On n’oublierait pas celui qu’il a écrit (4 octobre 1830) sur un premier refus de la Chambre de redemander les cendres de l’Empereur à Sainte-Hélène ; on terminerait par celui qu’il écrivait sur les opuscules de Napoléon, publiés par M. […] L’esprit de chevalerie, n’oubliez jamais ce mot-là en jugeant l’homme, ça été le principe de son erreur.
Pour concevoir comment il put ainsi retourner l’opinion, n’oublions pas que ce Parlement à qui il avait affaire était celui que le chancelier Maupeou avait substitué à l’ancien Parlement exilé et aboli. […] Ainsi de tous ceux qu’il met en cause et en scène : ou les connaît ; on ne les oublie plus.
Ces méthodes outrées et exclusives ne conviennent point à sa nature ; il s’empressa d’en retirer, d’en oublier ce que, seul, il n’y eût jamais fait saillir et prévaloir à ce point. […] Ce qu’il a fait et semé, dans tous les lieux où il a vécu et dans les sociétés qu’il a traversées, de jolis vers, de petits poèmes allégoriques, de couplets de fête et de circonstance, il l’a lui-même oublié.
Voltaire peut-être a raison, et pourtant la postérité, qui n’a pas à opter entre ces chefs-d’œuvre divers ni à se décider pour l’un au détriment des autres, la postérité, qui n’est pas homme de lettres, ne se pose point la question de la sorte ; elle ne recherche pas ce qui est plus ou moins difficile ou élevé comme art, comme composition ; elle oublie les genres, elle ne voit plus que le trésor moral de sagesse, de vérité humaine, d’observation éternelle qui lui est transmis sous une forme si parlante et si vive. […] En deux mots, Lamartine vise habituellement à l’ange, et La Fontaine, s’il semble élever les bêtes jusqu’à l’homme, n’oublie jamais non plus que l’homme n’est que le premier des animaux.
Ces sentiments sont tout naturels de la part d’un auteur, et il est, en effet, bien « excusable », Cet écrivain — c’est je crois, un Anglais ; mais j’ai oublié son nom — disait : « Quand je veux lire un bon livre, je le fais ». […] Qui veut apprendre à connaître réellement quelque chose de nouveau, que ce soit un homme, un événement, un livre, fait bien d’adopter cette nouveauté avec tout l’amour possible, de détourner résolument sa vue de ce qu’il y trouve d’hostile, de choquant, de faux, même de l’oublier, si bien qu’à l’auteur d’un livre, par exemple, on donne la plus grande avance et que, d’abord, comme dans une course, on souhaite, le cœur palpitant, qu’il atteigne son but.
N’oublions pas que maintenant, comme j’ai déjà eu occasion de le remarquer, le principe intellectuel a pris l’ascendant sur le principe moral, pour la direction de la société. […] Mais ce qu’il ne faut point perdre de vue, et ce qu’on est beaucoup trop disposé à oublier, c’est que la nation française n’a jamais été sans libertés.
puisqu’il y est déposé, je voudrais dire mon mot aussi sur cet homme oublié, sur ce journaliste qui n’aura qu’une gloire de journal pour sa peine de n’avoir été que cela. […] Il faudra des curieux et des travailleurs comme il l’était, des espèces de Tallemant des Réaux dans l’avenir, pour pouvoir parler, en science de cause, de cet homme qui fut un très éblouissant feu follet littéraire, lequel, comme les feux follets, errait et ne se fixait pas, et qui a oublié de laisser derrière lui le livre un, profond et complet, qu’il était très capable de faire, — le livre qui eût été un fût de colonne sur sa tombe effacée, et qui en eût marqué la place aux yeux de la Postérité !
Bachaumont ne tremble pas devant le sien… Il n’en oublie rien ; il en réfléchit tout. […] Déjà, en 1832, un romancier, oublié maintenant et qui valait mieux que beaucoup de ceux dont on parle, Horace de Vielcastel, impatienté de voir le faubourg Saint-Germain, dont il était, donner sa démission de l’action politique et se refuser à devenir le parti tory de la France, après en avoir été le parti jacobite, voulut nous en faire une forte peinture dans des romans qui portèrent hardiment ce nom.
Fiorentino, même dans ses attaques les plus franches, oublie de sourire à celui qu’il prend pour cible de quelque épigramme mêlée d’ambre et de fiel. […] Les sept notes de la gamme, tombant en langues de feu, font flamber les dix colonnes de son feuilleton et inculquent à l’écrivain un savoir musical de la force d’un compositeur et d’un chef d’orchestre ; mais quand il revient à lui, il a tout oublié. […] Les formes rossiniennes ont prévalu dans tout le morceau qui n’a plus été que ce que l’on entend tous les jours, de l’excellent Adam (en ce temps-là de l’Adam était un gros mot, une grosse injure : ne l’oubliez pas !). […] j’y entrerai peut-être un jour, et je serai reçu par M. de Matharel, qui, en galant homme, aura oublié nos petits démêlés littéraires et y fera mon éloge : — à quoi je riposterai par le sien. […] N’oublions pas, un des artistes engagés par Bilboquet, le classique Polichinelle, si admirablement rendu par un jeune artiste du nom de Derudder, qu’on se demande si c’est là un homme ou un pantin.
… — ou bien enfin de tous ces artifices réunis, sans compter ceux que j’oublie. […] Les Humbles sont bien à lui et, dans une histoire du mouvement naturaliste de ces vingt dernières années, il ne faudrait point oublier son nom. […] Et puis… on oublie de lire les Oraisons funèbres, car ce n’est presque plus la peine, et d’ailleurs ce serait, par comparaison, une lecture bien austère. […] Une femme vraiment belle jouit continuellement de sa beauté, elle ne saurait l’oublier un moment, elle la lit dans tous les yeux. […] La sensualité ignore cette règle, ou l’oublie ; elle jouit franchement des choses et s’en donne l’ivresse.
Il ne faut pas oublier que les Jésuites ont été chassés de France beaucoup plus par les Parlements que par la Couronne : « L’esprit jésuitique a toujours cherché à tromper l’autorité royale pour en abuser ; l’esprit convulsionnaire s’élève contre l’autorité royale. […] Vous êtes perdus si vous oubliez que les fruits sont à tous et que la terre n’est à personne. » Que faire donc ? […] Car il ne faut pas oublier que, à la condition qu’il soit réduit à la portion congrue, l’inutile lui-même a son utilité sociale. […] Oublions tout cela, mes amis. […] Elle ne m’a point élevée dans un couvent, parce que ce n’est point dans un couvent que j’étais destinée à vivre… J’entends dire que dans ces couvents, comme dans la plupart des collèges où les jeunes gens sont élevés, on n’apprend guère que ce qu’il faut oublier pour toute sa vie ; on ensevelit dans la stupidité les premiers de nos beaux jours.
Nisard sait également qu’il n’a point tout dit et qu’on ne dira rien désormais qui fasse oublier ce qu’il a dit. […] Il oublie Prosper Mérimée, Alphonse Karr, Töpfferi et Lamartine. […] Flaubert n’oublie pas les lamentations de la cloche qui sonne. […] Il n’a gardé d’oublier, à côté de l’esprit tranquille, « la chair contente ». […] Nous oublions qu’elle n’a pas même aimé sa fille.
Et d’abord je n’aurai garde d’oublier l’excellente notice sur les deux frères d’Argenson que la plume impartiale en même temps que pieuse du digne éditeur a consacrée à leur mémoire.
On ne peut oublier, une fois qu’on les a connus, Œil-de-Faucon et Tom Coffin.
Et c’est ce sentiment monarchique, si peu romain, si peu conforme à la vérité historique, qui, dans la tragédie, commence à relever Auguste aux yeux du spectateur, et à faire oublier Octave.
Ensuite, on oublie qu’entre génie et talent il y a différence de degré, non de nature ; ou, si l’on aime mieux une formule plus claire, qu’à toute époque l’originalité, la faculté d’innover, le don de créer sont répartis à doses inégales parmi beaucoup de personnes, au lieu d’être concentrés en deux ou trois seulement.
Heureusement que, moins respectueux que leurs maîtres, ils oublient bientôt ces mots absurdes ; les ouvriers stéréotypeurs n’ont pas tardé à imposer clichage et cliché.
J’entendais donc, à la campagne, appeler des pommes de terre roses hâtives, des lirlies roses ; on ne put me donner aucune autre explication, et, le mot m’étant inutile, je l’oubliai.
Ces deux volumes d’ailleurs, qu’on veuille bien ne pas l’oublier, sont à l’ouvrage dont ils font partie, et qui sera mis au jour plus tard, ce que serait à une symphonie l’ouverture.
Mettez-lui, dit-il, son habit de travail, son bonnet de forge, son tablier ; que je le voie à son établi avec une lancette à la main ou autre ouvrage qu’il éprouve ou qu’il repasse, et surtout n’oubliez point de lui faire mettre ses lunettes sur le nez.
Venus est à son triomphe, et oublie ce qui se passe à côté d’elle.
Je n’ajouterai plus qu’un mot à cette observation : c’est qu’à l’exception de Bajazet, et du comte d’Essex, toutes les tragedies écrites depuis soixante ans, dont le sujet étoit pris dans l’histoire des deux derniers siecles, sont tombées, leurs noms mêmes sont oubliez.
Mais, un jour, Ahmed a oublié d’enlever l’anneau pour le ranger dans le coffre : il se couche avec sa femme et, quand il s’est endormi, la femme aperçoit la bague.
Déduire des commandements de l’égalité l’uniformité des sanctions que la société devrait appliquer aux actions des individus, c’est oublier qu’égalité n’est pas identité.
Cette idée s’oublie alors ou s’obscurcit, pendant quelques années. […] Leur émigration dure assez pour qu’ils apprennent l’étranger, pas assez pour qu’ils oublient la France. […] Nous comprenons mal tant de sous-entendus et d’allusions à des personnages oubliés. […] Il ne faut pas oublier que les procédés de composition de Chateaubriand étaient d’un mosaïste et d’un arrangeur. […] Et il ne faut pas oublier qu’il a été l’élève, et qu’il restera toujours le disciple et l’ami des Jésuites.
On l’oublie trop quand on essaie, pour amoindrir sans doute notre dette envers elle, de contester l’originalité de la Renaissance. […] Et puisque toute chose créée porte en soi, dans les conditions même de sa naissance, le germe de sa mort future, on n’oubliera pas enfin de remarquer que, de même que le sentiment de la forme pouvait rapidement conduire à l’idée d’une beauté indépendante de son contenu, ainsi la glorification des énergies de la nature pouvait mener à la justification de l’immoralité même ; et le développement de l’individualisme à la destruction de la société. […] La Fourmi, L’Alouette, Le Houx, Le Frelon, La Grenouille]. — Définition de l’alexandrinisme ; — ses trois traits caractéristiques : — 1º L’indifférence au contenu, d’où résulte : — 2º La préférence donnée aux petits sujets ; d’où résulte à son tour : — 3º La disproportion du développement avec l’intérêt, et des mots avec les choses. — On ne peut s’empêcher de noter ces trois caractères dans les Poèmes de Ronsard. — Aussi seraient-ils justement la partie la plus oubliée de son œuvre, s’ils ne contenaient des renseignements précieux pour l’histoire de sa vie, — [Cf. l’Élégie Puisque Dieu ne m’a fait pour supporter les armes] ; et pour l’histoire littéraire du temps ; — [Cf. […] — Mais Pascal l’a sûrement beaucoup pratiqué ; — et à ce propos que les annotateurs de Pascal ont trop oublié Charron. — On sait comme il est facile et difficile à la fois de passer de Montaigne à Pascal ; — mais c’est vraiment Charron qui fait entre eux le pont. — Il n’a pas cru d’ailleurs qu’il pût être mauvais à la religion d’en fonder l’empire sur les bases de la raison ; — c’est ce qu’il a loyalement essayé de faire ; — et ainsi ses contradictions ne viennent que de ce qu’il n’a pas saisi la portée de quelques-unes de ses assertions. […] De François de Sales comme prédicateur ; — et pourquoi l’a-t-on oublié parmi les « précurseurs de Bossuet » [Cf.
Et ils oublient qu’avant le drame, et le roman et le poème, il y a l’art, je le répète, l’art qui est unique ; et que si le même souci d’art ne les dirige pas, tous tant qu’ils sont, c’est que certains d’entre eux se trompent. […] Je veux oublier que vous êtes belle. […] Avant même qu’il eût pu prendre conscience de son originalité lyrique, l’ambition le conduisit à s’oublier, à se dépasser, à cultiver d’autres dons que sa sensibilité particulière, à placer la fin de son art hors de soi-même. […] Ce livre facile et sans morgue, presque à lui seul — n’oublions pas pourtant Psyché et l’Amphitryon de Molière, et tels opéras de Quinault — fait équilibre aux théories absolues de Boileau et à tous les alexandrins de la France. […] Pottecher — sans oublier nos propres essais le Pain et l’Eau de Vie.
Il faut oublier tout ce que vous savez, et tâcher d’arriver devant la nature comme un enfant qui ne sait rien… M’entendez-vous bien ? […] Étienne n’a point oublié ce spectacle. […] Étienne n’oubliera jamais ces lugubres repas. […] On n’a point oublié sans doute que David était marié, depuis 1783, avec la fille de Pécoul, dont il avait eu deux fils et deux filles. […] Je n’oublierai jamais les services qu’il m’a rendus.
Un des soldats, la main étendue, jure sur le gage de son amour qu’il n’oubliera ni l’enfant ni la mère. […] Tu oublies que ce n’est qu’en toi que je puis être palpitante ou inanimée, et que de telles craintes peuvent m’être mortelles. […] Le diable fut saisi d’une telle épouvante, qu’il en oublia qu’il était immortel. […] Le département de l’Ain a oublié ses traditions et ses usages. […] Quand on les a vus une fois, on ne peut les oublier, tant ils ont de vérité et d’expression, tant ils sont frappants.
Une célébrité plus active, l’influence politique surtout, et l’expression métaphysique, le révoltaient chez une femme, et lui paraissaient tellement sortir du sexe, qu’à lui-même il lui arriva, cette fois, de l’oublier. […] Qu’on n’oublie toujours pas le duc d’Enghien fusillé quatre jours auparavant : le Consul espérait, par cette fraude, confisquer à la mesure l’approbation du Corps législatif et de son principal organe. […] La manière de travailler, dans l’école classique, ressemblait assez, il faut le dire, à la toile de Pénélope : on défaisait, on refaisait sans cesse ; on s’attardait, on s’oubliait aux variantes, au lieu de pousser en avant. […] Quatre ou cinq des sonnets de Pétrarque me font parfaitement oublier s’il a terminé ou non son Afrique. […] Mais c’est bien assez pousser ce parallèle pour ceux qui ont un peu oublié Du Perron.
Le passé oublié, nous ferions quelque chose. […] On ne peut pas plus oublier les figures qui passent dans les contes de M. […] Comment amener et retenir à l’art ces oubliés pour qui je réclame ? […] En Allemagne, c’est le poète Uhland qui a utilisé sa vieillesse à cette grande et belle tâche, parcourant, ainsi, à lui seul, son pays pour y recueillir tout ce que ses devanciers avaient pu oublier. […] Triste beauté que celle qui n’a que la puissance de faire oublier la toilette.
Ce prodige fit oublier tout ce qui l’avoit précédé, & fut le digne modele de tout qui ce devoit le suivre. […] Applaudissez à l’actrice (mademoiselle Duménil) qui oublie son rang, qui vous oublie, & qui s’oublie elle-même dans ces situations effroyables, & laissez dire aux ames de glace qu’elle devroit se posséder. […] Boileau avoit oublié en les composant, qu’Antoine devoit les entendre. […] pourquoi Cornélie est-elle oubliée à Lesbos ? […] L’héroïque devient absurde en passant de bouche en bouche : d’abord on l’admire comme un prodige ; bien-tôt on le méprise comme un conte suranné, & l’on finit par l’oublier.
Car c’est un des plus grands mérites des écrivains de l’école moderne de s’être retrempés dans la nature, quelque peu oubliée depuis bien des années. […] On a oublié de l’faire vacciner, celui-là… Est-il grêlé ! […] Je l’ai oublié, dit Élie en se délirant. […] et il désignait du doigt l’essuie-mains jeté la veille et l’assiette oubliée sur la table avec le morceau de pain. […] — Si quelque chose au monde, ajouta-t-il, pouvait les faire oublier, ce serait un moment comme celui-ci.
Quand l’un des chiens de M… s’oublie en sa présence, le maître, ne pouvant deviner quel est celui qui a la digestion incivile, administre une volée d’énergiques représentations à toute la meute, qui s’échappe alors par toutes les issues. […] — Vous avez, lui répondit celui-ci, oublié le proverbe, — il ne faut pas parler de corde dans la maison d’un… pendu. […] — Aurais-tu déjà oublié les tiens, Titine ? […] Puis, quand elle a fait ses quinze tours, donné partout son coup d’œil, sans oublier la glace, donné son coup de dent au morceau de sucre qui traîne, elle se sauve en vous jetant sur votre lit son petit bouquet de violettes d’un sou, qui ne vous coûte qu’un baiser […] Ignorant sans doute combien nos lois sont paternelles pour ces petits délits qui sont dans la nature, le délinquant parut frappé d’une invincible terreur, et je n’oublierai jamais l’accent avec lequel il demanda au sergent de ville « quel siouplice lui était réservé ?
Si le père Massillon, du temps qu’il était à Saint-Honoré (ou à Saint-Magloire), avait paru bien humble et occupé uniquement de l’éternité, l’évêque vieillissant semblait avoir légèrement oublié son sermon Sur le petit nombre des élus.
Cousin, s’emparant du sujet de Mme de Sablé comme c’était son droit, mais ayant soin d’oublier que j’avais été l’un des premiers à puiser dans le fonds des portefeuilles de Valant, affectant d’ignorer que j’avais à y revenir et à parler nécessairement et en détail de Mme de Sablé dans mon ouvrage de Port-Royal qui importunait, je ne sais pourquoi, ce grand esprit, M.
Latouche s’est rendu célèbre dans la littérature d’il y a quinze ou vingt ans par une foule de traits pareils, malicieux et même (quelques-uns disent) méchants : il a drapé les ridicules de la jeune École d’alors dans un article critique, intitulé la Camaraderie ; mais il a oublié de dire que ces ridicules de coquetterie et de cajolerie poétique, il les avait autant que personne partagés, caressés, — sauf à les dénoncer ensuite avec esprit, avec fiel aussi et âcreté.
On ne trouve de bon dans la vie que ce qui la fait oublier ; et si l’émotion pouvait être un état durable, bien peu de philosophes se refuseraient à convenir, qu’elle serait le souverain bien.
Ces qualités ne paraissant plus indispensables au même degré, beaucoup de nos chirurgiens oublient de les acquérir.
L’adorable Chénier, notre Lamartine, ce Barbier, infiniment trop oublié, le grand Vigny et jusqu’à un certain point Baudelaire ont rimé faiblement.
Il fallait tout oublier des notions acquises précédemment.
On disoit qu’il s’étoit étrangement oublié dans son livre ; qu’il ne l’avoit fait que pour être lu des petits maîtres ; que ses contes étoient plus licencieux que ceux de la Fontaine.
Ce que nous prétendons, c’est que cela ne suffit pas toujours et qu’il y faut ordinairement plus de recherche ; et ce que nous n’oublions pas aussi, ce que nous avons affirmé hautement, c’est que l’art et les procédés de cette recherche supposent une aptitude réelle chez ceux à qui on les enseigne, faute de quoi les meilleures leçons seront vaines.
Il ne reprit point en sous-œuvre l’idée de l’ancienne Monarchie pour l’empreindre du cachet de son génie à lui, et pour donner à cette idée tout son accomplissement et toute sa force ; et l’organisateur par excellence, qui a laissé même jusqu’à ce mot d’organiser dans la langue du xixe siècle, oublia d’organiser l’Histoire et la laissa aux partis qu’il avait vaincus !
« S’il se vante, je l’abaisse », nos romanciers n’y font pas faute ; « s’il s’abaisse, je l’élève », voilà ce qu’ils oublient trop. […] au cliquetis des armes, tu peux tout pardonner, tout oublier, les trahisons, les mensonges. […] Il faut que l’on oublie, à moins qu’on ne l’ignore, l’objet vrai de la critique, et les vraies conditions de l’art. […] … Je n’oublierai jamais qu’il y a vingt ans… etc. ! […] Oublions chacun ici nos préférences particulières.
Il s’agit d’une cause à gagner, et plus la cause est importante, plus l’orateur doit s’oublier lui-même pour l’intérêt supérieur qu’il vise. […] Il faut que l’idée divine qui inspire l’artiste soit assez puissante pour posséder son âme tout entière et lui faire oublier, au moins par instants, sa personnalité. […] Pourquoi l’œuvre si amusante du romancier, si considérable du critique d’art et du critique dramatique, est-elle déjà presque toute oubliée ? […] L’éclat de certains chefs-d’œuvre et surtout celui du nom de leurs auteurs peut continuer à être très vif, sans que les beaux ouvrages oubliés agissent et influent désormais sur nous. […] Ses Tragiques, publiés en 1616, furent oubliés en naissant.
Le dimanche, il boit, il oublie. […] Tous les détails portent et sont chargés de sens ; c’est le propre des grands peintres de dessiner en cinq ou six coups de crayon une figure qu’on n’oublie plus. […] Elles font la substance des œuvres littéraires qui durent, et c’est ce que nous oublions trop aujourd’hui. […] Ses recherches s’étendaient à l’infini, il s’oubliait, et, dans son dernier ouvrage, il avait parfois de la peine à se reprendre. — Mais, en chemin, il faisait des trouvailles. […] En présence d’une figure peinte ou sculptée, vous devez oublier qu’elle est peinte ou sculptée, imaginer qu’elle est vivante.
C’est Pope dont Lamartine n’a jamais oublié quelques strophes attristées. […] Le même sujet est abordé par un admirateur de Garve, par Zimmermann, dans un ouvrage qui n’est pas tout à fait oublié. […] Loin de se rechercher elles-mêmes, elles se sont oubliées et perdues dans leurs chagrins. […] comment oublier Tes cascades, tes rocs, ton sol hospitalier ? […] Chose plus triste, et qui pourrait l’oublier ?
À force de contempler et de copier, ils oublient de sentir et de penser. […] En somme, il ne faut pas oublier que l’eau-forte est un art profond et dangereux, plein de traîtrises, et qui dévoile les défauts d’un esprit aussi clairement que ses qualités. […] On oublie à chaque instant qu’injurier une foule, c’est s’encanailler soi-même. […] Et puis elles ont été obscurcies, définitivement oubliées. […] Granier de Cassagnac lui-même me semble l’avoir oubliée.
Il ne faut pas oublier qu’il écrivait le « Moïse sur l’Horeb » quand Hugo balbutiait encore le « Moïse sur le Nil » des Odes et Ballades. […] Elle oublie les petits et adopte ceux que leur temps fit célèbres. […] On sent qu’elles furent cueillies trop tôt à des tiges trop faibles et trop fragiles ; mais leur grâce maladive ne s’oublie plus. […] Oublions ce qui l’a fait tel qu’il est. […] Goethe ou Heine me font oublier Bismarck ou Moltke.
Il n’y a rien en effet de plus misérable que le talent qui s’épuise à combiner des mots, qui crée des formes accomplies, qui les adore et qui oublie de dérober le feu du ciel pour les animer. […] L’art peut transformer les plus vives douleurs en une sorte de jouissance vague et indéfinissable ; tout au moins, il console, il rend le calme, et, qui médite, oublie. […] Ces premières amours de Juif sont terribles, et Itzig n’a jamais oublié le château. […] S’il t’a promis auparavant quelque autre chose, oublie-le ; si tu as dans les mains des papiers qui l’inquiètent, rends-les. […] Freytag oublie trop à quel prix cette conquête fut précipitée.
A travers son exagération pathétique, qu’elle prend pour de la modération, elle réussit, quoi qu’il en soit, à nous faire estimer et plaindre ce personnage, fort admiré et fort envié en son temps, tout simplement oublié depuis, et qui ne vivra désormais un peu que par elle. […] On y entend autour de soi mille échos de pensées qu’on n’oubliera plus : un mot, entre autres, m’est resté, que je redis souvent : La vie de l’âme est plus active que sur le trône des Césars. […] L’apparition du Génie du Christianisme, un an à l’avance pressentie, allait ajouter un éclat incomparable à une restauration déjà si brillante, et l’environner de la seule gloire, après tout, qui éclaire pour nous, dans le lointain, ce qu’autrement on eût oublié. […] Puisque nous en sommes à ce qu’il peut y avoir de traits réels dans Delphine, n’en oublions pas un, entre autres, qui révèle à nu l’âme dévouée de Mme de Staël. […] La passion divine d’un être qu’on ne peut croire imaginaire introduit, le long des cirques antiques, une victime de plus, qu’on n’oubliera jamais ; le génie, qui l’a tirée de son sein, est un vainqueur de plus, et non pas le moindre dans cette cité de tous les vainqueurs.
N’oublions pas, comme trait bien essentiel, qu’à quelque heure et dans quelque circonstance qu’une personne de sa famille entrât, elle le trouvait toujours heureux du dérangement, ou plutôt non pas même dérangé, mais bon, affectueux et souriant. […] Est-il besoin de remarquer que l’auteur oublie de pousser assez loin la citation et l’allusion, qu’il s’arrête avant 1688, avant Guillaume et la Déclaration des droits ? […] Néanmoins, il y a trop de délibération, trop d’humanité dans cette affaire, et l’on pourrait gager mille contre un que la ville ne se bâtira pas, ou qu’elle ne s’appellera pas Washington, ou que le Congrès n’y résidera pas. » Beaucoup des prédictions de M. de Maistre (ne l’oublions pas) ne sont ainsi que des gageures. […] Il oublie même un peu trop de le diriger, et il y cède trop. — Soit. — C’est le défaut contraire au précédent. — Ce n’est pas un très noble régime, dira-t-on, qu’un tel régime représentatif et monarchique, avec une seule hérédité, sans aristocratie véritable, sans démocratie entière et Franche. — Non : mais c’est un régime sensé, modéré, tolérable assurément, et, qui plus est, assez heureux. — Mais vivra-t-il ? […] En insistant outre mesure sur un sujet odieux et pénible que la déclamation avait exploité sans doute, et où peut-être il y avait des amendements historiques à proposer, M. de Maistre a trop oublié que, là où il s’agit de sang versé et de tortures, la discussion extrême, le summum jus a tort.
Pauvre terre de France qui oublie avoir donné naissance au grand Rabelais. […] « Manger, boire et le reste, a-t-on dit, il ne se passe pas autre chose dans la Terre ou dans l’Assommoir. » Mais les personnes qui se permirent cette constatation, d’ailleurs fausse, semblent trop oublier l’objectif principal et les intentions premières du romancier. […] N’oubliez pas sa préface des Rougon-Macquart et que ce qu’il a voulu écrire, c’est le roman de l’espèce et de la société, considérés dans leur unité la plus simple, qui est une famille. […] Je n’oublierai jamais l’extraordinaire et sinistre spectacle de cette grande salle de Harlay pleine d’une tourbe en folie qui reçut l’annonce du verdict comme une hyène son morceau de charogne… Ah ! […] Je le formulai presque semblable en une prose oubliée des Essais de jeunes qui firent place à l’Effort : le poète est celui qui perçoit le sens profond, mystérieux, des choses et chez qui résonne l’écho de tous les accords extérieurs, prolongeant en lui, affinés ou grandis selon son tempérament, le reflet des êtres et des paysages.
C’est une idée impulsive, une idée-force qui a été introduite dans le cerveau pendant le sommeil, puis oubliée par le sujet revenu à l’état de veille. […] En vertu de la théorie des idées-forces, de même qu’il n’y a jamais sensation, idée, hallucination sans un mouvement correspondant, de même il n’y a jamais abolition d’une sensation ou d’une idée, jamais d’« anesthésie » ou d’« amnésie », sans une suppression ou une modification des mouvements immédiatement liés à cette sensation ou à cette idée : si j’ai oublié le nom ou la place d’un objet, je ne puis pas prononcer ce nom, ni faire le mouvement convenable pour prendre l’objet à sa place. […] N’oublions pas que, pour la psychologie contemporaine, une perception est toujours une « synthèse de sensations et d’images » : quand vous apercevez une orange, vous n’avez que la sensation actuelle d’un disque coloré, mais vous liez à cette sensation telles images et tels souvenirs : forme sphérique, solidité, odeur et saveur. […] Ces expériences sont venues confirmer ce que nous avions écrit dans la Revue des Deux-Mondes et ce qui nous avait attiré les critiques d’un savant distingué : — « S’autoriser de ce qu’un téléphone reproduit à une distance énorme les vibrations reçues pour en inférer la possibilité de la télépathie, c’est oublier le fil métallique dont on utilise la conductibilité ; jusqu’à présent l’on n’a pas encore construit de téléphone télépathique. » M. […] Nous pouvons aussi oublier presque immédiatement l’une des séries alternatives, celle dont nous sommes distraits.
Cette révolte publique contre l’indélicatesse et l’improbité prouve amplement que la conscience collective est encore intacte et qu’elle n’a oublié aucune des traditions de l’honneur. […] N’oublions pas que l’Assommoir contient en germe tout ce que l’auteur a publié depuis. […] Or, voilà où porte l’erreur de l’auteur, il oublie, un peu vite, que Nana a été conçue et engendrée par Coupeau et Gervaise quand ceux-ci avaient, tous deux, une conduite irréprochable. […] Il oublie qu’en temps de coups d’État et de guerres civiles, on fusille et on massacre partout. […] Rien n’est omis, rien n’est oublié.
On était donc, en 1665, au vrai seuil du beau siècle, au premier plan du portique, à l’avant-veille d’Andromaque ; l’escalier de Versailles s’inaugurait dans les fêtes : Boileau, accostant Racine, montait les degrés ; La Fontaine en vue s’oubliait encore ; Molière dominait déjà, et le Tartufe, achevé dans sa première forme, s’essayait sous le manteau. […] S’il paraît oublier dans l’homme le roi exilé que Pascal relève, et les restes brisés du diadème, qu’est-ce donc que cet insatiable orgueil qu’il dénonce, et qui, de ruse ou de force, se veut l’unique souverain ? […] En appréciant La Rochefoucauld, on ne doit pas oublier ceci : Tous ceux qui ont mal usé de leur jeunesse ont intérêt à ce que ce soit une duperie que les hautes pensées de la jeunesse.
Car tout cela (il faut bien nous le dire) s’est perdu, s’est dissipé, s’est oublié, et il n’en est rien entré dans la formation définitive, je ne dis pas de la langue, mais certainement de la poésie française. […] tandis que les grands poèmes chevaleresques et les nobles sujets qu’ils traitaient se sont perdus avec le temps, ont été oubliés et n’ont laissé de souvenir que ce qu’il en fallait pour être parodiés, tandis que la grande et hautaine branche des Chansons de geste s’est desséchée et a péri, la branche plus humble des Fabliaux, et plus voisine de terre, n’a cessé de verdoyer, de bourgeonner et de fleurir ; ces vieux récits n’ont cessé de vivre, de se réciter, de se transmettre, et les auteurs connus, qui ont eu l’honneur de nous les conserver en les variant à leur guise, n’ont fait le plus souvent qu’hériter des inconnus qui leur en ont fourni la matière et soufflé l’esprit. […] C’est pourtant au xiii e siècle seulement, ce siècle de génie, de véritable et universelle invention, m’il convient, ne l’oublions pas, de rapporter les plus jolies branches et rapsodies de cette libre épopée satirique, celles qui ont encore naïveté et grâce dans l’ironie, une sorte de candeur, et en qui ne percent pas trop outrageusement l’allégorie et la satire tout intentionnelle qui sera l’esprit du Renart final.
« Si je pouvais t’oublier, ô Jérusalem ! que ma main droite m’oublie moi-même ! […] c’est que tu touchais de tes miséricordes Ce barde dont ta grâce avait monté les cordes ; De ses psaumes vainqueurs tu faisais don sur don ; Il pouvait t’oublier sur son lit de mollesses, Tu poursuivais son cœur au fond de ses faiblesses De ton impatient pardon !
C’est pour l’avoir oublié à l’heure où il fallait s’en souvenir, que la crise a été si terrible et qu’elle nous agite encore. […] Le peuple s’aigrit, les provinces s’alarmèrent, les partisans des dynasties en expectative se groupèrent contre la république, l’ennemi commun ; la république s’exagéra sur sa montagne comme sur un mont Aventin, menaçant le civisme au lieu de le rassurer ; les élections furent extrêmes comme les partis ; la France oublia la liberté superflue des temps calmes pour ne penser qu’à son salut qu’elle crut compromis. […] La nature humaine est pathétique ; la république l’oublia, elle donna à la royauté le prestige du martyre, à la liberté le stigmate de la vengeance.