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1616. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Essai, sur, les études en Russie » pp. 419-428

Lorsqu’on jette les yeux sur les progrès de l’esprit humain depuis l’invention de l’imprimerie, après cette longue suite de siècles où il est resté enseveli dans les plus profondes ténèbres, on remarque d’abord, qu’après la renaissance des lettres en Italie, la bonne culture, les meilleures écoles se sont établies dans les pays protestants, de préférence aux pays qui ont conservé la religion romaine, et qu’elles y ont fait jusqu’à ce jour les progrès les plus sensibles. […] Il ne restait à celui-ci, pour arrêter les progrès de cette tour, qui s’élevait à vue d’œil, et qui allait percer jusque dans son boudoir, que la ressource de la confusion des langues.

1617. (1899) Psychologie des titres (article de la Revue des Revues) pp. 595-606

Et quand il n’est pas de force à faire des trouvailles de noms, comme le Tartuffe, Gobseck, ou Monsieur Alphonse, qui ont fini par rester attachés à des classes d’individus tout entières, il fera mieux de renoncer à ce procédé. […] Celui de Marivaux est resté le plus célèbre.

1618. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

C’était un gros tempérament comme elle était une grosse beauté… Avec l’exorbitance de son orgueil, et de sa chevelure aux longs tire-bouchons effarés autour de son visage, elle devait se faire à elle-même l’effet de quelque Mirabeau, femme et poëte ; — mais pour tout le monde elle resta toujours une plébéienne de son port, une espèce de poissonnière ou d’écaillère superbe, qu’on se représente les poings aux hanches, l’œil allumé, la bouche ouverte à l’invective ; vomitoire jaillissant dont le malheureux d’Arpentigny avait senti l’éclaboussure ! […] On le savait bien, on croyait le savoir, Mais ce qu’on ne savait point, c’est que cette plume ne gratterait pas cette place ; c’est que madame Colet n’avait pas d’ongles pour la gratter ; c’est qu’elle resterait impuissante devant ces quelques brins d’herbe obstinés à reparaître ; et que ces titres à faire trembler pour ce qu’ils contiennent — les Derniers Abbés et les Derniers Marquis ne devaient être que deux impostures et deux bêtises, faites par le dernier des bas-bleus.

1619. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1870 » pp. 3-176

Sur ce lit, qui est resté tel qu’il était, quand Jules couchait à côté de moi, a été jetée, au grand matin, la lettre de Thierry, qui nous pressait de revenir, pour mettre Henriette Maréchal en répétition. […] Deux ou trois femmes, restées dans les boutiques de la grande allée, frissonnent aux coups de canon de l’exercice. […] L’homme de l’ambulance restait plein d’inquiétude pour son immeuble. […] Plus d’eau cascadante, et dans l’espèce de boue restée dans le bassin, des soldats, encastrés dans les anfractuosités du rocher, lavent leurs chemises sales. […] La proposition en resta là.

1620. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XLVIII » pp. 188-192

Il s’est jeté dans le moyen âge aujourd’hui à la mode ; il s’est appliqué à deux points : 1° à prouver que l’Imitation de Jésus-Christ est bien de Gerson, ce qui restera toujours très-douteux ; 2° à réhabiliter les vieux mystères ou pièces dramatiques de nos pères.

1621. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXI » pp. 281-285

De loin, à nous humbles esprits, il nous semble que, malgré tout, la partie n’est point perdue pour la cause des Lettres honnêtes et sévères, et que ce drapeau si bruyamment déployé par des spéculateurs intrépides peut au contraire servir de signal à tous les esprits modérés et sains, à tous les talents restés sérieux et dignes, pour s’unir, se serrer en groupe, et pour résister à un coup de main qui tend à changer ainsi de fond en comble le régime et les conditions vraies de la littérature.

1622. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XII. Du principal défaut qu’on reproche, en France, à la littérature du Nord » pp. 270-275

Les devoirs de la vertu, ce code de principes qui a pour appui le consentement unanime de tous les peuples, reçoit quelques légers changements, par les mœurs et les coutumes des nations diverses ; et quoique les premiers rapports restent les mêmes, le rang de telle ou telle vertu peut varier selon les habitudes et les gouvernements des peuples.

1623. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Objections d’un moraliste contre l’exposition de 1900. » pp. 162-167

Des milliers de pauvres gens, que l’Exposition aura attirés à Paris et momentanément occupés, y resteront quand il n’y aura plus de travail pour eux, et y grossiront l’armée des meurt-de-faim… D’autre part, une Exposition universelle, c’est le Chanaan des filles.

1624. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bouchor, Maurice (1855-1929) »

Malheureusement, la foi manquant, tout risque de rester stérile.

1625. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Racan, et Marie de Jars de Gournai. » pp. 165-171

Montaigne, cet homme unique pour dire naïvement & fortement des choses neuves & qui restent dans la mémoire, flatté de la préférence exclusive qu’une Minerve nouvelle donnoit à ses Essais, la combla d’éloges.

1626. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre VIII. La Fille. — Iphigénie. »

La pitié et la terreur s’appuient donc uniquement, dans cette situation, sur l’intérêt naturel ; et si vous pouviez retrancher la religion de la pièce, il est évident que l’effet théâtral resterait le même.

1627. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Lundberg » pp. 169-170

Tort ou raison, c’est la figure qu’il a peinte qui restera dans la mémoire des hommes à venir.

1628. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de l’Évangile » pp. 89-93

Or, Michelet sait bien, au fond de sa conscience d’historien (et les embarras de son livre, et le vague tourment de sa pensée dans les conclusions de ce livre, le prouvent avec éloquence), que ce n’est pas aux femmes de la Renaissance qu’une société qui fut chrétienne peut rester aujourd’hui sans périr !

1629. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Saint-Marc Girardin »

À cette époque, il est vrai, l’Amérique n’avait pas encore publié la Case de l’Oncle Tom, mais cet ouvrage, qui est moins un livre qu’autre chose, serait-il même un livre grand comme sa renommée, qu’un livre isolé ne prouve rien de plus que la force individuelle de celui qui l’a écrit, et la littérature américaine n’en resterait pas moins une littérature d’avortement, l’amas confus d’organes ébauchés qui ne constituent pas la vie.

1630. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Furetière »

C’est un romancier qui a placé et élargi la comédie dans le roman, mais qui n’en est pas moins resté sérieusement attaché à la vérité de l’art et à la vérité sociale.

1631. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre VII » pp. 278-283

Certainement, s’il ne restait pas plus de traces d’Homère que de la guerre de Troie, nous ne pourrions y voir, après tant de difficultés, qu’un être idéal, et non pas un homme.

1632. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

Restée veuve, sa mère l’éleva jusqu’à onze ans. […] Ses classes achevées, il entra dans les mousquetaires et il y resta jusqu’à leur suppression, en 1776. […] Si le paysan souhaite de rester paysan, le commerçant de rester commerçant, ils seront plus aptes à faire de leur fils, celui-ci un bon paysan, celui-là un bon commerçant. […] La nuit est belle sur la lagune, le poète veut sortir ; le romancier a ses feuilles blanches à noircir d’encre et demande à rester. […] La durée qui a précédé ce moment et celle qui le suit lui restent extérieures.

1633. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

Or, sa douceur resta inaltérable. […] Il resterait donc à la reprendre dans un esprit de foi ou tout au moins de religieuse sympathie. […] Guillaume Livet en avait ôté ; mais il en restait assez pour satisfaire les plus exigeants. […] Barbe-Bleue et Boulotte sont tels qu’il resterait d’eux quelque chose, que même presque tout en resterait, les bouffonneries ôtées. […] » Le vieil enfant, resté seul, lâche un gros juron.

1634. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Werther. Correspondance de Goethe et de Kestner, traduite par M. L. Poley » pp. 289-315

L’idylle resta pure. […] Le meilleur conseil, et à la fois le plus loyal et le plus éprouvé, est : Restez où vous êtes. […] Restez fidèlement et avec fermeté à votre place.

1635. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite et fin.) »

L’armée ne peut rester froide en présence de l’homme de génie qui a fait revivre, sous son pinceau magique, les fastes de notre gloire militaire : M.  […] « En arrivant, j’ai trouvé, comme vous me l’aviez dit, une lettre de vous datée du 9, mon cher Delaroche ; quoique vous ayant vu depuis, j’y réponds par la raison toute simple qu’elle traite des questions graves qu’il m’importe à mon tour de traiter de vous à moi ; car je veux et je dois vous ouvrir mon cœur tout entier, au risque de vous déplaire sous certains rapports, et peut-être de voir nos relations se refroidir de nouveau ; mais il est des circonstances où ce serait un crime de se taire, puisqu’il y va de votre bonheur à venir et de vous préserver du plus affreux de tous les malheurs, de cette douleur sans compensation de rester seul sur la terre ! […] France, tant que tu resteras France, un pays distinct et une patrie, ne répudie jamais tes enfants sincères, les plus naturels, les plus légitimes ; ne te laisse pas aller à en décourager la race en la dédaignant.

1636. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

Or la poésie française ne devait point en rester à Marot : elle avait la noble ambition de s’élever, de se créer un instrument plus savant, une harpe ou une lyre ; et, lorsqu’on songe à tout ce qu’il fallut de labeur et d’effort à Malherbe pour réussir à dresser quelques strophes incomparables, on devient indulgent pour ceux qui y préludèrent et qui, les premiers, essayèrent de quelques cordes nouvelles. […] Cet essai, resté inachevé, inaugure parmi nous la série moderne des Méditations historiques et poétiques sur les ruines de l’antique Rome. […] Mais toutes nos sympathies restent acquises au cœur du poète qui nous a révélé si à nu ses sentiments et livré sous forme de rimes ses confessions.

1637. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre III »

Construisaient-ils ses vaisseaux, réparaient-ils ses routes, vêtaient-ils ses soldats, ils restaient sans garanties de leurs avances, sans échéances pour le remboursement, réduits à calculer les chances d’un contrat avec les ministres comme celles d’un prêt fait à la grosse aventure. » On ne paye que si l’on peut et quand on peut, même les gens de la maison, les fournisseurs de la table, les serviteurs de la personne. […] Le public, toute la bourgeoisie indignée s’engagea à ne revenir au spectacle qu’après satisfaction, et en effet le théâtre resta vide pendant plusieurs mois, jusqu’à ce que Mme Barnave eût consenti à y reparaître. […] Affranchi du despotisme réel, le Tiers s’indigne contre le despotisme possible, et il croirait être esclave s’il consentait à rester sujet.

1638. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Il reconquit de même par le pardon et des bienfaits le frère de son assassin Maffei de Voltini ; le pape Sixte, auquel il avait renvoyé son neveu Riario, qui resta pâle toute sa vie par suite de sa terreur pendant l’exécution du crime, l’excommunia pour toute reconnaissance. […] » Pic de la Mirandole, le prodige lettré d’Italie, dans ses Mémoires, disait que le génie de Laurent était à la fois si énergique et si souple, qu’il paraissait avoir été formé pour triompher dans tous les genres. « Ce qui m’étonne surtout, ajoutait ce juge si compétent, c’est qu’au moment où il est le plus engagé dans les affaires de la république, il peut ramener l’entretien sur des sujets de littérature et de philosophie avec autant de liberté et de facilité que s’il était le maître de son temps comme de ses pensées. » Il écrivait des sonnets, restés classiques, et s’excusait en ces termes de se livrer à la poésie, crime illustre dont on l’accusait : « Il y a quelques personnes, dit-il, qui m’accuseront peut-être d’avoir perdu mon temps à écrire des vers et des commentaires sur des sujets amoureux, précisément lorsque j’étais plongé dans des occupations très-graves et très-multipliées. […] Il se fit tribun, au lieu de rester prédicateur.

1639. (1890) L’avenir de la science « VIII » p. 200

Mabillon, Muratori, Baluze, du Cange n’étaient pas de grands philosophes, et pourtant ils ont plus fait pour la vraie philosophie que tant d’esprits creux et systématiques qui ont voulu bâtir en l’air l’édifice des choses, et dont pas une syllabe ne restera parmi les acquisitions définitives. […] Si, au lieu de consumer leur vie sur de barbares traductions et des travaux de seconde main, les commentateurs scolastiques eussent appris le grec et lu dans leur texte Aristote, Platon, Alexandre d’Aphrodisias, le XVe siècle n’eût pas vu le combat de deux Aristote, l’un resté solitaire et oublié dans ses pages originales, l’autre créé artificiellement par des déviations successives et insensibles du texte primitif. […] Les visions pseudo-daniéliques sont à mes yeux le plus ancien essai de philosophie de l’histoire, et restent fort intéressantes à cet égard.

1640. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « II »

Espérons que, peu à peu, toute la ménagerie restera à la cantonnade. […] a ces mots, qui sonnaient étrangement dans le pays de Bach et de Beethoven, d’Haydn et de Mozart, de Weber et de Schumann, l’auditoire resta interloqué. » Il n’y a pas que l’auditoire qui soit resté interloqué.

1641. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur de Latouche. » pp. 474-502

La publication des Poésies d’André Chénier est le grand titre de M. de Latouche, le grand fait littéraire auquel restera attaché son nom. […] Ces lettres présenteraient donc le contraste singulier de deux hommes, dont l’un a été toujours malheureux, et, parce qu’il a été malheureux, est devenu pape, l’autre, toujours heureux, est resté Arlequin. […] Depuis ce jour, M. de Latouche se montra plus circonspect avec les nouveaux venus ; il eut des avances toutes particulières pour les jeunes talents, pour Musset, pour Gautier, pour Hégésippe Moreau ; il eut même des retours et des repentirs sur ses rancunes passées ; mais il était trop tard, sa réputation était faite et trop faite : l’écriteau lui resta.

1642. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

Par là, elles resteront éternellement populaires : elles demeureront de la vierge catholique, la représentation la plus claire, la plus générale, la plus accessible, la plus bourgeoisement hiératique, la mieux appropriée au goût d’art de la piété. […] Elle est toute blonde, et restée toute blanche sous le soleil noircisseur de la Brie. […] * * * — Tous ces temps-ci, détente complète de l’activité physique et morale ; une somnolence qui irait à des nuits de dix-huit heures ; — dans l’éveil les yeux paresseux à voir, à observer ; — notre regard, sans notre pensée, feuilletant les livres et se traînant de l’un à l’autre ; — un grand effroi de faire moins que rien ; — la tête vide et pourtant lourde ; — le sang comme envahi par la lymphe ; — un lâche ennui ; — le remuement de la cervelle et du corps aussi durs pour nous que pour l’aï, qui passe une journée à se dérouler de son arbre ; — un état de l’âme sur lequel tout passe sans la secouer : les distractions, l’orgie, les grattements de vanité. — C’est la maladie qui vient aux activités retraitées, aux têtes qui restent trop longtemps à se reposer, à nous qui, depuis cinq mois, ne vivons pas dans une œuvre et pour une idée.

1643. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre III. Le théâtre est l’Église du diable » pp. 113-135

En vain Ménandre, en vain Térence et Molière ont apporté à cette œuvre brutale, les élégances de leur génie et la politesse de leur esprit, l’œuvre en elle-même est restée une œuvre un peu au-dessous de la philosophie et de la morale la plus facile, c’est-à-dire une œuvre ouverte aux plus violentes et aux plus irrésistibles passions. […] — Et comme je restais à regarder cet étrange conseiller, bouche béante. — « Eh quoi ! […] Il a tort et grand tort de nommer en toutes lettres son ennemi Boursault, comme il aura tort, plus tard, de mettre l’abbé Cottin tout vif dans Les Femmes savantes ; il ne faut pas tuer les gens à coups de massue, un petit coup d’épingle, à la bonne heure ; et puis si vous tuez votre homme aujourd’hui que vous restera-t-il le lendemain ?

1644. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Μ. Ε. Renan » pp. 109-147

Il aurait mieux fait de rester obscur. […] Ernest Renan, l’adversaire du surnaturalisme en histoire, est resté jusque dans le volume des Origines du Christianisme qu’il a publié, sous le titre de : Marc-Aurèle ou la fin du monde antique, fidèle à l’idée qui a fait sa fortune. Il l’est resté malgré l’inconsistance d’un esprit que les faits contradictoires se renvoient dans leur incohérence parce qu’il n’a pas la puissance de les dominer.

1645. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Michelet » pp. 167-205

Que Montaigne doutât, il veut bien l’innocenter de son doute, mais Pascal, il le trouve coupable du sien, et il oublie Byron, qui écrivait : « Le doute est le nec plus ultra de la foi humaine », et Chateaubriand, qui ne doutait pas, et qui n’est probablement resté chrétien que par le sentiment de l’honneur, traitant de gentilhomme à Dieu ! […] À cette époque-là, tout le monde fut frappé, en lisant le très beau récit de Michelet (car il est très beau), de l’insistance curieuse et troublée avec laquelle l’historien s’arrêtait sur le secret qui devait rester entre la jeune fille et Dieu, sur le mystère humain du virginal Archange dont le sang de la femme n’a jamais, dit-on, terni la splendeur. […] … Et c’est de là, c’est de là qu’il est tombé, qu’il a roulé dans la physiologie, la physiologie qui doit dévorer ce qui lui restait de talent, de vie et de force, et qui ce jour-là a peut-être commencé !

1646. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’avenir du naturalisme »

Forcé par les circonstances ou par le tempérament à pratiquer la chasteté et la sobriété la plus stricte, il ne lui restait qu’une seule satisfaction permise, une orgie de vision. […] Après lui, la « Terre » et la « Joie de vivre » restent encore à décrire, car nous mettons désormais sous ces mots une plus riche compréhension. […] Quand bien même vos plus fortes œuvres, l’Assommoir, Germinal, la Terre, ne parleraient pas assez haut pour votre gloire (ce que je crois inadmissible), votre nom restera toujours synonyme d’une formidable prise de corps avec la réalité, d’une énorme poussée vitale.

1647. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre II. L’âme et le corps »

Il est vrai que du dedans serait venue la première impulsion, à la vision intérieure nous aurions demandé le principal éclaircissement ; et c’est pourquoi le problème resterait ce qu’il doit être, un problème de philosophie. […] Il n’est donc pas, à proprement parler, organe de pensée, ni de sentiment, ni de conscience ; mais il fait que conscience, sentiment et pensée restent tendus sur la vie réelle et par conséquent capables d’action efficace. […] La première méthode, pour avoir voulu nous apporter tout de suite la certitude, nous condamne à rester toujours dans le simple probable ou plutôt dans le pur possible, car il est rare qu’elle ne puisse pas servir à démontrer indifféremment deux thèses opposées, également cohérentes, également plausibles.

1648. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Il est certain que là où une division du travail rudimentaire ne différencie, dans la société, que trois ou quatre groupes fermés, à l’intérieur desquels les individus restent étroitement semblables, cette scission du tout en sections intrinsèquement homogènes ne saurait être favorable à l’égalitarisme. […] En ce sens la solidarité qui naît de la différence des individus a pour condition une solidarité autre, qui naît précisément de leurs ressemblances « Pour que les unités sociales puissent se différencier, il faut d’abord qu’elles se soient attirées et groupées en vertu des ressemblances qu’elles présentent118. » Ajoutons que pour qu’elles veuillent rester groupées et cherchent un ordre social qui fasse à chacune sa juste part, il faut que certaines ressemblances aient continué de les unir et, comme le Dieu de Descartes recrée à chaque moment le monde, recréent à chaque moment l’association : le départ de ce qui revient à chaque individualité ne peut être effectué que par des individualités qui s’entendent, c’est-à-dire qui ont quelque chose de commun. […] Si le droit romain, au lieu de rester un droit local et un droit de classe, devait être un droit humain et individualiste, l’hétérogénéité de ceux qu’il avait à faire vivre ensemble n’en est-elle pas, pour une part, responsable124 ?

1649. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Plus quelques-uns de ses monuments poétiques avaient été liés à la liberté de ses villes, à leurs fêtes religieuses, à leur ancien héroïsme, plus ils restaient admirés, en paraissant désormais impossibles à imiter. […] « J’admirais ces enfants, tandis que leurs lyres ne restaient pas oisives. […] Les titres seuls de certains ouvrages perdus justifieraient cette conjecture ; et on peut l’appliquer également aux débris qui nous restent.

1650. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

Qui sait s’il ne restera pas, à la fin de nos désordres, des ridicules mieux prononcés, très bons à corriger encore. […] Les exemples qui nous en restent en fournissent les preuves évidentes. […] Ce dernier obtenait la couronne, mais la préférence entre eux restait si longtemps douteuse que le prix semblait donné plutôt par le hasard que par l’équité. […] N’est-il plus rien resté de neuf dont on se puisse emparer ? […] Nous avons dit que le genre comique se divise en six espèces, dont les cinq dernières nous restent à décomposer.

1651. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

C’était en 1658, vers Pâques, et elle y resta jusqu’au mois d’octobre. […] Une partie de ce troisième tableau m’est restée assez confuse. […] Et Piotr et l’aïeule idiote restent seuls dans la maison vide. […] Ces descriptions, dont la moindre déborde sur dix pages d’imprimé, sont restées fameuses. […] Cédé-je ici à de très anciennes impressions d’enfance et d’adolescence, restées intactes au plus profond de moi-même, et peut-être à mon insu ?

1652. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Il resterait à expliquer comment cette grandeur a été méconnue par les critiques dont j’ai cité les noms. […] Sainte Beuve, avec son tact infaillible, a dégagé ce point dans ses trois articles de 1863, dont Gautier lui écrivait qu’il restait « atterré de cette divine pénétration ». […] Il a nommé ce mal d’un mot qui restera, précisément à cause de son double sens. […] Vous vous êtes dit, courageusement, qu’il vous restait à faire votre oeuvre. […] Le pays, — ce fut, malgré tout, la foi, semble-t-il, la religion de cet ancien évêque, resté grand seigneur.

1653. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Il est capable d’embrasser une cause, et d’y rester attaché, quoi qu’il arrive, malgré tout, jusqu’au bout. […] Les confiscations, une banqueroute, enfin le grand incendie de Londres lui avaient ôté les trois quarts de sa fortune450, ses filles n’avaient pour lui ni égards ni respect ; il vendait ses livres, sachant que sa famille ne serait pas capable d’en profiter après lui ; et parmi tant de misères privées et publiques, il restait calme. […] Mais si le cœur est resté le même, le génie s’est transformé. […] Pour mettre en scène le surnaturel, il ne faut point rester dans son assiette ordinaire ; vous avez l’air de ne point croire, si vous y restez. […] L’enfer de Milton est immense et vague, « donjon horrible, flamboyant comme une fournaise ; point de lumière dans ces flammes, mais plutôt des ténèbres visibles qui découvraient des aspects de désolation, régions de deuil, ombres lugubres », mers de feu, « continents glacés, qui s’allongent noirs et sauvages, battus de tourbillons éternels de grêle âpre, qui ne fond jamais, et dont les monceaux semblent les ruines d’un ancien édifice. » Les anges s’assemblent, légions innombrables, pareils à « des forêts de pins sur les montagnes, la tête excoriée par la foudre, qui, imposants, quoique dépouillés, restent debout sur la lande brûlée531. » Milton a besoin du grandiose et de l’infini ; il le prodigue.

1654. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre I. De l’évolution de la vie. Mécanisme et finalité »

L’objet a beau rester le même, j’ai beau le regarder du même côté, sous le même angle, au même jour : la vision que j’ai n’en diffère pas moins de celle que je viens d’avoir, quand ce ne serait que parce qu’elle a vieilli d’un instant. […] Des chimistes ont fait remarquer qu’à ne considérer même que l’organique, et sans aller jusqu’à l’organisé, la science n’a reconstitué jusqu’ici que les déchets de l’activité vitale, les substances proprement actives, plastiques, restent réfractaires à la synthèse. […] Seulement, voici alors qu’un autre problème, non moins redoutable, se pose : comment toutes les parties de l’appareil visuel, en se modifiant soudain, restent-elles si bien coordonnées entre elles que l’œil continue à exercer sa fonction ? […] Si Mollusques et Vertébrés ont évolué séparément, les uns et les autres sont restés exposés à l’influence de la lumière. […] Maintenant, supposons que la main et le bras soient restés invisibles.

1655. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

Faute de Laforgue ce roman est resté en puissance, en sommeil, comme la Belle au Bois dormant. […] Mais je préfère rester sur le pont et respirer l’air salin d’une fraîche aventure. […] Silas est resté le même et sur cet homme pareil le second coup de la destinée est pareil au premier : c’est la même erreur qui l’abuse. […] On verra dans dix ans ce qui restera de cet enthousiasme. […] La poésie féminine est restée jusqu’ici très exceptionnelle, n’a paru que chez quelques poètes mineurs.

1656. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

Quand les yeux sont ainsi inondés, quel est le cœur de roc qui peut rester sec ? […] Il resta hésitant, troublé, cherchant sans cesse jusqu’à l’apparition des Excentriques, en 1850. […] — Voilà un amour venu bien vite. » « La conversation en resta là. […] Champfleury est toujours resté dans la même voie. […] — Il n’en restait qu’un morceau.

1657. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

Il restait de l’inédit à découvrir, même après les enquêtes dévotes et les trouvailles précieuses de M.  […] Provisoirement, elle restera sans nom… » Cela est daté du 17 nivôse an II. […] L’« Empereur et Roi » ne peut plus rester dans son palais. […] Rester ? rester ?

1658. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Laprade, Victor de (1812-1883) »

François Coppée Ceux qui auraient pu craindre qu’il s’attardât dans un panthéisme plein de poésie sans doute, mais un peu bruineux et incertain, qu’il restât absorbé dans le rêve mystique où le plongeait la contemplation de la nature, ont été bien vite rassurés.

1659. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre VII »

Cependant, chacune des quatre régions frontières ayant choisi de penser dans la langue du peuple voisin, peut-être resterait-il vers le centre, aux environs de Guéret et de Châteauroux, quelques familles farouches où se conserveraient, à l’état de patois, les mots les plus usuels de Victor Hugo.

1660. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre X »

Scopa a donné en vieux français escouve, écouve, dont il est resté écouvillon.

1661. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Marie Tudor » (1833) »

Shakspeare, comme Michel-Ange, semble avoir été créé pour résoudre ce problème étrange dont le simple énoncé paraît absurde : — rester toujours dans la nature, tout en en sortant quelquefois. — Shakspeare exagère les proportions, mais il maintient les rapports.

1662. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Louise Labbé, et Clémence de Bourges. » pp. 157-164

Le peu de vers qui nous restent d’elle sont plus originaux que tout ce que nous avons des La Suse & des Deshoulières.

1663. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre III. Partie historique de la Poésie descriptive chez les Modernes. »

Horace et Pindare sont restés bien loin de cette poésie.

1664. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 50, de la sculpture, du talent qu’elle demande, et de l’art des bas-reliefs » pp. 492-498

Nous ne voïons pas du moins dans les morceaux de la sculpture grecque ou romaine qui nous sont restez, que l’art des bas-reliefs ait été bien connu des anciens.

1665. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Remarque finale. Le Temps de la Relativité restreinte et l’Espace de la Relativité généralisée »

Restons-nous pour cela dans l’abstrait ?

1666. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Le génie éteint, resta la folie ; l’inspiration ôtée, on n’eut plus que l’absurdité. […] toujours dans l’excès, —  si extrêmement violent ou si extrêmement poli, —  que chaque homme pour lui était un dieu ou un diable. —  Dissiper la richesse était son talent propre. —  Nulle chose pour lui ne restait sans récompense, hors le mérite. —  Pillé par des parasites qu’il démasquait toujours trop tard, —  il avait son bon mot, ils avaient son domaine. —  Ses bouffonneries l’avaient chassé de la cour ; il se consola — à former des partis sans pouvoir être chef. […] Au fond, dans ce siècle en Angleterre, toutes les discussions restent étroites. […] S’il avait institué la critique et le bon style, cette critique n’avait trouvé place qu’en des traités pédantesques ou des préfaces décousues ; ce bon style restait dépaysé dans des tragédies enflées, dispersé en des traductions multipliées, égaré en des pièces d’occasion, en des odes de commande, en des poëmes de parti, ne rencontrant que de loin en loin un souffle capable de l’employer et un sujet capable de le soutenir. […] Vers le mois d’avril 1700, il essaya de sortir ; son pied foulé se gangrena ; on voulut tenter l’opération, mais il jugea que ce qui lui restait de santé et de bonheur n’en valait pas la peine.

1667. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1889 » pp. 3-111

Je me félicite de l’idée que je leur ai donnée — contrairement à l’opinion de Zola — de rester fidèles au roman, de ne pas introduire d’amour, et de faire seulement de la Tompkins une silhouette fantasque, trouvant qu’ainsi comprise et réalisée, la Tompkins fait la pièce originale. […] Mais mon frère, en sa qualité de plus jeune, a voulu passer absolument le premier, et en dehors du sentiment paternel que j’avais à son égard, je le connaissais avec sa paresse de corps et son horreur pour les exercices violents et l’escrime, destiné à rester sur le terrain, tandis que moi qui tirais très mal, qui ne tirais pas du tout, j’avais cependant un jeu difficile, déconcertant même pour ceux qui tiraient bien. […] Je lui conseille alors de rester à Paris, d’étudier ses quartiers, et de faire, sans l’humanité qui l’habite, une description psychique des murs. […] Cette sortie jette un froid parmi nous deux, restés à table. […] Nous nous entretenons des œuvres de Victor Hugo qui restent à publier, et qui ne peuvent maintenant dépasser cinq ou six volumes.

1668. (1895) Les confessions littéraires : le vers libre et les poètes. Figaro pp. 101-162

… Désabusé par la banalité qu’amènent la fréquence et l’abondance des poèmes, leurs longueurs, leurs redites, le poète doit se forger un instrument personnel ; mais qu’il ne l’impose pas aux autres, s’il veut rester lui… Edgard Poe a dit : « Il n’est point prétexte à longs poèmes » ; j’ajouterai : « nous ne pouvons chanter tout le temps ». […] Que restera-t-il de leur œuvre ? […] Ce qu’il a apporté d’original et de vraiment neuf restera. […] Les termes « condensation et suggestion » analysent le mot symbole ; ils restent la devise de la poésie nouvelle, celle des artistes les plus opposés de M.  […] Il nous est impossible de croire que nous soyons nés au siècle de Périclès, impossible d’ignorer les rêveries de nos métaphysiciens et de nos positivistes, impossible de rester indifférents aux leçons de nos historiens, de nos géographes, aux expériences de nos physiciens, aux récits de nos voyageurs.

1669. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

Ainsi un bon prêtre désire imposer l’estime de sa robe à ceux qui restent hors sa religion. […] En bas, dans ces bosquets, demeurait l’ombre d’un Mallarmé abondant, délicieux, à laquelle le Poète ne demanda rien, sinon qu’elle restât une ombre. […] Sa préciosité tient en partie à ce qu’il est resté un aristocrate, un mondain qui, outrant son désir d’une plus grande délicatesse et d’un cercle plus intime, a rencontré la solitude. […] Mais toujours Vigny restera hypnotisé par le fait poétique ; toujours il fixera sur lui-même, sur le don miraculeusement tombé en lui, ce même regard d’orgueil sombre, timide, effrayé. […] Mais il peut rester isolé.

1670. (1900) La culture des idées

En tout cas, les deux images restent prêtes à divorcer ; le divorce règne en permanence dans le monde des idées, qui est le monde de l’amour libre. […] Les uns et les autres réussirent ; mais, tandis que la tradition littéraire a été renouée par le romantisme, la tradition religieuse est restée brisée. […] Les jeux surveillés par des maîtres taquins n’en restent pas moins des jeux, quoique moins amusants ; les religions réformées n’en restent pas moins des religions, mais dépouillées de toutes leurs grâces puériles. […] Bien des amusements parurent permis à tous ceux qui étaient restés dans le siècle ; la littérature du moyen âge témoigne de cette aisance dans les relations sociales. […] Le paganisme est resté traditionnel, notamment à Paris, dans certaines familles, où, dit-on, les libations et les sacrifices d’animaux sont encore en usage.

1671. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

Entrer dans des exemples, ce serait entrer dans l’absurde ; Pascal en a donné un, resté fameux, avec le nez de Cléopâtre. […] Il resta timide toute sa vie, au point que, même arrivé à l’état de Dieu, il tremblait devant sa femme. […] Elle a des curiosités, et ne peut céder ; elle a des désirs, et ces désirs lui restent sur le cœur. […] Les chèvres, cependant, même comblées de soins, restent assez farouches et fort dédaigneuses. […] La magie a passé et le génie inventif est resté.

1672. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Il resta là jusqu’au 3 novembre. […] Que lui restait-il de sa vertu première ? […] Ils étaient tenus de lui rester fidèles et même reconnaissants. […] Rien que pour vivre, pour rester ce qu’ils sont, ils ont besoin de l’ordre social et politique d’alors, et ils ont besoin de l’Église. […] Un jour, il leur annonce qu’il va s’absenter une semaine, et qu’il lui plaît qu’ils restent ensemble.

1673. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

C’est précisément le moyen de rester enfant éternellement. […] Les Athéniens restent enfants en ceci qu’ils considèrent comme l’objet de la vie ce qui n’en est que la préparation d’abord et l’ornement ensuite. […] Cet amour du beau restera en lui, de ce premier ébranlement et de cette première secousse. […] Que ceux-là restent dans l’ignorance qui n’acquerraient jamais qu’un demi-savoir, à tout le moins inutile et peut-être redoutable. […] Et maintenant ce que je me demande, c’est quels moments lui seront restés pour travailler.

1674. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

Il est resté Thébain de cœur. […] Mais, une fois cette proclamation faite, que restait-il pour le rôle de Calchas ? […] Il ne restait aucun nom d’honneur à distribuer ; les autres s’appelèrent du nom de leurs pères. […] Il est vrai que ces règlements restèrent en vigueur bien longtemps après l’époque des Jeune-France. […] Dubosc en fait plutôt un vieux général, resté élégant, de l’ancien régime, un Soubise.

1675. (1896) Études et portraits littéraires

Mais la vérité abonde dans ce chapitre, qui restera une solide page d’histoire. […] Alors il restera son épopée de la mer. […] Rêveur encore, enclin aux extases d’artiste ; il le restera toujours. […] Si le peuple incendie, c’est peut-être qu’il est resté trop longtemps sans feu !  […] Il le restera avec excès.

1676. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre premier. Les fonctions des centres nerveux » pp. 239-315

Dans le premier cas, chaque excitation d’une partie restée sensible provoquait un cri bref, unique pour une seule excitation, toujours le même, comparable à ces sons qu’émettent les jouets d’enfants lorsqu’on les presse en un certain point, dépourvu en un mot de toute espèce de signification. […] En effet, toutes les images dont l’enchaînement irrégulier fait le rêve et dont l’enchaînement régulier fait la veille étaient absentes ; il ne restait que des sensations rares, intermittentes, celles que l’expérimentateur éveillait, et, avec elles, les tendances sourdes et les mouvements involontaires qui les suivent. — Une poule survécut dix mois à la même mutilation, et, au bout du cinquième mois, était grasse, très forte, très saine ; mais les instincts, la mémoire, la prévision, le jugement étaient abolis. […] Elle n’a point odoré, elle n’a point avalé, elle n’a point bu, elle est restée immobile sur ces tas de blé et y serait assurément morte de faim, si je n’eusse pris le parti de la faire manger moi-même. […] Ceux-ci sont beaucoup plus nombreux que les autres, et, du monde qui constitue notre être, nous n’apercevons que les sommets, sortes de cimes éclairées dans un continent dont les profondeurs restent dans l’ombre. […] Il n’est resté d’elle qu’un cliché, c’est-à-dire une modification de structure dans un groupé lointain de cellules et de fibres, une prédisposition organique, la prédisposition à vibrer dans tel ordre, et par suite, pour le courant nerveux qui atteindra ce groupe, la nécessité de couler dans le lit tracé d’avance.

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