/ 2464
1333. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire de la Grèce, par M. Grote »

C’est ainsi que nos anciennes chansons de Geste, où figurent Charlemagne et Alexandre, n’apprennent rien sur les héros mêmes ni sur l’état de la société de leur temps, et elles ne seraient propres qu’à égarer, si on les interrogeait dans une telle pensée de recherche ; mais elles nous représentent avec une vérité naïve les mœurs de l’âge féodal où les trouvères mirent en œuvre ces anciens canevas et les reprirent à l’usage de leurs contemporains. […] Il résultait de là, selon Wolf, que les poëmes d’Homère, tels qu’ils existaient d’abord à l’état homérique primitif, étaient et devaient être tout ce qu’il y a de plus différent des poëmes d’un Apollonius de Rhodes, d’un Virgile, d’un Milton, de tout autre poëte épique destiné à être lu ; qu’ils flottaient épars, comme des membres vivants, dans une atmosphère créatrice et imprégnée de germes de poésie ; mais que, tels que nous les avons et les lisons aujourd’hui, ils ne datent guère que de l’époque de Solon et surtout de Pisistrate, lorsque, le souffle général venant à cesser et l’écriture étant en usage, on sentit le besoin de recueillir cette richesse publique, cet héritage des temps légendaires, d’en faire en quelque sorte l’inventaire total et d’y mettre un ordre, un lien, avant qu’ils eussent couru les chances de se perdre et de se dissiper.

1334. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre »

En lui refusant un de ces grands succès, tel que l’eût été par exemple Dettingen, s’il y eût été vainqueur, une de ces actions d’éclat qui couvrent bien des fautes ou des insuffisances et qui font passer un homme de l’état contesté a l’état consacré, il semble que la Fortune, si prodigue d’ailleurs envers lui, n’ait été que juste et qu’elle ait résisté, au dernier moment, à couronner une gloire trop superficielle.

1335. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

de Talleyrand, qui depuis sa sortie du ministère avait d’abord habité sa petite maison de la rue d’Anjou-Saint-Honoré, « où il recevait fréquemment les étrangers, où il donnait des bals d’enfants, où les voix de Mme Grassini, de Crescentini, les scènes déclamées par Talma et sa femme, par Saint-Prix et Lafon, prêtaient aux simples soirées un air de fête », avait depuis acheté l’hôtel Monaco, rue de Varennes, et il y tenait un état princier de maison ; mais la faillite d’un banquier l’ayant mis subitement dans une gêne relative, l’empereur s’empressa de lui venir en aide, et lui acheta son palais. […] Que dirait-il d’un autre s’il s’était laissé mettre dans cet état ? 

1336. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « JASMIN. » pp. 64-86

Obligé à un état manuel, et bien qu’il n’en rougisse point, Reboul ne s’en glorifie pas non plus et ne s’y complaît pas ; religieux de cœur, il accepte ce lot comme une part de la tâche imposée par le Maître. […] » Depuis qu’il fait des vers, en effet, Jasmin, pour parler en pose, grâce au bon débit de ses productions et à l’intérêt bien entendu qu’y ont mis les Agenais, a pu, sans quitter son état, devenir propriétaire de la maison qu’il habite et obtenir une petite aisance, qui paraît le comble de ses vœux.

1337. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre II. Les privilèges. »

Un cinquième du sol est à la couronne et aux communes, un cinquième au tiers état, un cinquième au peuple des campagnes, un cinquième à la noblesse, un cinquième au clergé. […] De plus, chacun d’eux a réclamé de tout son crédit contre sa cote : « Votre cœur sensible, écrit l’un d’eux à l’intendant, ne consentira jamais à ce qu’un père de mon état soit taxé à des vingtièmes stricts comme un père du commun35 ».

1338. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre I. Le théâtre avant le quinzième siècle »

Ces qualités que nous avons trouvées déjà dans les fabliaux de Gautier le Long, et dans certains développements dialogués de Jean de Meung, apparaissent aussi dans le satirique Miroir de Mariage d’Eustache Deschamps, où il ne serait pas difficile de signaler les esquisses d’une expression synthétique de certains états moraux, où, par exemple, le thème moral de Georges Dandin est indiqué, sans mélange d’action ou d’intrigue dramatique. Il en faudrait dire autant, pour le xve  siècle, du Livre des quinze joyes du mariage, et en général des œuvres de nos conteurs satiriques où ils ont bien voulu regarder, au lieu de l’anecdote et des individus, les figures en quelque sorte schématiques des divers états de la vie et des divers tempéraments de l’homme.

1339. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre I. La tragédie de Jodelle à Corneille »

Chaque situation, chaque état moral n’est pour eux qu’un motif, selon la nature duquel ils modifient leur rhétorique, écrivant ici un discours, là une ode, ailleurs une élégie, ou une méditation, ou une suite de sentences. […] Ces règles donc, qui sont devenues cause de tant d’invraisemblances dans la décadence du théâtre classique, se sont imposées comme condition nécessaire de la vraisemblance : on en méconnaîtrait le caractère si l’on perdait de vue un seul moment à quel état de la mise en scène elles se rapportent.

1340. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre III. Comédie et drame »

Il a découvert et décrit tout ce réseau subtil de sentiments entre-croisés qui forme l’unité apparente du sentiment ; il a noté toutes ces petites nuances, ces imperceptibles mouvements qui en indiquent les états passagers et les degrés successifs. […] Ils sont tous représentés par des œuvres ; il convient seulement de remarquer qu’ils correspondent à des états d’esprit très divers, qui ne peuvent guère se rencontrer dans une seule race ou un seul siècle.

1341. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

Puis la lutte des partis, après la Restauration, profita aux études historiques : les libéraux s’efforcèrent de fonder leurs revendications et les droits nouveaux sur le développement antérieur de la nation ; ils allèrent chercher jusqu’aux temps féodaux et aux invasions barbares les germes de l’état contemporain, ou les titres de la souveraineté populaire et surtout de la suprématie bourgeoise. […] Dans une seconde partie, plus originale et plus profonde encore, Tocqueville nous découvre l’influence de la démocratie sur le mouvement intellectuel, sur l’état moral et sentimental, sur les mœurs, et la réaction des idées, des sentiments et des mœurs sur le régime politique.

1342. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Le père Monsabré »

La confession nous est si naturelle, continue le Père Monsabré, qu’avant de passer à l’état d’institution chrétienne « elle était partout connue, prêchée, pratiquée. » Et là-dessus il nous cite « un législateur chinois », Socrate, Sénèque, saint Jean-Baptiste et un missionnaire qui a trouvé la confession établie chez les sauvages  Fort bien ; mais alors comment l’orateur a-t-il pu nous dire, dans la première partie de son discours, que la confession, si elle avait été inventée par d’autres que Jésus-Christ, eût paru « une nouveauté énorme, une obligation oppressive, la plus répugnante des humiliations ?  […] V J’ai entendu d’autres prédicateurs du carême, mais en courant et avec trop peu de suite pour avoir un sentiment bien arrêté soit sur le talent de chacun, soit sur l’état actuel de l’éloquence sacrée.

1343. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. » pp. 432-452

Un tel office me conviendrait bien moins qu’à personne, ayant été l’un des premiers autrefois à annoncer ces Mémoires encore à l’état de confidence. […] N’étant lié envers sa haute renommée par d’autre sentiment que celui d’un respect et d’une admiration qu’un libre examen a droit de mesurer, j’ai étudié en lui l’homme et l’écrivain avec détail, avec lenteur, et il en est résulté tout un livre que j’aurais déjà mis en état de paraître, si je ne causais ici beaucoup trop souvent.

1344. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mme du Châtelet. Suite de Voltaire à Cirey. » pp. 266-285

Pardon, pardon ; mais mon état est horrible… Il y a quinze jours que je ne passais point sans peine deux heures loin de lui ; je lui écrivais alors de ma chambre à la sienne ; et il y a quinze jours que j’ignore où il est, ce qu’il fait ; je ne puis pas même jouir de la triste consolation de partager ses malheurs. […] Il est vrai que j’ai perdu cet état si heureux, et que ce n’a pas été sans qu’il m’en ait coûté bien des larmes.

1345. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand. (Berlin, 1846-1850.) » pp. 144-164

« Il faut prendre l’esprit de son état », écrivait-il en riant à Voltaire du milieu de la guerre de Sept Ans. […] C’était l’âme d’un usurier qui passait tantôt dans le corps d’un militaire, tantôt dans celui d’un négociateur. » Et remarquez que tout cela n’est pas à l’état de portrait comme dans les histoires plus ou moins littéraires, où l’historien se pose devant son modèle : c’est dit en courant, comme par un homme du métier qui pense tout haut et qui cause.

1346. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Histoire du chancelier d’Aguesseau, par M. Boullée. (1848.) » pp. 407-427

L’état de Louis XIV au lit de mort, et qui n’avait plus que quelques jours à vivre, rendait cet héroïsme un peu moins compromettant. […] M. d’Aguesseau aurait préféré, nous dit son fils, rester dans la pure et véritable magistrature, et passer ses jours dans une charge de conseiller au Parlement de Paris, et il ajoute, en des termes qui rappellent l’hôtel Rambouillet plus subtilement qu’il ne convenait à un ami et à un disciple de Boileau : « Les maîtres des requêtes ressemblent aux désirs du cœur humain, ils aspirent à n’être plus ; c’est un état qu’on n’embrasse que pour le quitter… » Or, cette phrase étrange sur les maîtres des requêtes, comparés aux désirs du cœur qui aspirent à n’être plus, serait inexplicable chez un aussi bon esprit sans une phrase de saint Augustin qui dit cela, en effet, des désirs du cœur humain (sunt ut non sint).

1347. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Maintenon. » pp. 369-388

Tous les témoins du même temps s’accordent sur cette beauté, cette taille aisée, cet esprit, et sur ce coin de l’enjouement : « Tous ceux qui la connaissent, dit Le Grand Dictionnaire des précieuses, sont assez persuadés que c’est une des plus enjouées personnes d’Athènes. » Et elle-même, vers la fin de sa vie, se représente comme « gaie par nature et triste par état ». […] Car, quoique j’aie éprouvé de la pauvreté et passé par des états bien différents de celui où vous me voyez, j’étais contente et heureuse.

1348. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Charles Perrault. (Les Contes des fées, édition illustrée.) » pp. 255-274

Comme toutes choses ne peuvent pas demeurer au même état et vont naturellement en dépérissant, les années suivantes, il fallut aller recevoir soi-même les pensions chez le trésorier en monnaie ordinaire. […] Et sans plus de réponse, je me borne à citer l’aimable anecdote suivante qui nous montre au vrai le caractère sincère et ingénu de Perrault, et je laisse l’impression s’en faire d’elle-même sur le lecteur : Quand le jardin des Tuileries fut achevé de replanter, et mis dans l’état où vous le voyez : « Allons aux Tuileries, me dit M. 

1349. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « De la poésie et des poètes en 1852. » pp. 380-400

Aujourd’hui donc je ne viens rien conseiller, mais je veux simplement jeter un coup d’œil sur l’état actuel de la poésie, et sur le mouvement qu’elle a suivi dans ces dernières années. […] Des poètes sérieux, consciencieux, élevés, y travaillent, et, si le public n’est pas familiarisé avec leurs noms, c’est qu’en France ce n’est que par le sentiment et la passion dramatique, et aussi par un coin d’esprit qu’on y mêle, que le public peut accepter, j’ai presque dit, peut pardonner la poésie : à l’état pur, elle n’existe guère que pour les poètes entre eux.

1350. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — II. (Suite et fin.) » pp. 421-440

C’est une marque de leur abattement qui ne leur fait pas d’honneur ; car, dans quelque mauvais état que soient les affaires, les grands esprits et les grands courages se raidissent davantage contre la mauvaise fortune. […] D’autres racontent (et ces divers récits se complètent sans se contredire) que Mme des Ursins ayant protesté de son dévouement à la nouvelle reine, et assuré Sa Majesté « qu’Elle pouvait compter de la trouver toujours entre le roi et Elle, pour maintenir les choses dans l’état où elles devaient être à son égard, et lui procurer tous les agréments dont Elle avait lieu de se flatter, la reine, qui avait écouté assez tranquillement jusque-là, prit feu à ces dernières paroles, et répondit qu’elle n’avait besoin de personne auprès du roi ; qu’il était impertinent de lui faire de pareilles offres, et que c’en était trop que d’oser lui parler de la sorte ».

1351. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. » pp. 479-498

Je me laissai donc aller à l’amour des grandeurs ; le penser m’en parut doux, j’y rêvais seul quelquefois, et faisais avec mes femmes mille châteaux en Espagne, qui commençaient, sans que je fusse en état de m’en apercevoir, l’esclavage de mon cœur et de mon esprit. […] Mais que l’on ne puisse jamais espérer de plaire et de mériter la moindre part dans l’amitié de quelqu’un à qui vous êtes attaché uniquement, que vous servez avec dévouement, auprès duquel vous passez votre vie entière dans un abandon total de vous-même, et occupé jour et nuit de ce qui peut lui être plus agréable ; en vérité, c’est un état trop douloureux pour les gens qui ont le malheur d’avoir le cœur sensible.

1352. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — II. (Suite et fin.) » pp. 436-455

Quand ses descriptions sont un peu moins travaillées, moins concertées, et qu’elles restent à l’état d’esquisses rapides, elles sont aussi plus vraies, et souvent dans une perfection ravissante : je recommande à ceux qui ont le temps de refeuilleter les Études la page de l’Étude septième, qui commence ainsi : « Il n’y a que la religion qui donne à nos passions un grand caractère… », et où l’on voit la jeune Cauchoise en pleurs au bord du rivage, regardant de loin les bateaux pêcheurs partis le matin par un gros temps, et sa station consolée au pied d’un calvaire. […] Inconnu, rebuté et indigent la veille, l’auteur passa en quelques jours à l’état de grand homme et de favori de l’opinion.

1353. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

Sa famille le destinait à l’état ecclésiastique, et il fut d’abord tonsuré. […] Qu’on se représente l’état précis de la poésie française au moment où il parut, et qu’on la prenne chez les meilleurs et chez les plus grands.

1354. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Le président Bouhier, qui prolongeait les grandes études du xvie  siècle jusque dans le xviiie , érudit, critique, antiquaire, créateur, de vastes collections et possesseur libéral de la plus belle bibliothèque, continuait la race des magistrats illustres qui unissaient l’amour de leur état au culte de l’Antiquité. […] De même en littérature, le poète qu’il aime par-dessus tout est l’Arioste : L’Arioste fait mes délices perpétuelles ; je ne puis le quitter depuis que je suis en état de l’entendre.

1355. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1873 » pp. 74-101

Il nous entretient d’un chien bien-aimé, semblant prendre part à l’état de son âme, le surprenant par un gros soupir, dans ses moments de mélancolie, — un chien qui, un soir, au bord d’un étang, où Tourguéneff fut pris d’une terreur mystérieuse, se jeta dans ses jambes, comme s’il partageait son effroi. […] Rien n’est comparable à l’état, à la fois stupide et heureux, que vous donne une journée de jardinage, à l’air vif et froid de ce premier mois de l’hiver.

1356. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre V. Séductions pour la compréhension de la psychologie indigène. — Conclusion »

Diêgui, notamment, nous révèle l’esprit chevaleresque des Torodo et, si l’on peut parfois comparer une période de notre évolution à l’état présent de la civilisation chez telle ou telle race indigène, il n’y aurait aucune audace à admettre des rapports marqués entre la mentalité des Torodo et celle de nos belliqueux ancêtres des premiers temps du Moyen-Age. […] Leroux, éditeur), que tardivement et au cours de l’impression de cet essai, je n’ai pu, malgré l’intérêt de comparaison qu’ils présentent, faire état de ces recueils dans l’étude ci-dessus.

1357. (1892) L’anarchie littéraire pp. 5-32

Parfois il regarde passer les femmes, les petites femmes aux formes voluptueuses : trop soucieux de son hygiène pour négliger la culture du sixième sens, il estime qu’en l’état actuel de notre civilisation, l’amour est une des plus utiles fonctions de l’organisme… ………………………………………………………………………………………………………… « Dans ses heures de loisir il rime ces vers d’une harmonie si moderne qu’il a recueillis en deux recueils intitulés Le Signe et Les Chairs profanes. […] Néo-Décadents et Symbolistes Aujourd’hui que l’École décadente n’existe plus à Paris qu’à l’état de souvenir, elle semble trouver en province et à l’étranger des adeptes et des continuateurs qui sont comme un écho lointain du bruit qu’elle fit en 1886.

1358. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

Toutes les belles images des gares et des murs ne correspondent guère à la vérité, mais elles indiquent un état de l’opinion et surtout de l’opinion parisienne, qui se passionne aujourd’hui pour la garde-robe de nos aïeux. […] Mais je prétends que les éléments qui peuvent se comparer, la bourgeoisie parisienne et la bourgeoisie provinciale, la noblesse qui habite la province et celle qui habite Paris n’appartiennent certainement pas à des états de civilisation différents, comme on serait tenté de le croire d’après notre littérature.

1359. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre IV. L’unification des sociétés »

La centralisation maîtrise donc décidément jusqu’aux nations qui lui paraissaient le plus hostiles ; si l’état présent de leurs institutions nous révèle que l’idée de l’égalité pénètre toutes les nations modernes occidentales, il nous apprend aussi que toutes à des degrés différents, s’unifient. […] Rappelons d’abord qu’en tout état de cause l’unification des sociétés n’est nullement à nos yeux la raison suffisante de leurs tendances égalitaires, mais une des conditions, entre beaucoup d’autres, qui favorisent le succès de ces tendances.

1360. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

Mais selon la loi de Dugald Stewart, l’état primitif d’une idée ou représentation, c’est de faire illusion et d’être affirmative ; donc, un instant auparavant, c’est-à-dire dans la perception, cette représentation ou simulacre intérieur nous a fait illusion, et nous est apparue comme un objet extérieur et réel. — Dans un très-grand nombre de cas, par exemple dans toutes les illusions des sens, l’objet apparent diffère de l’objet réel, et par conséquent s’en distingue12. […] La conception, à l’état naturel et primitif, est accompagnée d’affirmation et de croyance.

1361. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre III : M. Maine de Biran »

Elle est une action isolée, un état partiel du tout continu et persistant qui est l’âme. […] Quand je dis que ma résolution a la force de contracter mes muscles, j’entends simplement que, dans l’état de santé, si je prends la résolution de contracter un muscle, il est nécessaire, qu’il soit contracté.

1362. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

Dans l’une et dans l’autre, chaque état de l’être organisé a pour double condition l’état précédent et la tendance générale du type. […] Dans l’état où nous voilà, nous te consultons sur ce que nous devons faire. […] Tandis qu’en France les simples nobles, votant avec les grands seigneurs, laissaient sans lien le tiers état et l’aristocratie, ici les simples nobles, votant avec les bourgeois, unissaient l’aristocratie et le tiers état. […] Le tiers état n’avait ni la volonté ni la force d’instituer contre le roi des libertés publiques. […] Le tiers état, comme la noblesse, garde l’empreinte de ses origines.

1363. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

Crimes, douleurs, collisions sanglantes, bouleversements, misères, n’étaient pas, il est vrai, derrière elle, mais devant elle : à l’état de souvenirs, mais de pressentiments ou d’inquiétudes. […] Cet état mixte, produit d’une observation pénétrante altérée et grossie par une imagination hallucinée, peut être encore acceptable dans le roman, où le lecteur isolé, livré à ses propres rêveries, permet qu’on le nourrisse d’opium et de hachich, pourvu qu’on le dérobe aux ennuis et aux misères de la vie réelle. […] À l’état de théorie, dans l’esprit de quelques théosophes, de quelques rêveurs naïfs et convaincus, le mysticisme a pu n’être que l’exagération inoffensive du sentiment religieux et chrétien. […] La philosophie du dernier siècle et cette épidémie d’irréligion qu’elle répandit sur la France, ce n’était pas seulement une attaque contre l’Église considérée comme puissance séculière, contre le clergé à l’état de corps politique. […] L’état des âmes dans cette société mourante, voilà la préparation la plus efficace à l’avènement du christianisme.

1364. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXIII » pp. 133-140

Il est le seul qui puisse lui dire un peu nettement la vérité sur l’état du pays et sur les chances à jamais perdues.

1365. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « SUR ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 497-504

La cause de cette dissolution passagère est plus générale et tient à l’état de la société elle-même, après une grande secousse politique mal dirigée.

1366. (1874) Premiers lundis. Tome I « M.A. Thiers : Histoire de la Révolution française Ve et VIe volumes — I »

Du jour où les Girondins furent proscrits, le retour à l’ordre légal fut indéfiniment ajourné, et la France, constituée dans un état violent, inouï, d’un avenir incalculable.

1367. (1874) Premiers lundis. Tome I « Deux révolutions — I. L’Angleterre en 1688 et la France en 1830 »

L’Angleterre commence à s’apercevoir aujourd’hui que tout n’a pas été consommé alors, et que, contre les vices de sa Constitution, contre les désordres invétérés de son état social, une autre révolution reste à faire.

1368. (1874) Premiers lundis. Tome I « Hoffmann : Contes nocturnes »

Jusqu’à quel point s’étend cette conquête nouvelle de l’art ; jusqu’à quel degré est-il possible de la féconder ; et contient-elle en elle-même un art tout nouveau dont nous entrevoyons à peine les promesses, ou bien doit-elle éternellement demeurer à l’état de vague et de nuageux ?

1369. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIX. De la littérature pendant le siècle de Louis XIV » pp. 379-388

Je renvoie à la seconde Partie de cet ouvrage quelques réflexions sur le système tragique qui peut convenir à un état républicain ; cette discussion n’appartient pas à ce chapitre.

1370. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre V. Résumé. »

La compagnie était nombreuse et de tout état, gens de cour, gens de robe, gens de lettres, académiciens ; on avait fait grand’chère comme de coutume.

1371. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Avertissement »

Laissons-les acquérir de la facilité, une certaine adresse empirique, une certaine habitude de trouver et de rendre des pensées ; n’imposons des lois à ce qu’ils font que quand ils sont en état de faire quelque chose.

1372. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre III. De la sécheresse des impressions. — Du vague dans les idées et le langage. — Hyperboles et lieux communs. — Diffusion et bavardage »

. — Diffusion et bavardage Dans l’état ordinaire des choses, l’esprit sommeille les trois quarts du temps.

1373. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Heredia, José Maria de (1842-1905) »

Lorsqu’on a pénétré leur ordonnance intime, ils vous mettent dans l’état d’harmonie où l’on aime les morts mêlés aux vivants.

1374. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Merrill, Stuart (1863-1915) »

Albert Mockel Stuart Merrill a la science de la ligne décisive, comme il sait onduler toutes les souplesses d’une attitude ; mais, il faut le remarquer, ses formes sont presque toujours en équilibre statique, telles que les fortes et nobles créations de Constantin Meunier, par exemple ; le geste, chez lui, peut s’immobiliser indéfiniment, par cela même qu’il indique plus souvent un état qu’une action, et donne mieux l’impression de la chose qui dure.

1375. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre VII. L’Histoire de la Physique mathématique. »

Le Passé et l’Avenir de la Physique — Quel est l’état actuel de la Physique Mathématique ?

1376. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XII » pp. 100-108

quelle indépendance, quelle légèreté, quelle gaîté, quelle folie devaient régner dans un camp dont les chefs étaient de la jeunesse des deux sexes, dans un camp où les relations étaient toutes militaires, où tous les dangers étaient communs, où le chagrin des revers et l’ivresse des succès étaient également partagés, où régnait la familiarité la plus dégagée des formes habituelles du respect, en un mot dans une armée de deux sexes qui, en révolte contre les lois de l’état, ne devaient pas s’assujettir bien strictement à celles de la bienséance !

1377. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIX » pp. 207-214

Il était grand citoyen aussi quand il livrait à la moquerie publique la manie de se faire noble, de se donner des titres, de se séparer du commun état.

1378. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 124-134

On proscriroit sur-tout ces Bureaux d’esprit où l’on anathématise les meilleurs Ouvrages, quoiqu’on ne puisse s’en dissimuler le mérite ; où l’on encense la médiocrité, parce qu’elle est en état de protéger ou de nuire ; où l’on n’admet tant d’adorateurs stupides, que pour en faire des écho, dont la voix ira d’oreille en oreille déifier tous les Membres du tyrannique Sénat, & promulguer ses intrépides Arrêts ; nous aurions la douce joie de voir couler le lait & le miel à côté de l’Hipocrene, de pouvoir cueillir les fruits du sacré Vallon, sans redouter ceux de la Discorde, de dormir sur le Parnasse sans craindre de réveils fâcheux ; nous verrions renaître en un mot l’âge d’or de la Poésie, & le Monde savant retraceroit le modele de cette République, dont M.

1379. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau et M. de Voltaire. » pp. 47-58

Le poëte lyrique voulut montrer qu’il étoit également en état de se distinguer dans cette carrière.

1380. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre II. Chimie et Histoire naturelle. »

Si on l’accuse de s’être un peu méfiée de ces lettres qui ne guérissent de rien, comme parle Sénèque, il faut aussi condamner cette foule de législateurs, d’hommes d’état, de moralistes, qui se sont élevés beaucoup plus fortement que la religion chrétienne contre le danger, l’incertitude et l’obscurité des sciences.

1381. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 41, de la simple récitation et de la déclamation » pp. 406-416

Plus un ouvrage plaît, moins on est en état de reconnoître et de compter ses défauts.

1382. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Conclusion »

Assurément, le temps est encore loin où elle pourra jouer ce rôle efficacement ; pourtant, c’est à la mettre en état de le remplir un jour qu’il nous faut, dès maintenant, travailler.

1383. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Préface » pp. -

L’illustre auteur de La Comédie humaine n’a pas changé la nature du roman qui existait avant lui , mais il en a élargi les assises, et il l’a positivement élevé à l’état de Science, à force d’observations, de renseignements, de notions de toute espèce, d’une exactitude, d’une sûreté et d’une justesse merveilleuses.

1384. (1915) La philosophie française « II »

Si, pour mesurer la profondeur de leur pensée et pour la comprendre pleinement, il faut être philosophe et savant, néanmoins il n’est pas d’homme cultivé qui ne soit en état de lire leurs principales œuvres et d’en tirer quelque profit.

1385. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

L’histoire de René est la peinture de trois ou quatre états successifs d’une âme inquiète et malade. […] Il a presque inventé des états psychologiques. […] Peut-on mieux dépeindre l’état de demi barbarie et de demi-civilisation où sont les peuples à notre époque, que par ces images ? […] Croirait-on qu’on ait pu écrire un livre sur la Révolution de 1830 où il n’y eût pas un mot de l’état social de la France en 1830 ? […]  » Des idées abstraites entrent en lui à l’état de sensations.

1386. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Quel merveilleux sujet d’étude que l’état mental d’un Lacordaire menant de front les soucis de l’opposition libérale et les travaux de la pénitence, inspirant des journaux politiques et se faisant attacher sur une croix ! […] Le bon moine est toujours gai ; l’allégresse est une des vertus de son état et les hagiographes ont soin de rapporter que le grand saint Antoine avait gardé dans sa vieillesse la joie innocente d’un enfant. […] Mais il ne fait qu’effleurer cet examen, et, sans même exposer l’état de la question sur les points les plus importants, il se hâte de conclure dans le sens canonique. […] Don Marcos embrassa son cher entremetteur, qui alla rendre compte à Isidore de l’état auquel il venait de laisser son amant. […] En l’état des choses, un politique n’eût pas relevé les autels renversés par Constantin.

1387. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Quand il tomba, la Démocratie était passée à l’état de religion. […] Ainsi l’état des effets appartenant à M.  […] Cette formule décèle un état mental qui semble avoir été celui de toute une élite de la jeunesse française avant 1914 et la terrible guerre. […] Vous invitiez vos élèves à comprendre que tout système est une inspiration à retrouver, un état de l’âme à recréer en soi. […] Ces états sont-ils pathologiques ?

1388. (1890) Nouvelles questions de critique

La première vertu que l’on exige d’un menuisier n’est pas de savoir jouer du violon, c’est de connaître à fond son état de menuisier. […] Un mot de Chamfort exprime assez bien le dernier état de la pensée du xviiie  siècle sur le moyen âge et sur le christianisme. […] Idéaliste ou naturaliste, une grande œuvre engendre ou provoque un nombre presque infini de copies d’elle-même ; elle se substitue à la nature dans l’éducation de l’artiste en passant à l’état de chef-d’œuvre, elle passe à celui de modèle ou de canon. […] « Un paysage est un état de l’âme » ; on se rappelle ce mot d’Amiel : c’est le seul que l’on ait sauvé du naufrage de son Journal intime. Cela ne veut pas du tout dire, comme je vois pourtant qu’on le croit, qu’un paysage change d’aspect avec l’état de l’âme, aujourd’hui mélancolique et demain souriant, selon que nous sommes tristes ou joyeux nous-mêmes.

1389. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

Elles oscillent de leur état ancien, qui était une sujétion bien ennuyeuse, à un état nouveau, dont la modernité alarme nos habitudes. […] Un sien oncle, chanoine de son état, et son unique parent, le pressait d’apprendre la théologie. […] Seulement, cet état pourra-t-il durer ? […] Les archéologues, qui ont des grâces d’état, peuvent trouver quelque charme aux premières terres cuites de Chypre et au joueur de sambuque trouvé dans l’île de Kéros. […] C’est à peu près dans cet état, et avec ces enjolivements, que les écrits des Grecs se présentèrent d’abord à la science moderne.

1390. (1892) Essais sur la littérature contemporaine

Faut-il vous montrer l’état de mon âme quand je songeais entre ces pages ?  […] On parle beaucoup d’états d’âme. […] Et voilà pourquoi, drame ou comédie, nous demanderons qu’ils roulent toujours sur quelqu’une de ces relations ou de ces questions qui intéressent tous les « états ». […] Elle pourrait empêcher nos romanciers contemporains de prendre des états plus que particuliers, exceptionnels et morbides, pour des états ordinaires et généraux de l’âme humaine. Tout au moins, en les décrivant, sauraient-ils peut-être alors les rattacher à ces états moins exceptionnels dont ils ne sont qu’une aberration.

1391. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1870 » pp. 3-176

Soyons bien persuadés que les souverains ne sont absolument que les représentants de l’état moral de la majorité de la nation qu’ils gouvernent, et qu’ils ne resteraient pas, trois jours, sur leurs trônes, s’ils étaient en contradiction avec cet état moral. […] Voilà plusieurs fois qu’il va chercher, sans pouvoir l’obtenir, un état des fusils du Mont-Valérien. […] lance un sceptique, on aura beau changer les officiers, ce seront toujours les mêmes… et l’on parle du prochain décès de la France, de son épuisement en cerveaux de valeur, de son état convulsif par lequel elle va, soubresautante, à la mort. […] Rien de plus pénible que cet état, où vous ne savez pas si les armées de province sont à Corbeil ou à Bordeaux, et si même ces armées sont ou ne sont pas : rien de plus cruel de vivre dans l’obscurité, dans la nuit, dans l’inscience du tragique qui vous menace. […] Et j’avais dans mon rêve, à l’état aigu, toutes ces perceptions douloureuses, absolument comme si je les revivais.

1392. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

C’est qu’aussi bien, depuis quelques années, il s’est fait de singuliers mélanges de la naissance et de la fortune elles-mêmes : « Le corps des laquais — écrit Montesquieu dans ses Lettres persanes, en 1721 — est plus respectable en France qu’ailleurs ; il remplit le vide des autres états. […] « Tous ceux qui étaient riches il y a six mois sont à présent dans la pauvreté, et ceux qui n’avaient pas de pain regorgent de richesses… L’étranger a tourné l’état comme un fripier tourne un habit… Quelles fortunes inespérées, incroyables même à ceux qui les ont faites ! […] « C’est en affaiblissant la stupide vénération des peuples pour les lois et les usages anciens, écrit Helvétius, qu’on mettra les souverains en état de purger la terre de la plupart des maux qui la désolent et d’assurer la durée des Empires » [Cf.  […] « Dans l’ordre naturel, les hommes étant tous égaux, leur vocation commune est l’état d’homme, et quiconque est bien élevé pour celui-là, ne peut mal remplir ceux qui s’y rapportent… En sortant de nos mains notre élève ne sera ni magistrat, ni soldat, ni prêtre, il sera premièrement homme : tout ce qu’un homme doit être, il saura l’être au besoin tout aussi bien que qui que ce soit » [Émile, I, 1]. […] Mais son œuvre est posthume, et nous ne pouvons l’envisager ici que comme représentative de l’état des esprits, ou de quelques esprits de son temps.

1393. (1885) L’Art romantique

C’est, du reste, un des diagnostics de l’état spirituel de notre siècle que les arts aspirent, sinon à se suppléer l’un l’autre, du moins à se prêter réciproquement des forces nouvelles. […] Supposez un artiste qui serait toujours, spirituellement, à l’état du convalescent, et vous aurez la clef du caractère de M.  […] Ces êtres n’ont pas d’autre état que de cultiver l’idée du beau dans leur personne, de satisfaire leurs passions, de sentir et de penser. Ils possèdent ainsi, à leur gré et dans une vaste mesure, le temps et l’argent, sans lesquels la fantaisie, réduite à l’état de rêverie passagère, ne peut guère se traduire en action. […] Le caractère de la scène et le ton de la légende contribuent ensemble à jeter l’esprit dans cet état de rêve qui le porte bientôt jusqu’à la pleine clairvoyance, et l’esprit découvre alors un nouvel enchaînement des phénomènes du monde, que ses yeux ne pouvaient apercevoir dans l’état de veille ordinaire.

/ 2464