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1805. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1856 » pp. 121-159

Il faut quelqu’un qui puisse faire cela pour les presbytères et les châteaux. » M. de Montalembert a de longs cheveux gris et plats, une face pleine, des traits de vieil enfant, un sourire dormant, des yeux profonds mais sans éclairs, une voix nasillarde et manquant de mordant, une amabilité douce et reposée, une caresse féminine des manières et de la poignée de main, une robe de chambre cléricale. […] Tête de femme aux cheveux rebroussés en arrière, dégageant le bossuage d’un petit front étroit, les sourcils remontés vers les tempes, l’arcade sourcilière profonde, l’œil fendu en longueur avec une prunelle coulant dans les coins, le nez d’une courbure finement aquiline, la bouche serrée et tirée par une commissure à chaque bout, le menton maigre et carré : un type physique curieux de l’énergie et de la volonté féminine.

1806. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

2 août Par la littérature qui court, c’est vraiment un noble type littéraire que ce Saint-Victor, cet écrivain dont la pensée vit toujours dans le chatouillement de l’art ou dans l’aire des grandes idées et des grands problèmes, couvant de ses amours et de ses ambitions voyageuses la Grèce d’abord, puis l’Inde qu’il vous peint sans l’avoir vue, comme au retour d’un rêve haschisché, et poussant sa parole, ardente et emportée et profonde et peinte, autour de l’origine des religions, parmi tous les grandioses et primitifs rébus de l’humanité : curieux des berceaux du monde, de la constitution des sociétés, pieux, respectueux, son chapeau à la main devant les Antonins, qu’il appelle le sommet moral de l’humanité, et faisant son évangile de la morale de Marc-Aurèle, ce sage et ce si raisonnable maître du monde. […] En entrant sous bois, j’ai tout de suite le silence, mais un silence murmurant de toutes les petites et caressantes voix de la vie et de l’amour, que domine, comme une dièze profonde, la plainte amoureuse du ramier.

1807. (1913) La Fontaine « VII. Ses fables. »

A ces qualités des bêtes La Fontaine ajoute encore la patience profonde, la résignation aux coups du sort, ce caractère de tranquillité devant la mort  non pas devant le danger, car l’animal sait se soustraire au danger  mais tranquillité, quiétude devant l’inévitable, que La Fontaine a marqué encore quelquefois de traits justes, profonds et tout à fait pathétiques.

1808. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Nous concluons de l’assimilation superficielle à l’assimilation profonde, de la parenté des corps à la parenté des âmes. — L’influence des ressemblances intérieures est d’ailleurs assez puissante pour contrebalancer au besoin celle des différences extérieures ; ceux qui communient dans une même foi se sentent portés à oublier que la race ou l’habit les séparaient. […] Parce que les sociétés occidentales modernes sont celles où la plus large homogénéité coexiste avec la plus profonde hétérogénéité, elles sont aussi celles où le respect de l’humanité, devait coexister avec le respect de l’individualité, — pour le plus grand profit des idées égalitaires.

1809. (1773) Discours sur l’origine, les progrès et le genre des romans pp. -

Quelle autre production romanesque offrit jamais des détails aussi brillants joints à des vues aussi profondes ? […] Le grand mérite de cet ouvrage consiste dans les fines observations de Ricca, & dans les profonds raisonnements d’Usbec.

1810. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

On croirait entendre la surprise et les vœux des apôtres, dans cet hymne pour la fête de l’Ascension : « Délaisses-tu donc, saint Pasteur, ton troupeau dans cette vallée profonde, obscure, avec la solitude et les regrets ! […] « Fabius, si les pleurs n’offusquent tes regards, promène ta vue attentive sur ces longues allées détruites ; vois ces marbres et ces arcs de triomphe abattus ; vois ces statues superbes qu’a renversées Némésis, couchées dans la poussière, et les maîtres qu’elles représentent, enterrés dans un profond oubli.

1811. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite et fin.) »

Mais il y eut quelque chose de plus efficace et de plus puissant à produire cette révolution, que toutes les intrigues particulières ; ce fut, à un moment donné, le concert universel et la conspiration véritable de tous, le mépris profond dans lequel était tombé Pierre III, l’intérêt qu’inspirait Catherine, et la faveur populaire qui n’avait cessé de la suivre pendant des années jusque dans sa disgrâce.

1812. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Valentine (1832) »

Excepté trois ou quatre pages du commencement, qui, par leur prétention philosophique, forment une entrée en matière assez pénible, cette nouvelle est d’un bout à l’autre un profond et passionné tableau, comparable, sans y ressembler, à ce que M.

1813. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « BRIZEUX et AUGUSTE BARBIER, Marie. — Iambes. » pp. 222-234

Lui, poëte, il aime le beau et le saint, la pitié et l’harmonie, la noblesse et la blancheur, Sophocle, Dante et Raphaël ; il s’écrierait volontiers avec l’esprit qui le tente, et serait heureux de répéter toujours : Quel bonheur d’être un ange, et, comme l’hirondelle, De se rouler par l’air au caprice de l’aile, De monter, de descendre, et de voiler son front, Quand parfois, au detour d’un nuage profond, Comme un maitre le soir qui parcourt son domaine On voit le pied de Dieu qui traverse la plaine !

1814. (1874) Premiers lundis. Tome I « Victor Hugo : Odes et ballades — II »

Car, nous l’avons dit, l’inspiration première en est constamment vraie et profonde.

1815. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre II. Le Rire » pp. 28-42

Enfin si l’on veut me faire rire malgré le sérieux profond que me donnent la bourse et la politique, et les haines des partis, il faut que des gens passionnés se trompent, sous mes yeux, d’une manière plaisante, sur le chemin qui les mène au bonheur.

1816. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

est comme l’éprouvette de nos sentiments : il n’y a que les plus profonds et les moins artificiels qui y résistent.

1817. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIX. Progression croissante d’enthousiasme et d’exaltation. »

Ces foudroyantes maximes devaient dormir pour le grand nombre dans un profond oubli, encouragé par le clergé lui-même ; l’homme évangélique sera un homme dangereux.

1818. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXII. Machinations des ennemis de Jésus. »

On supposait que le grand-prêtre possédait un certain don de prophétie ; le mot devint ainsi pour la communauté chrétienne un oracle plein de sens profonds.

1819. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VII » pp. 56-69

Le style en est simple et noble ; les pensées en sont justes et pleines de raison ; les sentiments en sont vrais, élevés et profonds : on peut dans ces écrits rendre tout à la fois une idée juste de la portée et des directions de la marquise de Rambouillet, et des conversations qui avaient lieu dans son intimité.

1820. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre II. Mme Le Normand »

le sens le plus profond du livre.

1821. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Quitard »

En ces proverbes, naïfs ou sublimes, brillants ou profonds, moqueurs ou tendres, ils reconnaissaient une pensée, parente de la leur mais moins heureuse, car elle était entrée sans signature dans la mémoire des hommes, et en y restant elle n’y laissait aucun nom !

1822. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Antoine Campaux » pp. 301-314

Campaux a eu des soins plus mâles, une virilité de vue plus profonde.

1823. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le comte de Fersen et la cour de France »

Son sentiment pour la Reine Marie-Antoinette ressemblait à une piété profonde et tranquille.

1824. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Abailard et Héloïse »

Grâce à cette circonstance individuelle, la publication de ces lettres n’aura pas l’effet que la Philosophie pouvait en attendre si un plus habile les avait traduites et interprétées avec un talent plus profond.

1825. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Du Deffand »

L’ennui dont ses lettres ne sont que l’expression incroyablement profonde et, le croira-t-on ?

1826. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Valmiki »

Pris autrement et comme un livre ayant ses agréments et ses mérites particuliers, il accablera la tête européenne d’un ennui profond et d’une fatigue immense.

1827. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XI. Gorini »

L’Église retrouvait tout à coup ses ennemis du dix-huitième siècle, non plus insolents, épigrammatiques et frivoles, comme au temps de Voltaire et de Montesquieu, mais respectueux, dogmatiques et profonds, et qui avaient inventé pour draper leur haine deux superbes manteaux dont celui de Tartufe n’aurait été qu’un pan, l’éclectisme et l’impartialité.

1828. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIX. Abailard »

Grâce à cette circonstance individuelle, la publication de ces lettres n’aura pas l’effet que la Philosophie pouvait en attendre, si un plus habile les avait traduites et interprétées avec un talent plus profond.

1829. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Caro. Le Pessimisme au XIXe siècle » pp. 297-311

Et l’inquiétude qu’il éprouve n’est pas seulement pour ses propres raisonnements ou pour la destinée d’un livre qui peut paraître la plus mauvaise des plaisanteries à ceux qui prennent les choses par le côté plaisant, mais c’est une inquiétude plus haute, plus nette et plus fondée… La pudeur du philosophe qui rougit de ces vésanies d’une ignominieuse extravagance, ne l’empêche pas de jeter sur le temps où ces vésanies courent le monde et ambitionnent de le dominer le regard inquiet de l’homme pénétrant que le philosophe ne peut abuser… C’est ici le côté profond de cette Étude sur le Pessimisme au xixe  siècle.

1830. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Brispot »

Inspiré à son tour par le livre de sa foi et par sa cohabitation de cœur et d’esprit avec les hommes de génie qui ont écrit sur ce livre saint des pages si éclatantes et si profondes, l’abbé Brispot a plusieurs fois montré que cette espèce d’intimité, ce grand voisinage, avait porté bonheur à sa pensée.

1831. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Gérard Du Boulan »

Il y a celui qui fait rire et celui-là qui ne fait que sourire, et c’est celui qui ne fait que sourire qui est le comique supérieur, aussi humain, aussi réel que l’autre, mais idéalisé et donnant un plaisir plus noble et plus profond que le comique qui fait rire.

1832. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Auguste Vacquerie  »

Je le tiens aussi pour l’auteur de ce livre, signé « Vacquerie », parce que ce livre est le plus ingénieux moyen qu’ait pu inventer une vanité aussi vaste, aussi profonde et probablement aussi blasée sur toutes les formes de l’admiration que doit l’être celle de Hugo, pour se donner la sensation dernière d’un coup d’encensoir qu’il puisse sentir encore, après en avoir tant recul II fallait, par Dieu !

1833. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. J. Autran. Laboureurs et Soldats, — Milianah. »

Et plus tard, sous le sourire de Don Juan, sous la seule contraction d’ironie qui ait passé par ces lèvres pâles et si fièrement désespérées, on retrouve aussi le sérieux profond et la rêverie de celui qui partout n’est que Childe-Harold.

1834. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Ronsard »

Il y a plus profond que Ronsard, sans doute, dans les littératures humaines, mais il n’y a pas plus grand que Ronsard.

1835. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Eugène Sue » pp. 16-26

Il n’a jamais été brutalisé par cette divine Violente, la Vocation, cette tyrannie des talents profonds !

1836. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « L’Abbé *** »

Si vous joignez de plus à cela l’horripilation impudique que causent, à ces sensitives du mariage des prêtres, le dogme de l’immaculée Conception et la haine profonde pour le Marianisme, — cette affreuse religion entrevue par Michelet, — qui remplacerait prochainement le Christianisme si nous n’avions pas pour le sauver des docteurs comme des Julio de la Clavière et des abbés Trois-Étoiles, vous aurez à peu près tout ce qu’il y a de vues et de choses nouvelles dans ce Maudit, que j’appelle plutôt le mal dit ; car il est impossible de plus mal dire, il est impossible de plus manquer que ce livre du talent qui sait exprimer même des sottises, et qui parfois les fait passer !

1837. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre IX. Suite des éloges chez les Grecs. De Xénophon, de Plutarque et de Lucien. »

On trouve dans tous les deux la même douceur de style, les mêmes grâces, des vues de politique profondes, l’amour des lois et des hommes, un goût de vertu sans effort, et ce naturel touchant qui gagne la confiance du lecteur et le persuade sans le fatiguer.

1838. (1773) Essai sur les éloges « Morceaux retranchés à la censure dans l’Essai sur les éloges. »

Il ne sera pas mis non plus parmi ces grands hommes d’état nés pour être conquérants et législateurs, puissants par leur génie, grands par leur propre force, qui ont créé leur siècle et leur nation, sans rien devoir ni à leur nation ni à leur siècle : cette classe des souverains n’est guère plus nombreuse que la première ; mais il en est une troisième qui a droit aussi à la renommée : ce sont ceux qui, placés par la nature dans une époque où leur nation était capable de grandes choses, ont su profiter des circonstances sans les faire naître ; ceux qui avec des défauts ont déployé néanmoins un esprit ferme et toute la vigueur du gouvernement, qui, suppléant par le caractère au génie, ont su rassembler autour d’eux les forces de leur siècle et les diriger, ce qui est une autre espèce de génie pour les rois ; ceux qui, désirant d’être utiles, mais prenant l’éclat pour la grandeur, et quelquefois la gloire d’un seul pour l’utilité de tous, ont cependant donné un grand mouvement aux choses et aux hommes, et laissé après eux une trace forte et profonde.

1839. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

Elle était mince, blonde, avec des yeux délicieux, envoûtés dans la pénombre de profondes orbites, des mains pâles veinées de bleu, la voix très douce. […] L’impression fut grande et profonde ; jamais je ne me suis souvenue de cette première souffrance physique, endurée ce jour-là, sans qu’elle ne fût aussitôt voilée par cette splendeur : la première vision des étoiles. […] J’avais au bras une entaille profonde, devant laquelle les bonnes s’affolèrent. […] La seconde dame, d’un certain âge, richement vêtue, petite, trapue, l’air rébarbatif et grognon, m’inspira au premier coup d’œil une profonde antipathie : c’était ma grand-mère maternelle. […] Les vibrations, puissantes et profondes, d’une cloche toute voisine que ce geste mit en branle, m’épouvantèrent et j’eus si vite dégringolé l’escalier que jamais on ne put découvrir par qui avait été causé un pareil scandale !

1840. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

En somme, et pour ne retenir que ses maux durables : rétention d’urine (soit par vice de conformation, soit par mouvements spasmodiques), neurasthénie profonde, artério-sclérose, voilà son lot. […] Le ton, le sérieux, l’air de satisfaction profonde, rappellent Chateaubriand racontant son ambassade à Londres. […] Nous ne l’étions pas moins de la manière ferme, animée et profonde dont son premier essai en éloquence était écrit. […] Ses livres sortent de la même source profonde et trouble : mais je ne vois pas bien qu’ils s’engendrent logiquement l’un l’autre. […] Je ne dis pas que les écrits de Rousseau aient amené la Révolution (laquelle avait des raisons économiques profondes) : surtout je ne dis pas que seuls ils l’aient amenée.

1841. (1904) Propos littéraires. Deuxième série

Le respect est profond dans l’admiration silencieuse, grand encore dans l’office de traducteur, persistant, quoique déjà un peu familiarisé, dans l’imitation. […] » C’est diablement profond. […] Il a, depuis vingt ans environ, creusé un sillon droit et profond, sans jamais ni interrompre, ni varier le labeur. […] Brunetière pour donner de la rigueur à ce qu’il enseigne, — et cette ingénieuse, peut-être profonde, découverte tiendra une très grande place dans l’histoire de la critique et de la littérature. […] L’enfant à qui vous faites entendre la « petite bête » d’une montre, et qui, après l’avoir écoutée avec une attention profonde, se tourne vers la pendule et lui tend les bras, vient de faire une abstraction.

1842. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Les aventures ont glissé sur lui sans y laisser de traces profondes. […] Seulement, encore ici, sous l’apparente uniformité, la différence est profonde. […] Il y a plus d’aventures, comme on disait, partant plus de personnages, et s’il y a moins de réflexions, elles sont peut-être plus profondes et de plus de portée. […]  » On a cité souvent ces lignes éloquentes ; on n’en a pas assez fait remarquer l’accent profond de mélancolie. […] Quels accents de sensibilité profonde !

1843. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Conduite de l’action dramatique. » pp. 110-232

quelle connaissance profonde du cœur humain ! […] Quelquefois ce poète est aussi profond que Racine lui-même dans la connaissance du cœur humain. […] Mais si de votre cœur j’étais victorieux, Je serais plus content d’adorer vos beaux yeux, Au milieu des enfers, dans une paix profonde, Que Jupiter, le plus heureux des dieux, N’est content d’être roi de la terre et des cieux. […] L’admiration qu’excitent en nous la vertu, la grandeur d’âme, l’héroïsme, ajoute à l’intérêt théâtral ; mais cet enthousiasme est trop rapide : au lieu que les émotions de la crainte et de la pitié agitent l’âme longtemps avant de se calmer, elles y laissent des traces profondes qui ne s’effacent qu’avec peine. […] Le drame en musique doit donc faire une impression bien autrement profonde que la tragédie et la comédie ordinaire : il serait inutile d’employer l’instrument le plus puissant, pour ne produire que des effets médiocres.

1844. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre III. De la signification de la vie. L’ordre de la nature et la forme de l’intelligence. »

Il reçoit, des mains du savant, les faits et les lois, et, soit qu’il cherche à les dépasser pour en atteindre les causes profondes, soit qu’il croie impossible d’aller plus loin et qu’il le prouve par l’analyse même de la connaissance scientifique, dans les deux cas il a pour les faits et pour les relations, tels que la science les lui transmet, le respect que l’on doit à la chose jugée. […] Cherchons, au plus profond de nous-mêmes, le point où nous nous sentons le plus intérieurs à notre propre vie. […] Mais, plus le sentiment est profond et la coïncidence complète, plus la vie où ils nous replacent absorbe l’intellectualité en la dépassant. […] Et si c’est une science profonde qui est à l’œuvre, comment comprendre l’influence exercée sur la Matière sans forme par cette forme sans matière ? […] Nous faisons allusion ici, surtout, aux profondes études de M. 

1845. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

Un trait, si je ne me trompe, mais un trait caractéristique, à savoir la conviction profonde que c’est aux simples que Dieu parle et se communique. […] Je vous salue, monsieur, avec un profond respect. […] » C’est ici, dans sa simplicité, l’accent profond, et qui ne trompe pas. […] Son désespoir fut aussi profond de quitter Paris que son désenchantement, jadis, avait été vif d’y débarquer. […] Il n’est pas douteux, à vrai dire, que sa pénétration soit vive et son observation souvent profonde.

1846. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

Champlieu, aux vestiges romains, hante aussi ma pensée, avec sa lisière de bois profonds découpés à l’horizon tendre du beau pays de Valois. […] Nous n’irons plus rêver dans les bois profonds, un livre à la main ; nous nous accouderons près de l’âtre et sous la lampe. […] Dans le profond des forêts, le fauve s’élance en bondissant et la race ailée des oiseaux vole çà et là avec des cris. […] Elles ont de grands yeux profonds, qui fixent un regard énigmatique — sans énigme, peut-être : c’est là une vraie beauté. […] Dans le grand lit aux courtines closes, son mari dort, d’un sommeil profond.

1847. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

C’est une seconde, et grave, et profonde atteinte à l’idéal classique, la première étant, nous l’avons vu, l’abandon de la tradition. […] Et si l’on en demande la raison, c’est encore Diderot qui nous la donne, en remarquant que « l’homme sensible est trop abandonné à la merci de son diaphragme… pour être un profond observateur et conséquemment un sublime imitateur de la nature ». […] Nous prendrons insensiblement leur noble liberté de penser, et leur profond mépris pour les fadaises de l’école. » C’est Voltaire qui écrivait en ces termes à Helvétius, en oubliant d’ajouter que, pour son compte, et de plus, il avait pris Micromégas à Swift, son Poème de la loi naturelle à Pope, et Zaïre à Shakespeare. Et, lui-même, ayant pillé Shakespeare, il eût sans doute bien fait de ne pas détourner ses contemporains de l’une des sources de poésie les plus profondes et les plus pures qu’il y ait au monde. […] Le mépris que mes profondes méditations m’avaient inspiré pour les mœurs, les maximes et les préjugés de mon siècle me rendait insensible aux railleries de ceux qui les avaient, et j’écrasais leurs petits bons mots avec mes sentences, comme j’écraserais un insecte entre mes doigts » [Cf. 

1848. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

Il était beau, il avait le front élevé, la barbe noire, l’air bienveillant, le regard limpide et profond. […] Bien qu’on soit deux moitiés de la société, Ces deux moitiés pourtant n’ont point d’égalité : L’une est moitié suprême, et l’autre subalterne ; L’une en tout est soumise à l’autre qui gouverne ; Et ce que le soldat, dans son devoir instruit, Montre d’obéissance au chef qui le conduit, Le valet à son maître, un enfant à son père, À son supérieur le moindre petit frère, N’approche point encor de la docilité, Et de l’obéissance, et de l’humilité, Et du profond respect où la femme doit être Pour son mari, son chef, son seigneur et son maître24. […] Mes yeux sont trop blessés, et la cour et la ville Ne m’offrent rien qu’objets à m’échauffer la bile ; J’entre en une humeur noire, en un chagrin profond, Quand je vois vivre entre eux les hommes comme ils font ; Je ne trouve partout que lâche flatterie, Qu’injustice, intérêt, trahison, fourberie ; Je n’y puis plus tenir, j’enrage ; et mon dessein Est de rompre en visière à tout le genre humain. […] Qui suit bien ses leçons goûte une paix profonde, Et comme du fumier regarde tout le monde.

1849. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Là-dedans, au milieu de ce mobilier d’un autre siècle, l’ovale délicat de son pâle visage, ses yeux noirs doux et profonds, la sveltesse de sa personne longuette, lui donnent quelque chose d’une apparition, d’un séduisant et souriant fantôme ; caractère que je retrouve dans son portrait pastellé par Helleu. […] Et au milieu de tous ces visages, vous êtes attiré par des visages d’enfants, aux tempes lumineuses, au bossuage du front, à la linéature indécise des paupières autour du noir souriant de vives prunelles, aux petits trous d’ombre des narines, au vague rouge d’une molle bouche entr’ouverte, à la fluidité des chairs lactées qui n’ont point encore l’arrêt d’un contour, — des figures d’enfants regardées en des penchements amoureux, qui sont comme des enveloppements de caresse, par des visages de femmes aux cernées profondes, aux creux anxieux, aux grandes lignes sévères du dessin de l’Inquiétude maternelle. […] J’ai contre ma poitrine ma petite chatte, dont le corps est agité par des secousses, comme données par le contact d’une pile électrique, et sur moi, ce n’est plus le regard distrait de la petite bête de tout à l’heure, c’est le regard profond, mystérieux, énigmatique d’une réduction de sphinx. […] Là-dessus, à la suite de son père, le jeune Daudet déclare sans respect pour les théories de Zola, que la symphonie est la seule forme haute de la musique, et professe très éloquemment, que la musique ne doit avoir qu’une action auditive, et donner un plaisir des sens, s’étend sur Beethoven, et en parle un long temps en passionné, un long temps, pendant lequel Zola garde le silence… au bout de quoi, après un profond soupir, et avec la voix presque plaintive d’un enfant, il laisse tomber : « Pourquoi voulez-vous contrarier mon projet d’opéra ? 

1850. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Note »

Mille échappées, où l’on ne voyait auparavant que des accès de fantaisie, prennent un sens profond et précis qu’elles n’avaient pas.

1851. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre IV »

Dans un festin donné par un prince du sang789, la table de cent couverts, dressée sous une tente immense, était servie par les grenadiers, et l’odeur qu’ils répandaient offusqua la délicatesse du prince. « Ces braves gens, dit-il un peu trop haut, sentent diablement le chausson. » Un grenadier répondit brusquement : « C’est parce que nous n’en avons pas », et « un profond silence suivit cette réponse »

1852. (1890) L’avenir de la science « VI »

Mais vouloir bannir le style exact et technique, qui seul peut exprimer certaines nuances délicates ou profondes de la pensée, c’est tomber dans un purisme aussi peu raisonnable.

1853. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 272-292

Dans l’exposition des événemens, le Poëte a su accorder la politique la plus profonde avec les idées de la justice la plus sévere.

1854. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau, et Joseph Saurin. » pp. 28-46

Quelques-unes de ses épîtres, qui roulent sur des sujets utiles, prouvent son bon goût, un jugement sain, une littérature profonde.

1855. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les traductions. » pp. 125-144

On desire de connoître, d’après lui, Tacite, cet historien qui a si bien peint l’ame fausse, impérieuse, dissimulée & cruelle de Tibère, exécrable imposteur, modèle de Cromwel pour les grandes qualités & les grands vices ; cet historien, qui a si bien nuancé le caractère des Romains, qui veut prouver que tout, dans le sénat & chez Tibère, se faisoit par une combinaison de crimes ; cet historien dans qui l’on remarque un esprit d’ordre & de suite, des réflexions & des vues profondes & lumineuses, un talent merveilleux pour faire des tableaux.

1856. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIV. L’auteur de Robert Emmet »

Lord Byron, à lui seul, l’emporte, en intérêt littéraire et surtout en intérêt de nature humaine, sur tous ces Allemands sans passion ardente et profonde et qui n’ont de nature humaine que dans le cerveau… La vie de ce grand poëte, qui s’est élevé jusqu’au grand homme, est autre chose que celle de ces travailleurs en rêveries dont l’existence ressemble à une table des matières de leurs œuvres, dans laquelle elle tient… Pour tout homme, pour tout être si heureusement et si puissamment organisé qu’il soit, la vie de Byron est un sujet de critique et de biographie de la plus redoutable magnificence ; car Byron fut comme le plexus solaire du xixe  siècle, et tous les nerfs de la société moderne, cette terrible nerveuse, aboutissent à lui… Toucher à cet homme central, magnétique et vibrant, qui mit en vibration son époque, c’est toucher à l’époque entière… Jusqu’ici, ceux qui y ont touché s’y sont morfondus.

1857. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Tallemant des Réaux »

Touché et séduit par l’idée qu’il eût pu, s’il avait vécu de son temps, étaler ses aiguillettes et ses canons à côté de la robe bouffante de madame de Fiesque ou de la marquise de Sablé, Paulin Paris n’a pas un mot profond, grave et vrai, sur ce xviie  siècle qui attend toujours son juge, et qui, pour des raisons diverses, impose à tant de gens, tous plus ou moins compromis dans cette conspiration contre l’Histoire qui dure depuis deux cents ans et que de Maistre a dénoncée, mais sans pouvoir la faire condamner.

1858. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Louis XVI et sa cour »

Tous ces portraits, les uns éclatants, les autres profonds, dans le détail desquels nous entrerons peut-être un jour, classeront désormais fort à part et fort haut parmi les portraitistes historiques le continuateur de Sismondi.

1859. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Ch.-L. Livet »

« Il est aussi impossible de dire quand les réunions de Rambouillet ont commencé que quand elles cessèrent », écrit-il avec un découragement profond.

1860. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de la Révolution » pp. 73-87

Pour la punir, Michelet lui a refusé net le génie : « La naïveté profonde — dit-il — et la grande invention (qu’appelle-t-il la grande invention ?)

1861. (1880) Goethe et Diderot « Introduction »

, qui égara l’esprit français — si clair même quand il est profond — dans la brume épaisse de ces systèmes où l’on voit tout ce qu’on veut y voir, comme dans la musique et les nuages… De son côté, le Romantisme, en train d’accomplir, vers ce temps, la révolution dont nous sommes sortis, accepta, dans l’ébriété de sa jeune vie, — car il était la vie alors !

1862. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Charles d’Héricault » pp. 291-304

Il a publié plusieurs ouvrages d’une érudition souvent raffinée et profonde.

1863. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Armand Carrel » pp. 15-29

Nous y retrouvons le vide profond d’une opposition politique que nous avons vue à l’œuvre depuis, et qui, au temps de Carrel, se demandait si elle devait parler par la fenêtre ou sur la borne, et qui préférait la fenêtre encore !

1864. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « G.-A. Lawrence »

Il y a deux femmes, en effet, dans Guy Livingstone, les deux femmes éternelles qui sont partout, dans toutes les œuvres humaines, quelque nom qu’elles portent ; les deux types primitifs, dont les autres femmes ne sont jamais, plus ou moins, que les divers mélanges ou les dégradations… Il y a la Provocante terrible, le démon charmant, l’Astarté, et en vis-à-vis, pour le combat qui doit la tuer, la Pudeur fière, l’Amour profond, celle qui presque toujours, dans sa lutte contre l’autre, doit mourir… L’auteur de Guy Livingstone n’a pas inventé, en fait de femmes, quelque combinaison nouvelle de caractère ; mais son invention, c’est son intensité.

1865. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Byron »

Grenier, qu’il est le premier peut-être de tous ceux qui ont parlé de Byron qui ait signalé cette profonde grécité de sa poésie, oubliée par M. 

1866. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIII. Pascal »

Le Pascal profond n’est pas plus dans son initiative scientifique que dans l’originalité de sa langue littéraire.

1867. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XX. M. de Montalembert »

Au lieu d’une histoire qui se tienne, comme une fresque, dans une unité brillante ou profonde, nous aurons une histoire, morcelée en panneaux étroits, avec un semis de petits médaillons, grands comme le fond de la main, et uniformément petits, quoique déjà il y ait, parmi tous ces moines oubliés de l’histoire, parmi toute cette masse immense de violettes de sainteté humble qui trouvent, elles !

1868. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « MM. Delondre et Caro. Feuchtersleben et ses critiques. — L’Hygiène de l’âme » pp. 329-343

Il avait — avec un observateur très profond, dit-il, — remarqué que la musique « avait pour but la santé », — ce dont ne se doutait guères Beethoven, et il se régala de musique.

1869. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « L’abbé Monnin. Le Curé d’Ars » pp. 345-359

Ce n’était pas tel mot qui a résonné fort, tel accent qui a vibré profond, telle éjaculation si bouillonnante et si sublime qu’elle fait flamboyer la page inerte qui s’efforce de la répéter ; non pas !

1870. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Athanase Renard. Les Philosophes et la Philosophie » pp. 431-446

Dès qu’il a pu penser par lui-même en dehors de ses maîtres, la vie intellectuelle du Dr Athanase Renard a été de la plus profonde unité.

1871. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Victor Cousin »

Il avait les facultés nécessaires à cette besogne ; il avait le degré qu’il faut de sagacité, d’érudition, d’enthousiasme et même de duperie, pour aller chercher des idées dans des livres profonds et obscurs comme des puits, où elles se tiennent peut-être pour se faire croire la Vérité, et pour les verser dans les esprits qui les ignorent, après les avoir fait passer par cette langue française, qui est la langue universelle de la clarté, comme par un crible lumineux !

1872. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Guizot »

Sépulcre (au fond) de scepticisme, blanchi et recrépi de protestantisme à la surface, c’est le Guizot de toute sa vie que nous retrouvons dans ce livre, mais avec des changements profonds et des modifications singulières.

1873. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Marquis Eudes de M*** »

Mais pour ceux qui sentent en eux-mêmes cet impérieux besoin de conclusion, qui est, après tout, la passion la plus spontanée et la plus profonde de l’intelligence humaine, le livre des Esprits doit avoir une bien autre portée que celle d’un livre d’histoire.

1874. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « José-Maria de Heredia »

José-Maria de Heredia58 I Cette Histoire d’une conquête 59 en est une sur l’imagination… Cette antique chronique d’un vieux chroniqueur oublié et à peu près inconnu en France, traduite par la fantaisie éprise d’un écrivain qui a du sang espagnol et conquérant dans les veines et la plus profonde culture de la langue française, ce récit, si différent, par les sentiments et par le ton, du ton et des sentiments de l’histoire moderne, a fait son chemin en deux temps, comme les Dieux d’Homère.

1875. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Soulary. Sonnets humouristiques. »

Joséphin Soulary bien supérieur à tous les autres poètes d’une École qui ne se soucie que de l’expression, c’est le fond humain qui palpite en lui, c’est cette profonde sensibilité qui est toujours exquise, — quand elle cesse d’être cruelle.

1876. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Auguste Barbier »

des patauderies du sublime auteur du Pianto et qui tiennent à la profonde ignorance de son métier, passerait toute créance.

1877. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Théodore de Banville »

Le voici, à présent, tête de colonne parmi les Profonds.

1878. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Sandeau » pp. 77-90

Sandeau appartient à cette moralité bourgeoise qui n’a pas de croyance solide et profonde, mais qui ne veut pas qu’on lui vole ses chemises ou qu’on les lui chiffonne, et qui, comme Voltaire, trouve que, si Dieu n’existait pas, il faudrait l’inventer… pour les domestiques.

1879. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Malot et M. Erckmann-Chatrian » pp. 253-266

Malot ne semble guère avoir le sens des grandes cérémonies catholiques, inépuisables de poésie attendrissante et profonde.

1880. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Armand Pommier » pp. 267-279

« Si ce n’est qu’impossible, cela se fera », la part de la physiologie dans le roman, cette part dont nous parlions au commencement de ce chapitre, demandera toujours, en tout état de cause, au romancier qui voudra la faire, une grande réserve, une prudence profonde, et en sûreté de lui-même, ce que je nomme la souveraineté de la main.

1881. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « G.-A. Lawrence » pp. 353-366

Il y a deux femmes, en effet, dans Guy Livingstone, les deux femmes éternelles qui sont partout, dans toutes les œuvres humaines, quelque nom qu’elles portent ; les deux types primitifs, dont les autres femmes ne sont jamais, plus ou moins, que les divers mélanges ou les dégradations… Il y a la Provocante terrible, le démon charmant, l’Astarté, et en vis-à-vis, pour le combat qui doit la tuer, la Pudeur fière, l’Amour profond, celle qui presque toujours, dans sa lutte contre l’autre, doit mourir… L’auteur de Guy Livingstone n’a pas inventé, en fait de femmes, quelque combinaison nouvelle de caractère ; mais son invention, c’est son intensité.

1882. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Ernest Feydeau »

Dans un roman qui devrait être, comme tout roman, une profonde ou riche étude du cœur humain, il nous a donné beaucoup de cabotinisme, suffisamment de Bade, beaucoup de Pologne, un peu de Californie, et, pour terminer la chose, une brûlure de danseuse en plein théâtre.

1883. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIX. Panégyriques ou éloges composés par l’empereur Julien. »

Tous, à l’abri de l’ennemi domestique et étranger, vivront dans une paix profonde, adorant leur souverain, qui est pour eux l’auteur de tant de biens, remerciant les dieux, et invoquant sur lui les faveurs célestes.

1884. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXIV. Siècles de barbarie. Renaissance des lettres. Éloges composés en latin moderne, dans le seizième et le dix-septième siècles. »

Son amour pour la gloire était plutôt une coquetterie inquiète, qui tenait à l’esprit, qu’un de ces sentiments profonds qui subjuguent l’âme et la remplissent : aussi obtint-elle plus de célébrité que de gloire.

1885. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIV. Des panégyriques depuis la fin du règne de Louis XIV jusqu’en 1748 ; d’un éloge funèbre des officiers morts dans la guerre de 1741. »

Ce livre, où les idées morales sont souvent profondes, où l’expression est quelquefois négligée, mais vigoureuse, où l’on voit partout une âme pleine d’humanité jointe à un caractère plein de force, peut à plusieurs égards être comparé à nos meilleurs livres de morale.

1886. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

L’Asie Mineure est une autre Amérique, à la porte de l’Europe. » Et ce grand esprit, qui n’avait pas dédaigné de tracer le modèle d’un travail de statistique usuel pour Paris, mais qui, dans sa profonde science mathématique, gardait et laissait voir un instinct d’élévation morale, était inépuisable dans ce qu’il disait alors de cette renaissance d’un monde oriental annexé à l’Europe et gouverné par ses arts et son humanité.

1887. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

C’est en 1830 que vient au premier plan ce sentiment profond d’une liaison entre la révolution littéraire et la révolution politique. […] Vigny, Hugo, Musset, Lamartine ont écrit des romans, sans en avoir la vocation profonde et parce que l’élan même de l’époque romantique l’exigeait. […] Ensuite à leurs profondes racines dans un cœur d’homme : les deux apologies pour le silence, la Mort du Loup et le Mont des Oliviers, sont vraiment un testament du poète, qui a su lui-même se taire, maintenir derrière les barrages de granit la vie intérieure attestée par le Journal. […] Une âme neuve et profonde s’insinue, pour les pénétrer, les amollir, les rendre fusibles, conquérir les jeunes gens et les femmes, dans les vers de Lamartine et de Vigny. […] À vingt-deux ans il connaît sa langue, il a le sens commun et profond du vers, beaucoup mieux que Lamartine et Vigny ne les posséderont jamais.

1888. (1905) Promenades philosophiques. Première série

Bacon, cependant, a des moments de calme profond. […] Seuls aujourd’hui quelques ecclésiastiques affirment encore la profonde sincérité religieuse de René. […] Or, la peine, qui est dépressive, laisse dans la vie des traces plus profondes que la joie. […] Les paysages de France, ou d’Italie ou d’Angleterre, ou de tout pays de civilisation ancienne et profonde, sont l’œuvre des hommes. […] Un fossé plus profond que celui qui sépare le français d’aujourd’hui de celui du douzième siècle se creusera entre hier et demain.

1889. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre I. La Renaissance païenne. » pp. 239-403

Enfin le calme est revenu, et pendant cette éclaircie l’esprit agile et brillant joue comme une flamme voltigeante à la surface du profond foyer qui couve. […] Le profond sentiment de la nature, la sincérité de la rêverie, la fécondité de l’inspiration toujours coulante, le sérieux germanique raniment ici les inventions classiques ou chevaleresques qui semblent les plus vieillies et les plus usées. […] Au plus profond de la terre, il repose, enveloppé dans les molles vapeurs dont Téthys baigne son lit humide ; Diane répand les perles de la rosée sur sa tête éternellement penchée : et la Nuit mélancolique a posé sur lui sa robe obscure. […] Les divines figures, les regards sérieux ou profonds, les expressions virginales ou passionnées qui éclataient à chaque pas dans les premiers poëtes ont disparu ; on ne voit plus ici que des minois agréables peints par des vers agréables. […] Sous ces profondes cavernes d’érudition et de science, il en est une plus noire et plus inconnue que toutes les autres, comblée d’auteurs ignorés, de noms rébarbatifs, Besler de Nuremberg, Adricomius, Linschoten, Brocarde, Bredenbachius.

1890. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

Mais leur idée profonde, ésotérique, est partout la même et constitue la vérité primordiale. […] Il est possible qu’on éprouve quelque peine à en saisir toutes les significations profondes. […] Jules Lemaître portent en eux-mêmes leur signification profonde. […] Ce passage de signification correspond à une vérité profonde ; le libertinage de la pensée conduit au libertinage du cœur. […] Tendre et profond dévouement. — J. 

1891. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

À la vingt-cinquième marche, il tomba sur le palier, la face contre terre, en poussant un profond soupir… » Il était impossible de mieux peindre cette épouvantable scène qui nous montre en même temps que le courage de l’homme, la lâcheté des foules. […] Cette voix profonde, qui se voilait et défaillait, la caressait à son insu. […] « Un soupir grave, long, profond et déchirant s’exhala par tout le jardin. […] Mais j’ai l’absolue certitude que mon père ne l’avait jamais souhaitée et que, au contraire, il l’avait vue venir avec une profonde douleur. […] C’est surtout en lisant ces pages écrites pour ainsi dire sous la dictée des faits qui se succédaient sans relâche, des complications qui surgissaient à chaque pas au dedans et au dehors, qu’on peut comprendre dans quel profond désarroi se trouvait alors la France.

1892. (1900) La vie et les livres. Cinquième série pp. 1-352

Ils aimaient sa probité littéraire, le réalisme classique de son langage, son ironie subtile et profonde. […] Un gros nez à bout carré, de forme curieuse ; le front haché de quatre profondes rides cruciales ; l’œil rond, froid, un peu dur, à l’ombre d’un sourcil épais et derrière le miroitement du pince-nez. […] Nous étions tous deux assis dans l’embrasure profonde d’une fenêtre, quand tout à coup un rire étrange, saccadé, continu, a éclaté dans l’embrasure de la fenêtre voisine. […] Cette taciturnité devint, de jour en jour, plus profonde. […] La règle de beauté, qui fut le principal secret de sa maîtrise en l’art d’écrire, lui a permis, malgré le scepticisme profond dont il était atteint, d’établir une distinction entre les actions humaines.

1893. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

Ses systêmes physiques, plus brillans que profonds, ont croulé. […] Mallebranche est un des plus profonds méditatifs qu’on connoisse : il lisoit très-peu. […] Que cet ouvrage est profond & lumineux ! […] Un seul cordelier gardoit un profond silence. […] Jugeant la chose impossible, il ordonna, sous peine d’excommunication, un profond silence, & se chargea lui-même de réduire les argumens pour & contre dans un sens clair & précis.

1894. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

Aussi les tourments de conscience, qui aujourd’hui causent de si profonds remords, à un Gladstone, à un Morley, pour les péchés de leurs aïeux, n’étaient guère susceptibles d’agir sur un Marcius ou un Quinctius ! […] Blunt en prison, il a fait d’un rimeur habile un poète plein de gravité et de pensée profonde. […] Il y a une vie des choses les plus charmantes Sur toi, en ton sommeil si profond. […] Le repos n’a rien dont la fraîcheur soit à moitié aussi profonde Que le doux matin, qui réveille de nouveau mon cœur. […] Mes plus purs moments sont votre fidèle miroir ; Ma plus profonde pensée trouve en vous la vérité la plus brillante.

1895. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Le Chevalier de Méré ou De l’honnête homme au dix-septième siècle. »

Un galant homme a de certains agréments qu’un honnête homme n’a pas toujours ; mais un honnête homme en a de bien profonds, quoiqu’il s’empresse moins dans le monde. […] me répondit mon ami avec un profond soupir, de quoi m’allez-vous parler ? […] J’avois eu tant d’attention à son discours, que j’allois le prier de continuer, quand je vis dans ses yeux une tristesse si tendre et si profonde, que je crus qu’il étoit près de s’évanouir.

1896. (1860) Cours familier de littérature. X « LIXe entretien. La littérature diplomatique. Le prince de Talleyrand. — État actuel de l’Europe » pp. 289-399

Il en paraissait plus profond. […] Napoléon craint d’aliéner une pensée si vaste et si profonde de son gouvernement ; il la décore en l’éloignant. […] Thiers ait donné à ce favori de Napoléon la qualification de grand citoyen, de profond négociateur, d’homme d’État.

1897. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

Cette supposition impliquerait d’ailleurs le mystère le plus profond répandu par Alphonse sur l’état d’esprit et sur le supplice de sa victime. […] C’est l’histoire imaginaire, l’histoire altérée par les fables, l’histoire encadrée dans la poésie, mais enfin l’histoire, c’est-à-dire le récit, conforme aux temps, aux mœurs, aux costumes, aux événements, d’une des grandes races qui ont apparu sur la scène du monde, ou d’un des grands faits qui ont imprimé leur trace profonde sur la terre. […] « Telle on voit la mer Égée, lorsque les vents qui soulevaient ses flots sont rentrés dans leurs grottes profondes : le calme ne règne point encore sur son sein, et ses ondes obéissent toujours au mouvement dont elles furent agitées.

1898. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

« J’avais désiré et j’ai obtenu que cet ensemble offrît l’aspect sévère et simple d’un tableau flamand, et j’ai pu ainsi faire sortir quelques vérités morales du sein d’une famille grave et honnête ; agiter une question sociale, et en faire découler les idées de ces lèvres qui doivent les trouver sans effort, les faisant naître du sentiment profond de leur position dans la vie. […] « Il ne répondit pas, et se mit à décrire toutes les sortes de canots que peut porter un brick, et leur position dans le bâtiment ; et puis, sans ordre dans ses idées, il continua son récit avec cet air affecté d’insouciance que de longs services donnent infailliblement, parce qu’il faut montrer à ses inférieurs le mépris du danger, le mépris des hommes, le mépris de la vie, le mépris de la mort et le mépris de soi-même ; et tout cela cache, sous une dure enveloppe, presque toujours une sensibilité profonde. — La dureté de l’homme de guerre est comme un masque de fer sur un noble visage, comme un cachot de pierre qui renferme un prisonnier royal. […] La boue devenait plus épaisse et plus profonde.

1899. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

  Des commencements difficiles, une fin cruelle, des espérances renaissantes et toujours trompées, une ambition sans scrupule et en même temps sans prudence, le funeste privilège d’inspirer des passions profondes et de ne les point ressentir, de connaître et de peindre, avec une force incomparable, les misères de la nature humaine, et de pouvoir être cité soi-même comme un vivant exemple de la vérité de ces peintures, telle fut en ce monde la destinée de Swift qui s’y résigna d’autant moins qu’il la comprit davantage, et qui prit l’amère habitude de relire, chaque fois que l’année ramenait le jour de sa naissance, le chapitre de l’écriture où Job déplore la sienne et maudit cette nuit fatale où l’on annonça dans la maison de son père qu’un enfant mâle était né. […] L’art profond de Swift, pour prendre et soutenir un personnage, apparaît ici consommé et arrivé à sa dernière perfection. […] Ce mépris, plus complet et plus profond que les autres, puisqu’il enveloppe les idées mêmes qui servent de fondement aux autres, ce mépris amer et désespéré a aussi sa grandeur et son triste repos.

1900. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

Wilder accomplit un tour de force : reproduire en des poèmes élégants, clairs, certes exacts, les intenses et profonds drames de Wagner ! […] L’horreur de cette affreuse nuit, dont l’obscurité devient de plus en plus profonde à mesure que la narration de Tannhaeuser avance, monte à son comble à l’apparition des demeures de Vénus, dans la montagne qui s’entrouvre comme pour engouffrer sa proie, et où la Déesse elle-même se fait voir appelant et entraînant sa victime. […] Il est le créateur d’une vie profonde et suprême, éclairée par une philosophie merveilleuse.

1901. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre X, Prométhée enchaîné »

Pour elles, dans leur grotte profonde, pendant neuf ans, je forgeai mille ornements ; des agrafes, des anneaux, des colliers, des pendants d’oreilles. […] Tout est nocturne, secret, clandestin dans cette nymphe élémentaire qui vit à l’écart des autres dieux, au fond d’une grotte profonde : maîtresse cachée comme un trésor, que l’Olympien ne possède qu’au sein des ténèbres. […] » — Mot profond qui, rapproché de la nature cosmique du Titan, semble opposer aux dieux qui passent la pérennité de la nature qui demeure.

1902. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre quatrième. L’idée du temps, sa genèse et son action »

Cette première difficulté levée, c’est, selon nous, dans la nature de la sensibilité et de la volonté qu’on doit chercher les raisons les plus profondes de la conception de la durée ; c’est par son rapport à la sensibilité et à l’activité motrice que chaque représentation, chaque idée est une force psychique, et c’est parce qu’elle est une force en ce sens qu’elle peut, nous allons le voir, produire la conscience du temps. […] Voir la profonde analyse de Guyau, Genèse de l’idée de temps, p. 32 : « Le futur, à l’origine, c’est le devant être, c’est ce que je n’ai pas et ce dont j’ai désir ou besoin, c’est ce que je travaille à posséder ; comme le présent se ramène à l’activité consciente et jouissant de soi, le futur se ramène à l’activité tendant vers autre chose, cherchant ce qui lui manque. […] Nous pouvons nous en faire une idée, même à l’état sain : il y a des cas d’absorption profonde dans une pensée ou dans un sentiment, d’extase même où le temps disparaît de la conscience.

1903. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

Ajoutez à ces folies de la tête et des sens, un sincère courage, une bienveillance inépuisable, et la profonde conviction parmi, ces rois d’un monde croulant, que leur empire leur échappe, et qu’ils ne seront plus, demain, que des victimes. […] Aussi la tristesse de cette retraite a-t-elle été grande, profonde, bien sentie. […] Comédienne dans son moindre geste, dans son sourire, dans le pli de sa robe, dans la forme et dans la couleur de ses habits, dans le son de sa voix, cette voix touchante et ingénue, douce musique qui allait à l’âme, raillerie, innocence, bel esprit, moquerie pleine de verve, causerie sans fin, gracieuse façon de tout dire, profond sentiment, non seulement des ridicules humains, mais encore des misères humaines ; sa comédie avait quelque chose de grave et d’ingénu tout à la fois, quelque chose de sérieux et de jeune en même temps auquel il eût été bien difficile de résister.

1904. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre I. Des poëtes anciens. » pp. 2-93

Cette version est aussi fidelle qu’élégante, & ce que l’Auteur y ajoute pour éclaircir la Mythologie, ne peut qu’être le fruit d’un savoir profond. […] Il n’a encore rien paru de si raisonnable & de si profond sur ce sujet. […] Il a moins considéré ce Poëte comme le maître ou le précurseur de Virgile, que comme un Philosophe profond & sublime, qui déduit avec beaucoup d’art des principes qu’il a établis, l’explication des phénomènes de la nature.

1905. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

Il y avait, en ce temps-là, de sourdes et profondes divisions à la Bibliothèque, et l’on sait qu’il n’est rien de tel ni de plus aigre en son genre que les haines de bibliothécaires, c’est-à-dire de gens qui se voient tous les jours, qui sont assis presque en face, qui se détestent d’une table à l’autre, et qui passent leur vie à accumuler des fluides contraires. […] Magnin, nous devons le dire, furent marquées par des changements profonds que nous n’avons à juger en aucun cas, et qui ne le laissèrent pas tout à fait le même que nous venons de le montrer.

1906. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

Si, dans le Jocelyn que nous possédons, on aperçoit jusqu’à la fin quelque trait d’amour trop tendre, ce reste de faiblesse a dû être corrigé, durant les longues années suivantes, par cette vie toute pratique, de laquelle le Botaniste nous a dit :  La douleur qu’elle roule était tombée au fond ; Je ne soupçonnais pas même un lit si profond ; Nul signe de fatigue ou d’une âme blessée  Ne trahissait en lui la mort de la pensée ; Son front, quoiqu’un peu grave, était toujours serein ; On n’y pouvait rêver la trace d’un chagrin  Qu’au pli que la douleur laisse dans le sourire, À la compassion plus tendre qu’il respire.  […] Après un court voyage à Paris (vers 1800), où il retrouve, sans lui parler, Laurence en proie aux dissipations du monde, et après avoir aussi conçu une rapide et profonde idée de la renaissance du siècle, Jocelyn s’enfuit à la hâte vers ses montagnes et se replonge en cet air âpre et vivifiant dont il a besoin pour ne pas défaillir.

1907. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. VILLEMAIN. » pp. 358-396

En son bel article sur Byron, déjà cité, il offense, il évince presque en deux mots du rang des vrais poëtes le tendre et profond Cowper, le sublime Wordsworth ; il les rejette négligemment parmi les esprits singuliers et maladifs, êtres sans puissance sur l’imagination des autres hommes. […] Non, l’auteur de Michaël ou du Vieux Mendiant du Cumberland (pour prendre au hasard de courts et enchanteurs poëmes) n’est pas inférieur à Byron en génie simple, en peinture naturelle et profonde, comme il l’est en gloire.

1908. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre II. Principale cause de la misère : l’impôt. »

Il est donc manifeste que la pesanteur de l’impôt est la principale cause de la misère ; de là des haines accumulées et profondes contre le fisc et ses agents, receveurs, officiers des greniers, gens des aides, gens de l’octroi, douaniers et commis  Mais pourquoi l’impôt est-il si pesant ? […] Partout, contre les octrois, les barrières et les commis, la haine populaire est profonde.

1909. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIe entretien. La passion désintéressée du beau dans la littérature et dans l’art. Phidias, par Louis de Ronchaud (1re partie) » pp. 177-240

XXIV On remonte de ces entonnoirs des gorges du Jura sur d’autres plateaux d’où l’on redescend de nouveau pour admirer des scènes semblables et pour remonter encore à d’autres plateaux, jusqu’au nœud principal et culminant de ces montagnes aux trois grandes et profondes vallées, divergeant et serpentant, comme des rayons de roue divergent du moyeu, en courant vers la plaine. […] Des fenêtres de ce pavillon, on plonge à gauche sur la profonde gorge descendant vers la ville de Saint-Claude, de l’autre sur le château de Prat, dont mon père a porté quelque temps le nom et qui était un des domaines de mon grand-père dans cette contrée.

1910. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 5-64

Deux grands bœufs blancs, aussi luisants que le marbre des statues qui brillent sur le quai de Pise, étaient attelés au timon du char : un petit bouvier de quinze ans, avec son aiguillon de roseau à la main, se tenait debout, arrêté devant les gros bœufs ; il leur chassait les mouches du flanc avec une branche feuillue de saule ; leurs cornes luisantes, leur joug poli, de bois d’érable, étaient enlacés de sarments de vigne encore verte dont les pampres et les feuilles balayaient la poussière de la route jusque sur leurs sabots vernis de cire jaune par le jeune bouvier ; ils regardaient à droite et à gauche, d’un œil doux et oblique, comme pour demander pourquoi on les avait arrêtés, et ils poussaient de temps en temps des mugissements profonds, mais joyeux, comme des zampognes vivantes qui auraient joué d’elles-mêmes un air de fête. […] Elle séparait la maison du bargello de la petite cour profonde et étroite de la prison, sur laquelle les cachots grillés des détenus prenaient leur jour.

1911. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série «  Leconte de Lisle  »

Sombre douleur de l’homme, ô voix triste et profonde, Plus forte que les bruits innombrables du monde, Cri de l’âme, sanglot du cœur supplicié, Qui t’entend sans frémir d’amour et de pitié ? […] Longtemps, sous la sérénité de la forme, la poésie grecque a caché de profondes tristesses.

1912. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

La musique la plus secrète d’une langue, celle qui se traduit par la poésie, ne se révèle que par celui qui appartient à cette langue tout entier et qui plonge en elle chacune de ses plus profondes racines. […] la Bretagne idéaliste et légendaire : personne, ou pis encore, Paul Féval (« Prends ta Vierge d’ivoire… ») et Brizeux dit le Sapeur ; le Morvan et ses profondes forêts, personne, non plus qu’en Angoulême, en Anjou, etc.

1913. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 février 1885. »

Montrons, autant qu’il sera en nous, par des documents d’ordre privé, des souvenirs, des notes familières, ce qui fut l’homme en ce créateur prodigieux qui a tiré de soi-même un art complet, à jamais vivant ; racontons s’il se peut, la genèse de ses ouvrages, de la conception première au plein épanouissement de l’exécution et, tout au moins, efforçons-nous d’en traduire le frisson particulier ; descendons à l’examen des procédés techniques — surtout des moyens expressifs ; répandons, enfin, notre admiration profonde et raisonnée pour ce génie hors de pair qui a ramené le Théâtre musical à l’humanité, à la vérité, à la musique. […] « J’ai lu et relu, continue-t-il, cette page étrange ; je l’ai écoutée avec l’attention la plus profonde et un vif désir d’en découvrir le sens ; eh bien, il faut l’avouer, je n’ai pas encore la moindre idée de ce que l’auteur a voulu faire… » Berlioz ne pouvait cependant méconnaître absolument la valeur de ce prélude : « Ce compte-rendu sincère, dit-il, met assez en évidence les grandes qualités musicales de Wagner.

1914. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Victor Hugo » pp. 106-155

Hugo d’écrire les singulières pièces finales de la Légende des Siècles et des Contemplations, ces tentatives désespérées d’exprimer l’inexprimable et l’inintelligible, où le poète livrant avec les mots une terrible bataille à de vagues ombres d’idées, accomplit ses plus merveilleux prodiges de parolier, et mesure ses plus profondes chutes. […] Enfin, et par une cause plus profonde, M. 

1915. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VII. M. Ferrari » pp. 157-193

Ferrari soit uniquement un penseur désintéressé, comme tout fataliste devrait l’être, ou qu’il cache, sous les rigides et impérieuses formes d’un système, un patriotisme profond contre lequel le patriotisme officiel et braillard des partis s’élèvera peut-être, nous ne savons et peu nous importe ! […] C’est à la fois de l’imagination la plus savante et là plus profonde.

1916. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

… L’auteur de La Faute de l’abbé Mouret n’en fait pas moins contre le catholicisme acte de haine profonde, malgré l’insignifiance de son impiété. […] Tout est en volonté chez lui, et il n’y a que l’inspiration qui fasse de l’art vrai et profond.

1917. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

Les douleurs de l’adultère sorties de l’adultère, tenant uniquement à ce fait, que les deux amants sont adultères, et se produisant pour emporter le bonheur qui semble préservé par tous les hasards de la vie, voilà le sujet digne d’un observateur profond dans lequel il fallait plonger, et, pour y plonger mieux, il fallait écarter tout ce qui énervait cette donnée terrible de l’adultère, se frappant lui-même et se retournant contre le bonheur qu’il avait donné. […] Feydeau, en écrivant Daniel, n’a pas cédé à l’entraînement de sa veine ; il l’aurait plutôt contrariée s’il en avait eu une, mais il n’en avait pas ; il n’avait pas assez, pour la faire grimacer dans l’effort, de spontanéité décidée et profonde.

1918. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre III. De la logique poétique » pp. 125-167

Pour établir ces principes sur une base plus solide encore, nous devons attaquer l’opinion selon laquelle les hiéroglyphes auraient été inventés par les philosophes, pour y cacher les mystères d’une sagesse profonde, comme on l’a cru des Égyptiens. […] C’est donc avec raison que Bacon, aussi grand philosophe que profond politique, recommande l’induction dans son Organum.

1919. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Waterloo, par M. Thiers »

Au reste, il ne s’agit pas de charger en rien Ney, le brave des braves, mais d’expliquer la suite des faux pas, des malentendus dont un ou deux, ou trois encore, eussent été réparables, mais qui, en s’ajoutant tous, en s’accumulant opiniâtrement et sans relâche jusqu’à la fin, comblèrent la mesure et firent mentir dans ses calculs les plus profonds et les plus justes le génie moderne des combats.

1920. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Waterloo, par M. Thiers (suite) »

J’aime la vérité assurément et la réalité franche, je le répète assez souvent ; je sais même surmonter un dégoût pour arriver au plus profond des choses, au plus vrai de la nature humaine ; mais je m’arrête là où l’inutilité saute aux yeux et où la puérilité commence.

1921. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Dübner »

D’un dévouement et d’une complaisance à toute épreuve, il mettait sans cesse à ma disposition le secours de sa saine critique et de sa profonde érudition.

1922. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — II. Sur la traduction de Lucrèce, par M. de Pongerville »

……………………………………………… Si sa muse est inculte et son accent chagrin, Pardonnez au poète, il est encore romain, Et du bon citoyen la profonde blessure Attriste sous ses doigts la lyre d’Épicure.

1923. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, romans (1832) »

Mais style et magie de l’art, facilité, souplesse et abondance pour tout dire, regard scrutateur pour beaucoup démêler, connaissance profonde de la foule, de la cohue, de l’homme vain, vide, glorieux, mendiant, vagabond, savant, sensuel ; intelligence inouïe de la forme, expression sans égale de la grâce, de la beauté matérielle et de la grandeur ; reproduction équivalente et indestructible d’un gigantesque monument ; gentillesse, babil, gazouillement de jeune fille et d’ondine, entrailles de louve et de mère, bouillonnement dans un cerveau viril de passions poussées au délire, l’auteur possède et manie à son gré tout cela.

1924. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Appendice sur La Fontaine »

Mais son érudition n’était pas profonde, même en pareille matière, et très-probablement il déchiffrait cette langue surannée avec moins de sagacité et de certitude que ne le font aujourd’hui nos habiles, M.

1925. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. Vitet à l’Académie française. »

La censure d’alors interdisant au drame tout développement historique un peu vrai et un peu profond, on se jeta dans des genres intermédiaires, on louvoya, on fit des proverbes et des comédies en volume ; c’est ce qui s’appelle peloter en attendant partie : je ne sais si la partie est venue, ou plutôt je sais comme tout le monde qu’au théâtre elle n’a pas été gagnée.

1926. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Quoiqu’on ait dit que le type du Giaour et du Corsaire avait été suggéré à Byron par Trelawney lui-même, j’ai peine à croire que ces types profonds ne préexistassent pas dans l’âme du poëte, et qu’ils ne surgissent point immédiatement de l’orage de ses propres pensées.

1927. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre IV. L’écrivain (suite) »

La séparation est profonde chez nous entre la culture et la nature.

1928. (1895) Histoire de la littérature française « Avant-propos »

Cette erreur pédagogique dépend d’une autre, plus profonde et plus générale.

1929. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre II. Le lyrisme bourgeois »

Il a trouvé le lyrisme à sa vraie source : l’émotion personnelle et profonde.

1930. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens I) MM. Albert Wolff et Émile Blavet »

La sensation totale est celle d’un vide profond.

1931. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Baudelaire, Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique, par Eugène Crépet. »

C’est la description outrée et complaisante des plus désolants détails de la réalité physique, et c’est, dans le même moment, la traduction épurée des idées et des croyances qui dépassent le plus l’impression immédiate que font sur nous les corps  C’est l’union de la sensualité la plus profonde et de l’ascétisme chrétien. « Dégoût de la vie, extase de la vie », écrit quelque part Baudelaire.

1932. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre V. Le théâtre des Gelosi (suite) » pp. 81-102

Flavio la reçoit avec une profonde humilité15.

1933. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XI. Il Convitato di pietra (le Convié de pierre) » pp. 191-208

Tandis que le duc et Don Juan font un échange de compliments et de civilités, Arlequin se met à côté de Pantalon, et lui fait une profonde révérence chaque fois qu’il tourne la tête vers lui.

1934. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVII. Romans d’histoire, d’aventures et de voyages : Gebhart, Lemaître, Radiot, Élémir Bourges, Loti » pp. 201-217

Radiot a symbolisé dans un roman de vif attrait une intuition profonde et instruite de tout un monde.

1935. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre deuxième »

De là cette fortune des phrases contournées, de la précision louche, « de ces riens pesés dans des balances de toile d’araignée20 » ; de là le scandale des réimpressions de Trublet, qui indignaient un critique profond, Grimm, pensant, quarante ans après, au mal qu’aurait pu faire à l’esprit français, qu’il aimait comme le bien du genre humain, le retour du précieux qui se relevait des railleries du dix-septième siècle et reprenait l’offensive21.

1936. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XII. L’antinomie morale » pp. 253-269

Cette dernière raison est d’ailleurs la raison profonde qu’on retrouve au fond de toutes les autres.

1937. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre V. L’Analyse et la Physique. »

Qui nous a appris à connaître les analogies véritables, profondes, celles que les yeux ne voient pas et que la raison devine ?

1938. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « La Plume » pp. 129-149

On oubliait d’ailleurs, à l’entendre causer, ces détails mal venus et son regard profond et doux suffisait à parer et à illuminer toute sa personne.

1939. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « II »

Une nation est un principe spirituel, résultant des complications profondes de l’histoire, une famille spirituelle, non un groupe déterminé par la configuration du sol.

1940. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VIII. Quelques étrangères »

Mais supposez que Virgile ne soit pas une âme profonde et un esprit délicat : malgré tous ses efforts, l’imitation tournerait à la parodie et il ferait sans le savoir un Homère travesti.

1941. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre III, naissance du théâtre »

Déjà hiératique, encore populaire, un pied dans les Mystères, l’autre dans la nature, entrecoupé de lumières joyeuses et d’ombres profondes, riant et béant à la foule par une de ses faces, comme un mascaron de fontaine, se présentant de l’autre à ses initiés, le front plein de rêves, le doigt sur les lèvres.

1942. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Œuvres littéraires de M. Villemain (« Collection Didier », 10 vol.), Œuvres littéraires de M. Cousin (3 vol.) » pp. 108-120

Il ne fait pas seulement briller à nos yeux les choses éloquentes, il touche avec émotion les choses profondes.

1943. (1902) L’humanisme. Figaro

On peut dire de façon intelligible les choses les plus profondes.

1944. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre I : Une doctrine littéraire »

C’est cette partie universelle et profonde que l’on peut saisir et comprendre dans tous les pays, quoique exprimée sous une forme particulière et par cela même plus vivante ; c’est la peinture des lassitudes de la science et des ardeurs du désir chez l’homme rassasié de doute, c’est Faust ; c’est la peinture de la tentation ironique et de l’égoïsme infernal du cœur humain, c’est Méphistophélès ; c’est enfin la peinture de l’innocence sacrifiée et vaincue, et de la douleur sans bornes d’un cœur trompé, c’est Marguerite.

1945. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre II. Mademoiselle Mars a été toute la comédie de son temps » pp. 93-102

« Mais aussi, dans cette foule attentive et studieuse du Théâtre-Français venue, chaque soir pour l’entendre, quand elle paraît, cette femme illustre entre toutes les femmes qui appartiennent aux beaux-arts, l’émotion est générale, le silence est profond, l’attention est unanime.

1946. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre septième. »

La solitude était profonde.

1947. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 2, de la musique rithmique » pp. 20-41

Mais comme cela regarde la musique proprement dite, je renvoïerai mon lecteur à ce qu’en a écrit un sçavant homme qui joint à une connoissance profonde de cette science, une grande érudition.

1948. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 13, de la saltation ou de l’art du geste, appellé par quelques auteurs la musique hypocritique » pp. 211-233

C’est ainsi que David dansoit devant l’arche en témoignant par son attitude et par des gestes, le profond respect qu’il avoit pour le gage de l’alliance du seigneur avec le peuple juif.

1949. (1811) Discours de réception à l’Académie française (7 novembre 1811)

Mais de tous les sentiments qui m’agitent, le plus profond, Messieurs, est celui de la perte que vous avez faite.

1950. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIV. Mme Claire de Chandeneux »

Malheureusement Mme de Chandeneux n’est pas plus apte aux peintures recueillies et profondes qu’aux peintures éclatantes et grandioses.

1951. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « L’idolâtrie au théâtre »

Élevée par des maîtres sceptiques, gouvernée longtemps par des hommes de juste milieu pour qui jamais la vérité ne fut qu’un jeu d’escarpolette, tourbillon d’individualités sans le ciment qui les relierait et leur donnerait la solidité d’un monde, la société moderne, privée du profond et sympathique intérêt des doctrines communes, n’a plus que le théâtre pour toute ressource.

1952. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le comte du Verger de Saint-Thomas »

Toutes les questions relatives au duel et qui le constituent : l’offense, l’appel, la nature des armes, les témoins et leurs devoirs, les différentes espèces de duels, les duels ordinaires et exceptionnels, sont examinées et discutées dans ce livre avec une compétence profonde.

1953. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rigault » pp. 169-183

Seul, le sublime écolier d’Harrow, dont la violente fantaisie avait bu l’ennui dans cette coupe correcte, et gardé en sa nature profonde l’impression et le ressentiment de cet ennui, puisé dans cette poésie sans âme, a osé dire le secret de beaucoup d’esprits qui se taisaient, — lâches comme toujours, devant deux mille ans de gloire consacrée et d’idolâtrie, — et sa vérité à lui, sur un poète, au fond, médiocre d’inspiration et de génie, mais adoré et gardé par tous les médiocres de la terre : et les médiocres d’imagination, et les médiocres de passion, et les médiocres de cœur.

1954. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Louis Vian » pp. 373-387

Vian voudrait bien être un portrait dans la manière d’Holbein, c’est-à-dire une peinture intime, attentive, familière, profonde, éclairant l’homme surpris et posé dans les plus menus détails de sa vie, le peignant jusqu’à la gaule de vigneron qu’il portait sur l’épaule, quand il se promenait à la Brède, jusqu’au déshonorant bonnet de coton dont il coiffait sa maigre tête de buste antique !

1955. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « L’Angleterre depuis l’avènement de Jacques II »

Que les circonstances dans lesquelles eut lieu une si grande chose, au contraire, fussent de ces circonstances irrésistibles et suprêmes qui font tout fléchir devant l’ascendant de leur nécessité, au moins ne diminuaient-elles pas ce qu’un tel changement, ce qu’une pareille révolution avait de nouveau et de profond, et c’est ce que Macaulay n’a pas pu ou voulu voir.

1956. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Jacques Cœur et Charles VII »

Pour cette raison, sans nul doute, la littérature anglaise, plus qu’aucune autre littérature, abonde en biographies, en vies historiques précises, tranchées, prises plus profond et plus fin que l’histoire même.

1957. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Montmorency » pp. 199-214

Il la tuait avec une douceur immense, un respect profond et ce que les indifférents appellent des procédés généraux ; mais rien ne mourut dans ce cœur frappé de tant de coups !

1958. (1880) Goethe et Diderot « Note : entretiens de Goethe et d’Eckermann Traduits par M. J.-N. Charles »

Le voici : « Guizot est un homme tel que je le veux ; il est solide ; il possède de profondes connaissances qui s’allient à un libéralisme éclairé ; s’élevant au-dessus des partis, il poursuit sa propre route.

1959. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIII. M. Nicolardot. Ménage et Finances de Voltaire » pp. 297-310

I C’est là un de ces livres, hardis dans leur but, originaux dans leur recherche, profonds et fouillés jusqu’au tuf dans leur exécution, dont on peut dire avec étonnement : « C’est incroyable ! 

1960. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. H. Wallon » pp. 51-66

Tout en admirant les vertus surhumaines de Saint Louis, qui, dans toute époque, auraient fait de lui une des plus éminentes personnalités de l’Histoire, il faut cependant défalquer de l’admiration qu’il inspira ce qui doit en revenir à son époque, prête, alors, par les mœurs, par l’éducation du respect, par son Christianisme profond, à accepter le pouvoir unitaire et personnel de la Royauté.

1961. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le comte de Gobineau » pp. 67-82

car, excepté La Chartreuse de Parme, qui éclata tout à coup, un jour, du fond du silence dans lequel elle était enveloppée, parce que, de sa plume qui pouvait tout allumer, Balzac avait mis le feu à la mèche, les livres de Stendhal étaient trop raffinés et trop profonds pour avoir un succès bruyamment immédiat.

1962. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 201-216

Edmond de Goncourt et à sa réédition de La Duchesse de Châteauroux et de ses sœurs, une idée plus profonde que celle que j’avais déjà (et Dieu sait pourtant qu’elle l’était !)

1963. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Émile de Girardin » pp. 45-61

… L’autre moitié serait des caractères, une peinture de mœurs sincère et profonde, du dialogue étincelant ou mordant.

1964. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Crétineau-Joly » pp. 247-262

Il écrivit celle de la chouannerie, à la fin de sa Vendée militaire, avec le sentiment profond qu’il avait pour elle.

1965. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Lamennais »

La colère qui y monte comme une flamme, qui y saisit tout, qui y éclaire tout, — mais qui y décompose tout aussi quelquefois, — la colère, qui n’a pas encore cessé dans la plus grande partie de ces deux volumes d’être une sainte colère, est le caractère dominant de cette fulgurante Correspondance, qui fait penser au mot profond des Écritures, quand elles parlent de « la colère de l’Agneau ».

1966. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame de Sabran et le chevalier de Boufflers »

Le seul intérêt profond de ces Lettres est donc Madame de Sabran.

1967. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Le roi Stanislas Poniatowski et Madame Geoffrin »

Pour penser à rendre un service, et un service d’argent, au prince Poniatowski, pour lui donner le droit et la hardiesse d’un tel service, il fallait que Madame Geoffrin, cette femme d’un si grand tact et d’une si grande mesure, eût déjà pour lui un sentiment bien profond… Et c’est toujours la même chose, comme dit le paysan de Molière, parce que c’est toujours la même chose !

1968. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVIII. Lacordaire »

Non, le mal est plus profond : elle vient de l’absence de justesse dans un esprit, brillant souvent, mais jamais excessivement par la justesse.

1969. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXI. Philosophie positive »

Voilà pourquoi nous voulons vous exposer brièvement, mais intégralement pourtant, cette philosophie pédantesque et bouffie, qui cache un vide profond sous sa bouffissure et son étalage scientifique.

1970. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIX. M. Eugène Pelletan »

Il y a plus, il est peut-être, par le talent de l’expression, par l’élévation de son sentiment, par l’enthousiasme profond que lui inspire la cause de la démocratie, l’un des écrivains qui font le plus d’honneur à son parti.

1971. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

Au fond l’intelligence profonde de la double grandeur du temps et de l’homme lui échappe.

1972. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXI. Sainte Térèse »

Cette héroïne de la vie spirituelle est infinie d’intuition, de profondeur, de subtilité, mais ne l’entendez pas dans le sens littéraire qui voudrait dire excessivement intuitive, excessivement profonde, excessivement subtile.

1973. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « E. Caro »

Ces soixante pages, d’une beauté rare, et certainement les plus belles du livre, ont une froideur mélancolique du plus poignant effet, et que le livre n’a plus, quand il arrive à Renan, Taine et Vacherot, les représentants, selon Caro, chacun à sa manière, de ces idées qui marqueront la philosophie de cette minute du xixe  siècle d’une si profonde insanité.

1974. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Edgar Quinet »

Quand Bonald, qui ne s’occupait pas de la langue des oiseaux pour expliquer la langue de l’homme, quand le grand Bonald, auprès duquel le gros Quinet paraît bien petit, discutait, comme il savait discuter, la création du langage de l’homme, et s’arrêtait à l’idée la plus simple, qui est aussi la plus profonde, que ce langage avait été révélé à l’homme par Dieu même, Bonald parlait bien de création, et non, comme Quinet, de chose créée.

1975. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Achille du Clésieux »

Les poètes jeunes, à pressentiments plus qu’à expériences, ont un charme moins pénétrant et moins fort que les profonds poètes du souvenir.

1976. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Agrippa d’Aubigné »

L’âme religieuse de cet homme triple atteignait au sublime d’une foi profonde, quoique erronée ; mais pour retomber bientôt de cette hauteur aux faiblesses, ou aux forces, de l’humanité : à l’amour toujours païen de la femme, — à cette époque plus païen que jamais, — aux fureurs sacrées, comme disent les poètes » de la Muse, aux sonnets ardents qu’à la cour, pendant les trêves de ces guerres protestantes, il jetait, comme des torches, dans l’escadron volant des filles de la reine, pour leur embraser les sens et les cœurs.

1977. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Xavier Aubryet et Albéric Second » pp. 255-270

J’ai cru pourtant qu’il la tiendrait, quand j’ai vu sa madame Maubrel, après la mort de son mari, tué, comme il avait vécu, pour les besoins de la situation, chercher partout, avec l’acharnement d’une âme profonde qui n’oublie pas, et pour lui faire expier son crime, l’insolent farfadet qui l’a outragée ; — car il s’en est allé, il a disparu comme un farfadet !

1978. (1868) Curiosités esthétiques « VIII. Quelques caricaturistes étrangers » pp. 421-436

Du reste, il y a dans les œuvres issues des profondes individualités quelque chose qui ressemble à ces rêves périodiques ou chroniques qui assiègent régulièrement notre sommeil.

1979. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVI. Des sophistes grecs ; du genre de leur éloquence et de leurs éloges ; panégyriques depuis Trajan jusqu’à Dioclétien. »

Cet art, outre une imagination très vive et prompte à s’enflammer, supposait encore en eux des études très longues ; il supposait une étude raisonnée de la langue et de tous ses signes, l’étude approfondie de tous les écrivains, et surtout de ceux qui avaient dans le style, le plus de fécondité et de souplesse ; la lecture assidue des poètes, parce que les poètes ébranlent plus fortement l’imagination, et qu’ils pouvaient servir à couvrir le petit nombre des idées par l’éclat des images ; le choix particulier de quelque grand orateur avec qui leur talent et leur âme avaient quelque rapport ; une mémoire prompte, et qui avait la disposition rapide de toutes ses richesses pour servir leur imagination ; l’exercice habituel de la parole, d’où devait naître l’habitude de lier rapidement des idées ; des méditations profondes sur tous les genres de sentiments et de passions ; beaucoup d’idées générales sur les vertus et les vices, et peut-être des morceaux d’éclat et prémédités, une étude réfléchie de l’histoire et de tous les grands événements, que l’éloquence pouvait ramener ; des formules d’exorde toutes prêtes et convenables aux lieux, aux temps, à l’âge de l’orateur ; peut-être un art technique de classer leurs idées sur tous les objets, pour les retrouver à chaque instant et sur le premier ordre ; peut-être un art de méditer et de prévoir d’avance tous les sujets possibles, par des divisions générales ou de situations, ou de passions, ou d’objets politiques, ou d’objets de morale, ou d’objets religieux, ou d’objets d’éloge et de censure ; peut-être enfin la facilité d’exciter en eux, par l’habitude, une espèce de sensibilité factice et rapide, en prononçant avec action des mots qui leur rappelaient des sentiments déjà éprouvés, à peu près comme les grands acteurs qui, hors du théâtre, froids et tranquilles, en prononçant certains sons, peuvent tout à coup frémir, s’indigner, s’attendrir, verser et arracher des larmes : et ne sait-on pas que l’action même et le progrès du discours entraîne l’orateur, l’échauffe, le pousse, et, par un mécanisme involontaire, lui communique une sensibilité qu’il n’avait point d’abord.

1980. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Croyez, Monsieur le Ministre, à mon profond respect. […] Ceux qui ne se bornent pas à voir représenter quelquefois le Dépit amoureux ou les Fourberies de Scapin, ceux qui lisent assidûment Molière, ne peuvent se défendre d’une profonde émotion tendre pour ce délicieux homme. […] mais ce n’était ni très bien, ni bien, ce n’était que prétentieusement médiocre ; et l’on éprouve une surprise profonde, avec la gêne que cause la tare d’une grandeur, (ô abîme, même dans les plus nobles âmes, de la rancune jalouse !) […] Nulle explication de son intimité morale ; nulle clarté apportée en les ténèbres de cette âme peut-être étrange et profonde, enfantine peut-être ; et, malgré tant de monologues, malgré même l’énormité de l’action, la vierge meurtrière n’est qu’une anecdote. […] J’ajouterai que je souhaite ardemment de m’être trompé ; oui, du plus profond de mon cœur, je souhaite en effet que le compagnon de ma jeunesse ait mérité d’être l’initiateur, le guide spirituel de générations futures ; mais, avec chagrin, je ne le crois pas ; et j’ai dû me résigner à le dire.

1981. (1914) En lisant Molière. L’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Sauf ce défaut, capital il est vrai, la pièce est d’un grand bon sens et d’une profonde moralité et le comique en est très puissant. […] Encore est-il que c’est une profonde vérité. […] On en pourrait ; dire autant du Misanthrope étant question de Molière, C’est le chef-d’œuvre de la délicatesse, de la ‘finesse, de l’esprit, du ton de bonne compagnie et en même temps de la psychologie juste et profonde. […] C’est une manière de marquer le profond mépris où il le tient. […] Profonde honnêteté, profonde sincérité, colère de ne pas trouver  ces qualités chez les autres, orgueil, susceptibilité, irritabilité, c’est ainsi que Molière a entendu Alceste, c’est un misanthrope qui en est à la période de fougue.

1982. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

Et puis, savez-vous que Henri Heine n’est un poète si émouvant que par les qualités qui font en même temps de lui un des plus profonds penseurs de ce siècle ? […] Mais l’occultisme c’est la certitude profonde et durable ; il ne connaît ni lassitude ni à-coups. […] La poésie sait dire sans malice et sans ostentation des choses bien plus profondes et bien plus humaines que toute la psychologie avec ses petits airs entendus. […] J’ai noté aussi son amitié profonde pour M.  […] Des rougeurs flamboient derrière les arbres et incendient les haies qui bordent la route ; le petit vent de ce matin est tombé, le silence se fait plus profond.

1983. (1881) Le naturalisme au théatre

La force du naturalisme est justement d’avoir des racines profondes dans notre littérature nationale, qui est faite de beaucoup de bon sens. […] Et voilà tout, cela suffit à serrer les cœurs d’une profonde émotion. […] Quand donc les auteurs dramatiques comprendront-ils le profond ridicule de ce patriotisme à faux, de cette sottise historique dans laquelle ils s’entêtent ? […] A la nouvelle de la mort de Nanine, Guillaume et Ursule sont dans une joie profonde. […] Toujours, de pareilles combinaisons dramatiques, qui mettent en jeu les profonds sentiments de l’homme, remueront puissamment une salle.

1984. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Une critique toute composée de jolis morceaux de cette espèce serait-elle assez belle enfin, pour effacer dans notre imagination le souvenir de ces théories philosophiques qui n’ont pu trouver grâce devant le Chevalier, mais dont la hardiesse parfois profonde reste si pleine de séduction ? […] Que la critique doive être large, intelligente et sympathique, c’est, depuis plus d’un demi-siècle, ma conviction profonde ; mais que l’école célébrée par le Chevalier ait jamais eu ces qualités, c’est ce que l’histoire ne permet pas de prétendre, et qu’elle puisse les acquérir en demeurant fidèle à son principe, c’est ce que je nie absolument. […] S’il est aisé d’apercevoir dans une grande littérature l’empreinte du siècle et de la race qui l’ont produite ; s’il est aisé d’entendre la guerre civile s’entrechoquer dans les vers heurtés de Dante, et de contempler dans la douce figure de Béatrix la personnification, de toutes les choses rêvées par cette époque ardente, et mystique de poètes théologiens ; s’il est aisé de suivre dans le théâtre de Voltaire les préoccupations philosophiques du dix-huitième siècle, et de voir dans le Faust de Goethe l’expression du génie métaphysique et profond de l’Allemagne ; croit-on qu’il soit beaucoup plus difficile de découvrir la cause naturelle d’où procèdent les prodiges apparents, les études calmes d’un Bernardin de Saint-Pierre en 1789, les tragédies attiques d’un Goethe à Weimar ? […] Niobé, au milieu de ses Biles expirantes sous les flèches vengeresses de Diane, montre encore sur son visage où paraît une secrète et profonde douleur, l’inaltérable sérénité de la beauté plastique409.

1985. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre V. Swift. » pp. 2-82

Il faut écouter le profond soupir de joie haineuse avec lequel il contemple ses ennemis sous ses pieds. « Tous les whigs étaient ravis de me voir ; ils se noient et voudraient s’accrocher à moi comme à une branche ; leurs grands me faisaient tous gauchement des apologies. […] Et pour pousser un autre argument de nature semblable : si le christianisme était aboli, comment les libres penseurs, les puissants raisonneurs, les hommes de profonde science, sauraient-ils trouver un autre sujet si bien disposé à tous égards pour qu’ils puissent déployer leur talent ? […] Ce profond traité contient tout le secret de la métempsychose, et développe l’histoire de l’âme à travers tous ses états. —  Whittington et son chat est une œuvre de ce mystérieux Rabbi Jehuda Hannasi, contenant une défense de la Gémara de la Misna Hiérosolymitaine, et les raisons qui doivent la faire préférer à celle de Babylone, contrairement à l’opinion reçue. » Lui-même avertit qu’il va publier « une histoire générale des oreilles, un panégyrique du nombre trois, une humble défense des procédés de la canaille dans tous les siècles, un essai critique sur l’art de brailler cagotement, considéré aux points de vue philosophique, physique et musical », et il engage les lecteurs à lui arracher par les sollicitations ces inestimables traités qui vont changer la face du monde ; puis, se tournant contre les savants et les critiques éplucheurs de textes, il leur prouve à leur façon que les anciens ont parlé d’eux. […] Avec une gravité médicale, il établit que de tout le corps s’exhalent des vapeurs, lesquelles, arrivant au cerveau, le laissent sain si elles sont peu abondantes, mais l’exaltent si elles regorgent ; que, dans le premier cas, elles font des particuliers paisibles, et dans le second de grands politiques, des fondateurs de religions et de profonds philosophes, c’est-à-dire des fous, en sorte que la folie est la source de tout le génie humain et de toutes les institutions de l’univers.

1986. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

Les Anglais, hommes positifs et pratiques, excellents pour la politique, l’administration, la guerre et l’action, ne sont pas plus propres que les anciens Romains aux abstractions de la dialectique subtile et des systèmes grandioses ; et Cicéron jadis s’excusait aussi, lorsqu’il tentait d’exposer à son auditoire de sénateurs et d’hommes publics les profondes et audacieuses déductions des stoïciens. […] Aussi éprouve-t-on un contentement profond et une sorte de paix intérieure, lorsqu’on quitte tant de doctrines écloses au jour le jour dans nos livres ou dans nos revues, pour suivre la marche assurée d’un guide si clairvoyant, si réfléchi, si instruit, si capable de nous bien conduire. […] Il avait engagé Parr à suspendre les travaux qu’il poursuivait dans la sombre et profonde mine d’où il avait tiré un si vaste trésor d’érudition, trésor trop souvent enseveli dans la terre, trop souvent étalé avec ostentation, sans jugement et sans goût, mais cependant précieux, massif et splendide. […] Cette solidité, cette énergie, cette profonde passion politique, ces préoccupations de morale, ces habitudes d’orateur, cette puissance limitée en philosophie, ce style un peu uniforme, sans flexibilité ni douceur, ce sérieux éternel, cette marche géométrique vers un but marqué, annoncent en lui l’esprit anglais.

1987. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Janssen, dans son mémorable ouvrage sur L’Allemagne et la Réforme, — que comme d’intermédiaires pour parvenir à une intelligence plus profonde du christianisme et à l’amélioration de la vie morale » ; et c’était sans doute une manière parfaitement légitime d’en user, mais on en pouvait concevoir une autre. […] La différence est en effet profonde entre la disposition d’esprit qui consiste à chercher, dans les Tusculanes ou dans le sixième chant de l’Énéide, les signes avant-coureurs du christianisme déjà prochain, et celle qui consiste à n’y vouloir uniquement saisir, pour en jouir, que les témoignages du génie mélancolique de Virgile ou de l’éloquence de Cicéron. […] Et quand on ne saurait dire de quelle manière, en quel point précis l’influence a opéré, les effets n’en seraient pas moins certains, mais plus intérieurs et plus profonds seulement. […] Bazin, Histoire de France sous le règne de Louis XIII]. — Il n’a pas non plus laissé de trace bien profonde dans l’histoire de l’Église ; — n’ayant été fait évêque de Lisieux qu’à plus de soixante ans ; — mais il a beaucoup aimé les lettres ; — et nul avant lui n’a fait faire plus de progrès à l’éloquence française ; — par ses traductions d’Eschine, de Démosthène, de Cicéron [Pour et Contre Ctésiphon et Pour Milon] ; — par la collection de ses Arrêts rendus en robe rouge ; — et par le sentiment très délicat de ce qui manquait encore à la langue [Cf. son Traité de l’éloquence française, et des raisons pourquoi elle est demeurée si basse].

1988. (1853) Portraits littéraires. Tome I (3e éd.) pp. 1-363

Ces transformations, je le sais, sont plutôt apparentes que réelles, plutôt superficielles que profondes. […] Quand il se décide à quitter Blanfort pour essayer de la distraire, pour étourdir, pour dérouter sa rêverie, le mal est déjà profond et irréparable. […] Sandeau, une connaissance profonde du sujet qu’il a choisi. […] Sandeau : ce qui domine dans tous ses livres, c’est le sentiment profond de la famille. […] Les destinées diverses de ces deux tragédies tiennent, selon moi, à la diversité profonde des sujets.

1989. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome III

Des Chinois nés sous un gouvernement despotique, élevés dans le plus profond respect pour les volontés d’un maître, accoutumés au dévouement le plus aveugle, à la résignation la plus absolue aux ordres de leur empereur, doivent-ils tenir ce langage insolent ? […] On y retrouve toujours ce défaut essentiel de Voltaire qui parle par la bouche de tous ses personnages : Mahomet, dans cette fameuse scène, est aussi savant, que Voltaire en géographie, en histoire, en théologie ; il parle d’Osiris, de Zoroastre, de Minos, de Numa, de Constantin : il nomme les divers pays, les différents peuples du monde ; il les cite à Zopire qui ne les connaissait pas beaucoup plus que lui ; il met dans la bouche d’un vil conducteur de chameaux un précis historique à la manière de Bossuet, tandis qu’il est prouvé que les Arabes languissaient, à cette époque, dans une profonde ignorance et dans une honteuse superstition beaucoup plus grossière que celle que Mahomet a mise à la place. […] Souvent de lui-même il remaniait son esquisse ; il changeait des actes entiers ; il faisait de nouvelles tirades ; ce travail était bien plus long que celui de la première composition ; enfin, lorsqu’il avait satisfait son conseil privé et lui-même, il s’occupait de la représentation, et c’était là une source de combinaisons profondes. […] Ô mort toujours présente à ma douleur profonde ! […] Les meilleurs esprits ne peuvent se défendre des erreurs de leur siècle : Tacite, cet écrivain si judicieux, si profond, emploie aussi le mot liberté dans le sens vague et faux qu’on lui donnait encore, même de son temps.

1990. (1902) Le chemin de velours. Nouvelles dissociations d’idées

Il n’y a rien d’inutile dans les profondes habitudes humaines ; tout ce qui a duré est donc nécessaire. […] De là l’importance du babillage de la femme, importance bien supérieure à celle des plus beaux poèmes et des philosophies les plus profondes. […] La cause est plus profonde. […] Ceci est un point de départ pour une étude plus profonde. […] Longtemps, on s’était contenté de cette prison douce ; elle n’est tout à fait bonne qu’entourée d’un fossé profond.

1991. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

Le moyen âge, on le sait et on l’ose dire aujourd’hui, fut pour elle une grande époque ; je le répète après tant d’autres, mais avec une conviction d’autant plus profonde que j’y ai été amené avec lenteur et presque à mon corps défendant. […] Au milieu de la grossièreté des mœurs, nous comprenons par là l’une des délicatesses de l’honneur féodal ; nous en sentons les nuances, et nous mesurons la force du nœud mieux que nous ne l’aurions pu par toutes les définitions ; nous saisissons aussi des accents de nature profonde et d’humanité : ces hommes à la rude écorce et au cœur de chêne avaient des fibres tendres et savaient pleurer.

1992. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Note I. De l’acquisition du langage chez les enfants et dans l’espèce humaine » pp. 357-395

De même pour un autre son, kraaau, prononcé du gosier en gutturales profondes ; voilà la part de l’invention personnelle, accidentelle et passagère. […] » — Tout ceci ressemble fort aux émotions et aux conjecturés des peuplés enfants, à leur admiration vive et profonde en face des grandes choses naturelles, à la puissance qu’exercent sur eux l’analogie ; le langage et la métaphore pour les conduire aux mythes solaires ou lunaires.

1993. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre II. Les bêtes »

Il n’y a pas jusqu’aux petits enfants qui, par la finesse de leurs traits, de leurs proportions et de leurs formes, n’indiquent les altérations profondes que la civilisation a fait descendre des individus dans le type. […] Ils vont en troupe à une source profonde pour laper avec leurs langues étroites la surface de l’eau noire, vomissant le sang du meurtre ; leur coeur ne tremble point dans leurs poitrine, et leur ventre chargé de viande gémit. — (Chant XVI, 15.)

1994. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

La couleur de ses cheveux et de sa barbe tenait le milieu entre le noir et le blond, dans une telle proportion cependant, que le sombre l’emportait sur le clair, mais que ce mélange indécis des deux teintes donnait à sa chevelure quelque chose de doux, de chatoyant et de fin ; son front était élevé et proéminent, si ce n’est vers les tempes, où il paraissait déprimé par la réflexion ; la ligne de ce front, d’abord perpendiculaire au-dessus des yeux, déclinait ensuite vers la naissance de ses cheveux qui ne tardèrent pas à se reculer eux-mêmes vers le haut de la tête, et à le laisser de bonne heure presque chauve ; les orbites de l’œil étaient bien arqués, ombreux, profonds et séparés par un long intervalle l’un de l’autre ; ses yeux eux-mêmes étaient grands, bien ouverts, mais allongés et rétrécis dans les coins ; leur couleur était de ce bleu limpide qu’Homère attribue aux yeux de la déesse de la sagesse et des combats, Pallas ; leur regard était en général grave et fier, mais ils semblaient par moments retournés en dedans, comme pour y suivre les contemplations intérieures de son esprit souvent attaché aux choses célestes ; ses oreilles, bien articulées, étaient petites ; ses joues plus ovales qu’arrondies, maigres par nature et décolorées alors par la souffrance ; son nez était large et un peu incliné sur la bouche ; sa bouche large aussi et léonine ; ses lèvres étaient minces et pâles ; ses dents grandes, régulièrement enchâssées et éclatantes de blancheur ; sa voix claire et sonore tombait à la fin des phrases avec un accent plus grave encore et plus pénétrant ; bien que sa langue fût légère et souple, sa parole était plutôt lente que précipitée, et il avait l’habitude de répéter souvent les derniers mots ; il souriait rarement, et, quand il souriait par hasard, c’était d’un sourire gracieux, aimable, sans aucune malice et quelquefois avec une triste langueur ; sa barbe était clairsemée et, comme je l’ai déjà dépeinte, d’une couleur de châtaigne ; il portait noblement sa tête sur un cou flexible, élevé et bien conformé ; sa poitrine et ses épaules étaient larges, ses bras longs, libres dans leurs mouvements ; ses mains très allongées mais délicates et blanches, ses doigts souples, ses jambes et ses pieds allongés aussi, mais bien sculptés, avec plus de muscles toutefois que de chair ; en résumé, tout son corps admirablement adapté à sa figure ; tous ses membres étaient si adroits et si lestes que, dans les exercices de chevalerie, tels que la lance, l’épée, la joute, le maniement du cheval, personne ne le surpassait. […] « Vous me faites sentir plus que jamais combien la Fontaine est charmant dans ses bonnes fables ; je dis dans les bonnes, car les mauvaises sont bien mauvaises ; mais que l’Arioste est supérieur à lui et à tout ce qui m’a jamais charmé, par la fécondité de son génie inventif, par la profusion de ses images, par la profonde connaissance du cœur humain, sans faire jamais le docteur ; par ces railleries si naturelles dont il assaisonne les choses les plus terribles !

1995. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (1re partie). Littérature scientifique » pp. 221-288

Il régnait un profond silence ; l’âme de Humboldt était émue de douloureux sentiments. […] “Rien, disait-il, n’est comparable à l’impression de calme profond que produit la contemplation d’un ciel étoile dans ces solitudes.” — Là, quand, à l’approche de la nuit, il jetait les yeux sur la vallée qui bornait l’horizon, sur ce plateau couvert de gazon et doucement ondulé, il croyait voir la voûte étoilée du ciel supportée par la plaine de l’Océan.

1996. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVe entretien. Vie de Michel-Ange (Buonarroti) »

Quand on promène ses regards autour de cette salle du Jugement dernier, de la base aux murailles, des corniches à la voûte, on éprouve un vertige des yeux tout à fait semblable à ce vertige de l’âme éprouvé par la pensée, quand, dans une nuit sereine et profonde, on se plonge dans l’infini du firmament, dont les avenues d’étoiles illuminent la voie en reculant sans cesse le fond. […] Je me recommande à vous. » XIV La mélancolie, qui est la lie des âmes profondes et le trouble des cœurs sensibles, s’accrut dans Michel-Ange par cette perte de son unique ami à Rome.

1997. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

Sur toutes les hautes pensées, il est muet, l’esprit immobile dans son horizon fermé : le cœur est vide de sentiment profond. […] Jovialités facétieuses, et brusques indignations, apostrophes brutales, apologues satiriques, dialogues comiques ou dramatiques, quolibets des halles et pédantisme de l’école, descriptions saisissantes de vérité vécue, et parfois à l’aventure d’étonnantes images de mélancolie profonde, des jets hardis de poésie pittoresque, tout se mêlait, se heurtait dans cette verve puissante dont ils enlevaient les foules, grands et peuple.

1998. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

Vielé-Griffin est de la race des conteurs, mais il ajoute à leurs talents connus d’élégance et de clarté un sens plus profond de la vie, de plus intimes paroles issues d’un être qui a vu et compris, et un souci nouveau de suggérer. […] Car elle donne au Poème sa raison d’être en l’achevant : elle l’apparie aux lignes de la norme et fait de l’œuvre d’art un monde parfait et distinct qui trouve désormais sa vie au profond de lui-même et, fantôme éloquent du moi soudain communiant avec l’être, affirme son natal accord en l’Harmonie silencieuse des Lois 15.

1999. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Quoique le système juif soit entré dans toutes nos habitudes intellectuelles, il ne doit pas nous faire oublier ce qu’il y avait dans les autres systèmes de profond et de poétique. […] L’ignorance profonde où l’on est en France, en dehors du clergé, de l’exégèse biblique et de la théologie, a seule pu donner naissance à cette école superficielle et pleine de contradictions.

2000. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Additions et appendice. — Treize lettres inédites de Bernardin de Saint-Pierre. (Article Bernardin de Saint-Pierre, p. 420.) » pp. 515-539

Je n’ai trouvé de consolation que dans la solitude la plus profonde et en Dieu, et j’ai joui, dans ce dernier refuge, où j’aurais dû recourir bien plus tôt, de la plus douce et de la plus heureuse des existences dont ma position fût susceptible ; et à peine j’ai mis au jour ces fruits de ma retraite, qu’il s’est fait une révolution totale dans ma fortune. […] Nos Académies gardent à ce sujet un profond silence, d’autant que j’ai mis au jour leur erreur si étrange au sujet de l’aplatissement de la terre aux pôles qu’ils ont conclu de ce qui prouve son allongement, je veux dire de la grandeur même des degrés polaires.

2001. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Poésies complètes de Théodore de Banville » pp. 69-85

, un sentiment sincère, profond, passionné, qui, pour s’appliquer aux seules choses de l’art, n’en avait que plus de désintéressement et de hauteur, et n’en était que plus sacré.

2002. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Lettres de la mère Agnès Arnauld, abbesse de Port-Royal, publiées sur les textes authentiques avec une introduction par M. P. Faugère » pp. 148-162

Le Maître lui avait écrit en termes exaltés des mérites et des beautés de sa fiancée future, elle essayera de l’entendre, — de supposer qu’il l’entend de l’épouse du Cantique des cantiques, de la seule épouse spirituelle digne de ce nom, de l’Église : Mais en écrivant, ceci, je relis votre lettre, et, comme me réveillant d’un profond sommeil, j’entrevois je ne sais quelle lumière au milieu de ces ténèbres, et quelque chose de caché et de mystérieux dans des paroles qui paraissent si claires et si communes.

2003. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. »

Armand Renaud en est venu, de recherche en caprice, et après avoir épuisé la coupe, à des accents vraiment passionnés et profonds.

2004. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « M. Viguier »

Servois, l’ancien élève de l’École des chartes, un M. de Garriod, ancien officier savoisien, homme modeste et d’un vrai mérite, profond connaisseur en peinture, il ajoutait ce fin portrait d’un troisième : « J’attirais aussi quelquefois le professeur de belle littérature de l’Université (à la Sapience), dont j’ai entendu les leçons avec plaisir : mémoire facile et sûre des plus beaux textes latins et italiens, prononciation parfaite, et sur le tout un sentiment irréprochable d’excellent humanisme pour rapprocher, à chaque leçon, quelques beaux passages classiques de l’antique et de la moderne Italie.

2005. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  premier article .  » pp. 326-341

Mais en même temps que cette force intérieure s’est redoublée et que, dans les directions diverses, on poursuit des travaux curieux et profonds, le sentiment littéraire des beautés, faut-il le dire ?

2006. (1861) Cours familier de littérature. XI « Atlas Dufour, publié par Armand Le Chevalier. » pp. 489-512

Considérée comme existence visible, comme occupant sous le nom d’empire, de république, de race, de tribu, de nation, telle ou telle place dans l’espace et dans le temps, elle ne vaut pas plus que cela : car tout ce qu’elle remue n’est que poussière, tout ce qu’elle crée n’est que néant, tout ce qu’elle laisse après elle n’est qu’éblouissement, puis nuit profonde.

2007. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre II. Signes de la prochaine transformation »

Un amour profond de la vérité, une noble foi dans la raison et dans la science soutiennent les savants adonnés aux plus âpres études.

2008. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « I. Leçon d’ouverture du Cours d’éloquence française »

Leçon d’ouverture du Cours d’éloquence française faite à l’Université de Paris le samedi 9 janvier 1904 (Extraits) … Je voudrais aujourd’hui, Messieurs, donnant congé à Voltaire, vous dire pourquoi je ne puis espérer de remplacer Larroumet qu’en le continuant ; je voudrais, non pas par formalité ni pour satisfaire à une tradition de politesse universitaire, mais par un sentiment profond de sa valeur et de son rôle, vous entretenir de ce professeur à qui vous avez donné si longtemps, et jusqu’au bout, toutes vos sympathies.

2009. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « II  L’esprit scientifique et la méthode de l’histoire littéraire »

Il y a sans doute bien des œuvres mortes ; mais les chefs-d’œuvre sont devant nous, non point comme les documents d’archives, à l’état fossile, morts et froids, sans rapport à la vie d’aujourd’hui ; mais comme les tableaux de Rubens ou de Rembrandt, toujours actifs et vivants, capables encore d’impressionner les âmes de notre temps autant qu’ils firent celles de leur temps, et d’y déterminer des modifications profondes.

2010. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Banville, Théodore de (1823-1891) »

Son œuvre est d’un enseignement profond.

2011. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre IV. L’antinomie dans l’activité volontaire » pp. 89-108

« Les grèves, dit-il, ont engendré dans le prolétariat les sentiments les plus nobles, les plus profonds, et les plus moteurs qu’il possède. » Les vertus chevaleresques du prolétariat sont sans doute fort exagérées par M. 

2012. (1890) L’avenir de la science « Préface »

Un état qui donnerait le plus grand bonheur possible aux individus serait probablement, au point de vue des nobles poursuites de l’humanité, un état de profond abaissement.

2013. (1890) L’avenir de la science « IV » p. 141

À cette vue, une profonde tristesse saisit l’âme : C’en est donc fait !

2014. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « De la question des théâtres et du Théâtre-Français en particulier. » pp. 35-48

Le plus sûr pourtant, c’est, là où il y a une différence profonde et sentie, comme entre la liberté absolue du théâtre et celle de la presse, de ne pas abolir toute garantie, tout contrôle, et d’être persuadé que l’esprit français, dans le dramatique, ne s’en trouverait pas plus mal à l’aise pour se sentir un peu contenu.

2015. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre IV. Suite du parallèle de la Bible et d’Homère. — Exemples. »

Semblable à un fleuve dont les eaux sont si basses en certains endroits, qu’un agneau pourrait y passer, et en d’autres, si profondes, qu’un éléphant y nagerait. » 100.

2016. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Beaufort » pp. 308-316

Quand on a le courage de faire le sacrifice de ces épisodes intéressans, on est vraiment un grand maître, un homme d’un jugement profond ; on s’attache à la scène générale qui en devient tout autrement énergique, naturelle, grande, imposante et forte.

2017. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IV. Des changements survenus dans notre manière d’apprécier et de juger notre littérature nationale » pp. 86-105

En général, on sait bien qu’il s’est opéré un changement considérable dans les opinions ; mais on ne sait pas assez combien ce changement est intime et profond.

2018. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Introduction. Du bas-bleuisme contemporain »

En ce moment du siècle, il roule dans les esprits, qui en tressaillent, l’idée d’une égalité bien autrement profonde que cette égalité chétive ; et les femmes qui, en Gaule, passaient pour prophétesses, la pressentent et pour leur compte, la provoquent, en la demandant.

2019. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’Empire Chinois »

La lâcheté, en effet, la lâcheté qui opprime le faible et s’aplatit devant le fort, est le premier trait et certainement le plus profond de la moralité ou plutôt de l’immoralité chinoise.

2020. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Sainte Térèse » pp. 53-71

Mais ne l’entendez pas dans le sens littéraire qui voudrait dire : excessivement intuitive, excessivement profonde, excessivement subtile.

2021. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Le père Augustin Theiner »

Theiner, qui, par la nature de son esprit autant que par les habitudes de sa vie, doit incliner aux méditations profondes, avant d’écrire son Clément XIV aura-t-il pensé à tout cela ?

2022. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Monselet »

… Ce qui manque à ses Vignes du Seigneur, ce n’est ni la couleur, ni le mouvement, ni les surfaces ; mais c’est ce qui constitue toute poésie et même toute œuvre littéraire supérieure : l’accent naïf ou profond d’une personnalité à soi, d’une individualité inconnue et tout à coup révélée !

2023. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Théodore de Banville »

… Chefs d’école et s’acceptant pour tels, ils ont endoctriné au lieu de chanter ; ils ont endoctriné même quand ils chantaient, Ils n’ont pas ranimé leur inspiration aux sources changeantes et profondes de l’âme humaine.

2024. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Le Comte de Gobineau »

Il aurait pu nous donner un roman mordant et profond, qui aurait coupé non plus dans le vif, mais dans cet énervé et ce lâche de la nature humaine qui a remplacé le vif ; mais il n’a su être ni le Tacite ni le Juvénal du roman.

2025. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre II. De la métaphysique poétique » pp. 108-124

Elle n’a été autre chose qu’une sagesse vulgaire de législateurs qui fondaient l’ordre social, et non point une sagesse mystérieuse sortie du génie de philosophes profonds.

2026. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

Il y en a peu de plus profondes ; et, jadis, en avançant « qu’elle avait à sa date influé non seulement sur la poésie, mais sur la prose, sur ses destinées futures, et sur toute la direction nouvelle du langage », Sainte-Beuve n’en a pas exagéré l’importance. […] C’est une transformation profonde qui commence, ou qui s’annonce. […] Ils ont voulu, ou, pour mieux dire, sans le vouloir, ni le savoir peut-être, ils ont contrarié des goûts dont le génie même alors n’eût pas pu triompher, parce que ces goûts n’étaient, comme j’ai tâché de le montrer, que l’expression littéraire d’une profonde nécessité sociale. […] Et, tel sermon Sur les devoirs des rois ou Sur la justice, quelle en est l’idée intérieure et profonde ? […] Rarement, ou jamais, transformation plus profonde s’est, opérée plus promptement, et c’est Bayle, on le verra, qui, de cette métamorphose, a été le principal ouvrier.

2027. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

Dans le calme du soir, si profond et si doux, qui enveloppe le Nil d’un immense silence, il nous laissait rêver ou dormir. […] Elle ne sait pas que « la jeunesse de presque tout homme a subi l’épreuve de quelque passion coupable » ; elle ignore « que les plus délicats sont justement ceux qui engagent dans leurs fautes le plus d’eux-mêmes et qui gardent les cicatrices les plus profondes, les plus aisées à se rouvrir… » Mais l’instinct de l’amour loyal est si fort, ses intuitions irraisonnées sont si puissantes, qu’Henriette a lu le mensonge dans la physionomie et sur les lèvres de son fiancé. […] Vainement bercée, par sa mère, de paroles consolantes, la pauvre enfant trouve dans sa piété, très sincère et très profonde, la force de pardonner. […] Tout le vieux continent à traverser, la Chine la moins connue et le Tibet, et les hauts plateaux, et les déserts, et les fleuves profonds, sans compter les hommes… Les serviteurs pensent à tout cela. […] Ce récit, qui révèle une connaissance profonde des choses turques, est une excellente leçon d’histoire.

2028. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

C’est la profonde raison d’être de la poésie, le plus antibergsonien des arts. […] J’ajouterai qu’à creuser encore plus ce sens profond, Hélène, telle que nous la peint spirituellement Mme Gérard d’Houville, ne fut jamais vraiment un être humain. […] De son coup d’œil d’aigle, le grand poète discerne la vérité épique, c’est-à-dire la vérité profonde, qui échappe au microscope de l’analyste trop minutieux, même rigoureusement documenté (et Taine ne l’est pas toujours). […] Celle de Chateaubriand fut plus profonde et aurait suffi. […] Mais celle d’Emma Bovary cause une émotion plus poignante et plus profonde.

2029. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Il en est résulté que ceux à qui un heureux hasard n’a pas fait entendre quelqu’une de ses jolies chansons, par exemple le Guide, le Néophyte doctrinaire ; — que ceux surtout qui n’ont pas assisté aux lectures de sa pièce d’Abélard, où cette vivacité première se retrouve, associée à de hautes pensées, à de la passion profonde et à un puissant intérêt dramatique, ne le connaissent pas encore tout entier. […] Dans toutes les branches, excepté la poésie, ils laissèrent des traces profondes, et contribuèrent plus que personne à fertiliser la dernière moitié de la Restauration, de même que leur rentrée en masse aux affaires après juillet 1830, en voulant doter le régime actuel de sa politique, l’a trop déshérité de la haute culture intellectuelle. […] Royer-Collard me fit l’honneur une fois de me parler de M. de Serre, son ami, « le seul homme, disait-il, avec qui il ait vécu durant des années en intimité et en communication parfaite, profonde.

2030. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIe entretien. Épopée. Homère. — L’Iliade » pp. 65-160

Mais dans ces premiers jours, où d’un limon moins vieux La nature enfantait des monstres ou des dieux, Le ciel t’avait créé, dans sa magnificence, Comme un autre Océan, profond, sans rive, immense ; Sympathique miroir qui, dans son sein flottant, Sans altérer l’azur de son flot inconstant, Réfléchit tour à tour les grâces de ses rives, Les bergers poursuivant les nymphes fugitives, L’astre qui dort au ciel, le mât brisé qui fuit, Le vol de la tempête aux ailes de la nuit, Ou les traits serpentants de la foudre qui gronde, Rasant sa verte écume et s’éteignant dans l’onde ! […] Séparés seulement par le joug brillant, ils creusent un sillon profond et fendent le sein de la terre ! […] Maintenant te voilà dans les demeures de Pluton, profonds abîmes de la terre, pendant que moi, dans un deuil éternel, tu me laisses veuve à notre foyer !

2031. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

« Quand j’aurai chanté en moi-même et pour quelques âmes musicales comme la mienne, qui évaporent ainsi le trop-plein de leur calice avant l’heure des grands soleils, je passerai ma plume rêveuse à d’autres plus jeunes et plus véritablement doués que moi ; je chercherai dans les événements passés ou contemporains un sujet d’histoire, le plus vaste, le plus philosophique, le plus dramatique, le plus tragique de tous les sujets que je pourrai trouver dans le temps, et j’écrirai en prose, plus solide et plus usuelle, cette histoire, dans le style qui se rapprochera le plus, selon mes forces, du style métallique, nerveux, profond, pittoresque, palpitant de sensibilité, plein de sens, éclatant d’images, palpable de relief, sobre mais chaud de couleurs, jamais déclamatoire et toujours pensé ; autant dire, si je le peux, dans le style de Tacite ; de Tacite, ce philosophe, ce poète, ce sculpteur, ce peintre, cet homme d’État des historiens, homme plus grand que l’homme, toujours au niveau de ce qu’il raconte, toujours supérieur à ce qu’il juge, porte-voix de la Providence qui n’affaiblit pas l’accent de la conscience dont il est l’organe, qui ne laisse aucune vertu au-dessus de son admiration, aucun forfait au-dessous de sa colère ; Tacite, le grand justicier du monde romain, qui supplée seul la vengeance des dieux, quand cette justice dort ! […] Je n’étais pas en France, je n’en eus pas les émotions sur place, j’en eus les tristesses réfléchies ; elles furent en moi profondes, elles le sont toujours. […] Elle fut solennelle, profonde, pathétique.

2032. (1879) À propos de « l’Assommoir »

  Art. 22  Si le prêtre passe devant le grand autel, il fait une inclination profonde, la tête couverte ; s’il passe devant le lieu où repose le très Saint Sacrement, il fait une génuflexion, toujours sans se découvrir… Art. 32  Si le Saint Sacrement est dans le tabernacle, il fait la génuflexion sur le pavé. […]  » Le passage souligné est la clef de tout le caractère : cette Nana, d’ailleurs, est la suite, le développement de la Nana que nous avons vue l’œuvre dans L’Assommoir : n’ayant pas assez de cœur pour être méchante, elle aurait peut-être pu prendre de la raison si elle s’était développée dans un autre milieu ; mais dans la boue où elle a poussé, elle a puisé toute une sève mauvaise  Un peu plus loin, dans les notes dont nous venons de citer quelques fragments, on peut lire cette phrase profonde : « Nana, c’est la pourriture d’en bas, l’Assommoir remontant et pourrissant les classes d’en haut. […] Il lui lut le rôle, qu’elle écouta avec une émotion profonde et toujours croissante ; quand il eut fini, elle se jeta dans les bras de son mari, M. 

2033. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1862 » pp. 3-73

Les filles de Gautier ont un charme singulier, une espèce de langueur orientale, des regards lents et profonds, voilés de l’ombre de belles paupières lourdes, une paresse et une cadence de gestes et de mouvements qu’elles tiennent de leur père, mais élégantifiées par la grâce de la femme : un charme qui n’est pas tout à fait français, mais mêlé de toutes sortes de choses françaises, de gamineries un peu masculines, de paroles garçonnières, de petites mines, de moues, de haussements d’épaules, d’ironies montrées avec les gestes parlants de l’enfance ; toutes choses qui en font des êtres tout différents des jeunes filles du monde, de jolis petits êtres personnels, d’où se dégagent franchement, et d’une manière presque transparente, les antipathies et les sympathies. […] Cet affreux déchirement du voile que nous avions devant les yeux, c’est comme l’autopsie d’une poche pleine d’horribles choses, dans une morte tout à coup ouverte… Par ce qui nous est dit, j’entrevois soudainement tout ce qu’elle a dû souffrir depuis dix ans : et les craintes près de nous d’une lettre anonyme, d’une dénonciation de fournisseur, et la trépidation continuelle à propos de l’argent qu’on lui réclamait et qu’elle ne pouvait rendre, et la honte éprouvée par l’orgueilleuse créature pervertie par cet abominable quartier Saint-Georges, des fréquentations des basses gens qu’elle méprisait, et la vue douloureuse de la sénilité prématurée que lui apportait l’ivrognerie, et les exigences et les duretés inhumaines des m… du ruisseau, et les tentations de suicide qui me la faisaient, un jour, retirer d’une fenêtre, où elle était complètement penchée en dehors… et enfin toutes ces larmes que nous croyions sans cause ; cela mêlé à une affection d’entrailles très profonde pour nous, à un dévouement, comme pris de fièvre, dans les maladies de l’un ou de l’autre. […] Cette révélation fait pâlir même le mot profond du vieux Rothschild : « À la Bourse, il y a un moment où, pour gagner, il faut savoir parler hébreu !

2034. (1890) Le réalisme et le naturalisme dans la littérature et dans l’art pp. -399

Il y a là un vrai sacrilège : « Vous ne l’apercevriez pas, âmes pourries et cadavéreuses que vous êtes, si la peinture ne vous le faisait entrer de vive force dans la conscience par l’horreur même de la représentation. » Courbet, en traitant ce sujet « si accusateur », s’est montré « aussi profond moraliste que profond artiste », aussi éloquent que « Bridaine et Bossuet ». […] En Russie, elles sont nées d’un dégoût éphémère, mais profond : là-bas, notre littérature classique, aimée, imitée, subie jusqu’à la dernière lassitude, a entraîné dans son discrédit toute conception supérieure au réel. […] La correspondance de Flaubert révèle des études plus profondes encore et plus ténébreuses, poursuivies à toute heure, en tout lieu, à la ville comme à la campagne. […] Mais, par une profonde ironie du hasard, ou plutôt par un retour de bienveillance attendrie, Pierre, parti pour tuer, sauve. […] Sand, une mélancolie solennelle et profonde », et, comme bien l’on pense, il ne manque pas de faire allusion au geste auguste du semeur de V. 

2035. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Au fond, le drame, comme toute œuvre d’art, ne fait que rendre sensible une idée profonde de l’homme et de la vie ; il y a une philosophie cachée sous ses enroulements et sous ses violences, et le public doit être capable de la comprendre comme le poëte de la trouver. […] Mais quel brave cœur, et comment on entend, lorsqu’il est seul avec Antoine, le mâle accent, la profonde voix qui a tonné dans les batailles ! […] Quelles misères que ses beaux mots d’auteur, sa galanterie, ses phrases symétriques, ses froids regrets, si on les compare aux cris douloureux, aux effusions vraies, à l’amour profond qui éclate chez l’autre ! […] Pareillement, au milieu des sécheresses de sa polémique éclatent des magnificences subites, un jet de poésie, une prière sortie du plus profond du cœur ; la source anglaise de passion concentrée s’est tout d’un coup rouverte avec une largeur et un élan qu’on ne rencontre point ailleurs : Comme les rayons empruntés de la lune et des étoiles — luisent vainement pour le voyageur seul, las et égaré, —  ainsi la pâle raison luit vainement pour l’âme.

2036. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviiie entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

Il lui persuada de feindre une guerre avec ses voisins et de faire tuer Sîfrit dans la mêlée, souvenir biblique de la trahison de David ; le roi accepte ; Kriemhilt, l’épouse de Sîfrit, conçoit des soupçons, fait venir Hagene, qu’elle croit fidèle et s’ouvre à lui sur le secret profond qui rend Sîfrit invulnérable. […] « Ils chevauchèrent vers une forêt profonde ; maint guerrier rapide suivait Gunther et Sîfrit, par divertissement. […] « Quand le fort Sîfrit sentit la profonde blessure, furieux, il se releva de la source en bondissant. […] Une profonde douleur était fixée au fond de leur cœur.

2037. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1889 » pp. 3-111

Lundi 18 mars Profond découragement avec un fonds de jemenfoutisme, et une attente un peu ironique de ce qui va arriver. […] C’est en effet un causeur supérieur, par la science profonde qu’il possède de toutes les questions qu’il aborde, par le jugement original qu’il porte sur elles, par l’indépendance de son esprit à l’endroit de toutes les idées reçues, de tous les clichés acceptés, etc. […] Et la petite diligence jaune, me rappelle encore une de mes plus profondes émotions — c’était cette fois en rotonde, — je revenais tout seul, à douze ans, de mes premières vacances passées à Bar-sur-Seine, et j’avais acheté les livraisons à quatre sous du roman de Fenimore Cooper : Le Dernier des Mohicans. […] Il parle comme autrefois, et semble, par miracle, être revenu à la lucidité de l’intelligence, à la clarté de la parole ; toutefois de son individu qui porte sur son front une grande fatigue, s’échappe une profonde mélancolie.

2038. (1891) Lettres de Marie Bashkirtseff

On ne se fera jamais idée du calme profond, qui règne en cet endroit. […] En espérant une réponse à ma lettre, je me dis avec le plus profond respect et la plus grande estime, Votre fille dévouée et obéissante. […] C’est fin, c’est profond, c’est formidable, c’est grandiose. […] Mais ne vous aurais-je rien écrit que vous n’en seriez pas moins convaincu de la profonde sympathie que vous trouverez toujours chez nous et chez moi à l’occasion de tout événement heureux ou malheureux dans votre famille. […] Quant à mon talent, je l’ai en une estime profonde et même, en rêve, je ne me comparerai jamais à votre protégé.

2039. (1911) Psychologie de l’invention (2e éd.) pp. 1-184

Souvent il y a plus d’originalité, au moins pour les petites choses, et une originalité moins profonde peut-être, mais plus continuelle, chez certains imaginatifs, esprits primesautiers, un peu changeants et mal équilibrés, que chez des intelligences d’allure régulière et très pondérées. […] Chacun de nous est une combinaison d’atomes singulière, unique, identique à nulle autre et qui marque d’une empreinte plus ou moins nette et plus ou moins profonde tous les faits psychiques qui, à des degrés divers, sont l’expression de sa personnalité. […] Il n’est donc pas surprenant que, rencontrant partout l’élément infinitésimal du génie, nous rencontrions si rarement le génie lui-même et que nous constations de si profondes différences entre les esprits. […] » « Je la regardai un moment sans répondre, émerveillé, je l’avoue, de voir une fille sans éducation arrivée d’instinct, par naturelle supériorité d’esprit, à la plus profonde critique, et lui prenant la main, je lui dis : « Vous avez raison, je coupe la scène. […] Bien mieux, ce n’est qu’avec l’aide de ces sentiments, de ces tendances puissantes et profondes que l’œuvre et les autres sentiments qui l’avaient inspirée pourront se transformer.

2040. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

Elle couvait un profond orage intérieur, et à cet âge de dix-huit ans, sous un extérieur calme, elle agitait les pensées les plus contradictoires. […] Qu’on veuille penser à tout ce qu’il y avait de réfléchi et de profond d’éclairé au sens chrétien, dans cette piété qui sentait le besoin d’expier et de payer pour les autres, — pour son époux, le prince de Conti, fauteur de guerres civiles et artisan de désastres dans tant de villages et de chaumières, — pour son oncle le cardinal, acquéreur avide et si peu scrupuleux de richesses innombrables.

2041. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

« Je me fis répéter cette invitation, car j’étais plongé dans une rêverie profonde. […] « — Pas du tout, reprit lady Stanhope ; dans son voyage à Fez, Ali-Bey, qui, grâce à son costume et à sa profonde connaissance des idiomes de l’Orient, pénétrait dans les sérails comme dans les mosquées, eut des relations avec une sœur du roi de Fez, et la laissa grosse d’un enfant qu’on nomme aujourd’hui Osman-Bey.

2042. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

Viens, viens ; déjà la nuit est moins profonde. […] Villemain, j’avais vu madame de Staël dans cette maison et ailleurs éclairer d’une vive lumière quelques entretiens accidentels sur la politique, les lettres, les arts, parcourir le passé et le présent comme deux régions ouvertes partout à ses yeux, deviner ce qu’elle ne savait pas, aviser par le mouvement de l’âme ou l’éclair de la pensée ce qui n’était qu’un souvenir enseveli dans l’histoire, peindre les hommes en les rappelant, juger, par exemple, le cardinal de Richelieu avec une sagacité profonde, et il faut ajouter une noble colère de femme, puis l’empereur Napoléon qui résumait pour elle tous les despotismes, et que sa parole éloquente retrouvait à tous les points de l’horizon comme une ombre gigantesque qui les obscurcissait.

2043. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIe Entretien. Marie Stuart, (Reine d’Écosse). (Suite et fin.) »

La reine s’en aperçut, et, regardant le comte puritain, elle s’écria d’une voix profonde : « Versez le sang de Henri VII, mais ne le méconnaissez pas. […] Elle baisa trois fois le crucifix, disant à chaque étreinte : « Seigneur, je remets mon âme entre vos mains. » Elle s’agenouilla de nouveau, et s’inclina sur le billot déjà sillonné de profondes entailles.

2044. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

Voltaire accepta secrètement ces propositions ; il prit congé de la cour de France comme pour une absence momentanée ; on ne lui reprocha rien, on le laissa partir avec dédain, mais on garda contre lui le profond ressentiment d’une désertion de Versailles à Berlin. […] Il professait un profond mépris pour les masses du peuple, selon lui dévolues à la superstition par l’ignorance.

2045. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IV »

Sur ce point plus encore que sur les autres, nous avons ressenti une profonde humiliation, une cruelle douleur. […] Pendant longtemps je fus pour ainsi dire le seul compositeur français qui affichât franchement une admiration profonde pour Wagner, admiration qui nuisit peut-être à la réussite de mes premières œuvres.

2046. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre II, grandeur et décadence de Bacchus. »

Ce qui caractérise la religion de Bacchus, c’est qu’elle est aussi profonde qu’étendue, qu’il y en a autant en terre qu’au dehors, que ses cryptes basses égalent et répètent la hauteur de ses constructions. […] Ceux qui refusaient de subir l’opprobre étaient précipités par une machine dans des puits profonds.

2047. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre premier. Sensation et pensée »

Ne pourrait-on, sous la dualité devenue classique des opérations sensitives et intellectuelles, chercher une unité plus profonde et plus vraie ? […] Ce n’est pas dans ces lois de combinaison encore superficielles, c’est dans quelque chose de bien plus profond et de plus intime que nous trouverons la vraie part de notre conscience.

2048. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

Dans la plupart de ses romans récents, qui sont d’une inspiration singulièrement probe et vibrante, dans l’Eau courante comme dans l’Incendie, dans Un vainqueur comme dans l’Indocile, il a su joindre, à une grande fidélité de peinture et à la simplicité classique des moyens, une connaissance profonde de la vie morale contemporaine. […] Artiste délicat et sensitif, assuré d’une influence durable parce que la puissance de son art n’est point violente, — ni même toujours très apparente, — mais qu’elle tient à une observation profonde de l’âme humaine et des mouvements du cœur, M. 

2049. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VIII : Hybridité »

Deux observateurs consciencieux, Kœlreuter et Gærtner, ont consacré leur vie presque entière à l’étude de cette importante question, et il est impossible de lire les divers mémoires ou traités qu’ils ont publiés à ce sujet, sans acquérir la conviction profonde que le plus généralement les croisements entre espèces sont jusqu’à un certain point frappés de stérilité. […] Enfin, même en dépit de l’ignorance profonde où nous sommes, en presque tous les cas, des causes précises de la stérilité chez les êtres vivants, les faits rassemblés et succinctement discutés dans ce chapitre ne me paraissent en aucune façon opposés à l’idée qu’il n’existe aucune distinction essentielle et fondamentale entre les espèces et les variétés.

2050. (1920) Action, n° 3, avril 1920, Extraits

Ayant compris que le sens profond de la vie relève de la magie, Chesterton oppose le patriote, qui est pour lui le type de l’homme positif, à l’optimiste aussi bien qu’au pessimiste, pris comme des types négatifs. […] Une très belle œuvre dont le sourire parfois un peu bruyant ne saurait dissimuler la peine et l’angoisse profondes.

2051. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Petit glossaire »

— Petite vallée profonde. […] Cette solitude kilométriquement profonde, d’un vert sévère, arrosée de taches de lumière, délava.

2052. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — I » pp. 248-262

Sur cette matière informe il faisait une méditation profonde dans la matinée du jour qu’il avait à parler, et le plus souvent sans rien écrire davantage, pour ne se pas distraire, parce que son imagination allait bien plus vite que n’aurait fait sa main.

2053. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Variétés littéraires, morales et historiques, par M. S. de Sacy, de l’Académie française. » pp. 179-194

Je sens qu’elles me flétrissent l’âme et me rabaissent le cœur… » Et il développe sa thèse avec une grande vigueur de conviction, un profond accent de conscience, dans un style animé et tempéré qui est déjà celui d’un jeune et doux vieillard (pardon du mot !

2054. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mélanges de critique religieuse, par M. Edmond Scherer » pp. 53-66

Lamennais, pour ceux qui l’ont le mieux connu, reste une énigme ; on s’explique difficilement qu’une si haute et si puissante intelligence, à côté de si vives lumières et de si profondes pénétrations, ait eu de telles éclipses, de tels aheurtements presque absurdes.

2055. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Étude sur la vie et les écrits de l’abbé de Saint-Pierre, par M. Édouard Goumy. L’abbé de Saint-Pierre, sa vie et ses œuvres, par M. de Molinari. — I » pp. 246-260

Il y portait à la fois un sentiment dont plus d’un se targue en paroles, mais qui, sincère chez lui et profond, était de plus constant et fixe jusqu’à la manie, le désir d’en faire profiter les autres et d’être utile au public.

2056. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens, par M. Le Play, Conseiller d’État. »

. — Ailleurs, plus à l’est de l’Europe, il était témoin d’un état d’organisation que nous appelons arriéré, et qui reproduisait assez fidèlement sous ses yeux l’ancien état féodal, mais qui lui expliquait aussi les ressources et les racines profondes de ce régime disparu.

2057. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Le Brun »

Le Brun dut aimer dès l’abord, chez le jeune André, un sentiment exquis et profond de l’antique, une âme modeste, candide, indépendante, faite pour l’étude et la retraite ; il n’avait vu en Gilbert que le corbeau du Pinde, il en vit dans Chénier le cygne.

2058. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre III »

Car les grands artistes furent le plus souvent de profonds amoureux, et depuis trois cents ans la séméiologie des troubles qu’ils en éprouvèrent se murmure en prose, se déclame en vers, se chante en musique.

2059. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre III. De la vanité. »

La raison de ce jugement inique ou juste, c’est que les hommes ne voient aucun genre d’utilité générale à encourager les succès des femmes dans cette carrière, et que tout éloge qui n’est pas fondé sur la base de l’utilité, n’est ni profond, ni durable, ni universel.

2060. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre I. Origine des privilèges. »

Des trois assises superposées, la plus ancienne et la plus profonde était l’ouvrage du clergé : pendant douze cents ans et davantage, il y avait travaillé comme architecte et comme manœuvre, d’abord seul, puis presque seul.

2061. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre II. L’homme »

Il raconte à Mme de La Fontaine que son premier soin, en entrant dans un pays, est de s’enquérir des jolies femmes : « Je m’en fis nommer quelques-unes, à mon ordinaire. » Il entre dans une allée profonde et couverte, et explique (toujours à Mme de La Fontaine) « qu’il se plairait extrêmement à avoir en cet endroit une aventure amoureuse. » Il insiste pour plus de clarté (toujours dans une lettre à Mme de La Fontaine) : « Si Morphée m’eût amené la fille de l’hôte, je pense bien que je ne l’aurais pas renvoyée.

2062. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre V. De la lecture. — Son importance pour le développement général des facultés intellectuelles. — Comment il faut lire »

Ils ont si peu cherché, si constamment fui tout ce qui est singularité ou exception, que, dès le jeune âge, on peut les goûter sans idolâtrie, autrement que sur parole, par une claire intelligence de leur profonde vérité.

2063. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre II. La critique »

Ainsi l’œuvre d’art vaut plus ou moins, selon qu’elle exprime des traits superficiels ou profonds, passagers ou permanents, du modèle naturel : ce qui revient à dire, en fin de compte, selon sa plus ou moins grande généralité.

2064. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens II) Henry Fouquier »

Le trait caractéristique de don Juan, c’est l’émotion auprès de celles-ci, émotion profonde, naïve, sincère, égale et peut-être supérieure en intensité à l’émotion réglée des hommes qui mêlent l’idée du devoir aux choses de l’amour, encourant par là le juste anathème du poète !

2065. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « « L’amour » selon Michelet » pp. 47-66

Mais elle est profonde et continue.

2066. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Deux tragédies chrétiennes : Blandine, drame en cinq actes, en vers, de M. Jules Barbier ; l’Incendie de Rome, drame en cinq actes et huit tableaux, de M. Armand Éphraïm et Jean La Rode. » pp. 317-337

Elle aurait des mots simples et profonds, que je ne me charge point de trouver, des mots qui ressembleraient à quelques-uns de ceux que Tolstoï a su prêter au vieil Akim ou à Platon Karatief.

2067. (1842) Essai sur Adolphe

Comme il n’y a pas dans ce tableau mystérieux un seul trait dessiné au hasard ; comme tous les mouvements, toutes les attitudes des deux figures qui se partagent la toile sont étudiés avec une sévérité scrupuleuse et inflexible, d’année en année nous découvrons dans cette composition un sens nouveau et plus profond, un sens multiple et variable malgré son évidente unité, qui ne se révèle pas au premier regard, mais qui s’épanouit et s’éclaire à mesure que notre front se dépouille et que notre sang s’attiédit.

2068. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre I. L’intuition et la logique en Mathématiques. »

L’abîme qui les sépare est-il moins profond qu’il ne paraît d’abord ?

2069. (1890) L’avenir de la science « XXI »

Aucune révolution ne la détruira, car aucune révolution ne changera les instincts profonds de l’homme.

2070. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VI. Jean-Baptiste  Voyage de Jésus vers Jean et son séjour au désert de Judée  Il adopte le baptême de Jean. »

Il semble en effet que, malgré sa profonde originalité, Jésus, durant quelques semaines au moins, fut l’imitateur de Jean.

2071. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Dernière semaine de Jésus. »

Le malentendu entre lui et ses disciples devenait à chaque instant plus profond.

2072. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires touchant la vie et les écrits de Mme de Sévigné, par M. le baron Walckenaer. (4 vol.) » pp. 49-62

Ajoutez le parfum d’honnêteté antique qui circule à travers ces pages et qui trouve moyen de se mêler jusqu’au milieu de la chronique scandaleuse à laquelle elles sont souvent consacrées, un profond et naïf amour des lettres et de tout ce qu’elles amènent de délicat avec elles, une bonhomie parfaite qui épouse son sujet tout entier avec tendresse et réussit, après un peu de résistance, à nous le faire aimer et embrasser jusque dans ses replis.

2073. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VI. Les localisations cérébrales »

Il faut reconnaître cependant qu’il a contribué à donner dans la science une place au principe des localisations, et que, sans avoir lui-même rien découvert, il a provoqué les recherches de ce côté ; il a attiré l’attention sur la complexité de l’organe cérébral, et l’exagération même de ses vues sur le rôle des circonvolutions a été pour quelque chose dans les études plus exactes et plus profondes qui ont été faites depuis.

2074. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre II : Partie critique du spiritualisme »

Le spiritualisme français, sans méconnaître le génie de Fichte et les éclatants services que cet éloquent et profond philosophe a rendus à la cause de la personnalité humaine, se rattache plutôt par un lien historique naturel à Maine de Biran.

2075. (1854) Préface à Antoine Furetière, Le Roman bourgeois pp. 5-22

Nous avons vu déjà comment, jusqu’à nos jours, l’Académie a persisté à ne voir dans l’auteur du Dictionnaire universel qu’un misérable voleur : tant est vivace et profonde la haine des corps constitués !

2076. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Jules Janin » pp. 137-154

Non, ce ne fut point le Roi de la Critique, ni même le Prince, ni même — j’ose le dire — un critique du tout, dans le sens juste et profond de l’expression.

2077. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre V. Les figures de lumière »

Rappelons en deux mots les réflexions pénétrantes et profondes que M. 

2078. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre premier : M. Laromiguière »

III Son système ressemble à son esprit ; il est plutôt clair et ingénieux que profond ou nouveau.

2079. (1936) Réflexions sur la littérature « 1. Une thèse sur le symbolisme » pp. 7-17

Les stances, qui ont été saluées comme la négation du symbolisme et comme un retour authentique à l’art classique, ne sont-elles pas au contraire l’expression même de ce que le symbolisme comportait d’échec devant les sentiments profonds et les grandes idées humaines, le fruit de cendre que devaient découvrir à la fin ses feuillages dorés ?

2080. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VI. »

Nous lisons chez un de ces doctes apologistes68 : « Dans Sapho, une ardente et profonde sensibilité, une pureté virginale, la douceur de la femme et la délicatesse du sentiment et de l’émotion s’alliaient avec la probité native et la simplicité du caractère ionien ; et, quoique douée d’une exquise perfection des choses belles et brillantes, elle préférait la naïve et consciencieuse rectitude de l’âme à toute autre source de jouissance humaine. » À la bonne heure !

2081. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

Si nous déplorons aujourd’hui les persécutions dont Geoffroy fut la victime en 1791, si nous voyons un maire de village lui permettre à peine d’enseigner à lire à des enfants, on se rappelle encore qu’en 1815 un autre maire de village fit chasser de sa commune un honnête professeur, comme un partisan de l’homme de Sainte-Hélène ; il n’en doutait pas, puisque ce savant avait depuis longtemps, disait-il, la réputation d’un profond helléniste. […] le plus profond politique de son siècle ne mettait dans ses drames que des fadeurs et des niaiseries, et un petit avocat de Rouen, un homme obscur enseveli dans son cabinet, étalait dans ses pièces les plus grands intérêts et la plus profonde politique. […] Les progrès de la société ont enrichi notre scène d’un comique plus délicat, plus profond que celui qui règne dans le Menteur ; mais cette pièce offre des traits qu’on n’a point encore surpassés. […] Cette réflexion de Corneille est aussi juste que profonde, et c’est là qu’on le reconnaît. […] Le plan de Rodogune ne pouvait être combiné que par une tête forte : on ne voit jamais de pareilles productions éclore du cerveau d’un bel-esprit ; mais on voit souvent de beaux-esprits se consoler en persiflant les profondes inventions du génie : c’est précisément l’aventure de Voltaire.

2082. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Aujourd’hui, je suis du moins calme, et je puis relire votre lettre sans trop raviver la profonde blessure qu’elle m’a faite. […] … on dirait qu’elle se mêle aux clartés de la lune. » C’est le dialogue poétique dans ce qu’il a de plus pénétrant : « Les choses les plus profondes et les plus pures peut-être ne sortent pas de l’âme tant qu’un baiser ne les appelle pas !  […] Alors le Dieu cria, sentant ses mains percées, Levant ses yeux sanglants vers le grand ciel profond, Bien plus que de leurs clous souffrant de ses pensées : « Pardonnons-leur, car ils ne savent ce qu’ils font !  […] Cette remontée, qui rouvre dans le passé de si profonds horizons à la curiosité de ceux qui ne se peuvent contenter du présent, n’est pas moins suggestive, moins profitable à la science et aux arts que l’ardeur que l’esprit humain met à vouloir percer les voiles de l’avenir. […] Les Petites Visites C’est une œuvre de main délicate, faite d’observation profonde et facile, c’est-à-dire sans que l’effort de la recherche y apparaisse, que le livre que M. 

2083. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

« Un homme qui sait la cour est maître de son geste, de ses yeux, de son visage, il est profond, impénétrable ; il dissimule les mauvais offices, sourit à ses ennemis, contraint son humeur, déguise ses passions, dément son coeur, parle et agit contre ses sentiments. »48 Sans ce talent, comment se soutiendrait-il ? […] Cette politique est plus profonde que celle de l’avare. […] Il allait à la chasse ; apportait du gibier ; Faisait son principal métier D’être bon émoucheur ; écartait du visage De son ami dormant le parasite ailé Que nous avons mouche appelé Un jour que le vieillard dormait d’un profond somme Sur le bout de son nez une allant se placer Mit l’ours au désespoir.

2084. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

Éclairé par une profonde étude de la géographie, M. de Saint-Pierre resta confondu devant les merveilles que la raison humaine méconnaissait, sa pensée devina quelques-unes des pensées du Créateur ; car la vérité est la pensée de Dieu même. […] Mais le but de M. de Saint-Pierre n’est pas seulement de s’enrichir de ces beautés antiques ; il veut encore nous faire entrevoir, dans les auteurs cités, un sentiment exquis, une pensée profonde qui nous auraient échappé. […] Paul, s’étant rendu par hasard dans ce lieu, fut rempli de joie en voyant ce grand arbre sorti d’une petite graine qu’il avait vu planter par son amie ; et, en même temps, il fut saisi d’une tristesse profonde parce témoignage de sa longue absence.

2085. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1866 » pp. 3-95

* * * — Une femme, suprêmement maigre, les yeux profonds, le bleu de l’œil très clair dans l’effacement tendre des sourcils, un grand front, des tempes ramifiées de veinules bleuâtres, la bouche non sensuelle, la bouche sentimentale… Il y a des femmes qui ressemblent à une âme. […] * * * — Un mot profond de Mme Dorval : « Je ne suis pas jolie, je suis pire !  […] Et Renan, l’imaginative échauffée, et cherchant l’esquisse colorée d’un tout vivant, après de profondes fouilles dans son cerveau, et à la suite d’un long silence prometteur d’un accouchement de génie ; Renan, le plus sérieusement et le plus religieusement du monde, arrive à comparer, devant la table béante son Dieu à lui… deviner à quoi… à une huître et à son existence végétative… Oh !

2086. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

L’écrivain artiste n’est presque jamais un sentimental, et très rarement un sensitif ; c’est-à-dire qu’il incorpore à son style toute sa sensibilité, et qu’il lui en reste très peu pour la vie et les passions profondes. […] Le sentiment profond de l’amour, qui était en lui, n’a passé que dans les actes de ses personnages ; ils expriment des passions extrêmes en un style abstrait, glacé et diplomatique. […] Giraud est presque muette, mais elle est profonde. […] Car c’est merveilleux de trouver une profonde poésie en ces rudes œuvres, Saint Léger, Alexis Roland, modelées avec le la réalité pure ! […] Que de beaux feuillages nous avons, et comment les a-t-on négligés si longtemps pour l’acanthe qui vaut à peine la feuille de l’artichaut aux profondes découpures !

2087. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

Ce n’est ni l’accent ému et pieux de David, ni l’accent révélateur d’Orphée, ni l’accent héroïque d’Alcée, ni l’accent majestueux de Pindare ; il n’avait de foi bien profonde ni dans la divinité, ni dans la vertu, ni dans la patrie, ni dans la liberté. […] « S’il lui plaît de s’étendre tantôt sous un vieux chêne, tantôt sur un moelleux gazon, les eaux profondes du fleuve roulent sous ses yeux entre leurs rives élevées, les oiseaux gazouillent dans les branches, les sources répandent, en murmurant, leurs eaux courantes et l’invitent par leur bruit monotone à de légers assoupissements ; mais quand la saison d’hiver ramène les pluies, les foudres et les neiges dans le ciel, il pousse, aux aboiements de sa meute de chiens, les féroces sangliers dans les toiles qu’il leur a tendues, ou bien, sur des baguettes invisibles, il tend le filet à larges mailles aux grives gourmandes qui viennent s’y abattre ; il prend au lacet le lièvre peureux ou la grue voyageuse, proie enviée de son foyer.

2088. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

IV Je glisse sur les premières années de ce rejeton des Nelli et des Machiavelli ; son intelligence vive, étendue, profonde et éloquente comme la passion, le fit remarquer avant l’âge. […] XVI Une analyse historique profonde, lucide et pénétrante de la conduite du pape Alexandre VI et de César Borgia, son fils, pour se créer une vaste domination en Italie, est présentée ici non comme modèle, mais comme exemple, à Laurent de Médicis, dans le livre du Prince : là est le venin.

2089. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIe entretien. Molière et Shakespeare »

Peut-être même dégage-t-elle un sens plus profond et un plus haut enseignement dans le second que dans le premier. […] Lorsque Duncan sera endormi (et le fatigant voyage qu’il a fait aujourd’hui va l’entraîner dans un sommeil profond), j’aurai soin, moi, à force de vin et de santés, de décomposer si bien ses deux chambellans, que leur mémoire, cette gardienne des idées, ne sera plus qu’une fumée, et le réservoir de leur raison un alambic.

2090. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIIe Entretien. Montesquieu »

V De retour en France, Montesquieu se confina, pendant deux ans, dans son château de la Brède, où l’on montre encore, au coin de la cheminée, l’empreinte du pied de ce profond penseur ; il écrivit sesConsidérations sur les causes de la grandeur et de la décadence des Romains, qu’il publia en 1734. […] Non, Montesquieu n’a pas été un profond législateur ; il a été ou il a voulu être un simple érudit en législation, et il s’est trompé neuf fois sur dix dans ses prémisses et dans ses conclusions. — Et n’étant échauffé, comme un érudit, par aucune flamme idéale, illusionné par aucun rêve, il a écrit froidement ; il a remplacé par quelques traits d’esprit les généreuses erreurs que le rêve ajoute en ce genre à la vérité ; il a laissé à Platon son idéal, quelquefois brillant, souvent absurde, de sa République ; à J.

2091. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Le pire contresens qu’on puisse faire sur Molière, c’est de ne pas sentir combien son rire est naturel, spontané, copieux, et comment, loin d’être le masque de son expérience, il a les mêmes sources profondes que cette expérience même. […] Mais, d’abord, il est impossible qu’une observation profonde des hommes ne repose pas sur une certaine conception de la vie et du bien, et ne s’y termine pas.

2092. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Introduction. Le problème des idées-forces comme fondamental en psychologie. »

Il n’y a point deux réalités, l’une sentie, l’autre sentante : il n’y en a qu’une, dont le physique exprime certaines relations superficielles dans l’espace et dans le temps, dont le mental exprime certaines qualités plus intimes et plus profondes. […] Et le psychologue, venant après le physiologiste, trouve que la série des moyens est, en définitive, une explication plus profonde que la série mécanique des effets.

2093. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

Et cette conversation et cette succulente nourriture, sont, de temps en temps, coupées par des geignements, des plaintes sur notre chien de métier, sur le peu de contentement que nous apporte la bonne fortune, sur la profonde indifférence qui nous vient pour tout ce qui nous réussit, et sur la tracasserie que nous apportent les moindres riens hostiles de la vie. […] Et il laisse échapper, sur la note d’une profonde tristesse : « Au fond, je ne referai plus jamais un roman qui remuera comme L’Assommoir, un roman qui se vendra comme Nana ! 

2094. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

Alphonse, jeune Espagnol, remarquable par sa beauté, ses grâces et surtout « par une profonde et touchante mélancolie », empoisonne à première vue le cœur de la trop tendre Émilie […] D’après elle, c’est « Rousseau, Werther, des scènes de tragédies allemandes, quelques poètes anglais, des morceaux d’Ossian qui avaient transporté la profonde sensibilité dans l’amour ».

2095. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

Il y vivait en philosophe, auprès de ses sœurs, suspendu par ses opinions et ses souvenirs entre deux temps ; doué d’un esprit étendu, d’une érudition profonde, d’une éloquence sobre et précise comme les affaires qu’il avait maniées. […] J’entends encore d’ici, après quarante ans, ces voix à timbres divers résonner dans ce petit amphithéâtre sonore de rochers, qui les répercutait avec la vibration lapidaire d’une voûte souterraine ou d’une eau qui coule dans une profonde cavité.

2096. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre X : De la succession géologique des êtres organisés »

Comme nous possédons seulement le dernier volume de nos archives géologiques, et que, de plus, ce volume est fort incomplet, nous ne pouvons nous attendre, excepté en des cas très rares, à pouvoir remplir les profondes lacunes du système généalogique naturel de manière à relier parfaitement ensemble nos différents ordres ou familles. […] Il nous devient facile de comprendre, à son aide, comment les nouvelles espèces apparaissent lentement et successivement, comment les espèces de différentes classes ne changent pas nécessairement ensemble, ni avec la même vitesse de transformation, ni en égal degré, bien que, dans le cours prolongé du temps, toutes subissent des modifications plus ou moins profondes.

2097. (1870) La science et la conscience « Chapitre I : La physiologie »

Voilà ce qu’il fallait découvrir, voilà où nulle méthode connue n’avait pu conduire les observateurs les plus sagaces et les plus profonds. […] Avec un sentiment si clair, si profond, si invincible de notre personnalité, de notre responsabilité, de la moralité de nos actes, comment se fait-il qu’en tout temps et aujourd’hui surtout il s’élève tant de doutes et de théories contre le libre arbitre et contre certains autres attributs essentiels de notre être ?

2098. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Il nous attachera longtemps ; il sera pour nous le premier grand génie de l’Europe moderne ; il nous montrera ce qu’il y avait de pensée profonde et de haute poésie cachée sous la rude écorce du moyen âge. […] Tant que le guerrier troubadour a été sous le feu de sa passion, il a été poëte ; mais ce génie habile, cet art profond, cette science surtout d’avoir longtemps du talent, il ne semble pas qu’elle leur ait été donnée. […] Au dixième siècle, Gerbert, ce savant homme, après avoir étudié dans le monastère d’Aurillac, voulant étendre ses connaissances et s’enfoncer dans les arts profonds de l’Orient, se rend à Tolède. […] Peu de rois ont moins habité leur royaume, et y ont cependant laissé une trace plus profonde que Richard. […] C’est ainsi que saint Thomas, né dans la ville d’Aquino en Italie, vint à Paris étudier sous Albert le Grand, et que l’Anglais Roger Bacon, génie inventeur, passa dans cette ville plusieurs années de retraite profonde et d’étude.

2099. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — I. » pp. 131-146

Dès son entrée au barreau, il fut reconnu de tous, dit Saumaise, « facile aux affaires, subtil aux conseils, fertile aux raisons, haut à parler et profond à écrire ».

2100. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

Les dangers croissants de la famille royale, ces douleurs de chaque jour dont il était témoin et dépositaire, laissaient des empreintes profondes dans l’âme de Vicq d’Azyr et ébranlaient sa sensibilité ; il s’y voyait à son tour immiscé et compromis.

2101. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — II. (Suite.) » pp. 463-478

Ainsi, en montant le pic du Midi, le voyageur arrivé à une certaine élévation se trouve avoir atteint à un beau réservoir d’eau appelé le lac d’Oncet, et où la nature commence à prendre un grand caractère ; il en fait voir en peu de mots l’encadrement, et en quoi ce nouveau genre de beauté consiste : C’est un beau désert que ce lieu : les montagnes s’enchaînent bien, les rochers sont d’une grande forme ; les contours sont fiers, les sommets hérissés, les précipices profonds ; et quiconque n’a pas la force de chercher dans le centre des montagnes une nature plus sublime et des solitudes plus étranges prendra ici, à peu de frais, une idée suffisante des aspects que présentent les monts du premier ordre.

2102. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Les Chants modernes, par M. Maxime du Camp. Paris, Michel Lévy, in-8°, avec cette épigraphe. « Ni regret du passé, ni peur de l’avenir. » » pp. 3-19

Mais ce n’est pas là, pour l’art, une veine aussi neuve et aussi profonde que M. du Camp le suppose, et de tout temps, surtout chez nous au xviiie  siècle, il y a eu des poètes descriptifs jaloux de prendre à la science ou même à l’industrie ce qui prête au tableau, aux couleurs, et de renouveler ainsi leur matière.

2103. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — I — Vauvenargues et Fauris de Saint-Vincens » pp. 1-16

Je n’ai jamais été contre ; mais il y a des incrédules dont l’erreur est plus profonde : c’est leur esprit trop curieux qui a gâté leurs sentiments… Je n’ai jamais été contre est, je crois, le mot le plus vrai pour Vauvenargues.

2104. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Fanny. Étude, par M. Ernest Feydeau » pp. 163-178

Il fera dire, par exemple, à Adolphe, racontant et définissant ses rapports avec son père, ce père qui était timide même avec son fils : Je ne savais pas alors ce que c’était que la timidité, cette souffrance intérieure qui nous poursuit jusque dans l’âge le plus avancé, qui refoule sur notre cœur les impressions les plus profondes, qui glace nos paroles, qui dénature dans notre bouche tout ce que nous essayons de dire, et ne nous permet de nous exprimer que par des mots vagues ou une ironie plus ou moins amère, comme si nous voulions nous venger sur nos sentiments mêmes de la douleur que nous éprouvons à ne pouvoir les faire connaître.

2105. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers (tome xviie ) » pp. 338-354

Mais il n’est que juste, au moment où son dix-septième volume paraît, de le saluer au moins d’un hommage, pour le sentiment patriotique profond dont ces pages sont tout entières animées.

2106. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

Joubert représente donc parfaitement l’esprit de cette armée, de ces brigades intrépides et de leurs jeunes officiers, par le brillant de la valeur, par la politesse et l’élégance naturelle des manières, l’habitude et le prestige, de la victoire, et un attachement profond au général en chef qu’il eût suivi sans doute s’il eût vécu.

2107. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

Cette dernière résolution répondait à cette fibre secrète de modestie profonde que nous avons reconnue en lui.

2108. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 44-63

Âme robuste, entière, non usée de père en fils par l’élégance et la politesse des salons, intelligence brusque et absolue, non assouplie par la critique, non rompue aux systèmes, d’une sensibilité profonde et d’un grand besoin de tendresse au milieu de certaines grossièretés de nature, il fut atteint et renversé en même temps, retourné tout d’une pièce ; le fier Sicambre s’agenouilla : il se fit du même coup chrétien, catholique, ultramontain.

2109. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Mélanges scientifiques et littéraires, (suite et fin.) »

Qu’est-ce, auprès de ces systèmes profonds, rigoureux, enchaînés, et d’une vérité éternelle, qui occupent la pensée d’un Newton ou d’un Laplace, que nos faibles observations passagères, nos remarques d’esprits fins et légers, sans suite, où le fil casse à chaque instant, nos aperçus rapides et fugitifs, ce que nous appelons traits d’esprit, saillies, reflets, étincelles aussitôt nées, aussitôt évanouies ?

2110. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803, (suite et fin) » pp. 16-34

Si l’on connaissait bien la race physiologiquement, les ascendants et ancêtres, on aurait un grand jour sur la qualité secrète et essentielle des esprits ; mais le plus souvent cette racine profonde reste obscure et se dérobe.

2111. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

Un jeune talent qui veut exercer de l’influence et être connu cherche à renchérir sur ses prédécesseurs… Dans cette chasse à l’effet extérieur, toute étude profonde, tout développement intime et régulier de l’homme est oublié.

2112. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

À quelques descriptions, d’abord vraies et profondes, de cet état d’esprit singulier, ont succédé des déclamations sans nombre et bien des prétentions.

2113. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

Cet homme est un profond hypocrite, n’ayant ni les mœurs ni l’esprit de son état, et livré à un genre d’intrigues qui, d’un jour à l’autre, le conduira sur l’échafaud.

2114. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

Or Bossuet combattit cet homme, Richard Simon, le dénonça comme coupable au fond « d’une dangereuse et libertine critique », d’une malignité profonde, « d’un sourd dessein de saper les fondements de la religion » ; il le fit taire tant qu’il put ; il déclara subversives du Christianisme, et des prophéties sur lesquelles il se fonde, les explications les plus irréfragables ou les plus vraisemblables qui sont du ressort de la philologie pure ; il l’accusa de substituer en toute rencontre des sens humains à ce qu’il appelait les sens de Dieu.

2115. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires de madame de Staal-Delaunay publiés par M. Barrière »

Ce fut donc un printemps bien court dans la vie de Mlle Delaunay que ces premiers mois d’enchantement ; le parfum en fut pourtant assez profond pour remplir son âme durant ces jeunes années les plus exposées, et pour la préserver alors de toute autre atteinte.

2116. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VII. De l’esprit de parti. »

L’esprit de parti des premiers est de meilleure foi, celui des novateurs est plus habile ; la haine des premiers est plus profonde, celle des autres est plus agissante ; les premiers s’attachent plus aux hommes, les novateurs davantage aux choses ; les premiers sont plus implacables, les seconds plus meurtriers ; les premiers regardent leurs adversaires comme des impies, les seconds les considèrent comme des obstacles, en sorte que les premiers détestent par sentiment, tandis que les autres détruisent par calcul, et qu’il y a moins de paix à espérer des partisans des anciens préjugés, et plus à redouter de la guerre faite par leurs ennemis.

2117. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Gaston Paris et la poésie française au moyen âge »

Je jouis de sentir à tout mon être des racines si profondes dans les temps écoulés et d’avoir tant vécu déjà avant de voir la lumière.

2118. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VIII. Les écrivains qu’on ne comprend pas » pp. 90-110

Dès lors le fossé se creusa profond et sombre entre la petite troupe des intellectuels et la masse mal fortifiée par la préparation d’un baccalauréat pénible, puis débilitée par les soucis d’affaires ou mondains.

2119. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Le symbolisme ésotérique » pp. 91-110

Les opinions auxquelles les savants tendent à revenir sur la constitution de la matière ne sont pas sans analogie avec les vues profondes des premiers alchimistes. » Une élite se prépare à la tâche.

2120. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre II. L’analyse interne d’une œuvre littéraire » pp. 32-46

La Fontaine trahit une certaine antipathie pour l’enfance, « cet âge sans pitié », en même temps qu’une sympathie profonde et fort rare de son temps pour les bêtes.

2121. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

Or, les vastes périodes dessinées ainsi par la vie et la mort d’une de ces forces contiennent non seulement des alternatives de hausse et de baisse dans l’intensité de cette force, une série de pas en avant et de pas en arrière, de progrès et de régressions, pendant qu’elle monte, de destructions et de restaurations partielles, pendant qu’elle décroît ; mais elles renferment encore une quantité d’alternances semblables qui portent, non plus sur la force essentielle, mais sur des tendances moins durables et plus profondes.

2122. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

Cependant je m’y trouve plus résolue que jamais, et rien ne me paraît si difficile que de demeurer dans l’état où je suis. » Cette lettre est l’expression d’une mélancolie profonde.

2123. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre troisième. L’idée-force du moi et son influence »

En premier lieu, il est incontestable que l’être animé, quel qu’il soit, se veut lui-même ; et s’il conçoit plus ou moins vaguement son moi (soit par une intuition profonde de sa vraie réalité, soit par une simple illusion d’optique), ses désirs et volitions se trouvent concentrés vers ce foyer intérieur- : le vouloir-vivre spontané devient une volonté réfléchie de soi-même.

2124. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Les romans de M. Edm. de Goncourt » pp. 158-183

Grâce aux infinies ressources de son style et au biais particulier de sa manie observante, il est parvenu à saisir quelques-uns des faits profonds et obscurs de notre vie cérébrale.

2125. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Despréaux, avec le plus grand nombre des écrivains de son temps. » pp. 307-333

« Autrefois, disoit-il, on croyoit à tout, à l’astrologie, à la magie, à toutes les sottises imaginables ; mais actuellement on ne croit à rien. » Entendant un jour des esprits-forts nier l’existence d’un premier être, il entra dans une rêverie profonde.

2126. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Essai, sur, les études en Russie » pp. 419-428

Lorsqu’on jette les yeux sur les progrès de l’esprit humain depuis l’invention de l’imprimerie, après cette longue suite de siècles où il est resté enseveli dans les plus profondes ténèbres, on remarque d’abord, qu’après la renaissance des lettres en Italie, la bonne culture, les meilleures écoles se sont établies dans les pays protestants, de préférence aux pays qui ont conservé la religion romaine, et qu’elles y ont fait jusqu’à ce jour les progrès les plus sensibles.

2127. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 13, qu’il est des sujets propres specialement pour la poësie, et d’autres specialement propres pour la peinture. Moïens de les reconnoître » pp. 81-107

Après avoir traité les differens genres d’affliction des autres personnages du tableau comme des passions qui pouvoient s’exprimer, il place à côté du lit de Germanicus une femme noble par sa taille et par ses vêtemens, qui se cache le visage avec les mains, et dont l’attitude entiere marque encore la douleur la plus profonde.

2128. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 16, des pantomimes ou des acteurs qui joüoient sans parler » pp. 265-295

Le peuple fut donc obéi, et lorsque Pylade executa l’endroit où il avoit repris si hautement son éleve, il représenta par son geste et par son attitude la contenance d’un homme plongé dans une profonde méditation, pour exprimer le caractere propre au grand homme.

2129. (1759) Observations sur l’art de traduire en général, et sur cet essai de traduction en particulier

On ne peut traduire un homme de génie, si on ne le traduit pas vivement et d’enthousiasme ; mais si cet homme de génie est en même temps un écrivain profond, il faut du temps pour l’étudier et pour le rendre ; il me semble d’ailleurs en général, que pour éviter tout à la fois la froideur et la négligence du style dans quelque ouvrage de goût que ce puisse être, il est nécessaire et d’écrire vite et de corriger longtemps.

2130. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

Incapable de creuser longtemps dans la nature humaine et de nous faire un livre profond de ce qu’elle y aurait trouvé, Mme Colet a pour ressource de plaquer autour des amours avilissants et avilis, dont elle nous raconte les orages, de longues descriptions de Venise, fourbues à force d’avoir servi, et des citations de Byron toujours inévitables, quand on parle de Venise et qu’on n’a pas en soi d’impression, neuve et sincère.

2131. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Les deux cathédrales »

L’individu, que le dogme chrétien avait isolé de la nature, sentit peu à peu qu’entre elle et lui existait le plus indestructible et le plus profond des liens.

2132. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre III. Contre-épreuve fournie par l’examen de la littérature italienne » pp. 155-182

En effet, c’est la sensualité qui frappe d’abord chez lui, son amour de la beauté plastique, sa saine compréhension de l’amour physique et son grand sens pratique ; c’est qu’il est naturaliste, dans le sens profond du mot ; ce qui explique alors le fonds de mysticisme qu’il y a aussi en lui, et l’intuition géniale qui en fait le peuple des inventeurs, des précurseurs, des martyrs. — L’étranger s’étonne de la « combinazione », la blâme sans la comprendre ; elle est à la fois un art de la politesse et le dernier refuge des consciences opprimées.

2133. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VI : M. Cousin philosophe »

N’écoutez pas ces esprits superficiels qui se donnent pour de profonds penseurs, parce qu’après Voltaire, ils ont découvert des difficultés dans le christianisme ; vous, mesurez vos progrès en philosophie par ceux de la tendre vénération que vous ressentirez pour la religion de l’Évangile… Ne fléchissez pas le genou devant la fortune, mais accoutumez-vous à vous incliner devant la loi.

2134. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVI. »

La profonde hypocrisie dont il couvrit d’abord la seule passion honorable de son âme, son alliance avec les meurtriers de César jusqu’à l’heure de les combattre, plus tard sa complaisance aux cruautés d’Antoine, son profit dans les crimes d’autrui, et son art d’épuiser tous les avantages de la proscription et de la violence avant de revenir à quelque ombre de justice et d’humanité, rien de tout cela sans doute n’était fait pour attirer sur son nom le respect et l’amour.

2135. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

Madame de Staël, qui, à la rigueur, avait déjà débuté par ses Lettres sur Jean-Jacques, et qui devait accomplir un jour sa course généreuse par ses éloquentes et si sages Considérations, laissait échapper alors ses réflexions, ou plutôt ses émotions sur les choses présentes, dans son livre de l’Influence des Passions sur le Bonheur  ; mais ce titre purement sentimental couvrait une foule de pensées vives et profondes, qui, même en politique, pénétraient bien avant. […] Ce sont là des questions que nous posons à peine, mais qui se lèvent devant nous ; et comme la lecture de De Maistre met, bon gré mal gré, en train de prédire, nous nous risquerons à ajouter : Quoi qu’il puisse arriver dans un avenir quelconque, et même (pour ne reculer devant aucune prévision), même si quelque chose en religion devait définitivement triompher qui ne fût pas le catholicisme pur, que ce fût une convergence de toutes les opinions et croyances chrétiennes, ou toute autre espèce de communion, De Maistre aurait encore assez bien compris l’alternative à l’heure de crise, il aurait assez ouvert les perspectives profondes et assez plongé avant son regard, pour s’honorer à jamais, comme génie, aux yeux des générations futures vivant sous une autre loi ; il ne leur paraîtrait à aucun titre un Julien réfractaire, mais bien plutôt encore une manière de prophète à contre-cœur comme Cassandre, une sibylle merveilleuse. […] Jadis les chevaliers errants protégeaient les dames ; aujourd’hui c’est aux dames à protéger les chevaliers errants : ainsi, trouvez bon que je me place sous votre suzeraineté. » « … Je gémis comme vous de cette folle obstination de notre ami — , qui aime mieux manquer de tout à Paris que d’être ici à sa place, au sein d’une grande et honorable aisance ; mais regardez-y bien, vous y verrez la démonstration de ce que j’ai eu l’honneur de vous dire mille fois : je suis moins sûr de la règle de trois, et même de mon estime pour vous, que je ne le suis d’un profond ulcère dans le fond de ce cœur plié et replié, où personne ne voit goutte. […] — Sire, cinq journée, avec une profonde révérence. — Au reste, madame, après le congrès qui a donné à notre ami Napoléon les deux choses dont il avait le plus besoin, le temps et l’opinion, on n’a le droit de s’étonner de rien.

2136. (1881) Le roman expérimental

Cette conviction profonde soutient et dirige ma vie scientifique. […] » Le mot est bien profond. […] Et c’est au courant de cette lecture que j’ai été frappé des modifications profondes de notre esprit littéraire. […] Une page d’une vie humaine, et c’est assez pour l’intérêt, pour l’émotion profonde et durable. […] Quelle étude exquise et profonde que cette Renée Mauperin !

2137. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

Sa tête et son long visage aminci, comme détachés d’un passé profond dont il entraînait en allant, l’inquiétant mystère… Des soirs, parlant peu, comme absent, possédé de soi-même, tout à quelque création ou hanté de quelque idée dont il s’imprégnait longuement, et là, comme s’il ruminait de l’infini  L’un de ces soirs, il s’était assis près de moi, et, après quelques instants, il me dit : — Ecoutez le son de ces mots : « Non possumus !  […] Schumann se donne une peine infinie pour paraître original et profond. […] Elle est du mode Baudelairien encore, un peu, de s’écrier :          … L’azur Séraphique sourit dans les vitres profondes Et je déteste, moi, le bel azur ! […] Peut-être Mauclair essaie-t-il d’atténuer cette étrangeté quand il dit, lui aussi très dialecticien : « Par livre, Mallarmé entendait, comme Edgar Poe, une condensation de pensée et d’émotion restreinte, une sorte de vade mecum, spirituel, éblouissant, profond et bref  dont le symbolisme très concentré contînt une série de motifs de méditation sur lesquels pût s’exercer le travail personnel du lecteur  (L’art en silence, 1901)… Si nous traduisons, et d’ailleurs selon la pensée même de Mallarmé souvent à demi-avouée, c’est prétendre que chaque lecteur peut et doit de la même lecture tirer le sens qui lui agrée personnellement, et même à telle ou telle heure de son humeur. Mais Mauclair se rappelait-il aussi ce soir, où Mallarmé prétextant que le Livre était encore trop explicite pour le résultat « éblouissant, profond et bref »  rêvait d’une « sorte de montre dont le cadran porterait de simples signes diversement disposés et colorés. » Montre, qui tirée de la poche parlerait assez par ces signes, mobiles et que l’on pourrait manœuvrer de diverses manières, pour immédiatement suggérer toute une méditation sur l’homme et l’univers  au gré du « Moi » porteur du précieux petit instrument, Moulin à prière d’autre sorte !

2138. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

Lorsqu’elle détruit quelque chose, elle édifie la thèse opposée ; et, lorsqu’il semble qu’elle détruise en même temps les deux thèses opposées, c’est alors qu’elle nous promet quelque chose de profond, pourvu que nous la suivions aussi loin qu’elle peut aller. » Être sincère, avec autrui et avec soi-même, croire fermement à quelque chose, et agir et parler en toutes circonstances d’accord avec ce que l’on croit, m’a toujours paru la vraie joie et la vraie force. […] Sismondi, de son côté, écrit à la comtesse d’Albany, à propos de l’auteur des Martyrs : « Comme il n’est rien qu’avec effort, comme il veut toujours paraître, au lieu d’être lui-même, ses défauts sont tâchés comme ses qualités ; et une vérité profonde, une vérité sur laquelle on se repose avec assurance, n’anime pas tous ses écrits. » Eh bien ! […] Si le xviie  siècle a peut-être moins fait, en apparence, pour le progrès de l’humanité et l’avènement de la liberté, que le xvie et surtout que le xviiie , on peut dire que, par l’analyse morale et par l’étude de l’âme humaine, de ses ressorts les plus profonds, les plus cachés, les plus subtils, sa littérature est d’une richesse et d’une variété incomparables. […] Ils sont des éducateurs et des nourriciers ; ils nous élèvent et nous fortifient : quand ce n’est pas directement par leurs idées, c’est par la puissance de leurs peintures, par leurs analyses si profondes et si déliées, à représenter la vie humaine ; c’est par les nobles sentiments qu’ils prêtent à leurs personnages et qu’ils tirent de leurs cœurs pour relever les nôtres. […] Le pied de cette montagne est percé à jour par une grotte profonde qui laisse voir la mer en éloignement.

2139. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome IV pp. -328

Il revendique, pour son confrère, le père Buffier, les articles agir & amitié, donnés comme la preuve de la métaphysique claire & profonde de l’abbé Yvon. […] si le profond des cueurs On veut sonder de ces sorboniqueurs, Trouvé sera que de toi ils se deulent. […] Dom Mabillon, livré toute sa vie à des recherches profondes dans l’antiquité, s’étoit fait un stile convenable à son genre de travail. […] Les habitans de cette partie de l’Inde sont Pythagoriciens sur l’article de la métempsycose : de-là, leur respect profond pour les animaux. […] Je vous prie, monseigneur, d’être persuadé de la sincérité des sentimens qui y sont exprimés, & du profond respect avec lequel j’ai l’honneur d’être, &c. »   L’archevêque donna un mandement pour relever l’abbé de Prades.

2140. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre premier. Les fonctions des centres nerveux » pp. 239-315

Mais, arrivé à la sensation, nous sommes à la limite du monde moral ; de là au monde physique, il y a un abîme et comme une mer profonde ; nous ne pouvons plus pratiquer nos sondages ordinaires ; l’eau nous empêche de vérifier si la couche que nous avons suivie d’un bout à l’autre de notre sol va rejoindre l’autre continent. […] Si leur action s’annule, toute image, et partant toute idée ou connaissance s’annule ; le malade tombe dans cet état d’engourdissement et de stupeur profonde où le retranchement des mêmes lobes met les animaux. […] On a réuni plusieurs observations d’hommes qui, à la suite de profondes blessures latérales de la tête, suivies de pertes de substance cérébrale, n’ont éprouvé aucune diminution de leurs facultés, mais s’épuisaient rapidement et étaient forcés, après un court travail intellectuel, de s’arrêter et de se livrer au repos complet ou même au sommeil. » 139.

2141. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre II. La perception extérieure et l’éducation des sens » pp. 123-196

Le nerf acoustique a sa terminaison extérieure dans la chambre profonde de l’oreille. […] Si le toucher explorateur est arrêté par une éminence fixe comme les dents, la sensation paraîtra située à la superficie de l’éminence, quoique l’ébranlement nerveux soit beaucoup plus profond. — Si le toucher explorateur ne peut vérifier l’emplacement de deux ébranlements nerveux dont l’un est situé plus haut, l’autre plus bas, ce qui est le cas pour les impressions de la rétine, et si, en même temps, il trouve les deux conditions extérieures de ces deux impressions situées l’une par rapport à l’autre dans l’ordre inverse, ce qui est le cas pour les objets visibles, nous situerons dans l’ordre inverse les deux sensations qui en dérivent. […] Mais ces équivalents eux-mêmes sont des corps considérés au point de vue d’un mouvement qu’ils subissent ou d’une qualité qu’ils ont. — Il nous reste donc à démêler le sens et la valeur d’une illusion plus profonde, celle qui constitue la perception extérieure, et par laquelle nous affirmons qu’il y a des corps.

2142. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1885 » pp. 3-97

Il n’est pas, ou il n’est plus, le causeur éblouissant, que m’avait annoncé Saint-Victor ; mais, outre qu’on sent chez lui, un profond mépris pour tout homme qui n’est pas un pur et délicat lettré, il émet à tous moments des mots, fins, intelligents, colorés, et il a aussi des sous-entendus, qui amènent de suite, entre nos deux esprits, une espèce d’entente franc-maçonnique. […] Ennui noir, tristesse profonde. […] Des cours profondes comme des puits, des corridors interminables, des escaliers dont on ne peut compter les marches, puis soudain, des peintures ingénues et barbares, imparfaitement entrevues en un angle de plafond, soudain encore, un trou de lumière : une fenêtre avec son banc de pierre s’ouvrant au-dessus d’une ville de clochers roses sur un ciel mauve — et dans la trouble rêverie de votre esprit entre ces murs, revenant le souvenir du massacre, de la sanguinaire tuerie de 93.

2143. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1888 » pp. 231-328

Jeudi 26 avril Pendant que je suis en train de faire le départ du troisième volume de mon Journal, apparaît dans l’entrebâillement de la porte du cabinet de Fasquelle, la tête de Zola, et cette tête amaigrie, et si joliment amenuisée, que j’ai vue il y a un mois, sous les embêtements de Germinal, et l’exaspération de la non-réussite, a le décharnement d’une profonde maladie intérieure. […] C’est un livre de longues méditations, de profondes songeries. […] Mais votre pièce nous a saisis, bouleversés, enthousiasmés, et des jeunes gens qui, comme moi, ne vous connaissaient guère, trois heures avant, et qui n’avaient pour votre art qu’une estime profonde, sont sortis pleins d’une admiration affectueuse pour vous.

2144. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre premier. Les caractères généraux et les idées générales. » pp. 249-295

. — Notez la différence profonde qui sépare cette acquisition de l’acquisition parallèle que pourrait faire un perroquet. […] Bien mieux, par une réduction plus profonde, il se trouve que le point et le mouvement suffisent pour reconstituer les deux autres sortes de limites que nous avons nommées la ligne et la surface, et, en outre, ce corps solide duquel nous avons tiré, avec les idées de surface et de ligne, celles de point et de mouvement. — En effet, supposez un point, c’est-à-dire la limite d’une ligne, et admettez qu’il se meuve ; la série continue des positions qu’il occupe fait une ligne.

2145. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIe entretien. L’Arioste (2e partie) » pp. 81-160

L’Arioste (2e partie) I Nous continuâmes ainsi quelques jours la lecture du Roland furieux ; mais, quoique marchant d’aventures en enchantements, nous ne retrouvâmes pas l’émotion profonde et douce que nous avions savourée dans les chants de Ginevra. […] C’est là que Médor fut promptement rétabli par les soins de la jeune fille ; mais, en moins de temps encore, elle sentit qu’elle avait au cœur une blessure plus profonde que celle qu’elle venait de guérir.

2146. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

car il ne faut à la philosophie qu’un petit nombre de juges, et c’est à dessein qu’elle fuit la multitude. » Son argumentation sur les moyens de vaincre la douleur et de la mépriser, si on la compare au devoir, est un modèle accompli de raisonnements philosophiques ; le style semble s’éclaircir dans Cicéron à mesure que la pensée devient plus profonde et plus métaphysique. […] Accablé par la fatigue de la route et par la longueur de cette veille, je tombai bientôt dans un sommeil plus profond que de coutume ; tout à coup une apparition s’offrit à mon esprit, tout plein encore de l’objet de nos entretiens ; c’est la vertu de nos pensées et de nos discours d’amener pendant le sommeil des illusions semblables à celles dont parle Ennius.

2147. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (1re partie) » pp. 337-416

Ce profond et cruel égoïsme du jeune horloger en fit bientôt un vagabond sans patrie, parce qu’il était sans famille. […] Solon avait voyagé dans tout l’Orient, poète et philosophe, recueillant pour sa patrie les miettes de la profonde sagesse orientale.

2148. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Il met de la force comique jusque dans des comédies-ballets, de la grâce mâle jusque dans ses ballets, du sel le plus fin jusque dans ses bouffonneries, qui sont toujours la charge de quelque vérité profonde. […] On sort d’une représentation du Cid ou d’Athalie avec une profonde admiration pour le génie ; on sort d’une pièce de Molière avec de l’amitié pour l’homme.

2149. (1890) L’avenir de la science « III » pp. 129-135

Je suis bien aise de le dire une fois pour toutes : si je porte dans les discussions religieuses une franchise et une lourdeur qui ne sont plus de mode, c’est que je n’aborde jamais les choses de l’âme qu’avec un profond respect. […] Les autres, par une vue plus profonde de la marche de l’esprit humain, au-dessous des contradictions apparentes, voient le progrès et l’unité.

2150. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

Un profond silence régnait dans la foule ; chacun se recueillait dans l’attente d’un drame déjà aussi réel qu’un événement. […] C’était pendant l’horreur d’une profonde nuit ; Ma mère Jézabel devant moi s’est montrée, Comme au jour de sa mort pompeusement parée ; Ses malheurs n’avaient point abattu sa fierté ; Même elle avait encor cet éclat emprunté.

2151. (1868) Curiosités esthétiques « I. Salon de 1845 » pp. 1-76

Cette couleur est d’une science incomparable, il n’y a pas une seule faute, — et, néanmoins, ce ne sont que tours de force — tours de forces invisibles à l’œil inattentif, car l’harmonie est sourde et profonde ; la couleur, loin de perdre son originalité cruelle dans cette science nouvelle et plus complète, est toujours sanguinaire et terrible. — Cette pondération du vert et du rouge plaît à notre âme. […] Il serait bon que tous les gens qui se cramponnent à la vérité microscopique et se croient des peintres vissent ce petit tableau, et qu’on leur insufflât dans l’oreille avec un cornet les petites réflexions que voici : ce tableau est très-bien, non parce que tout y est et que l’on peut compter les feuilles, mais parce qu’il rend en même temps le caractère général de la nature — parce qu’il exprime bien l’aspect vert cru d’un parc au bord de la Seine et de notre soleil froid ; bref, parce qu’il est fait avec une profonde naïveté — tandis que vous autres, vous êtes trop… artistes. — (Sic).

2152. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire littéraire de la France. Ouvrage commencé par les Bénédictins et continué par des membres de l’Institut. (Tome XII, 1853.) » pp. 273-290

Il a poussé un soupir des plus profonds ; pour tout l’or du monde, il n’eût pu s’en retenir.

2153. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Nouveaux voyages en zigzag, par Töpffer. (1853.) » pp. 413-430

Plus bas, en effet, la reproduction, le changement, le renouvellement nous entourent ; le sol actif et fécond se recouvre éternellement de parure ou de fruits, et Dieu semble approcher de nous sa main pour que nous y puisions le vivre de l’été et les provisions de l’hiver ; mais ici où cette main semble s’être retirée, c’est au plus profond du cœur que l’on ressent de neuves impressions d’abandon et de terreur, que l’on entrevoit comme à nu l’incomparable faiblesse de l’homme, sa prochaine et éternelle destruction si, pour un instant seulement, la divine bonté cessait de l’entourer de soins tendres et de secours infinis.

2154. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

J’ai l’honneur d’être, avec le plus profond respect34, etc.

2155. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — I. » pp. 381-397

C’est ce mélange de prudence, de calcul, et aussi de piété et d’attendrissement à la suite, qui caractérise ces scènes de Venise chez Villehardouin, et qui montre, sans qu’il le dise, la différence profonde qu’il y avait entre l’esprit de ce gouvernement politique et celui des croisés impétueux.

2156. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — I. » pp. 91-108

C’est une famille pour qui je me suis toujours senti un profond respect, en qualité de poète et de malade.

2157. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — III. (Fin.) » pp. 162-179

Le point était habilement choisi par l’Espagne, si elle avait voulu rompre décidément en rendant odieux le roi de France allié des Hollandais, et en le présentant comme opposé aux intérêts et aux droits de sa propre religion : mais il n’entrait point en cela une si profonde politique, et bientôt, lorsque le président Jeannin eut introduit dans l’assemblée des États-Généraux (27 août 1608) sa proposition d’une trêve à longues années au lieu d’une paix, on vit (tant les mots sont puissants sur les hommes !)

2158. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

Ronsard y raconte à l’un de ses amis, Pierre Lescot, l’un des architectes du Louvre, comment dès son enfance il résistait à son père qui lui disait de renoncer à la poésie, et comment déjà le démon du rêve et de la fantaisie le transportait ; je crois bien qu’en la mettant à l’âge de douze ans, alter ab undecimo…, il antidate un peu sa jeune manie, pour la mieux peindre ; mais il exprime cela en jeune homme qui n’a pas cessé d’en être possédé au moment où il en parlef : Je n’avois pas douze ans, qu’au profond des vallées, Dans les hautes forêts des hommes reculées, Dans les antres secrets, de frayeur tout couverts, Sans avoir soin de rien je composois des vers.

2159. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Guillaume Favre de Genève ou l’étude pour l’étude » pp. 231-248

Cette érudition était étendue et profonde, comme son beau lac, mais un peu stagnante ; il y manquait au milieu le Rhône.

2160. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — II » pp. 268-284

Si ce n’était faire tort à un écrit si solide que d’en présenter des extraits de pages, je détacherais celle qui marque le caractère de Montesquieu dans son livre de la grandeur et de la décadence des Romains… Je la donnerai pourtant, parce que nous sommes Français et que nous aimons les morceaux, mais je n’en donnerai que le commencement ; tout lecteur sérieux voudra lire la suite : Dans ce livre, il (Montesquieu) oublie presque les finesses de style, le soin de se faire valoir, la prétention de mettre en mots spirituels des idées profondes, de cacher des vérités claires sous des paradoxes apparents, d’être aussi bel esprit que grand homme.

2161. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir a l’histoire de mon temps. Par M. Guizot »

Entre ces deux hommes, d’ailleurs, qui se fussent si bien complétés, il y avait des différences profondes d’origine, de tempérament et de nature ; elles sautent aux yeux.

2162. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Essais de politique et de littérature. Par M. Prevost-Paradol. »

Son symbole parlementaire, en effet, son Credo politique, et qu’il expose en toute occasion, serait que la France fût régie à peu près comme l’Angleterre ; et dans le détail cependant, sur le chapitre de la presse, par exemple, qui est un article bien essentiel de ce Credo, il a lui-même établi et reconnu la différence profonde d’esprit des deux peuples.

2163. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Essai sur l’Histoire générale des sciences pendant la Révolution française. »

Nous, à la vive lumière de la philosophie, oublions donc aussi ces craintes chimériques du retour de l’ignorance, et marchons d’un pas ferme dans l’immense carrière désormais ouverte à l’esprit humain. » Ainsi parlait le jeune savant ; et plein d’un profond sentiment d’horreur pour le régime oppressif et ignare qu’on avait subi, pour ce retour inouï de barbarie en pleine civilisation, il montrait pourtant avec une satisfaction élevée le rôle honorable et indispensable des savants au fort de la crise et leur empressement courageux à répondre à l’appel de la patrie, tout décimés qu’ils étaient alors par l’échafaud.

2164. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Etienne-Jean Delécluze »

Étienne, dans sa jeune tête, avait peine à concilier tout cela : « Ce conflit, cet amalgame de choses et d’idées incohérentes fit naître dans l’esprit d’Étienne une foule de réflexions contraires, dont le résultat fut de le plonger dans une rêverie profonde.

2165. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Mais aussi que l’anatomie profonde, la physiologie humaine, ne soient point méconnues et absentes sous vos plis et vos draperies, qu’on sente la vraie chair et le vrai sang jusque sous la soie et les dentelles ! 

2166. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La Grèce en 1863 par M. A. Grenier. »

Tous ceux, en effet, qui voyagent en Grèce ou dans la Troade commencent invariablement, on le sait, par vérifier et admirer l’exactitude et le piitoresque de la plupart des épithètes homériques relatives aux lieux : Ithaque aux beaux couchants, la sablonneuse Pylos, la profonde Lacédémone, Épidaure fertile en raisins, la venteuse Ilion, le Pélion, agitateur de feuilles, etc.

2167. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

Collé lui-même, qui n’aime pas Voltaire, et, au moment où, dans son Journal, il s’indigne le plus vivement des personnalités injurieuses répandues dans l’Ecossaise, se croit obligé d’ajouter : « Et personne n’a pourtant un plus froid, un plus profond mépris que moi pour Fréron. » 17.

2168. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre III. Inconvénients de la vie de salon. »

disait-elle, il est mort ce soir à six heures ; sans cela, vous ne me verriez pas ici. » Sous ce régime continu de distractions et d’amusements, il n’y a plus de sentiments profonds ; on n’en a que d’épiderme ; l’amour lui-même se réduit à « l’échange de deux fantaisies »  Et, comme on tombe toujours du côté où l’on penche, la légèreté devient une élégance et un parti pris301.

2169. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre III. Théorie de la fable poétique »

Trouvera-t-on dans chacun d’eux une empreinte profonde et originale ?

2170. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre 2. La littérature militante »

A travers ces hautes préoccupations, il n’oubliait pas qu’il était magistrat et chef de la justice : en même temps que ses Ordonnances réformaient les vices de la législation et de la procédure, il visitait les Parlements ; à Paris, à Rouen, à Bordeaux, il admonestait les juges, leur disait d’honnêtes et de fortes paroles, les rappelant à la probité, à l’exactitude, à la vigilance, avec un profond amour du peuple à qui la justice doit être une protection, non une charge.

2171. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Il n’a rien dit de bien neuf, ni de bien profond : il a dit ce qu’il avait lu dans Montaigne et dans les anciens.

2172. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « La comtesse Diane »

Presque toujours ces boutades ont un air profond.

2173. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Alphonse Daudet  »

Au petit drame touchant se mêlent les jolis détails d’un paradis d’enfant de chœur, de petit clerc de la manécanterie de Saint-Nizier : « Mes yeux et mon cœur l’ont aussi reconnu, ce petit chérubin vêtu de mousseline, à ceinture d’azur, qui agite dans l’air, de toutes les forces de ses petits bras dodus et roses, une bannière à fleurs d’or aussi grande que lui ; c’est ma sœur, ma petite sœur Anna, que j’ai tant pleurée. » Surtout il y a dans ce rêve bien humain une tendresse profonde, un don de faire monter aux yeux de petites larmes chaudes, don précieux que M. 

2174. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Les chétives discussions de la scolastique, la sécheresse d’esprit de Descartes, l’irréligion profonde du XVIIIe siècle, en rapetissant Dieu, et en le limitant en quelque sorte par l’exclusion de tout ce qui n’est pas lui, ont étouffé au sein du rationalisme moderne tout sentiment fécond de la divinité.

2175. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

De même la théorie courante de l’affirmation, considérée à la lumière d’une science de plus en plus profonde de l’organisme du discours, semble attacher une importance exagérée à une puissance d’affirmation, présumée inhérente aux verbes, et particulièrement aux verbes de l’existence.

2176. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie Stuart, par M. Mignet. (2 vol. in-8º. — Paulin, 1851.) » pp. 409-426

Elle s’arrêta à la touchante histoire du bon Larron, qui lui sembla le plus rassurant exemple de la confiance humaine et de la clémence divine, et dont Jeanne Kennedy (l’une de ses filles) lui fit lecture : « C’était un grand pécheur, dit-elle, mais pas si grand que moi ; je supplie Notre-Seigneur, en mémoire de sa Passion, d’avoir souvenance et merci de moi comme il l’eut de lui à l’heure de sa mort. » — Ces sentiments vrais et sincères, cette humilité contrite de ses derniers et sublimes moments, cette intelligence parfaite et ce profond besoin du pardon, ne laissent plus moyen de voir en elle aucune tache du passé qu’à travers les larmes.

2177. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

Quand il y eut moyen de parler, Dandolo répondit ; et cette fois la nécessité, la circonstance extrême, lui inspira des forces et une audace inaccoutumée ; il fut noble, courageux, éloquent ; il fit résonner avec sincérité les grands mots de patria, libertà ; il les appuya de raisons : La force de ses raisonnements, sa conviction, sa profonde émotion agirent sur l’esprit et le cœur de Bonaparte, au point de faire couler des larmes de ses yeux.

2178. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame, duchesse d’Orléans. (D’après les Mémoires de Cosnac.) » pp. 305-321

L’autopsie officielle, en partie exigée par la politique, sembla le constater, et on insista fort sur les lésions profondes de constitution, que recouvrait cette enveloppe gracieuse.

2179. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

On a beau reproduire textuellement la note du passé, le sens littéral n’est pas le sens profond ; celui-ci échappe si le génie ne le retrouve pas, et il ne l’obtient souvent qu’en l’arrachant : les âges d’autrefois, en s’éloignant de nous et en retombant dans leur immobilité, deviennent des sphinx ; il faut les forcer à rendre leur secret.

2180. (1913) Le bovarysme « Troisième partie : Le Bovarysme, loi de l’évolution — Chapitre I. Le Bovarysme de l’individu et des collectivités »

Elle est comprise dans le domaine de la psychologie et c’est pourquoi on parle ici la langue de la psychologie sans rechercher encore s’il ne serait pas possible de donner au phénomène une explication plus profonde.

2181. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « J. K. Huysmans » pp. 186-212

Huysmans l’expédie en quelques phrases et consacre ses chapitres non plus au récit d’une série d’événements, mais à la description d’une situation, d’une scène, procède non par narrations successives avec de courtes haltes, mais par de larges tableaux reliés de brèves indications d’action ; et, comme tous les écrivains de cette école  avec de profondes différences personnelles  il possède un vocabulaire étendu et un style riche en tournures, apte, par des procédés divers, à rendre l’aspect extérieur des choses, à reproduire les spectacles, les parfums, les sens, toutes les causes diverses et compliquées de nos sensations, de façon à les renouveler dans l’esprit du lecteur par la voie détournée des mots.

2182. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Préface de la seconde édition »

Est chose tout objet de connaissance qui n’est pas naturellement compénétrable à l’intelligence, tout ce dont nous ne pouvons nous faire une notion adéquate par un simple procédé d’analyse mentale, tout ce que l’esprit ne peut arriver à comprendre qu’à condition de sortir de lui-même, par voie d’observations et d’expérimentations, en passant progressivement des caractères les plus extérieurs et les plus immédiatement accessibles aux moins visibles et aux plus profonds.

2183. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une croisade universitaire » pp. 107-146

Ce que je viens d’écrire est tellement élémentaire et tellement banal que je m’abîme en des étonnements profonds en songeant qu’on l’a rabâché pendant trente ans sans réussir à le faire entendre.

2184. (1912) L’art de lire « Chapitre IV. Les pièces de théâtre »

Tant y a qu’il existe des pièces qui sont très bien faites pour être lues et même relues ; ce sont les plus profondes et les plus subtiles, et les noms de Racine et de Marivaux, plus encore que ceux de Corneille et de Molière, viennent à l’esprit, comme aussi ceux de Sophocle et de Térence.

2185. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « I »

Albalat, avec une érudition profonde et un esprit d’observation remarquable, aiguisés encore par la concentration d’un effort continu, s’est proposé de combler et qu’il a comblée, au jugement des critiques de valeur, qui ont pris la peine de suivre attentivement son œuvre.

2186. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre II. Marche progressive de l’esprit humain » pp. 41-66

Ainsi les oracles des sibylles annonçaient un siècle nouveau ; et cette grande prophétie, née du besoin des peuples, inspirait à Virgile de beaux vers dont lui-même ignorait le sens profond.

2187. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre V. Mme George Sand jugée par elle-même »

je touche ici à une chose profonde ; je touche à l’explication du succès immense de Mme Sand.

2188. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

Voici par exemple le beau poème de Verlaine : En sourdine : Calmes dans le demi-jour Que les hautes branches font, Pénétrons bien notre amour De ce silence profond.

2189. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre V : M. Cousin historien et biographe »

On mit en mots piquants les questions graves ; la philosophie resta profonde, et devint enjouée.

2190. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VIII : M. Cousin érudit et philologue »

Il est impossible de ne pas éprouver une impression profonde et presque solennelle en présence de cette argumentation, quand on ne se dit que c’est là peut-être la première fois que, dans la Grèce au moins, l’esprit humain a tenté de se rendre compte de sa foi et de convertir ses croyances en théories.

2191. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

Jusque-là l’attention, la satisfaction même de l’auditoire se soutint74 ; mais lorsqu’il en vint au bon jugement et à la profonde politique du prince, personne ne put s’empêcher de rire ; cependant le discours était de Sénèque, qui y avait mis beaucoup d’art. […] C’était une femme célèbre par sa beauté, sa naissance et ses galanteries ; elle avait autrefois vécu dans l’intimité avec Agrippine ; mais elle s’en était séparée, emportant avec elle un ressentiment profond d’une injure toujours grave entre les femmes106. […] Burrhus et Sénèque en dirent assez pour marquer leur profonde horreur, exciter la fureur, les menaces, les reproches de Néron, et exposer leur vie. […] Interprète fidèle de cet auteur sublime et profond, nous n’aurions pu sans témérité, j’ai presque dit sans sacrilége, y ajouter ou en retrancher un seul mot. […] Profond penseur, moraliste pur et sublime, ce grand caractère frappe, intéresse, attache : son langage est celui de la raison la plus ferme et de la sagesse la plus austère ; son esprit paraît emprunter sa force et sa vigueur d’une âme élevée et courageuse ; l’énergie de ses pensées n’est que celle de ses sentiments ; la vertu la plus mâle fait tout son génie. » Mais on lira dans un troisième : « Les ouvrages de Sénèque impriment dans le cœur un profond amour de la vertu.

2192. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

À l’heure matinale où les notes stridentes de la diane le réveillaient, il eût fallu voir de quel regard profond, attendri, mouillé d’ineffables effusions, Cantabeille enveloppait cette pauvre petite frimousse endolorie ! […]   Une toute jeune comédienne de grand talent, protégée par un illustre critique, qui pourrait être Jules Janin, bien qu’il s’appelle George Griroux, patronnée par un autre critique du monde des théâtres, qui pourrait bien être Nestor Roqueplan, quoique se nommant Hector Rochebrune, s’aperçoit un jour du vide profond de son cœur. […] Tous deux, dès le commencement de la messe, allaient se poster devant l’église et y fumaient leurs pipes jusqu’à la sortie, ne pensant pas, dans leur profonde bêtise, qu’il n’y a pas tant de courage, pas tant d’héroïsme qu’ils le croient à braver un Dieu qui, selon eux, n’existe pas. […] Démocrate et très libéral, mais non moins autoritaire, j’avais, et j’ai toujours, l’intime et profond sentiment qu’en France la seule forme pratique de la démocratie est l’empire. […] Mais après un sincère appel à ma conscience, je garde la profonde conviction de n’avoir, dans ces Mémoires, ni jamais de ma vie, fait grief sciemment à personne ou cédé à des sentiments dont je doive rougir.

2193. (1924) Critiques et romanciers

Mais aussi que de choses commencent en eux et par eux, qui nous sont infiniment précieuses, je veux dire l’esprit de tolérance, le sentiment profond des droits de la personne, l’instinct de la liberté humaine !  […] Ce garçon qui va grandir au lendemain de l’épopée impériale, qui parmi ses aïeux a des royalistes et des jacobins, des catholiques fervents et des athées, qui a dans le sang les velléités de l’énergie belliqueuse et à qui manque désormais l’emploi d’une telle énergie, Omer Héricourt, c’est la France au sortir de ses tribulations les plus profondes, la Terreur et l’Empire. […] Les gens ne ressemblent point à leurs âmes ; et leur vie apparente n’est point l’image de leur vie intime et profonde. […] force redoutable qui règne au plus profond de l’âme pour forger sa destinée, mais que nul n’aperçoit ; car, enfermé dans son drame, chacun méconnaît l’autre. […] » La solitude « n’est pas seulement une force : elle est aussi l’asile profond des tendresses dépouillées.

2194. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

« Cet acte, dit M. de Méneval, témoin oculaire, excita un mouvement spontané parmi tous les assistants. » On y chercha de profondes raisons, la plupart politiques. […] L’émotion de cette femme éprise d’héroïsme fut encore plus profonde, lorsqu’elle assista aux cérémonies de l’audience solennelle où le Directoire exécutif de la République française accueillit et fêta ce « héros de Plutarque ». […] Le futur empereur des Français et l’ambitieuse authoress anglomane, qui déjà s’intitulait in petto l’« impératrice de la pensée », aperçurent bientôt les profonds dissentiments qui devaient, pendant près de dix ans, aigrir de plus en plus leurs relations. […] Cette aire, peu étendue, derrière laquelle bleuissent les masses profondes de la forêt de Soignes, est traversée par deux larges chaussées, pavées de grès, venant l’une de Nivelles, l’autre de Charleroi. […] Voix pure, claire et profonde comme le cristal transparent des fontaines.

2195. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

Aujourd’hui tu as grandi ; une flamme mystérieuse luit dans tes yeux ; ta voix est profonde comme le murmure des feuillages dodoniens… Tu me domines ! […] Il ne sera jamais un poète celui que ces simples mots prononcés ne font point tressaillir jusqu’au plus profond de son être… La nuit pleine d’étoiles ! […] L’ombre est si calme, le silence tellement profond qu’on peut ouïr quelques ormes épars çà et là respirer avec douceur et les touffes d’herbe chuchoter entre elles. […] Et la Forêt s’endort, profonde, auguste, mystérieuse — comme la vie. […] Les Obscurs demeurent immobiles et semblent plongés dans une léthargie profonde.

2196. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Bientôt, de ces profonds silences qui vous effrayaient tout d’abord, s’élèvent des bruits confus ; ce sont des voix aimées qui vous parlent toutes à la fois ; bientôt encore on dirait que la confusion s’arrête et que chaque voix veut parler à son tour. Écoutez-les, et si chacune de ces voix, qui représente une année, une passion de voire vie, arrive à vous, racontant des opinions auxquelles vous êtes resté fidèle, des haines qui vivent encore en votre âme, et des admirations qui n’ont fait que grandir ; si en même temps vous rencontrez, dans ce concert qui ne vous déplaît pas, quelque souvenir de luttes généreuses, de résistances loyales, de combats courageux : le faible protégé dans sa faiblesse imméritée, et le fort attaqué dans sa gloire injuste ; et si vous pouvez dire à coup sûr : voilà une renommée que j’ai faite, voilà un esprit que j’ai découvert le premier, voilà un nom qui est un nom, grâce à moi ; et parmi vos erreurs, si vous en trouvez plusieurs qui vous ont été facilement pardonnées ; et parmi les hardiesses de votre goût, si vous en rencontrez quelques-unes qui aient été justifiées, et dans vos prévisions, s’il arrive que vous ayez deviné juste, une fois sur dix, et si, en fin de compte, vous avez pour amis les vaillants, les fidèles, les courageux, les grands esprits, et si les autres seuls vous haïssent ; les impuissants, les vaniteux, les faux poètes, les faux historiens, les faux railleurs, les faux braves, les faux hommes de lettres, et si parmi les choses que vous avez écrasées, il ne s’est pas rencontré un chef-d’œuvre, et si parmi les choses que avez le plus louées, il ne s’est pas découvert une honte, et si votre instinct vous a guidé dans les passages difficiles, de façon à vous faire éviter les trappes, les écueils et les abîmes dont le sentier des belles-lettres pratiques est semé de toutes parts, et si, de tous ces obstacles… Tant de violences, de haines, de cris étouffés, — tant de fureurs anonymes, tant d’injures, tant de calomnies, tant et tant de rages sourdes de l’amour-propre offensé, n’ont pas laissé plus de traces que l’escargot quand il passe… un peu d’écume gluante que la rosée efface et que le soleil emporte, alors, véritablement, cette profonde horreur que vous inspirait cet amas de feuilles, amoncelées dans le Capharnaüm du journal, devient une fête… une fête de votre esprit ! […] M. de Fénelon dit encore (nous voulons tout citer, ne fût-ce que pour contrebalancer quelque peu notre admiration profonde pour le génie et le talent de Molière) : — « En pensant bien, il parle mal. […] L’affliction de plusieurs hommes d’honneur fut sincère et profonde. […] Un peu plus loin, à deux chapitres d’ici, vous retrouverez Marivaux ; il a été pour le feuilleton un texte inépuisable et le sujet d’une profonde étude.

2197. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

Voltaire dut accueillir aussi un disciple de cette poésie facile, spirituelle et brillante, qu’il ne concevait guère, pour son compte, plus profonde et plus sévère. […] Delille gagna à ce parti pris d’un exil tout volontaire des sentiments plus vifs que d’habitude, et le droit d’exhaler une inspiration plus profonde qu’il n’en avait marqué jusqu’alors.

2198. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre premier. Nature et réducteurs de l’image » pp. 75-128

« Je n’ai jamais joué une partie d’échecs, dit-il, sans l’avoir rejouée seul quatre ou cinq fois la nuit, dans mon lit, la tête sur l’oreiller… Dans l’insomnie, lorsque j’ai des chagrins, je me mets à jouer ainsi aux échecs en inventant une partie de toutes pièces, et cela m’occupe ; je chasse ainsi quelquefois les pensées qui m’obsèdent. » — Ce ne sont pas les plus profonds joueurs qui poussent le plus loin ce tour de force. […] La tête tombée, il voit l’exécuteur la prendre pour la mettre dans le panier… Il déclare qu’il a eu alors une émotion très profonde ; au moment où il a vu arriver le condamné, le cou nu et dépouillé de ses vêtements, il a été pris d’un tremblement nerveux qu’il n’a pu maîtriser, et, longtemps après l’exécution, l’image de cette tête sanglante qu’il a vu jeter dans le panier le poursuivait sans cesse.

2199. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

Le comte de Maistre en eut le pressentiment sans doute, car il garda un profond silence, silence très répréhensible, envers sa cour sur ces aventures de diplomatie très compromettantes pour ceux dont il était censé être le diplomate. […] « Il y a une expression de votre lettre, répond M. de Maistre au chevalier Rossi, qui m’inspire à moi les réflexions les plus profondes et les plus tristes.

2200. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

Pendant trois ou quatre mois je me suis déplu à Rome ; maintenant j’ai repris à ces nobles ruines, à cette solitude si profonde, si paisible et pourtant si pleine d’intérêt et de souvenir. […] À mon sens, votre Vision d’Hébal est ce que vous avez produit de plus élevé et de plus profond.

2201. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

La punition de l’orgueilleux Alfieri, nous le verrons, fut d’avoir un successeur qui ne le valait point ; la punition de la comtesse fut de sentir, au plus profond de son âme, l’humiliante leçon que lui infligeaient les dernières années de Charles-Édouard. » V Alfieri continuait, en attendant la gloire, à préluder avec elle par des éditions consécutives de ses tragédies, surveillées tantôt à Sienne par son ami Gori, tantôt par lui-même. […] Pendant ce dernier séjour à Paris, non plus que dans le précédent, je ne voulus jamais fréquenter ni connaître, même de vue, un seul de ces innombrables faiseurs de prétendue liberté, pour qui je me sentais la répugnance la plus invincible, pour qui j’avais le plus profond mépris.

2202. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (2e partie) » pp. 81-159

La fonction consistait à entrer lentement un à un, à s’arrêter au pied du trône, à faire une profonde inclination et à sortir par la porte de la salle suivante. Ce fut alors, — tandis que les cardinaux arrivaient un à un pour saluer respectueusement, — que l’empereur, du haut de son trône, adressant la parole, tantôt à l’impératrice, tantôt aux dignitaires et aux princes qui l’environnaient, dit, avec la plus vive animation et la plus grande colère, des choses très cruelles contre les cardinaux absents, ou, pour parler plus exactement, contre deux d’entre eux, ajoutant qu’il pouvait épargner les autres, car il les considérait comme des théologiens gonflés de préjugés, et que c’était la raison de leur conduite ; mais qu’il ne pardonnerait jamais aux cardinaux Opizzoni et Consalvi ; que le premier était un ingrat, puisqu’il lui devait l’archevêché de Bologne et le chapeau de cardinal ; que le second était le plus coupable du Sacré Collège, n’ayant pas agi par préjugés théologiques qu’il n’avait point, mais par haine, inimitié et vengeance contre lui Napoléon, qui l’avait fait tomber du ministère ; que ce cardinal était un profond diplomate, — l’Empereur le disait du moins, — et qu’il avait cherché à lui tendre un piège politique, le mieux calculé de tous, en préparant à ses héritiers la plus sérieuse des oppositions pour la succession au trône, celle de l’illégitimité.

2203. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VII, seconde guerre médique. »

Ce fut là qu’il fut pris de cet étrange accès de mélancolie qui l’idéalise un instant, en jetant sur lui le clair-obscur d’une pensée profonde. […] En réalité, si la Perse avait subjugué la Grèce, ce n’est point son Ormuzd, c’est son Arihmane qui aurait vaincu, et qui aurait frappé l’univers d’une Plaie des Ténèbres plus profonde que celle de l’Égypte.

2204. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1872 » pp. 3-70

Tourguéneff, le doux géant, l’aimable barbare, avec ses blancs cheveux lui tombant dans les yeux, le pli profond qui creuse son front d’une tempe à l’autre, pareille à un sillon de charrue, avec son parler enfantin, dès la soupe, nous charme, nous enguirlande, selon l’expression russe, par ce mélange de naïveté et de finesse : la séduction de la race slave, — séduction relevée chez lui par l’originalité d’un esprit personnel et par un savoir immense et cosmopolite. […] » Puis il me ramène au chemin de fer, et accoudé sur la traverse, où l’on fait queue pour prendre les billets, il me parle de son profond ennui, de son découragement de tout, de son aspiration à être mort, et mort sans métempsychose, sans survie, sans résurrection, à être à tout jamais dépouillé de son moi.

2205. (1856) Cours familier de littérature. II « XIIe entretien » pp. 429-507

L’accent vient du plus profond des siècles. […] Quelquefois, cependant aussi, c’est un homme d’une profonde sensibilité, qui n’a pas eu la force de supporter sa douleur.

2206. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXe entretien. Dante. Deuxième partie » pp. 81-160

Je vis », ajoute-t-il, « tout ce que l’univers renferme relié en un volume par l’amour. » Enfin il discerne, dit-il : « Dans la profonde et lumineuse substance d’un haut foyer, trois cercles de trois nuances et d’une même surface. […] Pascal n’est pas plus profond, Bossuet n’est pas plus saillant, Platon n’est pas plus éthéré, Homère n’est pas plus resplendissant, Virgile n’est pas plus sonore, Théocrite n’est pas plus gracieux, Pétrarque n’est pas plus féminin, Eschyle n’est pas plus tragique ; mais tout cela par moment, par pages, par demi-pages, par filons d’or ou de diamants, dans une mine de sable, de scories, et quelquefois de fange.

2207. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — I. » pp. 195-212

En réimprimant sa grande Histoire, il faudrait la faire précéder de L’Avant-Clovis, commenter les premiers siècles (car les matériaux n’en étaient point connus du temps de Mézeray) ; mais de saint Louis à Louis XIII, je ne crois pas qu’aucun de nos historiens égale Mézeray pour l’exactitude, le profond jugement, et la vivacité de la narration.

2208. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — I. » pp. 1-19

On dit que le même mouvement se renouvela dans la chapelle de Versailles7, et l’on raconte que Massillon lui-même, par son geste, par son attitude abîmée, par son silence de quelques instants, s’associa à la terreur de son auditoire, et, avec une sincérité qui se confondait ici avec les bienséances, trouva jusque dans son triomphe à faire acte de chrétienne et profonde humiliation.

2209. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Chateaubriand. Anniversaire du Génie du christianisme. » pp. 74-90

Mais les mille pensées qu’éveille la comparaison de la société à ces deux époques, avec ce qu’il y a de ressemblances réelles et de dissemblances profondes, me mèneraient trop loin, et me tireraient surtout des cadres tout littéraires où j’aime à me renfermer, sauf à les agrandir le plus que je puis.

2210. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Après des années, un jour qu’il était accusé d’être volage et peu profond dans ses sentiments, Maucroix en convient d’assez bonne grâce : À propos, écrivait-il à une femme d’esprit qui l’attaquait là-dessus, vous me reprochez que bien souvent ç’ont été les sens qui ont emporté mon cœur ; pour cette fois-là (Il parle d’une liaison nouvelle), vous ne devinez pas trop mal, ma chère ; quand il y a un peu d’amour en campagne, cela arrive assez souvent : car, quoi !

2211. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — II » pp. 18-35

Dacier, homme fort fameux par son érudition et ses ouvrages, qui a épousé Mlle Le Fèvre, plus fameuse encore que lui par sa profonde science, avait eu une pension du roi de 500 écus ; ils se sont tous deux convertis depuis quelques mois. » Bien plus, c’étaient M. et Mme Dacier qui avaient décidé la conversion entière de la ville de Castres. — « Dimanche, 17 février. — J’appris que le roi donnait à Foran 1500 francs de pension en faveur de sa conversion, outre celle de 2000 francs que le roi leur donna, à Villette et à lui, il y a quelque temps, comme chefs d’escadre ; ils sont tous deux nouveaux convertis, et le roi répand volontiers ses grâces sur ceux qu’il croit convertis de bonne foi. » — « 10 mars. — Le roi donne au marquis de Villette, cousin-germain de Mme de Maintenon et chef d’escadre, une pension de 3000 fr. ; il s’est converti depuis peu. » Ces sortes de pensions et de faveurs sont à l’infini : elles sont décernées hautement, données de bon cœur et de bonne foi, non pas comme motif de la conversion, mais après la conversion et comme marque de satisfaction du prince pour un retour à la règle.

2212. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — I » pp. 236-253

Je n’irai pas pourtant jusqu’à en conclure qu’il n’y avait point une part de christianisme sincère en lui, même depuis qu’il eut connu Montaigne, et une part de christianisme plus grande et plus profonde qu’il ne le soupçonnait lui-même en certains moments où il s’entêtait en artiste de son idée de sagesse.

2213. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — II » pp. 369-387

Dans la modération et la clémence de Henri IV il entrait donc, sur un fonds premier de générosité et de bon naturel, une profonde connaissance de ce que peuvent les choses, de ce que valent les hommes, bien de la prudence et un peu de mépris.

2214. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Préface pour les Maximes de La Rochefoucauld, (Édition elzévirienne de P. Jannet) 1853. » pp. 404-421

Ce dernier, comme Machiavel, autre philosophe profond et plein de réalité, a trop donné à son observation si pénétrante et si durable la marque particulière des temps où il a vécu et qu’il a traversés.

2215. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — I » pp. 20-38

Nous sommes délaissés, et une nuit profonde ensevelit les poètes latins ; plus d’honneur pour eux, pas un sourire pour leurs chants… Les poètes français ont je ne sais quelle douceur qui attire, et la tendre jeune fille ne lit plus que leurs vers tendres… Il n’a jamais nui de plaire à ce sexe délicat ; c’est encore comme cela maintenant, car ce qui leur a plu d’abord plaît à tous.

2216. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Voiture. Lettres et poésies, nouvelle édition revue, augmentée et annotée par M. Ubicini. 2 vol. in-18 (Paris, Charpentier). » pp. 192-209

Catulle, au milieu de ses jolis hendécasyllabes et de ses mordants badinages, est un poète profond, un poète sérieux ayant le culte de son art.

2217. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — I » pp. 298-315

Je pleure sa personne, je regrette l’occasion perdue, et soupire du profond de mon coeur la façon de sa mort.

2218. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — III » pp. 337-355

Et cependant, lui-même il tombe gravement malade à Sondrio (août-septembre 1636), d’une maladie qualifiée de léthargie profonde tellement que le bruit de sa mort se répand et dans son armée qui le pleure, et chez l’ennemi qui s’en réjouit.

2219. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — I » pp. 356-374

Si vous me mettez de ce nombre, je puis vous assurer que je vis dans une ignorance profonde des sentiments que vous avez pour moi.

2220. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — II » pp. 414-431

Il n’avait pas en sa veine de quoi justifier cet autre mot du même poète, et qui porte avec lui sa preuve lumineuse : « Elle vit plus longtemps que les actions, la parole que la langue a tirée d’un esprit profond avec la rencontre des grâces. » Les grâces, il les rencontrait souvent, il les accostait volontiers, mais c’étaient les grâces familières ; et cette autre condition que veut Pindare, la profondeur, était absente.

2221. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

Ici commence une analyse profonde, délicate, serrée ; une dissection cruelle s’entame et ne cessera plus.

2222. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Journal d’Olivier Lefèvre d’Ormesson, publié par M. Chéruel » pp. 35-52

À défaut d’une grande étendue et élévation d’esprit, on doit le vénérer pour l’intégrité et sainteté de sa vie ; un sentiment moral, profond, respire dans ses mémoires inédits, trop prolixes et trop informes pour être publiés en entier ; M. 

2223. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mémoires de Mme Elliot sur la Révolution française, traduits de l’anglais par M. le comte de Baillon » pp. 190-206

Nous étions tous dans une profonde affliction et dans les larmes.

2224. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Caractères de La Bruyère. Par M. Adrien Destailleur. »

Comme il sent bien le mérite de certaines femmes, leur charme élevé, profond, quand elles joignent l’agrément à l’honnêteté !

2225. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Œuvres complètes d’Hyppolyte Rigault avec notice de M. Saint-Marc Girardin. »

Il eut un adversaire que ses amis et lui ne nommaient alors qu’avec des signes d’horreur profonde et dont il faut bien pourtant reconnaître la valeur, maintenant que L’Univers n’existe plus, et que tout cela est presque devenu de l’histoire littéraire ; je veux parler de M. 

2226. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier »

Mme de Staël se l’était attaché à titre de précepteur de ses enfants ; mais Schlegel, qui avait ses travers, affectait devant le monde de n’être auprès d’elle que sur le pied d’un ami. « Schlegel, écrivait-elle dans un moment d’épanchement, a des défauts qui me cachent quelquefois ses vertus. » Témoin journalier de l’humeur et même des ridicules de Schlegel (car il en avait qui sautaient aux yeux), Bonstetten disait plus gaiement et en y mettant moins de façon : « Les jours où Schlegel n’est pas gentil, il est impitoyablement fouetté, et le plus joli, c’est que Mme de Staël se charge elle-même de la punition ; alors elle a trois fois plus d’esprit. » Quoi qu’il en ait pu être de ces petites querelles amusantes, Schlegel lui fut, pendant des années, du plus grand usage par ses qualités, par son savoir ingénieux et profond.

2227. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier (suite et fin.) »

Dès que les Allemands ont passé le Rhin, elle n’a plus désiré que la paix avec Bonaparte, et elle a senti avec une profonde douleur l’humiliation de la France et sa dépendance.

2228. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Livet, il cherche et trouve des raisons subtiles et profondes à une institution et à une durée mémorable dont il ne me convient pas assurément de vouloir amoindrir le prestige ; mais il semble croire qu’il en est de l’Académie comme de Rome, qu’elle est vouée à l’éternité ; « Qu’on essaye, dit-il, de se figurer un pouvoir, quelque autorisé à tout faire qu’on le suppose, qui ose porter atteinte à ce chiffre de quarante, devenu sacramentel en littérature ; on n’y réussira pas. » Grâce à Dieu, l’Académie n’est pas et n’a jamais été bien menacée de nos jours ; mais pour cela je ne crois pas que ce chiffre de quarante ait une telle vertu historique.

2229. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français, et de la question des anciens et des modernes, (suite et fin.) »

C’est que notre propre progrès est incessant, et que, par la même illusion, nous attribuons toujours au vieux poète des émotions nouvelles et de plus en plus profondes, dont la lecture de ses poèmes est pour nous l’occasion… Chaque lecture nous révèle un développement nouveau.

2230. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset. »

Par malheur, la prudence, l’art profond qui avait dirigé le Sénat dans les beaux siècles de la République, la suite et la durée qui n’est donnée qu’aux corps et aux institutions et qui est refusée aux individus, leur manquèrent, et l’on est trop informé aussi, à leur égard, de certains détails qui gagneraient à se confondre dans l’éloignement.

2231. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid. »

j’ai souvent ouvert, avec la meilleure volonté du monde, Corneille, Racine et Boileau, et je sens tout ce qu’ils ont de talent ; mais je ne puis en soutenir la lecture, et il me paraît évident qu’une partie des sentiments les plus profonds qu’éveille la poésie est restée lettre close pour ces auteurs56… » L’aveu est assez clair.

2232. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. »

si les circonstances n’ont pas permis au Gouvernement de guérir entièrement les plaies de la nation qui saignent encore, bien loin de l’en blâmer, c’est à nous de louer sa profonde sagesse qui ne met des bornes à ses bienfaits que pour nous en assurer la jouissance.

2233. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. (Suite) »

Le maréchal fit la sourde oreille et répondit avec une profonde révérence « qu’il souhaitait de mourir au service de Sa Majesté comme le maréchal de Turenne. » C’était s’en tirer en homme d’esprit. — Voilà des honneurs assurément, voilà de l’influence ; mais il y a encore loin de ce haut degré à gouverner la France et la Cour.

2234. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

L’autre Mémoire sur les avantages à retirer de colonies nouvelles dans les circonstances présentes mériterait aussi une analyse : il se rapporte particulièrement à l’état moral de la France d’alors, et il est plein de vues sages ou même profondes.

2235. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Affaires de Rome »

Sur son passage à Avignon, par exemple, croirait-on qu’un pèlerin croyant eût dit : « Ce passé triste, mais non sans grandeur, remplit d’une émotion profonde l’âme de celui qui traverse ces silencieux débris, pour aller au loin chercher d’autres débris, encore palpitants, de la même puissance ? 

2236. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

Si le sentiment moral s’est parfois trouvé affaibli sous le coup de cette transformation profonde, c’est là un mal à combattre, à réparer ; mais il y a eu, à d’autres égards, de l’avantage : il s’est répandu dans toute l’atmosphère des esprits un certain mélange dont l’intelligence et la tolérance ont profité.

2237. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. le Cte Alfred de Vigny à l’Académie française. M. Étienne. »

Il nous est impossible, nous l’avouons, d’attacher à cette pièce le sens profond et grave que M. de Vigny y a découvert.

2238. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre I. Composition de l’esprit révolutionnaire, premier élément, l’acquis scientifique. »

Que l’on compare le Discours de Bossuet sur l’Histoire universelle, et l’Essai de Voltaire sur les mœurs, on verra tout de suite combien ces fondements sont nouveaux et profonds  Du premier coup, la critique a trouvé son principe : considérant que les lois de la nature sont universelles et immuables, elle en conclut que, dans le monde moral, comme dans le monde physique, rien n’y déroge, et que nulle intervention arbitraire et étrangère ne vient déranger le cours régulier des choses, ce qui donne un moyen sûr de discerner le mythe de la vérité339.

2239. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre premier. Les signes — Chapitre II. Des idées générales et de la substitution simple » pp. 33-54

La rougeur subite d’un papier imprégné ou le recul plus ou moins grand d’une lamelle de fer sont liés à une métamorphose intime ou à un degré fixe d’action profonde, et nous observons le second objet que nous n’atteignons pas dans le premier que nous atteignons. — Pareillement, quand il s’agit d’une qualité générale dont nous ne pouvons avoir ni expérience ni représentation sensible, nous substituons un nom à la représentation impossible et nous le substituons à bon droit.

2240. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre II. L’éloquence politique »

Il avait la parole facile, fluide, animée cependant et ardente : il n’était ni profond ni précis, mais il s’échauffait au son de sa propre parole, et il devenait entraînant.

2241. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre XI. La Science et la Réalité. »

La vérité, pour laquelle Galilée a souffert, reste donc la vérité, encore qu’elle n’ait pas tout à fait le même sens que pour le vulgaire, et que son vrai sens soit bien plus subtil, plus profond et plus riche.

2242. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Stéphane Mallarmé » pp. 146-168

Mendès n’a jamais voulu revenir sur cette impression puisqu’il écrivait en 1900 de Mallarmé : Je souhaite ardemment de m’être trompé ; oui, du plus profond de mon cœur, je souhaite en effet que le compagnon de ma jeunesse ait mérité d’être l’initiateur, le guide spirituel des générations futures, mais, avec chagrin, je ne le crois pas et j’ai dû me résigner à le dire.

2243. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VI. Pour clientèle catholique »

Mais, parce que Le Disciple est un livre sincère, parce que la pensée inepte et mille fois répétée de la responsabilité de l’écrivain y est devenue un profond sentiment bourgeois, la lecture en reste intéressante et humiliante, comme la vue d’une lâcheté éperdue, comme le spectacle d’une terreur verte et bégayante de Joseph Prudhomme.

2244. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XIII »

Il peut s’emparer hardiment d’une maladie des sens ou de l’âme, en scruter les plaies, en analyser les ressorts, compléter, par une étude hardie et profonde, la science de la vie à laquelle rien de ce qui est humain ne doit rester étranger.

2245. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires de Philippe de Commynes, nouvelle édition publiée par Mlle Dupont. (3 vol. in-8º.) » pp. 241-259

Nul historien n’exprime aussi vivement que lui le sentiment profond de la misère des grands et des rois, des puissants et des heureux de la terre.

2246. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

Une parfaite bienséance règne dans la salle avant l’arrivée du lecteur : dès qu’il est arrivé, le plus profond silence s’établit, et les moindres impressions se peignent, soit par un silence encore plus attentif, soit par un frémissement très sensible, comme dans les auditoires les plus exercés.

2247. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Éloges académiques de M. Pariset, publiés par M. Dubois (d’Amiens). (2 vol. — 1850.) » pp. 392-411

Le profond divorce qui existait alors entre la chirurgie et la médecine empêcha les deux Sociétés de se fondre à aucun moment ou même de se rapprocher, comme il eût été si naturel.

2248. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Pline le Naturaliste. Histoire naturelle, traduite par M. E. Littré. » pp. 44-62

Il les égaie par des anecdotes historiques piquantes ; il les orne au moins par la concision ; il les relève toutes les fois qu’il peut par des vues morales qui ont leur beauté, même lorsqu’elles touchent au lieu commun, par un sentiment profond de l’immensité sacrée de la nature, et aussi par celui de la majesté romaine.

2249. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — II. » pp. 494-514

Il est pourtant deux traits d’exception à cet égoïsme presque universel, et Mallet les relève, comme il est juste de les relever aussi : 1º le peuple, ce qu’il appelle le bas peuple (mais cela s’étend très loin), n’a pas cessé, selon lui, d’être atteint de son hydrophobie, il n’en est nullement revenu : « C’est toujours un animal enragé, dit-il, malgré sa misère profonde. » Cette rage qui survit même à la souffrance et à la misère, c’est la soif de l’égalité et la haine du tyran.

2250. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — I. » pp. 441-459

Un double courant de factions était aux prises : ceux mêmes qui voulaient rester immobiles et fidèles à la situation du milieu étaient entraînés par l’un ou par l’autre de ces courants profonds et contraires.

2251. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Étienne, ou une émeute littéraire sous l’Empire. » pp. 474-493

Le moment était des plus favorables ; à cette fin de 1811, la paix de l’Empire était ou semblait profonde ; les esprits, reposés depuis des années, n’attendaient qu’une occasion pour dépenser leur trop-plein de santé et de force.

2252. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

Boris, dès les premiers jours, a senti le danger qui tient à des causes générales et profondes.

2253. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre III. Zoïle aussi éternel qu’Homère »

Leur fermeté et leur fierté recouvrent une sympathie profonde ; si le granit avait un cœur, quelle bonté il aurait !

2254. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

En signalant avec tant de force, et peut-être avec un excès d’inquiétude, les maux et les périls que la démocratie recèle dans son sein, M. de Tocqueville a-t-il voulu décourager les sociétés démocratiques, les ramener aux institutions du passé, et leur proposer comme remède une restauration plus ou moins profonde de l’ancien régime ?

2255. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre III : La littérature du xviiie et du xixe  siècle »

combien il est profond et touchant !

2256. (1912) Le vers libre pp. 5-41

brièvement, voici : Il fallait d’abord comprendre la vérité profonde des tentatives antérieures et se demander pourquoi les poètes s’étaient bornés dans leurs essais de réforme.

2257. (1912) L’art de lire « Chapitre III. Les livres de sentiment »

Le romanesque est un être très aimable qui nous donne bien des satisfactions : celle d’abord de l’aimer ; celle ensuite de l’admirer un peu comme un noble exemplaire en somme de l’humanité ; celle ensuite de ne pas le craindre, encore qu’il ne fallût pas, à cet égard, avoir une pleine confiance ; celle enfin de lui donner ces fameux conseils de bon sens, de prudence, de sagesse pratique, qu’à donner nous nous épanouissons, nous nous élargissons, nous nous enorgueillissons et qui comblent de plaisir, de pleine satisfaction, de joie intime et profonde, du sentiment de la supériorité indulgente et bienfaisante, ceux de qui ils partent.

2258. (1912) L’art de lire « Chapitre VIII. Les ennemis de la lecture »

Et, dans tous les cas, un auteur blesse ce sentiment profond d’égalité que nous avons tous.

2259. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Seconde partie. Des mœurs et des opinions » pp. 114-142

Dans un pays où le bien-être social consiste en des choses de délicatesse et de goût, où l’existence intime repose sur l’honneur, où les discours légers ont tant de gravité, où les interprétations d’une conduite exempte de tout reproche peuvent être si fatales, ou les femmes sont tellement mêlées à la société, et y mêlent tellement toutes les sortes de susceptibilités, et j’oserais dire toutes les sortes de pudeur, où tous les amours-propres sont toujours éveillés et si facilement irritables ; dans un tel pays, avouons-le, la médisance devient de la calomnie, les écrits indiscrets feront des blessures profondes que nulle puissance au inonde ne pourra guérir, la censure deviendra un tribunal public dont les arrêts justes ou injustes seront trop souvent des outrages.

2260. (1925) Comment on devient écrivain

En France, nous nous imaginons être profonds quand nous sommes ennuyeux, et nous jugeons toujours le vice plus intéressant que l’honnêteté. […] Il en résulta un cahier volumineux, qu’il finit, bien entendu, par perdre ; mais on se rend mieux compte maintenant des raisons profondes qui donnent une telle vie aux créations de Tourguenieff… Quel que soit le don, seul un travail de cette conscience et de cette subtilité donne aux œuvres cette solidité que rien ne remplace54. » La première condition d’un caractère ou d’un personnage (on l’oublie toujours et on ne saurait trop le redire), c’est sa permanence, sa fidélité à lui-même. […] D’Israëli cite, dans son Recueil, un homme qui « était tombé dans une si profonde tristesse, à cause de quelques vers qu’on avait faits contre lui, qu’il en mourut ». […] Mais ce qu’il y a de plus important, de fondamental, ce qui produit l’impression la plus profonde, ce qui agit avec le plus d’efficacité sur notre moral, dans une œuvre poétique, c’est ce qui reste du poète dans une traduction en prose ; car cela seul est la valeur réelle de l’étoffe dans sa pureté, dans sa perfection. »‌ Je me demande ce qui resterait des Orientales et des Contemplations traduites en prose anglaise ou allemande, et si ce qui pourrait en rester agirait avec « efficacité » sur le « moral » du lecteur et pourrait légitimement représenter la « valeur réelle » de ces poèmes. […] Esprit léger et profond, espèce de Joseph de Maistre du journalisme, comme dit à peu près Sainte-Beuve, causeur étincelant, auteur d’une sérieuse étude sur la langue française, Rivarol n’a brillé que par la conversation et l’esprit journalistique.

2261. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

C’est Pascal qui sait « que l’art de fonder et de bouleverser les États est d’ébranler les coutumes établies, en sondant jusque dans leur source pour marquer leur défaut de justice », ou encore « que recourir aux lois fondamentales et primitives de l’État qu’une coutume injuste a abolies, c’est un jeu sûr pour tout perdre » ; mais c’est le citoyen de Genève qui ne se doute pas de ces profondes et lamentables vérités. Il y a une connaissance des choses et des hommes plus profonde et plus sûre, un sens plus vif de la réalité, je ne dis pas dans les Maximes de la Rochefoucauld, mais dans les Mémoires du moindre frondeur que dans Diderot tout entier. […] Je ne mentionne que pour mémoire un court passage de la troupe sur une troisième scène, au jeu de paume de la Croix-Blanche91 : c’était à l’endroit de la rue de Buci où l’on peut voir encore un assez profond retrait de l’alignement. […] La différence est si profonde, le système de Racine et de Molière est si distinct du système de Corneille, que vers les dernières années du xviiie  siècle, quand les novateurs, menés par Diderot, essayeront de secouer la domination que le souvenir de Molière et de Racine exerce encore sur le théâtre français, la formule de Saint-Évremond deviendra leur mot d’ordre. […] Sans doute moins profond que ceux-ci ; nullement poète, si l’on veut, en dépit de quinze ou vingt volumes de vers ; moins bienfaisant surtout que ceux-là ; mais combien supérieur à tous, et sans en excepter les plus grands, par la multiplicité des œuvres, la mobilité du génie, et surtout l’étendue d’influence exercée sur son temps !

2262. (1912) Réflexions sur quelques poètes pp. 6-302

*** Une causticité naturelle, le plaisir de railler, se réveillent chez du Bellay à la première occasion et amusent quelque temps sa tristesse, qui demeure quand même profonde et sincère. […] L’autre, se jetant sur lui, le marque de deux profondes plaies ; puis il s’enfuit à toute bride. […] Tant de cette frayeur les profondes atteintes Repoussent fortement toutes les autres craintes. […] Vous vous reconnaissez à ces traits, Uranie : C’est pour vous obéir et non point par mon choix, Qu’à des sujets profonds j’occupe mon génie, Disciple de Lucrèce une seconde fois13. […] Lebrun use d’un art volontiers ampoulé, et s’il devient soudain torrent, c’est pour se perdre avec pompe dans des trous peu profonds.

2263. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — I. » pp. 234-253

Je suis avec un profond respect, etc.

2264. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — I. » pp. 495-512

On dirait que les objets sont nés dans le monde le jour ou il les a vus… J’ai déjà remarqué ailleurs93 qu’à l’autre extrémité de la chaîne historique on a tout le contraire de cette impression, quand on lit nos graves professeurs d’histoire d’aujourd’hui, nos auteurs de considérations politiques d’après Montesquieu, mais plus tristes que lui, tous ceux qui cherchent et prétendent donner la raison de tous les faits, l’explication profonde de tout ce qui se passe, qui n’admettent sur cette scène mobile ni l’imprévu, ni le jeu des petites causes souvent aussi efficaces que les grandes ; esprits de mérite, mais ternes et laborieux, ployant sous le faix de la maturité autant que Joinville errait et voltigeait par trop de candeur et d’enfance94.

2265. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

Aujourd’hui, le genre de talent de Bourdaloue nous semble bien loin de prêter à de telles vivacités de couleurs, et, pour mieux essayer d’y pénétrer, je dirai d’abord l’effet assez général que cette éloquence produit à la lecture, et par quel effort, par quelle application du cœur et de l’esprit il est besoin de passer pour revenir et s’élever à la juste idée qu’il convient d’avoir de sa grandeur, de sa sobre beauté et de sa moralité profonde.

2266. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

Je ne veux point parler ici de cette science de dialectique et de ces ingénieuses subtilités de division, dans lesquelles on retrouve le théologien profond, l’ancien professeur de théologie morale : j’ai dans l’idée ces hardiesses et ces présences d’esprit de l’orateur, qui, même en développant ses thèmes généraux, s’adresse aux opinions, aux susceptibilités régnantes, et qui, pour déployer ses voiles et voguer presque contre le vent, consulte en bon pilote les courants et les flots.

2267. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

Dans les beaux temps de cette littérature, c’est à peine si La Bruyère, qui a parlé de toutes choses, ose dire un mot en passant de l’impression profonde qu’une vue comme celle de Pau ou de Cras en Dauphiné laisse dans certaines âmes.

2268. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le marquis de la Fare, ou un paresseux. » pp. 389-408

Il y a souvent en l’homme un défaut dominant et profond, un vice caché qui se dissimule, qui est honteux de paraître ce qu’il est, qui aime à se déguiser dans la jeunesse sous d’autres formes séduisantes, à se donner des airs de noble et belle passion : attendez les années venirt, le vice caché va s’ennuyer des déguisements et des détours, ou si vous l’aimez mieux, il va hériter de ces autres passions plus faibles et éphémères qui se jouaient devant lui ; il va les dévorer et grossir en les absorbant en lui-même et les engloutissant : alors on le verra se démasquer tout à la fin et se montrer crûment sans plus de honte, laid, difforme, et, pour tout dire, monstrueux.

2269. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

Nous n’avions pas une voile, et cependant le navire faisait trois lieues par heure, Peins-toi réunis le sifflement du vent et de la pluie, les éclats du tonnerre, le mugissement des flots qui venaient se briser avec impétuosité contre le vaisseau, et un bourdonnement sourd et continuel dans les cordages ; ajoute à tout cela l’obscurité la plus profonde et un brouillard presque solide que l’ouragan chassait avec violence, et tu auras une légère idée de ce que j’observais alors tout à mon aise.

2270. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — II » pp. 159-177

Il y avait des points douloureux et profonds et qui ne furent jamais entièrement guéris en lui ; il évite de les toucher, et il se montre plutôt par le côté vif, ingénieux, affectueux et riant.

2271. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Instruction générale sur l’exécution du plan d’études des lycées, adressée à MM. les recteurs, par M. Fortoul, ministre de l’Instruction publique » pp. 271-288

Cette réforme, étant une des choses les plus considérables qu’on ait tentées depuis longtemps dans l’éducation de la jeunesse, et devant avoir l’influence la plus directe et la plus profonde sur l’avenir de la société, mérite d’être exposée dans son esprit, et je tâcherai de le faire en dégageant cet examen de tout ce qui pourrait le masquer ou l’embarrasser, et sans y rien mêler qui puisse paraître injuste envers personne.

2272. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — I » pp. 395-413

D’Alembert serait plus l’homme de Frédéric ; celui-ci en parle en des termes si naturels, qu’on croit voir la personne même dans sa modestie de grand géomètre, et quand Diderot ne le poussait pas aux affaires de parti (7 juillet 1755) : J’ai vu à Wesel d’Alembert, qui me paraît un très aimable garçon ; il a beaucoup de douceur et de l’esprit, joint à un profond savoir, sans prétentions.

2273. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — I » pp. 249-267

Au midi, une armée de pics crénelés, d’arêtes tranchées au vif, de tours carrées, d’aiguilles, d’escarpements perpendiculaires, se dresse sous un manteau de neige ; les glaciers étincellent entre les rocs sombres ; les noires saillies se détachent avec un relief extraordinaire sur l’azur profond.

2274. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

Semblables à des somnambules qui parlent et qui marchent en dormant, ces derniers ne connaissent point cette suite impétueuse et féconde de pensées, qui forment un si vif sentiment dans le cœur des hommes profonds.

2275. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

Mais puisque rien de ce qui est arrivé n’est arrivé sans la permission de Dieu, je me tairai, ô Dieu éternel, j’implorerai ton nom, et je le demanderai pour moi, pour tous les miens, des sentiments d’humilité profonde, etc.

2276. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. »

On le croyait à la veille d’une disgrâce dans l’esprit du roi et sous la menace d’une chute profonde.

2277. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. (Suite et fin) »

On en sort, ce me semble (dût-on avoir souri de quelques expressions au passage), avec une profonde estime pour le jeune roi qui pense et s’exprime ainsi.

2278. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Ce n’est plus l’humeur voyageuse qui s’égaye et qui se joue en mille désirs de courses errantes et vagabondes, ce n’est plus la curiosité jeune et dans sa légère ivresse, c’est le sentiment historique profond, qui se prononce et se déclare, c’est une admiration pleine de deuil pour la plus grande cité qu’ait portée la terre et qu’elle a presque tout engloutie.

2279. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Étienne-Jean Delécluze, (suite et fin) »

la plupart de ses jugements littéraires d’alors, courus et touchés à peine, sont restés charmants : — et sur Xavier de Maistre et son frère, si différents, mais semblables en un point, et en général sur les écrivains de Savoie, fins, sagaces et jamais lourds, et desquels on peut dire que « la finesse italienne a passé par là » ; — et sur Mme de Souza, le romancier aux aimables nuances, qui excelle à cent pages d’amour délicat, mais chez qui « cette délicatesse est compensée par l’absence de tout trait fort et profond : le premier volume de ses romans amuse beaucoup, le quatrième lasse toujours » ; — et sur Mme de Staël, contre laquelle il lance des paroles d’un pronostic, effrayant ; et sur Mme de Genlis, qui a trouvé moyen, avec infiniment d’esprit, de faire entrer l’ennui dans ses livres, car l’hypocrisie de salon les glace ; et sur M. de Jouy, à qui il accorde un peu trop en faveur de son Sylla et de ses vers tragiques dignes de la prose ; et sur Andrieux, dont on essaya un moment de faire l’arbitre du goût ; il écrivait de ce dernier en janvier 1823 : « M. 

2280. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire. »

Dites-lui bien que ma grande sagesse est un profond mépris pour ce qu’on appelle la sagesse humaine ; que je n’en fais aucun cas ; que je ne l’ai jamais estimée, et que je me suis aperçu que, les trois quarts du temps, ce n’est qu’une vanité triste et tourmentante.

2281. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

quel sentiment principal et profond parvient on à réveiller en elle, sentiment qui semble inhérent à sa nature tant qu’elle sera France ?

2282. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

 » Mais ces anciens papiers sont relégués, entassés dans des greniers, dans des arrière-chambres où l’on n’a pas pénétré depuis des années ; il faut ouvrir et desceller des placards remplis et regorgeant de dossiers, morts dès longtemps à la lumière ; pour trouver un seul acte, il faut étaler, dépouiller tout cela, il faut tout parcourir ; car la pièce qu’on cherche, si elle s’y trouve, sera enfouie, comme il arrive souvent, dans la dernière liasse, et cette liasse sera peut-être elle-même tombée au plus profond recoin de l’armoire où elle gît et où elle resterait à jamais, si l’on n’y plongeait de toute la longueur du bras.

2283. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. (suite) »

J’ai des horreurs profondes pour les formes, pour les considérations de tous les jours.

2284. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite et fin.) »

Avec des antipathies profondes de genres, il a toujours adouci l’expression de son peu de goût à l’égard des œuvres et des personnes.

2285. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite et fin.) »

Le jour où viendrait un critique qui aurait le profond sentiment historique et vital des lettres comme l’a M. 

2286. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Elle est explicite là-dessus dans ses Mémoires tels qu’on nous les rend aujourd’hui ; elle se vante et s’honore de cette passion tardive et profonde, elle s’y rattache en toute rencontre avec orgueil, avec élévation ; et je dirai nettement que dans tout cet inédit dont on fait tant de bruit, il n’y a que cela de bien et qui en vaille la peine ; il n’y avait que cela qui méritât véritablement de nous être donné.

2287. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Confinée au cercle domestique et n’ayant pas mené, comme l’illustre vagabond de Genève, une vie errante et souvent pédestre, elle ne pouvait qu’entrevoir, sans les sonder, les misères profondes : elle était digne de les sentir.

2288. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Leckzinska (suite et fin.) »

Mme de Pompadour, du moins, eut le tact de comprendre qu’elle ne pouvait avoir vis-à-vis de cette reine vertueuse et offensée qu’une ligne de conduite et qu’une attitude tolérable : le respect le plus profond, la soumission la plus entière, le désir de lui complaire en tout et de la servir ; faire dire d’elle en un mot : « Mieux vaut celle-là qu’une autre. » Cet éloge tel quel, Mme de Pompadour le mérita.

2289. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

Elle ajoutait dans tout le feu de son indignation et l’ardeur profonde de son mépris : « Je ne vous charge pas de faire mon apologie ; vous connaissez depuis longtemps le fond de toute mon âme, et jamais le malheur n’y pourra faire entrer la moindre idée vile ni basse ; mais aussi ce n’est que pour la gloire du roi et de son fils que je veux me livrer en entier, car tout le reste que je vois ici m’est en horreur, et il n’y en a pas un, dans aucun parti, dans aucune classe, qui mérite qu’on fasse la moindre chose pour lui. » Voilà les accents du cœur, l’âme même qui déborde.

2290. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

On lui faisait son lit avec un creux profond au milieu, se relevant ensuite aux pieds et à la tête, et sa façon d’être couché était presque encore de se tenir sur son séant.

2291. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « HISTOIRE de SAINTE ÉLISABETH DE HONGRIE par m. de montalembert  » pp. 423-443

Pendant qu’il parle ainsi sans discontinuer, d’une voix claire, les yeux baissés, une espèce de sourire vague à sa bouche (assez gracieux dans son dédain) annonce cette profonde et douce satisfaction, cette intime et parfaite certitude qu’il a de lui-même.

2292. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DISCOURS DE RÉCEPTION A L’ACADÉMIE FRANÇAISE, Prononcé le 27 février 1845, en venant prendre séance à la place de M. Casimir Delavigne. » pp. 169-192

Lui-même a consacré les prémices de son bonheur domestique dans les seuls vers peut-être où il se soit permis ce genre d’épanchement : Il n’est point de beaux lieux que n’embellisse encore Le sentiment profond qu’on éprouva près d’eux… De tels vers et ceux qui suivent, et que je regrette de ne pouvoir citer avec étendue, ont tout leur prix chez le poëte qui n’a laissé échapper de son âme discrète que de pudiques parfums.

2293. (1892) Boileau « Chapitre VI. La critique de Boileau (Fin). La querelle des anciens et des modernes » pp. 156-181

Cette doctrine ne repose pas sur une profonde métaphysique : ce n’est à proprement parler qu’un positivisme littéraire.

2294. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

Ailleurs, la vulgaire comparaison du croissant de la lune à une faucille, gagnant par une contagion semblable les autres idées réunies dans la même phrase, entourant l’image primitive d’images complémentaires, a créé un merveilleux tableau : Tout reposait dans Ur et dans Jerimadeth ; Les astres émaillaient le ciel profond et sombre ; Le croissant fin et clair, parmi ces fleurs de l’ombre, Brillait à l’occident, et Ruth se demandait, Immobile, ouvrant l’œil à moitié sous ses voiles, Quel dieu, quel moissonneur de l’éternel été Avait, en s’en allant, négligemment jeté Cette faucille d’or dans le champ des étoiles.

2295. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre I. Le théâtre avant le quinzième siècle »

Malheureusement le sentiment profond qui ferait la grandeur poétique d’une telle scène ne sort pas : Dieu a toutes les allures d’un bon curé de campagne, la paroissienne clabaude à propos de l’offrande et du cierge ; et dans la plus saisissante fantaisie que la foi chrétienne put créer, on croit assister simplement à une messe de village.

2296. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre III. La poésie : V. Hugo et le Parnasse »

Sully Prudhomme a de profondes tendresses et d’abondantes pitiés, qui naissent en lui d’un pessimisme délicat et pénétrant.

2297. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Henry Rabusson »

La dissipation de la vie ne permet guère le recueillement où se nourrissent et croissent d’ordinaire les profondes amours.

2298. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Alphonse Daudet, l’Immortel. »

Mais ici l’injustice paraît si grande qu’elle vient peut-être d’un sentiment plus profond et plus réfléchi qu’on ne croit.

2299. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Émile Zola, l’Œuvre. »

que le monde est donc plus vaste, plus profond, plus varié et plus amusant qu’il ne le voit !

2300. (1829) De la poésie de style pp. 324-338

* * * Herder et Schiller voulurent se faire chirurgiens dans leur jeunesse, mais le Destin le leur défendit : « Il existe, leur dit-il, des blessures plus profondes que celles du corps ; guérissez-les ! 

2301. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Je ne saurais dire combien me paraît intéressant tout ce chapitre par le jour qu’il jette sur le procédé politique de Napoléon, sur le point fixe de sa croyance supérieure (croyance en Dieu), sur son indifférence profonde pour les articles secondaires et sur l’importance extrême qu’il affectait pourtant d’y attacher, en un mot, sur la règle de conduite qu’il regardait évidemment comme la seule loi des chefs d’empire, puisqu’il nous l’expose en termes si nets et si peu voilés.

2302. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Par la charité, il n’y eut pas de cœur où l’Église ne pût pénétrer ; car le malheur est le roi d’ici-bas, et, tôt ou tard, tout cœur est atteint de son sceptre… Désormais l’Église pouvait aller avec confiance conquérir l’univers, car il y a des larmes dans tout l’univers, et elles nous sont si naturelles, qu’encore qu’elles n’eussent pas de cause, elles couleraient sans cause, par le seul charme de cette indéfinissable tristesse dont notre âme est le puits profond et mystérieux.

2303. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

L’essentiel pour la critique, pour celle dont nous parlons, tout active et pratique, est bien moins encore d’avoir une science profonde des choses que d’en ressentir vivement, d’en inspirer le goût, et de le retrouver autour de soi.

2304. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. » pp. 432-452

Mais, pour cela, il vous faudrait être un de ces poètes qui sont larges, simples et profonds comme la nature.

2305. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits de Fénelon. (1850.) » pp. 1-21

On voit trace de sa douleur profonde jusque dans cette Correspondance badine ; mais que les paroles sont simples, vraies, et qu’elles rejettent bien loin toute maligne pensée !

2306. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. Le Chateaubriand romanesque et amoureux. » pp. 143-162

C’est là aussi un côté bien essentiel de Chateaubriand, la veine qui tient au plus profond de sa nature et de son talent.

2307. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand. (Berlin, 1846-1850.) » pp. 144-164

Dans le portrait de son aïeul, le premier Frédéric, fils du Grand Électeur, et si peu semblable à son père, il dira pour marquer le faste de ce roi de la veille, qui n’avait pas moins de cent chambellans : « Ses ambassades étaient aussi magnifiques que celles des Portugais. » Son jugement des hommes est profond et décisif.

2308. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

C’est un don de l’expérience et même d’une profonde étude que d’être familier et de rire avec ses lecteurs. » Plus jeune, il avait osé rire et pleurer à la fois dans ses arlequinades pour Mme Gonthier ; plus mûr, et un peu enhardi par les débuts de la Révolution, il osa être piquant, gai, malin, en même temps que moral encore et bienveillant, dans ses Fables.

2309. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

Considérant l’espèce d’état de fausse paix et de trêve précaire, le régime de sourde et profonde corruption qui avait précédé les derniers troubles, il se félicitait presque aussi de le voir cesser ; car « c’étoit, dit-il de ce régime de Henri III, une jointure universelle de membres gâtés en particulier, à l’envi les uns des autres, et, la plupart, d’ulcères envieillis, qui ne recevoient plus ni ne demandoient guérison.

2310. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. » pp. 103-122

Dès ce temps-là, il n’était pas très rare de trouver de libres et hardis causeurs qui, parlant de La Harpe à propos de son Éloge de Racine, disaient : « L’Éloge de M. de La Harpe manque d’idées et de vues… Un coup d’œil neuf et profond porté sur la tragédie et sur l’art dramatique, voilà part où il fallait honorer la cendre du grand Racine14. » De telles vues, de telles questions, qui allaient jusqu’à Sophocle et à Shakespeare, pouvaient être particulières alors à quelques esprits ; elles eussent excédé la portée d’un auditoire à cette date et encore durant les trente ou trente-cinq années suivantes.

2311. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « De la poésie et des poètes en 1852. » pp. 380-400

Le poète a voulu rendre l’impression profonde de cette heure immobile et brûlante sous les climats méridionaux, par exemple dans la Campagne romaine.

2312. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — II. (Suite et fin.) » pp. 436-455

 » Cet applaudissement frondeur donné à un mot qui n’avait certes point une intention si profonde, mais qui rappelait un autre mot récent de Chateaubriand sur Néron dans le Mercure, nous marque du moins la disposition d’esprit de cet auditoire élégant et nous le fait voir tel qu’il était, très peu préparé à se soulever tout entier d’enthousiasme et à faire crouler les voûtes de la salle sous ses applaudissements, pour cette péroraison toute napoléonienne et un peu romantique de Bernardin.

2313. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

La seconde période, de 1669 à 1677, comprend le satirique encore, mais qui de plus en plus s’apaise, qui a des ménagements à garder d’ailleurs en s’établissant dans la gloire ; déjà sur un bon pied à la Cour ; qui devient plus sagement critique dans tous les sens, législateur du Parnasse en son Art poétique, et aussi plus philosophe dans sa vue agrandie de l’homme (Épître à Guilleragues), capable de délicieux loisir et des jouissances variées des champs (Épître à M. de Lamoignon), et dont l’imagination reposée et nullement refroidie sait combiner et inventer des tableaux désintéressés, d’une forme profonde dans leur badinage, et d’un ingénieux poussé à la perfection suprême, à l’art immortel.

2314. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — II. (Fin.) » pp. 246-265

Cette opinion de Richelieu, qui vient après le débordement du xvie  siècle et avant le déluge du xviiie , est du Bonald de première qualité, et, de quelque côté qu’on l’envisage, exprimée à cette date et avec cette précision, elle atteste la vue profonde de l’homme d’État.

2315. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — II. (Fin.) » pp. 476-495

Il y a du novice dans ces premières confidences belliqueuses de Frédéric à Jordan ; ce n’est pas, comme pour Napoléon, dès le premier jour, le grand géomètre militaire embrassant du haut des Alpes son échiquier et développant, avec une perfection inventive, des combinaisons profondes et savantes que l’héroïsme exécutera comme la foudre : Frédéric se forme lentement ; il s’essaye, il entame, il échoue, il revient à la charge, il s’y prend et reprend maintes fois.

2316. (1899) Esthétique de la langue française « Le vers libre  »

Celui-ci est d’un rythme plus savant (trois, quatre, trois, six) : Aux margelles des puits profonds qui s’ignorent en ses [yeux inconnus.]

2317. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

Comme l’autre, il enfonce si bas le scalpel investigateur que les fibres les plus intimes et les plus profondes saillissent à nu et saignent sous l’instrument.

2318. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VI. Daniel Stern »

Livrée aux préjugés orgueilleux de l’esprit moderne, mais sans conviction réfléchie et profonde, elle a, entre le Catholicisme et le Protestantisme de ce temps dont elle écrit l’histoire, — entre Philippe II et Guillaume d’Orange — l’impartialité de l’indifférence ; car elle regarde les choses religieuses au point de vue de cette Libre-Pensée qui dit, comme les Médecins de Molière, que « tout est changé » quand il n’y a rien de changé !

2319. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Ernest Renan »

Le Jésus de Renan, ce Jésus romantique, rêveur, paysagiste, exquise personne, âme suave, ennemi de toute religion, qui ne veut que la pureté du cœur, ce Jésus qui est un blasphème vivant contre Notre-Seigneur Jésus-Christ, une insulte hypocrite et profonde à la foi du plus grand nombre des Français encore par ce temps respecté de suffrage universel, a été trouvé généralement charmant, comme dit Renan lui-même.

2320. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iii »

Le père Deléglise (Jean-Marie), des Pères Oblats de Marie Immaculée, aumônier volontaire au 13e bataillon de chasseurs alpins : « D’un dévouement absolu, exerçant ses fonctions avec un tact et une intelligence au-dessus de tout éloge, apprenant à ses hommes le plus profond mépris de la mort, et montrant la même indifférence complète du danger ; à l’assaut du 14 juin 1915 a suivi la colonne, donnant à tous le meilleur réconfort ; frappé à son tour, en portant un blessé sur ses épaules, s’est relevé pour continuer sa marche avec son glorieux fardeau ; a été tué presque aussitôt d’une balle en plein front.  » (J.

2321. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre IV. L’unification des sociétés »

Et par suite rien d’étonnant si, les autres circonstances aidant, cette unification « d’en haut » n’a pas normalement développé dans les couches profondes du peuple russe l’idée que tous les hommes égaux en droits.

2322. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XV. »

Mais cette étude profonde de la poésie grecque, ce sentiment du beau qui remonte, non pas au type divin, mais aux copies sublimes de l’art, ce second enthousiasme, né de l’admiration et du goût, continuera de suivre la trace marquée par Catulle.

2323. (1863) Causeries parisiennes. Première série pp. -419

Un matin, elle avait éprouvé une terreur profonde en apercevant sur la batiste de son oreiller des taches faites par des gouttes de salive que sa bouche, contournée par l’absence de quelques dents, avait laissées suinter pendant le sommeil. […] Aussi, quelle perspective interminable de pensums, quelle éternité de retenues se déroule devant lui… Mais soudain, voyez ce jeune visage s’illumine, la conscience que tout cela n’est qu’un rêve a pénétré jusque dans son profond sommeil de collégien… ; il se dresse avec anxiété sur son séant pour ressaisir la bienheureuse réalité, l’embrasse d’un seul regard, et se replonge avec félicité dans le sommeil. […] S’il n’y avait pas eu antre chose dans la Renaissance, son influence aurait disparu avec les beaux génies qu’elle enfanta, tandis que nous voyons encore de nos jours les traces profondes qu’elle a laissées dans des pays fort déshérités du côté de l’art — dans le sens restreint qu’on donne au mot — en Angleterre, par exemple, et même en Suisse. […] Je me suis rappelé trop tard ce mot profond d’un humoriste anglais : Il faut bien connaître son homme avant de plaisanter devant lui. […] Nos Japonais poussent à ce point les belles manières que, lors de l’ouverture de l’Exposition de Londres, ils ont traversé la grande nef, armés jusqu’aux dents, sans jeter un seul regard ni à droite, ni à gauche, à la profonde mortification du public anglais.

2324. (1914) L’évolution des genres dans l’histoire de la littérature. Leçons professées à l’École normale supérieure

B.Qu’avec Villemain — du nom de qui, dans cette conquête, on ne saurait séparer ceux de Guizot et.de Cousin, — au changement opéré dans le goût public par la connaissance des littératures étrangères et de l’histoire, s’ajoute un changement non moins profond, opéré par une connaissance plus étendue, plus précise, et on peut dire même une connaissance toute neuve des rapports qui unissent les œuvres littéraires au temps, aux institutions, à la forme et à la structure de la société dont elles sont l’expression. […] En effet, tandis qu’autour de nous et en nous tout changeait, il faut bien, si nous comprenons encore, si nous goûtons toujours Euripide ou Homère, il faut bien que quelque chose en nous soit demeuré le même ; et à l’expérience, il se trouve que c’est ce qu’il y avait en eux de plus universel sans doute mais aussi de plus profond, et je ne sais en vérité si je ne puis dire de plus intime. […] Ce qui fait la bonté de cet ouvrage, c’est qu’il n’y a que peu d’erreurs, et beaucoup de réflexions vraies, nouvelles et profondes. » Ainsi s’exprime Voltaire, dans son Catalogue des écrivains du siècle de Louis XIV ; et, pour le dire en passant, quand Voltaire s’exprime ainsi, vous pouvez être assurés qu’il doit beaucoup lui-même à l’ouvrage qu’il loue avec tant de chaleur. […] J’ajouterai que, dans les dernières années du xviiie  siècle, une raison puissante, secrète, et intérieure, équilibra l’influence de ce naturalisme, surtout au point de vue littéraire, et vint en entraver le développement. « Ce n’est peut-être sans une raison profonde, a dit quelqu’un, qu’au moment où le catholicisme a reçu son premier grand ébranlement, au xvie  siècle, l’humanisme a pris naissance, comme par une sorte de contrepoids. […] Pour le coup, c’était faire rétrograder la question par-delà Mme de Staël ; et la distinction lumineuse et profonde qu’elle avait essayé d’établir entre deux sortes d’esprits, dont elle s’était efforcée de trouver l’origine et l’explication dans la différence des milieux ou dans la diversité des races, Hugo la niait au nom d’un idéal aussi universel, et conséquemment aussi arbitraire en son genre, que celui du classicisme lui-même.

2325. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

C’est le sens profond de la fameuse apostrophe : « Le premier qui, ayant enclos un terrain, s’avisa de dire : « Ceci est à moi » et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. […] mais qu’un seul homme soit propriétaire de toutes les terres ; c’est une idée monstrueuse, et ce n’est pas la seule de cette espèce dans ce livre, qui d’ailleurs est profond, méthodique et d’une sécheresse désagréable.  » On multiplierait sans profit les citations sur cette affaire. […] C’est ce droit des gens qui fait que, parmi nous, la victoire laisse aux peuples vaincus ces grandes choses : la vie, la liberté, la loi, les biens et toujours la religion, lorsqu’on ne s’aveugle pas soi-même. » C’est ici une des pensées les plus profondes de Montesquieu ; et la vérité, plus précise encore, c’est que le Christianisme, en contestant le droit absolu de l’Etat sur toute la personne de ceux qu’il contient 0ude ceux qu’il conquiert, a fondé les Droits de l’homme. […] Les chrétiens n’ont été persécutés ni comme factieux, ni même comme chrétiens à proprement parler, mais comme antipolythéistes, c’est-à-dire, en dernière analyse, comme chrétiens dans le sens le plus profond de ce mot et de cette idée ; et en cela les Romains avaient parfaitement raison ; car les empereurs qui ont adopté le christianisme se sont donné personnellement un auxiliaire ; mais ils ont partagé l’Empire. […] Louis XIV, malgré la profonde paix religieuse qui avait régné en France depuis le siège de la Rochelle et « l’Edit de grâce », regardait les protestants d’un mauvais œil. « Il les considérait, non sans quelque raison, comme d’anciens révoltés, soumis avec peine. » Il prit, depuis 1675 environ, une série de mesures pour ruiner secrètement les protestants. « Toutes ces mesures étaient publiquement sollicitées par le clergé de France.

2326. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 5482-9849

Nul ouvrage philosophique n’est foible, malgré la foiblefse d’un style lâche, quand le raisonnement est juste & profond. […] Tout le monde convient que Cromwel étoit le général le plus intrépide de son tems, le plus profond politique, le plus capable de conduire un parti, un parlement, une armée. […] Ce n’est pas cette sorte d’imagination que le vulgaire appelle, ainsi que la mémoire, l’ennemie du jugement ; au contraire, elle ne peut agir qu’avec un jugement profond. […] C’est par elle qu’un poëte crée ses personnages, leur donne des caracteres, des passions ; invente sa fable, en présente l’exposition, en redouble le noeud, en prépare le dénouement ; travail qui demande encore le jugement le plus profond, & en même tems le plus fin. […] Quand elle est trop ardente, trop tumultueuse, elle peut dégénérer en démence ; mais on a remarqué que cette maladie des organes du cerveau est bien plus souvent le partage de ces imaginations passives, bornée à recevoir la profonde empreinte des objets, que de ces imaginations actives & laborieuses qui assemblent & combinent des idées, car cette imagination active a toûjours besoin du jugement ; l’autre en est indépendante.

2327. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VII. Les poëtes. » pp. 172-231

La sève en ce pays est toujours plus forte que chez nous ; leurs sensations sont plus profondes, comme leurs pensées plus originales. […] Comme lui, il exaltait l’amour profond, la tendresse conjugale, « l’union des âmes, la parfaite estime animée par le désir » ; l’affection paternelle et toutes les joies domestiques.

2328. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

L’histoire des origines de la musique, dit-il, est partout enveloppée de fables et de légendes qui cachent toujours sous un voile plus ou moins transparent de profondes vérités. […] « On m’a fait, dit-il, un profond salut à la porte de Rome.

2329. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (3e partie) » pp. 249-336

« La journée du 13 s’était écoulée ; une obscurité profonde enveloppait le champ de bataille. […] En face il se relevait sensiblement, et, sur ce relèvement marqué de quelques mamelons, on apercevait les Russes en masse profonde.

2330. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

On se sent plongé dans la paix profonde d’une nature solitaire, car le silence absolu n’est interrompu que par les notes isolées des merles qui alternent avec le chant d’une grive des bois. […] Il m’en parla d’ailleurs avec une profonde admiration ; il ne l’appelait pas un talent, mais une nature.

2331. (1899) Les industriels du roman populaire, suivi de : L’état actuel du roman populaire (enquête) [articles de la Revue des Revues] pp. 1-403

Nous savons tous que le pathétique d’une situation violemment tendue doit éclater enfin avec son maximum d’intensité dans un mot, dans un cri, dans l’un de ces effets inopinés et saisissants qui laissent à l’âme une impression profonde. […] Loliée sur Les industriels du roman populaire de même que l’enquête à laquelle ont bien voulu prendre part plusieurs de nos écrivains et critiques des plus éminents ont causé une émotion profonde en France et à l’étranger.

2332. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIe Entretien. Le 16 juillet 1857, ou œuvres et caractère de Béranger » pp. 161-252

Ce peuple rabelaisien n’est pas encore arrivé à son âge poétique dans ses couches profondes, et peut-être n’y arrivera-t-il jamais. […] Le silence est profond sous le chaume où je vis.

2333. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VII : Instinct »

Il faudrait manquer de sens pour ne pas être pénétré d’une admiration profonde, quand on examine avec soin la structure si singulière d’un rayon de miel, structure surtout si parfaitement adaptée au but qu’elle doit remplir. […] Immédiatement les Abeilles commencèrent à y creuser de petites excavations circulaires ; et, à mesure qu’elles avançaient à l’ouvragé, ces excavations devenaient à la fois plus profondes et plus larges, jusqu’à ce qu’elles prissent la forme de petits bassins présentant exactement à l’œil la surface en creux d’un segment sphérique et à peu près le diamètre d’une cellule.

2334. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — I » pp. 139-158

Sa mère Anne Donne, de noble naissance, mourut jeune en 1737, laissant deux fils ; William n’avait alors que six ans, mais il garda des premiers temps de son enfance et des tendresses de sa mère un souvenir vif et profond, gravé plus avant en son cœur par le régime tout différent auquel il fut soumis le lendemain de cette mort ; il a consacré ce souvenir, à plus de cinquante ans de distance, dans des vers composés par lui en recevant d’une cousine le portrait de sa mère (1790).

2335. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Le président Hénault. Ses Mémoires écrits par lui-même, recueillis et mis en ordre par son arrière-neveu M. le baron de Vigan. » pp. 215-235

douce, simple, m’aimant uniquement, crédule sur ma conduite qui était un peu irrégulière, mais dont la crédulité était aidée par le soin extrême que je prenais à l’entretenir, et par l’amitié tendre et véritable que je lui portais. » Mme Du Deffand est très bien traitée dans ces Mémoires, et s’y montre presque sans ombre, sous ses premières et charmantes couleurs ; mais la personne évidemment que le président a le plus aimée est Mme de Castelmoron, « qui a été pendant quarante ans, dit-il, l’objet principal de sa vie. » La page qui lui est consacrée est dictée par le cœur ; il y règne un ton d’affection profonde, et même d’affection pure : « Tout est fini pour moi, écrit le vieillard après nous avoir fait assister à la mort de cette amie ; il ne me reste plus qu’à mourir. » On raconte que dans les derniers instants de la vie du président et lorsqu’il n’avait plus bien sa tête, Mme Du Deffand, qui était dans sa chambre avec quelques amis, lui demanda, pour le tirer de son assoupissement, s’il se souvenait de Mme de Castelmoron : Ce nom réveilla le président, qui répondit qu’il se la rappelait fort bien.

2336. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

La conscience des vaincus pourtant, quand il y a en jeu des sentiments sincères et de vraies croyances, et aussi une portion de droit engagée, a ses forces secrètes, ses ressorts profonds, invincibles, et dont il ne faut parler qu’avec respect.

2337. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — II » pp. 375-394

J’ai pris sur moi de le dissiper le plus qu’il m’a été possible, en me livrant à des occupations de devoir et de nécessité ; mais, mon cher frère, il est bien difficile d’effacer les profondes impressions du cœur.

2338. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — I » pp. 432-453

Son grand intérêt dans la vie, et plus tard son amertume profonde et sa plaie secrète, fut ce fils auquel elle sacrifia tout et qui, en devenant un homme assez distingué, du moins à la surface, se montra des plus indifférents et des plus méconnaissants envers sa mère.

2339. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — IV » pp. 103-122

Villars, ayant passé le fleuve vers le Fort-Louis, força les lignes de Bülh, où le margrave de Baireuth ne l’attendit pas, puis poussa l’armée impériale de poste en poste et fit une profonde incursion dans l’Allemagne au pas de course, répandant au loin la terreur et rançonnant les villes et les contrées.

2340. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Mirabeau croit faire merveilles que d’écrire au bas de cette lettre, pour que Vauvenargues la montre aux amis, la réponse qu’il y a faite et qui consiste en ces seuls mots :     Mademoiselle, J’ai l’honneur d’être avec un très profond respect,     mademoiselle, Votre très humble et très obéissant serviteur.

2341. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie de Maupertuis, par La Beaumelle. Ouvrage posthume » pp. 86-106

Michel Nicolas ne vienne pas nous dire : « Ses ouvrages, même ceux de sa jeunesse, annoncent un observateur judicieux, souvent un penseur profond, toujours un écrivain guidé par le seul amour de la vérité. » Il est impossible, quand on arrange la vérité d’autrui de la sorte et qu’elle se fausse, pour ainsi dire, d’elle-même sous la plume, qu’on en ait grand souci dans aucun de ses propres ouvrages.

2342. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de l’Académie française, par Pellisson et d’Olivet, avec introduction et notes, par Ch.-L. Livet. » pp. 195-217

L’originalité de La Bruyère n’est pas d’avoir fait des portraits tels quels, à la diable, et dessinés plus ou moins couramment à la plume, par manière de jeu de société, comme on les brochait avant lui, mais de les avoir faits serrés, profonds, savants, composés, satiriques, en un mot tels qu’un grand peintre seul les pouvait faire.

2343. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

Il a des barbarismes tout gratuits ; parlant d’une femme (la duchesse de Gontaut) : « Elle intrigue, elle prétend déplacer les ministres, et avec cela elle s’est hypocrisée en quittant le rouge… » Mais ce même homme, au style hérissé et sauvage, a de soudaines expressions qui lui sortent du cœur, et qui d’un trait peignent un homme ou expriment des vérités politiques profondes.

2344. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Enfin, après une vague et partiale peinture de l’état des Lettres sous les divers régimes qui se sont succédé depuis cinquante ans, et encore sous le coup de la Révolution de Février, qui le préoccupe extraordinairement, et qui n’a été, après tout, qu’une révolution plus ou moins comme une autre, il en vient à établir son principe et à proclamer son spécifique littéraire, — le mot peut paraître assez naïvement choisi : « Il fallait, s’écrie-t-il, il fallait (au lendemain de cette Révolution) proclamer le spiritualisme chrétien dans l’art, comme le seul spécifique assez puissant pour le guérir (pour guérir l’art, entendons-nous bien), comme la seule piscine assez profonde pour le laver de ses souillures. » Remarquez-vous comme ces esprits chastes, sitôt qu’ils se mêlent de critique, sont continuellement préoccupés et remplis d’immondices et de souillures ?

2345. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers. »

L’amitié et l’estime profonde de David Hume nous sont des garants du sérieux qu’il trouvait en elle.

2346. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite.) »

Ce fils paraît lui avoir causé quelque peine, car elle prend soin de noter un changement avantageux qu’elle croirait, dit-elle, remarquer en lui, « si elle n’avait interdit à l’espérance aussi bien qu’à la crainte tout accès dans son cœur ; mais ces deux passions, ajoute-t-elle, amollissent trop le courage, et on les doit bannir autant qu’il est possible, lorsqu’on s’engage dans quelque entreprise importante. » Elle parle d’une « mélancolie profonde et trop justement fondée, suivie de la rougeole et d’un long état de langueur, qui l’ont concentrée en elle-même » et l’ont empêchée d’écrire.

2347. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Sa mort plongea Mme de Boufflers dans la plus vive et la plus profonde affliction.

2348. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

… Mystères terribles de la justice de Dieu, profonds abîmes de ses jugements, ce n’est pas à nous à vous pénétrer, mais nous ne saurions assez vous redouter.

2349. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

Sa correspondance avec la comtesse est sur le pied d’une grande déférence et d’un profond respect, qui a besoin cependant d’arriver et de se fixer à une sorte d’amitié : c’était pour lui, dans toute liaison, la pente naturelle.

2350. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Le spectacle de cette entrée épouvantable et de cette exécution laissa une longue horreur imprimée aux âmes, et quand on lit ensuite le traité de la Servitude volontaire d’Étienne de La Boëtie, l’ami de jeunesse de Montaigne, on ne peut s’empêcher d’y reconnaître un profond sentiment de représailles autant et plus peut-être qu’un ressouvenir et une imitation de l’antiquité.

2351. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin (suite et fin.) »

Quelle digestion intellectuelle s’est donc opérée au plus profond de notre cerveau ?

2352. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid(suite et fin.)  »

Notre profond silence abusant leurs esprits, Ils n’osent plus douter de nous avoir surpris ; Ils abordent sans peur, ils ancrent, ils descendent Et courent se livrer aux mains qui les attendent.

2353. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette »

je les mérite par le respect profond et l’amour sans bornes que je vous porte.

2354. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Après le départ de Mme Récamier, je réfléchissais aux jugements de ce monde : il a souvent accusé cette jolie femme de coquetterie, de légèreté, et je la voyais livrée à un sentiment si profond de regret, elle exprimait en si peu de mots et avec tant de douceur ses plaintes, que j’ai plus d’une fois pensé que tous les succès de Mme de Staël ne valaient point une semblable amitié.

2355. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN DERNIER MOT sur BENJAMIN CONSTANT. » pp. 275-299

J’ai pensé qu’on en saisirait la cause profonde dans le tableau de cette singulière jeunesse et de ces premières années qui se dévoilaient soudainement à nous : de là mon analyse91.

2356. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

Il livre alors aux lecteurs avides de ces sortes d’émotions quelque histoire altérée, mais que sous le déguisement des apparences une vérité profonde anime ; ou bien il garde pour lui et prépare, pour des temps où il ne sera plus, une confidence, une confession qu’il intitulerait volontiers, comme Pétrarque a fait d’un de ses livres, son secret.

2357. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Boileau »

Non, il n’est pas indispensable, pour provoquer en nous cette vive et profonde intelligence des choses naturelles, de s’en aller bien loin, au-delà des mers, parcourant les contrées aimées du soleil et la patrie des citronniers, se balançant tout le soir dans une gondole, à Venise ou à Baïa, aux pieds d’une Elvire ou d’une Guiccioli.

2358. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre III »

Plus elle est monstrueuse, plus elle est vivace, accrochée aux plus frêles vraisemblances et tenace contre les plus fortes démonstrations  Sous Louis XV, pendant l’arrestation des vagabonds, quelques enfants ayant été enlevés par abus ou par erreur, le bruit court que le roi prend des bains de sang pour réparer ses organes usés, et la chose paraît si évidente, que les femmes, révoltées par l’instinct maternel, se joignent à l’émeute : un exempt est saisi, assommé, et, comme il demandait un confesseur, une femme du peuple prend un pavé, crie qu’il ne faut pas lui donner le temps d’aller en paradis, et lui casse la tête, persuadée qu’elle fait justice739  Sous Louis XVI, il est avéré pour le peuple que la disette est factice : en 1789740, un officier, écoutant les discours de ses soldats, les entend répéter « avec une profonde conviction que les princes et les courtisans, pour affamer Paris, font jeter les farines dans la Seine ».

2359. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

Quel bonheur pour un homme nouvellement débarqué de l’exil, après avoir passé huit ans dans un abandon profond, excepté quelques jours promptement écoulés !

2360. (1894) Propos de littérature « Chapitre II » pp. 23-49

Quelques Flamands s’y adonnent aussi et, je crois, avec plus de bonheur ; je connais des strophes où ne manquent ni la grâce ni l’énergie, bien qu’elles allégorisent ; mais quelle vie intérieure plus profonde elles auraient eue sans ce défaut !

2361. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

Elles agissent sur ce qu’il y a de plus profond dans l’esprit d’un peuple.

2362. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre I : La loi d’évolution »

Le timide sectaire, alarmé des progrès de la science, obligé d’abandonner une à une les superstitions de ses ancêtres, et voyant ébranler chaque jour de plus en plus ses croyances chéries, craint en secret que toutes choses ne soient un jour expliquées ; il redoute la science, pratiquant ainsi la plus profonde de toutes les infidélités — la peur que la vérité ne soit mauvaise.

2363. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XI, les Suppliantes. »

. — Tu as soufflé de ton haleine, la mer les a couverts : comme le plomb, ils se sont enfoncés dans les eaux profondes. » — Et les filles de Danaos leur répondent d’une mer à l’autre : — « Ô Zeus !

2364. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

J’ai dit le succès, il sera profond et durable.

2365. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de La Tour-Franqueville et Jean-Jacques Rousseau. » pp. 63-84

À cette époque, la raison de Rousseau avait déjà reçu des altérations profondes ; il commençait, non pas seulement à paraître fou dans le sens vague et général du mot, mais à l’être trop réellement dans le sens précis et médical.

2366. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) «  Mémoires et correspondance de Mme d’Épinay .  » pp. 187-207

Cet esprit plein de grâce et de finesse acquit par lui toute sa trempe ; il démêla en elle et mit en valeur le trait qui la distinguait particulièrement ; « une droiture de sens fine et profonde ».

2367. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Procès de Jeanne d’arc, publiés pour la première fois par M. J. Quicherat. (6 vol. in-8º.) » pp. 399-420

Presque toujours seule à l’église ou aux champs, elle s’absorbait dans une communication profonde de sa pensée avec les saints dont elle contemplait les images, avec le ciel où on la voyait souvent tenir ses yeux comme cloués.

2368. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Le duc de Lauzun. » pp. 287-308

Toutes les fois qu’il veut exprimer un sentiment un peu profond et vrai, il est puni, la passion et la poésie manquent à son langage.

2369. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

» — « Je n’en sais rien », répond Marthe avec une simplicité profonde.

2370. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — I. » pp. 471-493

— « Il est de l’essence de la démocratie, pense-t-il encore, d’aller toucher le pôle tant qu’aucun obstacle ne l’arrête. » Analysant avec une force de dissection effrayante les idées fausses, vagues, les sophismes de divers genres qui ont filtré dans toutes les têtes au milieu d’une nation amollie et de caractères déformés par l’épicuréisme, Mallet du Pan montre comment on n’a jamais opposé au mal que des moyens impuissants et des espérances dont se berçait la présomption ou la paresse : « Cependant on s’endormait sur des adages et des brochures : Le désordre amène l’ordre, disaient de profonds raisonneurs ; l’anarchie recomposera le despotisme. — La démocratie meurt d’elle-même ; la nation est affectionnée à ses rois. » C’est surtout aux émigrés, on le sent, qu’il parle ainsi ; et, tandis que les partis se nourrissaient de leurs illusions et de leurs rêves, les Jacobins seuls marchaient constamment au but : « Les Jacobins seuls formaient une faction, les autres partis n’étaient que des cabales. » Et il montre en quoi consiste cette faction, son organisation intérieure, son affiliation par toute la France, ses moyens prompts, redoutables, agissant à la fois sur toutes les mauvaises passions du cœur humain.

2371. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Mémoires du cardinal de Retz. (Collection Michaud et Poujoulat, édition Champollion.) 1837 » pp. 40-61

Notez que Retz en peignant explique, et que la raison politique et profonde des choses se glisse dans le trait de son pinceau.

2372. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le Brun-Pindare. » pp. 145-167

Il respire dans cette pièce un profond sentiment de la justice que la postérité accorde aux œuvres durables et aux monuments élevés avec lenteur : Flatté de plaire aux goûts volages, L’Esprit est le dieu des instants.

2373. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame de Motteville. » pp. 168-188

Sage, secrète, régulière, d’un esprit doux et enjoué avec nuances, d’une curiosité à la fois sérieuse et amusée, d’un coup d’œil observateur qui ne cherchait pas à être perçant ni profond et qui se contentait de bien voir ce qui se faisait autour d’elle, elle passa ainsi vingt-deux années bien diverses, et dont quelques-unes furent agitées des plus violents orages.

2374. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Œuvres de Louis XIV. (6 vol. in-8º. — 1808.) » pp. 313-333

Saint-Simon était un grand peintre et un profond moraliste ; Louis XIV fut un roi.

2375. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — I. » pp. 224-245

Loin de considérer ce mémorable traité, et les maximes d’État qu’il renferme, comme des émanations de l’âme austère et sérieuse et du génie le plus recueilli du cardinal, ceux mêmes qui le lui attribuaient y voyaient plutôt de la défaillance, et le grand Frédéric, si digne de l’apprécier, écrivait, par complaisance pour Voltaire : L’esprit le plus profond s’éclipse : Richelieu fit son Testament, Et Newton son Apocalypse.

2376. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Son œil brun, vif, spirituel, et quelquefois d’une douceur charmante ou d’une mélancolie profonde, était surmonté d’un arc de sourcil fort élevé, qui donnait à sa physionomie une expression très originale.

2377. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — I. » pp. 455-475

Mon cœur en portera le deuil, et cela, d’une façon plus profonde qu’on ne le porte pour la plupart des parents.

2378. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Si leur malheur eût été irréparable, la profonde émotion qu’il eût excitée m’aurait poursuivi jusque dans mon lit.

2379. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse esthétique »

Pour ces œuvres, l’émotion produite ne dérive des idées qu’elles expriment, que dans le cas où il s’agit de livres de métaphysique en prose ou en vers ; car ici l’auteur élit, selon son tempérament, le postulat dont il procède par déduction, par intuition, par enthousiasme, par raisonnement, avec transport, avec amertume, ou impassiblement, usant d’une dialectique et de principes qui peuvent, en certaines finies spécialement douées, susciter de profondes émotions esthétiques.

2380. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Innocent III et ses contemporains »

Ni préoccupation d’historien séduit par les qualités très réelles d’Innocent, ni sophisme de parti pris, ni même intelligence plus profonde des nécessités de ce temps n’y feront rien.

2381. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre I. La demi-relativité »

Voilà du moins pour ce qui concerne la matière pondérable, celle que j’entraîne avec moi dans le mouvement de mon système : des changements profonds se sont accomplis dans les relations temporelles et spatiales que ses parties entretiennent entre elles, mais je ne m’en aperçois pas et je n’ai pas à m’en apercevoir.

2382. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre III. “ Fantômes de vivants ” et “ recherche psychique ” »

J’arrive à la cause plus profonde qui a retardé jusqu’ici la « recherche psychique » en dirigeant d’un autre côté l’activité des savants.

2383. (1896) Les Jeunes, études et portraits

Elle est dans l’œuvre de celui-ci ce qu’il y a de plus profond. […] Encaissés entre de profondes murailles, des canaux lents, des canaux dormants, dont l’eau inutile ne sert qu’à refléter le visage des maisons neuves ou le tremblement des feuilles. […] Il y tient par de profondes et de subtiles racines. […] Elle se tenait au soleil pour faire sécher ses cheveux mouillés qui l’enveloppaient tout entière, comme un velours d’un beau violet profond où transparaissait la pâleur mate de son visage. […] Mais une réunion de cent quarante et un écrivains dont le moindre est un profond penseur et un écrivain parfait, voilà ce qui ne s’était jamais rencontré.

2384. (1856) Articles du Figaro (1855-1856) pp. 2-6

Celle-ci est l’inspiration personnelle du génie s’abandonnant à l’interprétation arbitraire de la nature ; l’autre, plus circonscrite, mais assurément plus profonde, c’est tout simplement le rayonnement de la vie humaine dans la vérité. […] Ce n’est pas lorsqu’il écrit cette phrase, — qui veut paraître profonde et qui n’est guère que plaisante : — « le pape de l’avenir sera un homme de lettres » — c’est quand, dans un accès de franchise et dans un retour sur lui-même, il laisse échapper ce précieux aveu : — « Certes, la société dans laquelle vit l’homme destiné aux lettres exerce une grande influence sur l’élégance ou sur la crudité de son expression. » — Je ne sais pourquoi cette phrase me paraît avoir quelque chose de touchant ; ne semble-t-il pas que M.  […] Delacroix n’est-il pas un dramaturge aussi passionné, aussi profond que le poète d’Othello ? […] cet abîme, cette mer aussi vaste et plus profonde que l’Océan, que faisait fouetter Xerxès. — Si l’acte n’était pas moins insensé de la part de l’écrivain que du roi vaincu, je me plais à reconnaître que la folie de M. de Pontmartin se faisait presque pardonner à force de talent, de style et de hardiesse d’esprit.

2385. (1895) De l’idée de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines pp. 5-143

Après Kant, de profonds philosophes soutiennent aujourd’hui encore que la notion de loi résulte de notre constitution mentale et qu’elle réside dans un jugement synthétique a priori. […] Ces diverses théories sont ingénieuses ou profondes, mais laissent une forte part à l’hypothèse. […] Comme le montre le savant et profond ouvrage de M.  […] Concluons qu’actuellement la chimie se distingue véritablement de la physique, et cela en tant qu’elle admet des espèces de corps distincts, substratum de ce profond changement chimique que l’observation distingue du simple changement physique.

2386. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

On n’arrache pas facilement, des cœurs et des esprits d’un grand royaume, les racines profondes de la religion.

2387. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

L’avantage de ces sortes de liaisons, c’est de pouvoir commencer bien plus tard que les amitiés d’hommes, lesquelles, pour être tout à fait vives et profondes, ont besoin de s’être nouées dans la jeunesse.

2388. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

Il les définit, il les raille, il les persifle même sur cette dextérité et cette adresse d’exposition dont leur doctrine a grand besoin ; il établit avec un haut et paisible dédain la différence profonde qu’on doit faire entre un Condillac et un Bacon, deux noms que l’on affectait toujours d’associer ; il replace celui-ci sur le trône de la science, parmi les princes légitimes de l’esprit humain.

2389. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — II » pp. 150-171

Ses amis ressentent une douleur profonde de le voir à la veille d’être entièrement aveugle ; sa vue, qui s’éteint par degrés insensibles, le rappelle sans cesse à sa prochaine infortune et le sollicite au découragement ; tandis que nous travaillons à le consoler et à le distraire de ce triste objet, il s’imprime dans Paris des livres cruels où l’on insulte lâchement à son malheur.

2390. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Souvenirs militaires et intimes du général vicomte de Pelleport, publiés par son fils. » pp. 324-345

Les paroles du général font une impression profonde sur les imaginations ; ses actes sont d’un souverain plus que d’un chef d’armée, il y avait déjà habitué ses troupes dans la campagne d’Italie ; il s’exerce plus que jamais à ce rôle pendant toute l’expédition d’Égypte : il y fait son expérience et comme sa répétition de souveraineté et d’empire, à huis clos, dans cet Orient où il est enfermé, et loin de l’Europe qui a les yeux sur lui, mais dont un rideau magique le sépare.

2391. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « François Villon, sa vie et ses œuvres, par M. Antoine Campaux » pp. 279-302

Ce n’était pas seulement chez lui dégoût instinctif des fadeurs pastorales, et manque absolu peut-être, extinction, causée par la misère, du sens des beautés de la nature ; c’était encore répugnance profonde pour un cadre où toutes ses habitudes se trouvaient désorientées ; répugnance constante et qui ne se dément pas une seule fois dans son œuvre.

2392. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

En arrivant sur le haut d’une montagne, on voit tout d’un coup Bethléem de l’autre côté d’un ravin profond.

2393. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Don Carlos et Philippe II par M. Gachard Don Carlos et Philippe II par M. Charles de Mouy »

Don Juan vint ensuite et, le serment prêté, il fit une profonde révérence à don Carlos, lui baisant la main malgré sa résistance : c’est que don Carlos voyait surtout en lui un camarade et un ami.

2394. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. (suite et fin.) »

Nous faisions entendre qu’en notre qualité d’otages l’aga devait veiller à notre sûreté et qu’il était responsable de notre conservation ; ces représentations produisaient si peu d’effet qu’un jour que le citoyen Majastre se présenta à lui la tète ensanglantée d’une pierre qu’il venait de recevoir à côté de l’œil et qui lui avait fait une blessure large et profonde, il n’en obtint pas un signe d’intérêt.

2395. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Essai de critique naturelle, par M. Émile Deschanel. »

Profond mystère, féconde joie, réciprocité de la vie : le fils régénère le père et la mère, il les crée à son tour !

2396. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. »

Je suis, avec la soumission la plus profonde, Sire, etc. » Il y revient, la guerre entamée, dans une des lettres suivantes (6 septembre 1741) : « J’ai eu l’honneur d’écrire à Votre Majesté que la France voulait terminer rapidement cette affaire, et je crois qu’elle lui rendra un service agréable de s’emparer de la Bohême, quoique cette puissance ne puisse en convenir, vu les engagements qu’elle a avec l’Électeur de Bavière.

2397. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite et fin.) »

Enfin l’écrit fatal est remis à un secrétaire ; il monte à la tribune ; un silence profond succède au tumulte, et la gravité respectueuse, les compliments de l’exorde entretenant les premières dispositions, on voyait le ravissement des spectateurs et des députés patriotes de recevoir cet hommage solennel du patriarche de la démocratie.

2398. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [V] »

C’était une disposition habituelle et presque un tic chez Jomini de se croire malade et mourant ; depuis le profond ébranlement de sa santé à la retraite de Russie, il était resté très-délicat et se sentait comme atteint dans son organisation.

2399. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [I] »

Qu’on regrette qu’il y ait eu interruption depuis deux cents ans déjà avec les sources premières du moyen âge et que la déviation ait été si profonde, je le comprends ; mais qu’on en fasse un crime à de jeunes hommes qui n’ont eu encore le temps que d’embrasser et d’épouser un seul ordre d’études, le plus noble de tous, et qui, la plupart, vont s’y consumer par trop de zèle et s’y dévorer, cela est souverainement injuste, et c’est méconnaître le rôle et la vocation assignés par la nature des choses et par la loi de l’histoire aux générations successives.

2400. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ULRIC GUTTINGUER. — Arthur, roman ; 1836. — » pp. 397-422

Dans leur immense majesté Lis-tu quelque profond mystère ?

2401. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

Si cette réalité n’était qu’affreusement triste, on trouverait encore moyen de s’en tirer ; mais elle réunit à une tristesse profonde tous les caractères de contradictions et de ridicules, et tellement en grand qu’on n’arrive au théâtre que bien blasé.

2402. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

Vous m’êtes échappés, secrets d’un autre monde, Merveilles de crainte et d’espoir, Qu’au bout d’un océan d’obscurité profonde, Sur des bords inconnus je croyais entrevoir Tandis que mon œil vous contemple, L’avenir tout à coup a refermé son temple, Et dans la vie enfin je rentre avec effort.

2403. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Pierre Corneille »

Génie loyal, plein d’honneur et de moralité, marchant la tête haute, il devait se prendre d’une affection soudaine et profonde pour les héros chevaleresques de cette brave nation.

2404. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. Joubert »

Combien de vues fines et profondes sur les anciens, sur leur genre de beauté, leur modération décente !

2405. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

On en retrouve le regret en même temps que l’expression en plus d’une page des Mémoires de M. de Ségur ; car combien, sous cette plume facile, d’aperçus historiques profonds et vrais !

2406. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Madame de Krüdner et ce qu’en aurait dit Saint-Évremond. Vie de madame de Krüdner, par M. Charles Eynard »

Eynard (qu’il y prenne garde) ouvre, sur l’intérieur de Mme de Krüdner, tout un jour profond qu’il suffit de prolonger désormais pour donner raison à plus d’un sceptique.

2407. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (6e partie) » pp. 129-176

Les longues douleurs de sa captivité, le sentiment désespéré mais calme de sa situation, les larmes contenues mais murmurantes au fond des paroles, donnaient à sa voix un accent où l’on entendait ce bouillonnement des sentiments qui monte d’un cœur profond.

2408. (1892) Boileau « Chapitre II. La poésie de Boileau » pp. 44-72

Nous ne concevons pas ce sentiment sans un amour désintéressé, une sympathie profonde, ni presque sans un tour d’imagination religieusement panthéiste.

2409. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

Ce meurtre, en un tel jour, en un tel lieu, cette audacieuse entreprise de la force brutale contre la sainteté du caractère ecclésiastique, firent sur les esprits une impression profonde.

2410. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Ce qu’il aime, ce sont les demi-teintes, les demi-sentiments, les affections simples et domestiques, les inclinations paisibles ou contenues, où entre autant de connaissance que de passion ; ou bien les caractères renfermés et compliqués, parfois les âmes égoïstes et médiocres : des amours de vieillards319, profonds, discrets, point du tout ridicules ; des amitiés de frères320, confiantes et fortes, contre qui l’ambition même et l’amour ne prévalent pas ; des affections de cour, composées d’intérêt ou d’amour-propre, mais aussi de goût sérieux et sincère321 chez d’honnêtes gens qui ont de la raison et de l’expérience ; des intrigues de ministres ambitieux, de courtisans retors, de fonctionnaires égoïstes, toute la mécanique des cours et des cabinets de princes322.

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