est point l’indice d’un fanatique. […] Non, il ne se résigne pas à ignorer l’origine et la fin des êtres ; il se révolte contre « ce point d’interrogation pour toujours posé sur l’horizon », et alors, devant ce mystère éternel, il est pris, comme une âme endolorie de femme, d’une poignante nostalgie de la foi religieuse ; il ne sait que croire, mais il voudrait croire ; il adorerait volontiers une figure voilée ; il est près de plier les genoux devant un Dieu inconnu ; parfois même il revoit dans les souvenirs de sa pieuse enfance « la pâle figure du Crucifié » ; peu s’en faut qu’il ne dise pour son compte la prière qu’à la fin de son dernier roman il met sur les lèvres du vieux philosophe Adrien Sixte : « Notre Père, qui êtes aux cieux. » Comme ce mysticisme intermittent, la pitié est chez M. […] Veut-il peindre la solitude de l’âme privée de sa croyance en un Dieu consolateur ?
Il en voulait probablement à saint Labre et tenait en suspicion les couvents, lui, à qui j’entendis redire, plus tard, bien souvent, qu’il ne pouvait comprendre les religieux… « qui se réunissent pour puer de compagnie, en l’honneur d’un Dieu qui a créé dix mille espèces de parfums… » La mère Marie-Jésus était là, derrière le grillage ; elle chuchotait, de sa voix mielleuse et, à cause de la présence d’un homme, son voile baissé ne laissait voir que son menton fin et pointu et un peu de sa bouche mince. […] Elle riait, sûre de son bonheur, fière de se donner à Dieu, sans avoir eu ni déceptions ni tristesses, et à mesure que le jour de sa prise d’habit approchait, sa joie rayonnait de plus en plus. […] Cette architecture maussade a l’avantage de ne pas distraire les âmes qui doivent être abîmées en Dieu. […] Tâchez de ne pas entendre ses cris et ses imprécations ; la malheureuse est folle ; au moment de paraître devant Dieu, elle profère d’épouvantables blasphèmes et des malédictions monstrueuses. […] Priez Dieu qu’il la délivre et lui fasse miséricorde !
Dieu a de nouveau prévenu Noé. […] Entre Dieu et lui, il n’admet plus d’intermédiaire. […] Pour prêcher la parole de Dieu, il emploie tous les artifices du diable. […] » et « Dieu ! […] Parfois, et Dieu aidant, elle peut être la source de généreuses aspirations et nous mettre sur le chemin du bien.
Dieu envoie son Fils pour ramener la vérité dans le monde ; ses apôtres la prêchent ; mais elle est bientôt altérée par les équivoques d’un mot, d’une syllabe, d’une lettre : de là l’Arianisme et tant d’autres hérésies… » Marais était un homme de sens et, qui plus est, de goût.
Mais c’est par la doctrine de charité, d’amour de Dieu, et non par l’esprit de secte, qu’il communique de ce côté.
Lorsque Dieu forma le cœur et les entrailles de l’homme, il mit premièrement la bonté, comme propre caractère de la nature divine, et pour être comme la marque de cette main bienfaisante dont nous sortons.
Ils doivent à un seigneur un franchard (42 livres) de froment et trois poulets, à un autre trois franchards d’avoine, un poulet et un sou, à quoi il faut joindre la taille et les autres impôts. « Dieu nous vienne en aide, disait-elle, car les tailles et les droits nous écrasent !
Dieu même, si tant est qu’il est juge, ne peut le faire que selon sa nature, et préférer le bien au mal, n’est-ce pas déjà de la partialité ?
Tel qu’un cadavre, j’étais gisant dans le désert, et la voix de Dieu m’appela : Lève-toi, prophète, vois, écoute, et parcourant et les mers et les terres, brûle par la Parole les cœurs des humains. » 1.
On m’a dit qu’à l’article Cependant, par exemple, il y avait deux traits, l’un contre Dieu, l’autre contre moi.
Le poète ne donnait à son ami que des conseils de paresseux et de sage, et Bussy y substitue des conseils chrétiens ; là où Racan avait dit : Qu’Amour soit désormais la fin de nos désirs ; Car pour eux seulement les Dieux ont fait la gloire, Et pour nous les plaisirs ; Bussy, dans sa version corrigée et tout édifiante, suppose qu’il faut lire : Que Dieu soit désormais l’objet de nos désirs ; Il forma les mortels pour jouir de sa gloire, Et non pas des plaisirs.
Arrachez mon cœur et mangez-le ; vous deviendrez ce que vous n’êtes point : grands… Ô Dieu !
Elle est humaine et nous la croyons Dieu.
— la filiation d’un Pouyer-Quertier, descendant d’un ouvrier tisseur… Cela m’amusera, de l’écrire en dialogues, avec des mises en scène très détaillées… Puis mon grand roman sur l’Empire… Mais avant tout, mon vieux, j’ai besoin de me débarrasser d’une chose qui m’obsède, oui, nom de Dieu, qui m’obsède !
Les Payens & quelques enthousiastes féroces représentent Dieu comme un tyran cruel.
Ainsi : la condition imposée à un passager transporté par un génie de ne pas prononcer le nom de Dieu (Conte des calenders.
On n’appelle « Dieu » l’homme qu’on aime que parce qu’on sait bien qu’il ne l’est pas… Vérifiez.
Schiller, qui par la suite devait tomber au champ d’honneur, écrivait de la caserne deux lettres (publiées dans la Lanterne du 8 octobre 1916, sous ce titre : Ceux de l’école sans Dieu).
Leur Dieu est là, dans les églises : d’un côté, le Christ en croix, sanglant, avec la peau terreuse des suppliciés ; de l’autre, la Vierge avec les dentelles et les pierreries des reines. […] De par la force des choses et de par la volonté de Dieu, il a une « mission historique » et cette mission il la remplit. […] Dieu mieux, il connaît le plus souvent les familles, la parenté, les tenants et les aboutissants, et c’est là-dessus qu’il juge. […] Je dois à Dieu et à mon nom d’être le plus honnête homme que je pourrai. […] Dieu me fit l’insigne faveur de remarquer une erreur dans les jours et les dates, erreur dont personne ne s’était aperçu.
Mais le Conte d’hiver finit bien. « C’était un rêve », comme on dit aux enfants à la fin des histoires terribles, et Dieu n’a pas voulu laisser de trop grandes injustices s’accomplir. […] Or le croyant qui met son amour en Dieu, c’est-à-dire dans l’inaccessible, doit trouver les joies de la réalité souvent faibles, même quand il a perdu la foi, puisque, hélas ! […] Pas de religion : et Dieu seul aurait pu être la vivante unité de cette existence. […] Le verbe est mystérieux par ses appels, pierre de diamant lancée dans un lac d’or fluide, aux cercles infinis et prophétiques ; Victor Hugo l’a dit de sa manière saisissante et brève : Dans Virgile, parfois, Dieu tout près d’être un ange, Le vers porte à sa cime une lueur étrange.
Quintilien prodigue à l’odieux despote de Rome les plus vils éloges ; non seulement il en fait un Dieu, il le loue même d’être un grand poète, ce qui devait coûter davantage à sa conscience de critique ; il le félicite aussi d’avoir banni les philosophes ; il s’indigne que ces hommes se soient crus plus sages que les empereurs, et les accuse dans les mêmes termes, dont les délateurs s’étaient servis contre Thraséas. […] « Quels ennemis sont ces hommes, dit l’évêque, qui veulent écarter du peuple les Écritures de Dieu, l’arme la plus puissante que le Christ ait ici-bas laissée pour sauver les âmes de l’enfer, et qui les jettent ainsi tête baissée dans le domaine infernal ? […] Dans ce testament fait au nom de Dieu, il déclare d’abord qu’espérant et croyant avec certitude participer à la vie éternelle, par les seuls mérites de Jésus-Christ son sauveur, il confie son âme aux mains de Dieu son créateur, et son corps à la terre, d’où il est formé ; puis il dispose, en bon gentilhomme anglais, de son bien, assez considérable pour le temps. […] Les anges révoltés tirant du canon dans le ciel, Dieu prenant un compas pour circonscrire l’univers, les diables changés en serpents pour siffler leur chef, sont des inventions plus capricieuses que grandes. On ne peut nier non plus que Milton ne soit médiocrement inspiré dans le langage qu’il prête à Dieu, et qu’il ne le fasse souvent dogmatiser en théologien.
Il est entre Dieu et le monde, et sert l’un au profit de l’autre. […] Michelet rêva trop la Cité des hommes pour souffrir qu’on la subordonnât à la Cité de Dieu. […] La Fin de Satan ou Dieu font illusion à distance ; de près, on ne s’y trompe pas. […] Il a pour devise : Dieu et mon droit. […] Rome remplaçait Sparte ; / Déjà Napoléon perçait sous Bonaparte ») que Hugo évoque son âme de poète en ces termes : « Mon âme aux mille voix que le Dieu que j’adore / Mit au centre de tout comme un écho sonore ».
Non seulement ils se disputaient entre eux, mais encore ils s’occupaient sans cesse (et Dieu sait avec quelle incompétence) de ce qui ne les regardait pas. […] … Que Dieu me bannisse plutôt de France, que de m’y faire rentrer par le secours des étrangers ! […] Ce journal contenait un décret impérial, ainsi conçu : Napoléon, par la grâce de Dieu et les Constitutions, empereur des Français, roi d’Italie, protecteur de la Confédération du Rhin, médiateur de la Confédération suisse, etc., etc., etc. […] … ……………………………………………………… Ce champ sinistre, où Dieu mêla tant de néants, Tremble encore d’avoir vu la fuite des géants ! […] Les jolies inventions de l’exotisme littéraire vieillissent vite, parce que, Dieu merci !
C’est comme un Dieu mélancolique du commandement. […] * * * — Jamais un homme, si riche qu’il soit, n’achètera un bel enfant, une belle petite fille, pour avoir sous les yeux un chef-d’œuvre de nature, de l’art de Dieu.
Notez encore que Dickens a trouvé çà et là d’inoubliables accents de détresse, des cris d’appel vers la justice de Dieu, que la pitié légère et un peu méprisante de Daudet ne pouvait connaître. […] Bumble, s’est vu enfin seul, abandonné à lui-même dans la boutique morne et silencieuse du croque-mort, « il tomba à genoux sur le plancher, écrit Dickens, et, cachant son visage dans ses mains, il versa de telles larmes qu’il faut souhaiter pour l’honneur de la nature que Dieu veuille en faire rarement répandre de semblables à des enfants de cet âge ! […] Si vous voulez bien, nous le renverrons là-dessus à notre amie Gyp, qui n’est point une idéaliste, Dieu sait ! […] Dieu sait le revirement qui suivit cette exécution !
Ma confiance dans la parfaite bonté de Dieu, comme en sa justice, s’affermit tous les jours.
» L’A est, selon Dupleix, une lettre incomparablement plus noble, plus mâle, et il en donnait, entre autres, cette raison superlative : « Le langage des premiers hommes, qui fut inspiré de Dieu à Adam, en fait preuve, puisque ce même grand-père de tous les hommes a son nom composé de deux syllabes avec A, et Abraham, le père des croyants, de trois syllabes aussi en A.
S’il y avait encore de nos jours quelque similitude éloignée de situation où (ce qu’à Dieu ne plaise !)
Il a fait plus que de montrer au doigt le courtisan, qui autrefois portait ses cheveux, en perruque désormais, l’habit serré et le bas uni, parce qu’il est dévot ; il a fait plus que de dénoncer à l’avance les représailles impies de la Régence, par le trait ineffaçable : Un dévot est celui qui sous un roi athée serait athée ; il a adressé à Louis XIV même ce conseil direct, à peine voilé en éloge : « C’est une chose délicate à un prince religieux de réformer la cour et de la rendre pieuse ; instruit jusques où le courtisan veut lui plaire et aux dépens de quoi il feroit sa fortune, il le ménage avec prudence ; il tolère, il dissimule, de peur de le jeter dans l’hypocrisie ou le sacrilége ; il attend plus de Dieu et du temps que de son zèle et de son industrie. » Malgré ses dialogues sur le quiétisme, malgré quelques mots qu’on regrette de lire sur la révocation de l’édit de Nantes, et quelque endroit favorable à la magie, je serais tenté plutôt de soupçonner La Bruyère de liberté d’esprit que du contraire.
Que si le soin public lui laissoit du loisir, Il ne l’employoit point en un plus doux plaisir Qu’en celui que le fruit d’une étude si sainte Fait savourer aux cœurs où Dieu grave sa crainte.
A qui croit-on, par exemple, qu’il fasse allusion dans les lignes qui suivent : « Et ici, Ménandre, avant que de passer outre, admirons ensemble les moyens dont Dieu se sert pour procurer le repos du monde, et le soin qu’il a de trouver quelquefois le bien public dans le malheur des particuliers.
A voir de quelle hauteur le premier regarde les choses, on pourrait croire qu’il n’aperçoit rien sur la terre qui soit digne d’admiration, sinon ce qu’il appelle le dessein de Dieu dans les choses humaines.
Elle est traduite devant une cour de justice féodale, qui la condamne à subir le Jugement de Dieu.
En la piété de sa fière songerie, il y avait placé le joyau du divin sacrifice, une relique merveilleuse, deux lois sanctifiée : il avait voulu que la coupe où s’épandit le sang invisible du Christ, par l’immolation des paroles prononcées à la Cène, fût aussi le précieux vase où Joseph d’Arimathie recueillit le sang visible du Dieu mort sur la croix.
Et l’objection se fonde moins encore sur les objets de sa recherche, Dieu, la liberté, la causalité, etc., que sur sa méthode, qui, soustraite à la vérification, est par là en dehors de la science.
Ses discours sur la nature et ses Époques sont d’un naturaliste qui se passe aisément de Dieu.
— Nous sommes loin de l’époque où Reid, après s’être posé ce grand problème, concluait qu’il faut renoncer à expliquer la merveille : « C’est qu’il a plu à Dieu, disait-il, de nous donner la connaissance directe et immédiate du passé. » Avec ce miracle trop opportun, Reid admettait une contradiction dans les termes.
Transformées en vérités universelles, elles se sont réclamées, selon la maturité de l’esprit humain, de Dieu ou de la raison.
Je suis prêt à tout subir, à tout affronter, à n’accepter aucune compromission, à aller en prison, à perdre la considération bourgeoise et tout, mais, sacré nom de Dieu, je ne puis empêcher mon cœur d’avoir les battements de la peur d’une femme.
Elles servent à Dieu, à ses saints, au diable, — ou au loup ; les Arabes disent : ou au chacal ; elles servent aux animaux que nous ne voyons pas manger et qui vivent ; elles servent aux êtres surnaturels qui descendent pendant les nuits claires et à ceux qui rôdent pendant les nuits sans lune.
mon Dieu, Messieurs, taisez-vous ; quand Dieu ne vous a pas donné la connaissance d’une chose, n’apprêtez pas à rire à ceux qui vous entendent parler, et songez qu’en ne disant mot, on croira peut-être que vous êtes d’habiles gens !
Un jour il écrivit, Dieu merci, car le renseignement est admirable pour nous, il écrivit ceci à Mme Herwart, touchant La Fontaine : Je voudrais bien le voir aussi Dans ces charmants détours que votre parc enserre, Parler de paix, parler de guerre, Parler de vers, de vin et d’amoureux soucis, Former de vingt projets le plan imaginaire, Changer à sa façon l’ordre de l’univers, Sans douter, proposer mille doutes divers ; Puis tout seul s’écarter, comme il fait d’ordinaire, Non pour rêver à vous qui rêvez tant à lui, Non pour rêver à quelque affaire, Mais pour varier son ennui.
Dieu seul sait la distance entre nous, Seul il sait quels degrés de l’échelle de l’être Séparent ton instinct de l’âme de ton maître ; Mais seul il sait aussi, par quel secret rapport.
Dieu merci !
Goethe, Poésies : Dieu et le Monde.
« Ni gesticulations, ni cris, ni horreurs, ni trop de larmes… Le Christ est une des plus élégantes figures que Rubens ait imaginées pour peindre un Dieu… Vous n’avez pas oublié l’effet de ce grand corps un peu déhanché, dont la petite tête, maigre et fine, est tombée de côté, si livide et si parfaitement limpide en sa pâleur, ni crispé, ni grimaçant, d’où toute douleur a disparu, et qui descend avec tant de béatitude, pour s’y reposer un moment, dans les étranges beautés de la mort des justes.
Mais ce que je veux établir, et ce qui le caractérise entre ses contemporains de génie, c’est qu’habituellement il a vu la nature humaine en elle-même, dans sa généralité de tous les temps, comme Boileau, comme La Bruyère l’ont vue et peinte souvent, je le sais, mais sans mélange, lui, d’épître sur l’Amour de Dieu, comme Boileau, ou de discussion sur le quiétisme comme La Bruyère2. […] C’est lui qui, dans la scène du Pauvre, a pu faire dire à don Juan, sans penser à mal, ce mot qu’il lui fallut retirer, tant il souleva d’orages : « Tu passes ta vie à prier Dieu, et tu meurs de faim ; prends cet argent, je te le donne pour l’amour de l’humanité. » La bienfaisance et la philanthropie du xviiie siècle, celle de d’Alembert, de Diderot, de d’Holbach, se retrouve tout entière dans ce mot-là.
J’ai voulu non seulement être lucide, mais encore ôter aux gens de mauvaise foi l’occasion de s’écrier : Grand Dieu ! […] Un assassin, qui arrivait déguisé en prêtre, jure et maudit Dieu de ne pouvoir gagner le million promis.
Il fut le Dieu tutélaire des Savans, qu’il aima, qu’il encouragea, & qu’il protégea toujours. […] « L’an 1437, lorsque Conrad Bayer, Evêque de Metz, fit exécuter le Mystère de la Passion en la Plaine de Veximiel près cette Ville, fut Dieu un Sire, appelé Seigneur Nicolle Don Neufchatel en Touraine, lequel étoit Curé de Saint Victour de Metz, lequel fut presque mort en la croix, s’il n’avoit été secouru, & convint que un autre Prêtre fût mis en la croix pour parfaire le personnage du crucifiement, & le lendemain ledit Curé de Saint Victour parfit la résurrection, & fit très-hautement son personnage….
» Mais Dieu merci, voilà qu’au troisième acte, la pièce se relève, et que la qualité de la pièce et le jeu de Tessandier, font éclater les applaudissements dans les derniers tableaux. […] il ne veut plus de Dieu, plus de religion, et vient-il de débondieuser le Christ, il bondieuse Hugo et proclame l’hugolâtrie.
Il nous montre le monde sortant des mains de Dieu par un effet de sa Toute-puissance ; l’homme né pour être juste & heureux, frappé de malédiction ; son Libérateur promis & annoncé dans tous les siécles aux Patriarches & aux Prophêtes ; sa venue dans ce monde au tems marqué ; sa Religion prêchée & reçue dans tout l’univers ; les Empires qui s’élévent & qui tombent successivement. […] L’auteur tient un milieu entre le fanatisme qui avoit dégradé Julien au-dessous de l’homme & l’enthousiasme qui en avoit voulu faire un Dieu.
Les fidèles qui se réunissent pour écouter la parole de Dieu savent par avance qu’ils sont des abîmes d’iniquités, des monstres de luxure, et que le tonnerre de l’éloquence sacrée va éclater sur leurs têtes. […] À Dieu ne plaise ! […] Dieu sait si c’était mal joué ! […] — Moi, point ; à Dieu ne plaise. […] C’est la situation, qui rend comiques et spirituels tous les mots de Toinette ; pour elle, elle n’y pensait pas, la bonne fille : elle n’était que gaie, telle que Dieu l’avait faite.
Quelquefois, en attachant mes yeux sur toi, j’allais jusqu’à former des désirs aussi insensés que coupables : tantôt j’aurais voulu être avec toi la seule créature vivante sur la terre ; tantôt, sentant une divinité qui m’arrêtait dans mes horribles transports, j’aurais désiré que cette divinité se fût anéantie, pourvu que, serrée dans tes bras, j’eusse roulé d’abîme en abîme avec les débris de Dieu et du monde !
J’atteste à Dieu et à vous, Monseigneur, que nous avons perdu plus d’un tiers de nos blés nains à la dernière récolte, parce que nous n’avions pas d’hommes pour travailler. » 708.
Quand le vieux Merlin des légendes traverse les forêts armoricaines, triste, désolé, voyant la science bardique déchoir et les anciennes croyances s’effacer devant une foi nouvelle, c’est l’oiseau qui lui crie, perdu en la profondeur des feuillages : « Merlin, Merlin, il n’y a d’autre dieu que Dieu. » S’inspirant du symbole, Wagner a fait de l’oiseau une « voix de la nature » : il lui a donné pour cela, légèrement modifiée, la mélodie que chantait Woglinde, la première fille du Rhin, su début de Rheingold.
Ce que femme veut, Dieu le veut.
Tandis que, délaissant la théorie du « Devenir » de Darwin (mais, sans doute, adéquatement à la hideuse morale pratique, n’arriveraient-ils qu’à l’erronée interprétation de Spencer), ils paraissent surtout séduits par l’idéalisme de Hégel, son éternel-devenir de Dieu, — pour ce qu’il n’est qu’un mode du panthéisme dont toute notre poésie se trouve imprégnée, en vague-à-l’âme… Or, des poètes qui eurent ainsi de tardives velléités de se rénover, des poètes nouveaux qui eurent la sensation d’être à de plus essentiels travaux, occultement astreints, nous n’avons saisi même le rêve stérile d’une personnelle destination de l’homme aux lois du monde : mais, au hasard des philosophies spiritualistes dont ils parurent s’inspirer, ni une œuvre, ni des livres en suite logique de poèmes.
est celle qui n’affirme l’absolu, — ou l’Inconnaissable — qu’autant qu’elle s’y est, pour ainsi dire, heurtée dans toutes les directions qu’elle a prises pour y échapper ; qui ne s’incline en quelque manière devant le mystère des choses qu’après avoir épuisé les moyens humains d’en éclairer la profondeur ; et qui ne se propose pas enfin, comme celle de Fichte, de créer de son fond, et vraiment du néant, ex nihilo, l’homme, et le monde, et Dieu, mais, plus modestement, de les reconnaître, et de les définir, dans la mesure de notre pouvoir.
« Malheur, écrit un éloquent historien des religions, malheur au savant qui aborde les choses de Dieu sans avoir au fond de sa conscience, dans l’arrière-couche indestructible de son être, là où dort l’âme des ancêtres, un sanctuaire inconnu d’où s’élève par instants un parfum d’encens, une ligne de psaume, un cri douloureux ou triomphal qu’enfant il a jeté vers le ciel à la suite de ses frères et qui le remet en communion soudaine avec les prophètes d’autrefois25 !