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733. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1886 » pp. 101-162

Vendredi 12 mars Une maîtresse inférieure n’est jamais complètement associée au monsieur, avec lequel elle couche ; elle aura pour lui le dévouement dans les révolutions, les maladies, les événements dramatiques, mais en pleine existence tranquille et bonasse, l’amant d’une autre caste trouvera chez elle, le retrait, l’hostilité même intérieure d’un peuple, contre une aristocratie. […] Zola évoque le temps, où très souvent, il avait son pantalon et son paletot au Mont-de-Piété, et où il vivait dans son intérieur en chemise : la maîtresse avec laquelle il vivait alors, appelait ces jours-là, les jours où il se mettait en Arabe. […] Ce soir, il me parlait des intéressantes pages qu’il écrirait, il lui semble, en racontant ses visites à ses vieux parents, quand il va se faire piquer par son beau-père, peignant son état de souffrance abominable dans la rue, puis l’espèce d’apaisement qui se fait chez lui, pareil à ce qui se passe chez le dentiste, quand la vieille bonne lui ouvre, et qu’il entre dans ce calme intérieur, puis l’état vague, hachiché, dans lequel il revient.

734. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

Avec Sully-Prudhomme ce n’est plus le lyrique ébloui, tentant d’embrasser tout le dehors en son regard agrandi ; ce sont les yeux mi-clos de la réflexion sur soi, la vision intérieure, mais qui cependant s’élargit peu à peu, « jusqu’aux étoiles » : Tout m’attire à la fois et d’un attrait pareil : Le vrai par ses lueurs, l’inconnu par ses voiles : Un trait d’or, frémissant joint mon cœur au soleil Et de longs fils soyeux l’unissent aux étoiles238. […] Mainte fois nous le voyons arrêté au seuil des humbles intérieurs : la lampe allumée, la bûche du foyer et le labeur du soir ont trouvé en lui leur poète ému. […] Nulle nécessité intérieure ne produirait leur liaison, ni leur existence.

735. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIIe entretien » pp. 87-159

Que nous dit cet oracle intérieur qu’on nomme l’évidence ? […] Si cela n’était pas ainsi, les trois grands témoins de Dieu : l’intelligence, la conscience, l’évidence intérieure, auraient menti en nous, c’est-à-dire que ces trois grands témoins, subornés par la vérité suprême, Dieu, auraient été chargés par Dieu de se jouer en son nom de l’intelligence, de l’évidence, de la conscience, de la vérité, de la foi, de l’espérance de l’homme ! […] Si cet homme est Bossuet, c’est-à-dire s’il réunit dans sa personne la conviction qui assure l’attitude, la pureté de vie qui préconise le Verbe, le zèle qui dévore, l’autorité qui impose, la renommée qui prédispose, le pontificat qui consacre, la vieillesse qui est la sainteté du visage, le génie qui est la divinité de la parole, l’idée réfléchie qui est la conquête de l’intelligence, l’explosion soudaine qui est l’assaut de l’esprit, la poésie qui est le resplendissement de la vérité, la gravité de la voix qui est le timbre des pensées, les cheveux blancs, la pâleur émue, le regard lointain, la bouche cordiale, les gestes enfin qui sont les attitudes visibles de l’âme ; si cet homme sort lentement de son recueillement ainsi que d’un sanctuaire intérieur ; s’il se laisse soulever peu à peu par l’inspiration, comme l’aigle d’abord pesant, dont les premiers battements d’ailes ont peine à embrasser assez d’air pour élever son vol ; s’il prend enfin son souffle et son essor, s’il ne sent plus la chaire sous ses pieds, s’il respire à plein souffle l’esprit divin, et s’il épanche intarissablement de cette hauteur démesurée l’inspiration ou ce qu’on appelle la parole de Dieu à son auditoire, cet homme n’est plus un homme, c’est une voix.

736. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre premier. Le Moyen Âge (842-1498) » pp. 1-39

Tous les hommes pour lui se ressemblent, un peu comme à nos yeux tous les nègres ou tous les Chinois ; et, au fait, ce qui diversifie les visages humains, et, en les diversifiant, ce qui les individualise, n’est-ce pas le reflet en eux d’une complexité intérieure, d’une richesse, ou d’une intensité de vie inconnue aux hommes de ce temps ? […] Mais c’est aussi pourquoi, si la pompe quasi liturgique des Mystères a d’abord continué dans la rue les cérémonies que l’on célébrait dans l’intérieur de l’église ; s’ils ont été, comme les processions, une manière d’intéresser les sens du populaire, son avidité naturelle de divertissements et de spectacle à la durée de la religion ; et enfin, s’ils ne sont morts, comme on le montrerait, que de l’anathème que l’Église a jeté sur eux, on peut dire et il faut dire que, comme la poésie, courtoise exprimait l’idéal de la noblesse et les Fabliaux celui du vilain, pareillement les Mystères ont commencé par exprimer l’idéal du clergé. […] Renaud de Montauban], dont les héros sont les barons en révolte contre une royauté qui ne remplit plus son office. — Coïncidence notable des chansons de ce dernier cycle avec le recul de l’Islam. — Le même temps doit être aussi celui des chansons qui nous montrent les nationalités intérieures en lutte les unes contre les autres [Ex. la Chanson de Garin le Loherain] ; — et celui des poèmes généalogiques [Ex.

737. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XVIII. »

Tel est, par exemple, ce chant où, dans l’hexamètre de l’Hymne à Jupiter du philosophe Cléanthe, Grégoire énonce la vérité sublime et touchante, et, comme disait un Père de l’Église, la tendresse intérieure renfermée dans le théisme chrétien. […] Là, en effet, où le ciel est moins beau, la nature moins riche, la vie moins extérieure et moins libre, la cité moins retentissante de fêtes et de triomphes, l’homme moins jeune, moins ardent, moins passionné de patrie et de gloire, la voix la plus expressive, n’ayant pas pour s’animer les grands spectacles du dehors, aura besoin des méditations les plus intérieures de l’âme ; et l’élévation, la contemplation abstraite et lyrique devra naître surtout de la solitude. […] Je voulais que de là mon âme, pure de passions, dégagée de désirs, reposée de fatigues, délivrée de douleurs, ayant rejeté loin d’elle la colère, la contention, tous ces maux intérieurs, acquittât d’une bouche innocente et d’un cœur sanctifié l’hymne d’amour qu’elle te doit.

738. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — II. (Fin.) » pp. 180-203

Il avait loué dans les premières éditions du Temple du goût son entente heureuse pour l’emplacement, pour la distribution et les embellissements intérieurs de sa maison près le Palais-Bourbon53. […] Il a écrit sur les princes, sur ceux, en particulier, de ces petites cours oisives, et en vue de ces intérieurs des Condé, des Bourbon et des Du Maine, des pages telles que le courtisan le plus clairvoyant et le plus dégoûté en peut seul écrire55 ; il revenait à ses anciennes idées favorites d’indépendance, de loisir honnête et digne.

739. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

Il a composé deux ouvrages principaux sur ces objets ou sujets du monde intérieur : Recherches sur la nature et les lois de l’imagination, 1807 ; Études sur l’Homme, ou recherches sur les facultés de sentir et de penser, 1821. […] Dans les tout derniers temps, l’âge l’avait atteint, ses yeux le quittaient ; sa vie intérieure restait la même.

740. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville »

Il écrit à sa mère, à bord du navire, pendant la traversée même (avril-mai 1831) ; il décrit l’intérieur de ce petit monde, un vaisseau en mer, cette arche de Noé qui contient bien des espèces diverses de toute nature et de tout pays. […] Ne croyez pas que je sois arrivé sans de grands Combats intérieurs à considérer l’existence sous ce point de vue, ni que je m’v tienne toujours.

741. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

En supposant même que rien de tout cela n’arrive, que les ennemis se retirent, que la tranquillité intérieure se rétablisse et que le pouvoir se raffermisse, entre les faibles mains où on l’a replacé, que pouvons-nous raisonnablement attendre d’une administration effarée, incertaine, enivrée de tous les principes qui tourmentent la société depuis vingt-cinq ans ; d’un chef bon, mais aveuglé au point de méconnaître également, et les hommes et les choses, et de placer sa personne sous la protection du poignard des assassins, et l’État sous la sauvegarde des institutions auxquelles la France a été redevable, pour tout bienfait, du règne de la terreur et de celui de Napoléon ? […] C’est bien là au fond la vocation et le vœu de l’ardent disciple ; mais l’écrivain entraîné ne nuirait-il pas au chrétien intérieur et pratique ?

742. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Élevée pendant les années de la Révolution, dans un intérieur modeste et pauvre, près d’une église en ruine, en face d’un cimetière agreste où l’on allait jouer et prier, toute flamande dans ses croyances du berceau et ses crédulités charmantes, elle confondait dans un même amour domestique Dieu et son père, la Vierge et sa mère et ses sœurs. […] C’est véritablement aimer et espérer aussi. » À côté de ces lettres si intérieures, il faudrait relire la pièce intitulée Tristesse, qui est toute son enfance, et qui nous représente ses Feuillantines à elle : N’irai-je plus courir dans l’enclos de ma mère ?

743. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

Pendant qu’il se disait ces choses assez haut, une voix intérieure lui parlait plus bas, et cette voix avait un nom pour lui. […] On sait les retraites fréquentes et les huitaines de Saint-Simon, qui nous a donné sur cet intérieur austère des jours tout particuliers, d’une clarté vive, et qui nous y font pénétrer.

744. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger en 1832 »

La jeunesse pourtant, cette  puissance d’illusion et de tendresse dont elle est douée, cette gaieté naturelle qui en formait alors le plus bel apanage et dont notre poëte avait reçu du ciel une si heureuse mesure, toutes ces ressources intérieures triomphèrent, et la période nécessiteuse qu’il traversait brilla bientôt à ses yeux de mille grâces. […] Le fait intérieur et domestique que j’y remarque le plus, c’est son amitié avec Manuel.

745. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE BALZAC (La Recherche de l’Absolu.) » pp. 327-357

Janin ; « elle est à lui dans ses atours, dans son négligé, dans le plus menu de son intérieur ; il l’habille, la déshabille100. » M. de Balzac, mettant en œuvre comme romancier et conteur la science de sa Physiologie du Mariage, s’est introduit auprès du sexe sur le pied d’un confident consolateur, d’un confesseur un peu médecin ; il sait beaucoup de choses des femmes, leurs secrets sensibles ou sensuels ; il leur pose en ses récits des questions hardies, familières, équivalentes à des privautés. […] Bien des femmes aussi ont été plus difficiles de goût qu’en province, et ne lui ont point passé ses familiarités d’intérieur ou ses invraisemblances, par intérêt pour les principales situations.

746. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

Les habitudes intérieures du devoir, de la règle morale, ont passé sur son style, en ont déterminé l’allure, et sans doute la marquent trop par endroits19. […] Les Discours religieux, réunis au nombre de vingt-cinq, offrent comme un cours complet des vérités évangéliques, déduites dans une méthode tout intérieure.

747. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

M.Mignet a plus fait pour Louis XIV que tous les panégyristes : il nous a ouvert l’intérieur de son cabinet et l’a montré au travail comme roi, judicieux, prudent dès la jeunesse, invariablement appliqué à ses desseins et ne s’en laissant pas distraire un seul instant, au cœur même des années les plus brillantes et du sein des pompes et des plaisirs. […] On jouit, grâce à M.Mignet, de lire dans ces intérieurs de conseils, de percer le secret des choses et d’en pouvoir raisonner.

748. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — I »

Des changement secrets s’accomplissent en eux, au sein de leur génie, et quelquefois le transforment ; ils subissent ces changements comme des lois, sans s’y mêler, sans y aider artificiellement, pas plus que l’homme ne hâte le temps où ses cheveux blanchissent, l’oiseau la mue de son plumage, ou l’arbre les changements de couleur de ses feuilles aux diverses saisons ; et, procédant ainsi d’après de grandes lois intérieures et une puissante donnée originelle, ils arrivent à laisser trace de leur force en des œuvres sublimes, monumentales, d’un ordre réel et stable sous une irrégularité apparente comme dans la nature, d’ailleurs entrecoupées d’accidents, hérissées de cimes, creusées de profondeurs : voilà pour les uns. […] Certains passages des lettres à son fils aîné, alors attaché à l’ambassade de Hollande, font rêver une poésie intérieure et pénétrante qu’il n’a épanchée nulle part, dont il a contenu en lui, durant des années, les délices incessamment prêtes à déborder, ou qu’il a seulement répandue dans la prière, aux pieds de Dieu, avec les larmes dont il était plein.

749. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

Heureux ceux qui, comme lui, ont eu un jour, une semaine, un mois dans leur vie, où à la fois leur cœur s’est trouvé plus abondant, leur timbre plus pur, leur regard doué de plus de transparence et de clarté, leur génie plus familier et plus présent ; où un fruit rapide leur est né et a mûri sous cette harmonieuse conjonction de tous les astres intérieurs ; où, en un mot, par une œuvre de dimension quelconque, mais complète, ils se sont élevés d’un jet à l’idéal d’eux-mêmes ! […] Sa physionomie ouverte et bonne, la politesse décente de son langage, laissent transpirer à son insu une sensibilité intérieure profondément tendre, et, sous la généralité de sa morale et la multiplicité de ses récits, il est aisé de saisir les traces personnelles d’une expérience bien douloureuse.

750. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

Nous n’avons plus d’exemples de ces républiques qui donnaient à chaque citoyen sa part d’influence sur le sort de la patrie ; nous sommes encore plus loin de cette vie patriarcale qui concentrait tous les sentiments dans l’intérieur de sa famille. […] En gagnant des batailles, on peut soumettre les ennemis de la liberté ; mais pour faire adopter dans l’intérieur les principes de cette liberté même, il faut que l’esprit militaire s’efface ; il faut que la pensée, réunie à des qualités guerrières, au courage, à l’ardeur, à la décision, fasse naître dans l’âme des hommes quelque chose de spontané, de volontaire, qui s’éteint en eux lorsqu’ils ont vu pendant longtemps le triomphe de la force.

751. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre II. Deuxième élément, l’esprit classique. »

Pareillement il nous reste à considérer les Français du dix-huitième siècle, la structure de leur œil intérieur, je veux dire la forme fixe d’intelligence qu’ils emportent avec eux, sans le savoir et sans le vouloir, sur leur nouvelle tour. […] Sur les organes les plus vitaux de la société, sur les règles et les pratiques qui vont provoquer une révolution, sur les droits féodaux et la justice seigneuriale, sur le recrutement et l’intérieur des monastères, sur les douanes de province, les corporations et les maîtrises, sur la dîme et la corvée378, la littérature ne m’apprend presque rien.

752. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Victor Hugo, Toute la Lyre. »

Et c’est pourquoi j’ai pu lire, avec une admiration stupéfaite, il est vrai, et dans une sorte d’ivresse physique mais sans une minute d’émotion, de douceur intérieure, et sans le moindre désir de larmes, les dix mille vers de Toute la Lyre. […] Les Chants du crépuscule étaient la même chose que les Voix intérieures qui étaient la même chose que les Feuilles d’automne ; la seconde Légende était la même chose que la première ; les Quatre vents de l’esprit reprenaient tous les thèmes des Contemplations, etc.

753. (1895) La musique et les lettres pp. 1-84

La taxe, légère, prélevée sur les rééditions même scolaires, suppose la comptabilité d’un bureau spécial annexé, s’il faut, au Dépôt des Livres que possède le ministère de l’Intérieur. […] Tout l’acte disponible, à jamais et seulement, reste de saisir les rapports, entre temps, rares ou multipliés ; d’après quelque état intérieur et que l’on veuille à son gré étendre, simplifier le monde.

754. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre huitième »

Machiavel, qu’il a eu tort de ne pas nommer, et après Machiavel, Bossuet qui parle de la sagesse de cette assemblée auguste comme d’une chose prédite par le Saint-Esprit dans le livre des Machabées, nous avaient déjà introduits dans l’intérieur de la curie. […] Après ces enseignements, et comme au sortir de cette grande école, voici qu’une littérature nouvelle, « engageante et hardie », vient tirer le lecteur de lui-même, l’appelle au dehors, lui fait voir, au lieu de l’homme abstrait, l’habitant d’un pays et le citoyen d’une ville ; au lieu d’un type de société formé d’honnêtes gens qui s’occupent de leur réforme intérieure, sous une puissance établie de Dieu, des sociétés aussi diverses que les climats, les territoires et les religions.

755. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Je n’empêche pas qu’un autre n’analyse longuement les dépêches et qu’il n’entrecoupe le récit par des extraits ; — mais alors il fait une histoire diplomatique ; — qu’il ne s’étende sur les dissensions intérieures de la Hollande et sur la fin tragique des De Witt ; mais c’est entreprendre sur l’histoire de la Hollande ; — qu’il ne raconte au long les combats qui en si peu de jours mettent la Hollande aux abois, et la forcent à se noyer pour se sauver ; — mais ce sont là des mémoires militaires. En attendant, je me contente d’un récit qui m’en apprend assez sur les causes de la guerre pour que je ne confonde pas cette conquête manquée avec une guerre juste, et l’ambition du roi avec la querelle de la France ; qui des luttes intérieures de la Hollande fait ressortir cette triste vérité, que l’invasion même ne réconcilie pas les partis ; qui m’intéresse aux deux nations, à la Hollande par la justice et par le respect du faible, à la France par le patriotisme et l’amour de la gloire ; qui, parmi plusieurs portraits d’un dessin aussi juste que brillant, me laisse imprimées dans l’esprit les deux grandes figures royales du siècle, Louis XIV et Guillaume III, esquissées comme certains croquis de grands maîtres, dont le crayon ne laisse plus rien à faire au pinceau.

756. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XIV, l’Orestie. — Agamemnon. »

Le Chœur l’excite à pousser sa piste sanglante : — « L’étrangère est sagace comme un chien de chasse, elle flaire les meurtres qu’elle va découvrir. » — Elle vient de flairer, en effet, celui qui s’apprête dans l’intérieur du palais ; elle tombe en arrêt devant lui, l’œil ardent, la bouche écumante. […] Cependant les cris d’Agamemnon égorgé retentissent par deux fois dans l’intérieur du palais. — « A moi !

757. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de Pompadour. Mémoires de Mme Du Hausset, sa femme de chambre. (Collection Didot.) » pp. 486-511

. — « Ce royaume, dit Mirabeau, est bien mal ; il n’y a ni sentiments énergiques, ni argent pour les suppléer. » — « Il ne peut être régénéré dit La Rivière, que par une conquête comme à la Chine, ou par quelque grand bouleversement intérieur ; mais malheur à ceux qui s’y trouveront ! […] Battue au-dehors, faute de héros, dans son duel contre Frédéric, Mme de Pompadour fut plus heureuse de sa personne, à l’intérieur, dans sa guerre à mort contre les Jésuites.

758. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1879 » pp. 55-96

Avez-vous éprouvé quelques trouble intérieur, au moment de votre chute ? […] * * * — La douce sensation d’avoir, le matin, en entrant dans son cabinet de travail, la perspective de douze heures de travail, sans sortie, sans visites, sans dérangement, dans la jouissance parfaite et l’exaltation intérieure de la solitude.

759. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre III. »

Mais ces recommandations morales, ces saintes lois et d’autres encore, gravées sur les tables de pierre de Moïse, se retrouvent aussi et peuvent se lire sur la table intérieure et vivante du cœur humain, sur cette table rase en apparence, mais, comme un marbre jaspé, dit Leibniz, sillonnée de veines profondes, où réside l’instinct des vérités nécessaires que développe la croissance de l’âme. […] Au-delà est cette vie divine que l’antiquité, même idolâtre, avait conçue, dont elle entendait quelque chose dans le recueillement intérieur de l’âme, qu’elle recherchait dans les initiations de ces mystères, dont Pindare a dit : « Que l’homme n’en aurait pu contempler toute la lumière dévoilée, sans mourir. » Mais revenons au seul domaine de l’imagination et de l’art.

760. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française — II. La Convention après le 1er prairal. — Le commencement du Directoire. »

En 94, désabusés de leurs premières illusions, ils cherchèrent un appui dans l’insurrection vendéenne, jusque-là délaissée, et dans les conspirations intérieures, jusque-là impossibles.

761. (1874) Premiers lundis. Tome I « Diderot : Mémoires, correspondance et ouvrages inédits — I »

La vie, le sentiment de la réalité, y respirent ; de frais paysages, l’intelligence poétique symbolique de la nature, une conversation animée et sur tous les tons, l’existence sociale du xviiie  siècle dans toute sa délicatesse et sa liberté, des figures déjà connues et d’autres qui le sont du moment qu’il les peint, d’Holbach et le père Hoop, Grimm et Leroy, Galiani le cynique ; puis ces femmes qui entendent le mot pour rire et qui toutefois savent aimer plus et mieux qu’on ne prétend ; la tendre et voluptueuse madame d’Épinay, la poitrine à demi nue, des boucles éparses sur la gorge et sur ses épaules, les autres retenues avec un cordon bleu qui lui serre le front, la bouche entr’ouverte aux paroles de Grimm, et les yeux chargés de langueurs ; madame d’Houdetot, si charmante après boire, et qui s’enivrait si spirituellement à table avec le vin blanc que buvait son voisin ; madame d’Aine, gaie, grasse et rieuse, toujours aux prises avec le père Hoop, et madame d’Holbach, si fine et si belle, au teint vermeil, coiffée en cheveux, avec une espèce d’habit de marmotte, d’un taffetas rouge couvert partout d’une gaze à travers la blancheur de laquelle on voyait percer çà et là la couleur de rose ; et au milieu de tout ce monde une causerie si mélangée, parfois frivole, souvent souillée d’agréables ordures, et tout d’un coup redevenant si sublime ; des entretiens d’art, de poésie, de philosophie et d’amour ; la grandeur et la vanité de la gloire, le cœur humain et ses abîmes, les nations diverses et leurs mœurs, la nature et ce que peut être Dieu, l’espace et le temps, la mort et la vie ; puis, plus au fond encore et plus avant dans l’âme de notre philosophe, l’amitié de Grimm et l’amour de Sophie ; cet amour chez Diderot, aussi vrai, aussi pur, aussi idéal par moments que l’amour dans le sens éthéré de Dante, de Pétrarque ou de notre Lamartine ; cet amour dominant et effaçant tout le reste, se complaisant en lui-même et en ses fraîches images ; laissant là plus d’une fois la philosophie, les salons et tous ces raffinements de la pensée et du bien-être, pour des souvenirs bourgeois de la maison paternelle, de la famille, du coin du feu de province ou du toit champêtre d’un bon curé, à peu près comme fera plus tard Werther amoureux de Charlotte : voilà, et avec mille autres accidents encore, ce qu’on rencontre à chaque ligne dans ces lettres délicieuses, véritable trésor retrouvé ; voilà ce qui émeut, pénètre et attendrit ; ce qui nous initie à l’intérieur le plus secret de Diderot, et nous le fait comprendre, aimer, à la façon qu’il aurait voulu, comme s’il était vivant, comme si nous l’avions pratiqué.

762. (1874) Premiers lundis. Tome II « Loève-Veimars. Le Népenthès, contes, nouvelles et critiques »

Bref, le côté humouriste qui ressemble à du Sterne, le côté d’intérieur allemand et flamand rapporté du commerce d’Hoffmann, sont dirigés en M. 

763. (1874) Premiers lundis. Tome II « Henri Heine. De la France. »

Souvent, le soir, regardant quelque coin de ciel, des toits lointains, çà et là un rare feuillage, je me suis dit qu’un tableau qui retracerait exactement cette vue si simple serait divin ; puis j’ai compris que cette fidélité entière était impossible à saisir directement ; que mon émotion résultait du tableau en lui-même et de ma disposition sentimentale à le réfléchir ; que, de l’observation directe de l’objet, et aussi de la réflexion modifiée de cet objet au sein du miroir intérieur, l’art devait tirer une troisième image créée qui n’était tout à fait ni la copie de la nature, ni la traduction aux yeux de l’impression insaisissable, mais qui avait d’autant plus de prix et de vérité, qu’elle participait davantage de l’une et de l’autre19.

764. (1875) Premiers lundis. Tome III « Profession de foi »

Mais la dissolution du Globe n’en résultait pas nécessairement ; l’idée première, la conception fondamentale dont le développement avait dévié en se resserrant dans la politique de la Restauration ; qui pourtant s’était reproduite plus d’une fois dans des applications partielles, dans des pressentiments organiques ; qui, en plus d’une page, à l’occasion de l’union européenne et de la politique de Napoléon, à l’occasion du Comité de salut public et de sa tentative avortée ; qui, plus récemment, au sujet du libéralisme de Benjamin Constant, jugé par le noble et infortuné Farcy, avait percé au point d’offenser dans le journal le principe dominant, et d’y scandaliser les politiques pratiques ; cette idée qui nous en avait inspiré le début ; qui, par le choix intérieur des matières et des faits, en alimentait le fond ; qui, par des renseignements nombreux, par d’amples informés sur l’instruction primaire aux frais de l’État, sur l’émancipation des artisans, sur les essais divers de système coopératif et sur une foule d’autres sujets, avait sourdement lutté contre les doctrines économiques d’indifférence et de laisser-faire professées dans des colonnes plus officielles ; cette idée qu’une plume ingénieuse et délicate avait autrefois effleurée, sans l’entamer, dans un article intitulé de la Critique de la critique, et qui s’était hardiment résumée en Juillet sous ce cri prophétique, bien qu’un peu étrange : Plus de criticisme impuissant ; cette féconde et salutaire idée d’association universelle et d’organisation future restait entière à exploiter ; elle demeurait à nu, dégagée de tous les voiles factices, de toutes les subtilités prestigieuses que la Restauration avait jetées devant.

765. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre I. Un retardataire : Saint-Simon »

Mais il est bien le contemporain de Lesage et de La Bruyère, par ce don de traiter toutes les apparences sensibles comme le chiffre qui contient l’homme intérieur.

766. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre II. Enfance et jeunesse de Jésus. Ses premières impressions. »

Les maisons, à ce qu’il semble, ne différaient pas beaucoup de ces cubes de pierre, sans élégance extérieure ni intérieure, qui couvrent aujourd’hui les parties les plus riches du Liban, et qui, mêlés aux vignes et aux figuiers, ne laissent pas d’être fort agréables.

767. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre onzième. »

Ceci doit faire allusion à quelque petite pièce de société, représentée devant le roi dans son intérieur, où M. le duc du Maine avait sans doute bien joué le rôle d’amoureux.

768. (1767) Salon de 1767 « Sculpture — Pajou » pp. 325-330

Entre ces deux pilastres, dans un enfoncement formant l’intérieur d’une chambre, l’ annonciation.

769. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre XI. Troisième partie. Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère des idées politiques. » pp. 350-362

Si nous descendions aux détails, nous aurions à examiner ici les sources de la mendicité, les causes qui l’ont produite et consacrée en quelque sorte chez les peuples modernes, les raisons qui doivent la faire disparaître à présent : nous aurions encore à jeter un coup d’œil sur le régime de hôpitaux, sur la nécessité ou nous sommes peut-être, dans l’état actuel de la civilisation, d’introduire de grands changements dans l’administration générale des secours aux indigents ; nous aurions enfin à pénétrer dans l’intérieur de nos manufactures pour voir comment il serait possible de conserver la santé de nos ouvriers, de relever en eux l’intelligence et le sentiment moral affaiblis par un travail trop mécanique, de les rendre à l’intensité des affections de famille, de leur donner la prévoyance de l’avenir : mais ce ne serait point véritablement de mon sujet, puisque je dois m’abstenir d’appliquer mes observations à aucun objet en particulier.

770. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Gères. Le Roitelet, verselets. »

De secrets avertissements, L’intérieure inquiétude, Quelques symptômes alarmants, Changent bientôt en certitude Les sinistres pressentiments.

771. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Louis Bouilhet. Festons et Astragales. »

Il a de la grâce souvent, comme dans son Enfant au bord de la mer ou son Intérieur ; il a de la vérité, comme dans L’Abandon, quoiqu’elle soit délayée, hélas !

772. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Deltuf » pp. 203-214

Que si, au contraire, ce titre d’Aventures parisiennes donné à un livre d’observation d’intérieur, de coin du feu, de sentiment raffiné, est une ironie détournée contre cette société devenue si uniformément plate à force de civilisation, et dans laquelle chacun de nous n’a plus d’autres aventures à courir que dans les deux pouces cachés de son propre cœur, elle est vraiment trop détournée, cette ironie ; c’est là une intention qui ne sera pas aperçue, et l’auteur aura manqué son trait, comme le joueur au billard manque la bille pour avoir voulu la prendre trop fin.

773. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Conclusion »

Si au contraire le triomphe de l’égalitarisme s’explique, non plus seulement par l’invention d’une théorie, mais par la constitution même des sociétés qu’il soumet, alors les conditions du combat sont changées : morceler les États, raser les villes, barrer les routes, parquer les hommes en groupes fermés entre lesquels on empêcherait les imitations et à l’intérieur desquels on empêcherait les distinctions individuelles, voilà toutes les révolutions sociales qu’il vous faudrait préalablement achever pour arrêter l’élan démocratique de notre civilisation.

774. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XIX. »

« Liés à toi, à ta vie intérieure, nous éclatons au dehors par la prière et le chant.

775. (1864) Le roman contemporain

Il n’y a que Dieu qui puisse remplir le vide intérieur que laisse dans notre âme l’inactivité, et le vide extérieur de la solitude. […] L’auteur a pris sans doute plaisir à peindre l’intérieur du petit journal, qui lui rappelle peut-être des souvenirs de jeunesse. […] C’est une étude de l’intérieur d’une petite ville située dans le Soissonnais. […] En effet, la révolte intérieure contre la souffrance, la conviction qu’elle est injuste, imméritée, rendent son aiguillon plus aigu et la blessure qu’il fait plus intolérable. […] Ces secrets de for intérieur ne sont connus que de la tombe où les âmes entrent nues.

776. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion statique »

Il n’en est pas moins vrai qu’il y a un corps détachable de celui qu’on touche, corps sans intérieur, sans pesanteur, qui s’est transporté instantanément au point où il est. […] Il se glissait à l’intérieur, derrière mon dos ; et mie fois dans la chambre, il m’avait pour lui tout seul, pouvant ainsi se manifester de façon convaincante. […] De cette religion tout intérieure nous traiterons dans le prochain chapitre. […] Un instinct, que des habitudes toutes différentes recouvrent dès qu’il a cessé d’être utile, portera donc la tribu à se scinder en clans à l’intérieur desquels le mariage sera interdit. […] On répondra que toutes nos facultés sont mystérieuses, en ce sens que nous ne connaissons le mécanisme intérieur d’aucune d’elles.

777. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Les bords se repliaient à l’intérieur, en manière de corolle, comme ceux d’une large campanule. […] Un air de Mozart éveillait en lui l’essaim des songes et des images intérieures. […] Que sont les splendeurs célestes, auprès des myriades d’étoiles qui illuminent le rêve intérieur ? […] Alors seulement nous pourrons déterminer, par des approximations poussées aussi loin que possible, comment les choses extérieures modifient l’homme intérieur. […] Et l’âme, en contemplant selon la vérité ces mouvements intérieurs, éprouve autant de joie qu’au spectacle des phénomènes qui charment les sens.

778. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

« D’abord, nous avons des phénomènes analogues dans la moiteur qui couvre un métal froid ou une pierre lorsque nous soufflons dessus, qui apparaît en été sur les parois d’un verre d’eau fraîche qui sort du puits, qui se montre à l’intérieur des vitres quand la grêle ou une pluie soudaine refroidit l’air extérieur, qui coule sur nos murs lorsque après un long froid arrive un dégel tiède et humide. […] Mais cette troisième cause se ramène à la première, qui est le pouvoir de résister au passage de la chaleur, car les substances de texture lâche sont précisément celles qui fournissent les meilleurs vêtements, en empêchant la chaleur de passer de la peau à l’air, ce qu’elles font en maintenant leur surface intérieure très chaude pendant que leur surface extérieure est très froide. […] Prises en soi, les deux données ne sont que des incidents qui coïncident ; il n’y a point en elles de nécessité intérieure qui les assemble en un couple forcé. […] Nulle nécessité intérieure ne produirait leur liaison ni leur existence. […] Si, comme dit Mill, elles ne faisaient que s’accompagner, nous serions obligés de conclure, comme Mill, que peut-être elles ne s’accompagnent pas toujours ; nous ne verrions point la nécessité intérieure de leur jonction ; nous ne la poserions qu’en fait ; nous dirions que, les deux données étant de leur nature isolées, il peut se rencontrer des circonstances qui les séparent ; nous n’affirmerions la vérité des axiomes et de leurs suites qu’au regard de notre monde et de notre esprit.

779. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Le visage est pâle, déformé, usé — dirait-on — par de longues années de lutte intérieure. […] Dans les lettres qu’il écrivait, nul moyen de deviner s’il mettait quelque chose, de ses sentiments intérieurs. […] Les mers intérieures de l’Amérique du Nord, dont les eaux ont le goût frais. […] Car la vie intérieure de Walt Whitman est une lente et graduelle reprise de la nature sur la civilisation. […] Mais le naturalisme lui fait sa part, comme au reste ; il se borne seulement à indiquer les effets des mouvements intérieurs, au lieu d’en analyser le détail à perte de vue.

780. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

Dès qu’il a déposé sur le papier ce qu’il a vu dans l’intérieur de sa conception, cela suffit, il s’arrête, son œuvre est accomplie, il ne se croit pas capable d’embellir la nature ; il se regarde comme un traducteur qui ajouterait à son texte et qui mentirait en l’exagérant. […] Enfin, je la crois si nécessaire au bonheur dans le monde même, qu’il me paraît impossible d’y goûter un plaisir durable de quelque sentiment que ce soit, ou de régler sa conduite sur quelque principe stable, si l’on ne se fait une solitude intérieure, d’où notre opinion sorte bien rarement, et où celle d’autrui n’entre jamais. […] Domingue et moi nous le portâmes dans l’intérieur de la forêt, où nous le fîmes revenir avec bien de la peine. […] A-t-il besoin d’employer quelque signe extérieur pour exécuter sa volonté, lui qui agit sans cesse dans tous ses ouvrages par un travail intérieur ?

781. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

Je ne sais de comparable aux changements qu’opéra l’avénement de Louis XIV, que ce que nos pères ont vu du général Bonaparte, quand il nous rendait, dans la même année, la victoire sur les champs de bataille, à l’intérieur l’ordre, la religion, un bon état de finances, une administration, une société civile. […] Il réalisait, dans les institutions du gouvernement intérieur, l’ordre qui régnait dans les pensées du roi, en même temps qu’il préparait les moyens de faire la guerre sans accabler les peuples. […] Ce fut Bossuet qui lui parla le premier, « avec le respect d’un sujet, mais aussi avec la liberté d’un prédicateur. » A ce jeune prince si porté à la tendresse, si bien fait, si magnifique, « dont les belles qualités, dit Mme de Motteville, causaient toutes les inquiétudes des dames », il peignit la violence des désirs de la jeunesse, « ces cœurs enivrés du vin de leurs passions et de leurs délices criminelles, l’habitude qui succède à la première ardeur des passions, et qui est quelquefois plus tyrannique247. » Il lui découvrit les pièges de l’impudicité, « laquelle va tête levée, et semble digne des héros, si peu qu’elle s’étudie à se couvrir de belles couleurs de fidélité, de discrétion, de douceur, de persévérance 248. » Il lui représenta le « plaisir sublime que goûtent ceux qui sont nés pour commander, quand ils conservent à la raison cet air de commandement avec lequel elle est née ; cette majesté intérieure qui modère les passions ; qui tient les sens dans le devoir, qui calme par son aspect tous les mouvements séditieux, qui rend l’homme maître en lui-même249. » A ce roi si absolu, si maître de tout, si obéi, il montra le cœur d’un Nabuchodonosor ou d’un Balthasar, dans l’histoire sainte, d’un Néron, d’un Domitien dans les histoires profanes, « pour qu’il vît avec horreur et tremblement ce que fait dans les grandes places l’oubli de Dieu, et cette terrible pensée de n’avoir rien sur sa tête250. » Le premier, devant ce roi si plein de vie, et qui paraissait si loin de la mort, devant cette cour si attachée aux choses du monde, il ne craignit pas de soulever la pierre d’un tombeau, et d’y faire voir « cette chair qui va changer de nature, ce corps qui va prendre un autre nom, ce je ne sais quoi qui n’a plus de nom dans aucune langue, tant il est vrai que tout meurt en lui, jusqu’à ces termes funèbres par lesquels on exprimait ses malheureux restes251. » A ce roi entouré de tant de faveur, d’une si grande complaisance des jugements humains, il révéla les secrets de la justice « de ce Dieu qui tient un journal de notre vie, et qui nous en demandera compte dans ces grandes assises, dans cette solennelle convocation, dans cette assemblée générale du genre humain252. » Ce qui sied le mieux à l’âge où l’imagination et la passion dominent, ce sont de fortes peintures. […] Aussi ne lit-on pas ces sermons, que Louis XIV a entendus, pour y trouver des détails de mœurs sur une époque, mais pour y voir une image de notre intérieur éclairé à jamais, dans ses profondeurs les plus reculées, par la lumière de la morale chrétienne.

782. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

Elle peut représenter tout à la fois l’intérieur et l’extérieur d’un temple, d’un palais, d’un camp, d’une ville. […] Les unes sont éternelles, intérieures, et restent ; les autres variables, extérieures, et ne servent qu’une fois. […] C’est une grande et belle chose que de voir se déployer avec cette largeur un drame où l’art développe puissamment la nature ; un drame où l’action marche à la conclusion d’une allure ferme et facile, sans diffusion et sans étranglement ; un drame enfin où le poëte remplisse pleinement le but multiple de l’art, qui est d’ouvrir au spectateur un double horizon, d’illuminer à la fois l’intérieur et l’extérieur des hommes ; l’extérieur, par leurs discours et leurs actions ; l’intérieur, par les a parte et les monologues ; de croiser, en un mot, dans le même tableau, le drame de la vie et le drame de la conscience.

783. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « en tête de quelque bulletin littéraire .  » pp. 525-535

Il s’est passé, chez M. de Lamartine, depuis peu d’années, une révolution intérieure, semblable et analogue à celle qui a du lieu dans M. de La Mennais : c’en est l’exact pendant, si l’on tient compte de la différence de leurs talents et de leurs natures.

784. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Virgile et Constantin le Grand par M. J.-P. Rossignol. »

Rossignol, les caractères généraux de la poésie pastorale ; on a déterminé avec assez de précision quels devaient être le lieu de la scène, le rôle des acteurs, le ton du discours, les qualités du style ; mais l’organisation intérieure, le mécanisme secret, la structure savante et ingénieuse de cette poésie, ont été jusqu’ici peu étudiés.

785. (1875) Premiers lundis. Tome III « L’Ouvrier littéraire : Extrait des Papiers et Correspondance de la famille impériale »

Le ministère de l’Intérieur est occupé de trop de choses administratives, politiques.

786. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre IV. De la philosophie et de l’éloquence des Grecs » pp. 120-134

L’enthousiasme pour les facultés de l’esprit l’emporte en eux sur tout autre genre d’estime : ils excitent l’homme à se faire admirer ; mais ils ne portent point un regard inquiet ou pénétrant dans les peines intérieures de l’âme.

787. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la religion. »

Quand le vrai chrétien s’est acquitté de ses devoirs, son bonheur ne le regarde plus ; il ne s’informe pas quel sort lui est échu, il ne sait pas ce qu’il faut désirer ou craindre, il n’est certain que de ses devoirs ; les meilleures qualités de l’âme, la générosité, la sensibilité, loin de faire cesser tous les combats intérieurs, peuvent, dans la lutte des passions, opposer l’une à l’autre, des affections d’une égale force ; mais la religion donne pour guide un code, où, dans toutes les circonstances, ce qu’on doit faire est résolu par une loi.

788. (1894) Propos de littérature « Chapitre Ier » pp. 11-22

» Cependant, à cette objection rigide qui surgit devant tous les chercheurs en quête de leur foi, il faut répondre, car les mélodies intérieures ont de trop pures inflexions !

789. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’Âge héroïque du Symbolisme » pp. 5-17

Peu de gaz pour éclairer les marches escarpées et la rampe trop large pour un corps * quelque peu abusif », mais le propriétaire « bon garçon »« plantait une bougie sur un rebord intérieur de fenêtre, les soirs de réception ».

790. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre III. L’analyse externe d’une œuvre littéraire » pp. 48-55

Comment rend-il l’impression que fait sur lui un paysage, un monument, un intérieur, un costume, un visage, un tableau, que sais-je encore ?

791. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Japonisme » pp. 261-283

Ils enfoncent à coups de marteau la porte intérieure.

792. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1824 »

Ils s’obstinent à ne vouloir point parler la même langue ; ils n’ont d’autre langage que le mot d’ordre à l’intérieur et le cri de guerre à l’extérieur : ce n’est pas le moyen de s’entendre.

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