Je l’ai vue cent fois chez le vieux poëte. […] Pénélope vue de profil regarde au loin et montre du doigt quelque chose. […] Terrasse froide et dure, d’un verd tranchant qui blesse la vue. […] Quelle différence entre celui qui l’a vue chez elle, et celui qui ne l’a vue qu’en visite chez son voisin. […] L’éducation fut sans vue, sans aiguillon, sans base solide, sans but général et public.
C’est à cette destination particulière, et peut-être aussi au tour d’esprit de l’auteur, qu’il faut attribuer certaines formes, certaines divisions plus méthodiques et, pour tout dire, plus scolastiques qu’on ne voudrait en telle matière ; mais il y a une véritable étude, une étude approfondie du sujet, beaucoup de vues justes, fines, pénétrantes, des remarques ingénieuses et solides. […] Le nom d’écrivains proprement dits continue d’appartenir à ceux qui de propos délibéré choisissent un sujet, s’y appliquent avec art, savent exprimer même ce qu’ils n’ont pas vu, ce qu’ils conçoivent seulement ou ce qu’ils étudient, se mettent à la place des autres et en revêtent le rôle, font de leur plume et de leur talent ce qu’ils veulent : heureux s’ils n’en veulent faire que ce qui est le mieux et s’ils ne perdent pas de vue ce beau mot digne des temps de Pope ou d’Horace : « Le chef-d’œuvre de la nature est de bien écrire. » Les autres, les hommes d’action, qui traitent de leurs affaires, ne sont écrivains que d’occasion et par nécessité ; ils écrivent comme ils peuvent et comme cela leur vient ; ils ont leurs bonnes fortunes. […] La différence est à la vue comme dans les noms. » Laissons les environs de Paris, et ne prenons que les autres lieux de la « douce France », comme disait Henri.
Celui-ci eut des torts, cela nous suffit ; il en eut en amour et en politique ; il manqua cette partie importante de sa vie, et, quand même la Fronde aurait obtenu quelque succès et aurait amené quelque résultat, il n’aurait encore donné de lui que l’idée d’un personnage brillant, mais équivoque et secondaire, dont la pensée, les vues et la capacité ne se seraient point dégagées aux yeux de tous. […] Il se plaît à ce jeu, il se met à rédiger chaque pensée avec soin, et tout aussitôt avec talent : une sorte de grandeur de vue se mêle insensiblement sous sa plume à ce qui ne semblait d’abord que l’amusement de quelques après-dînées. […] Sans doute il est vrai que l’homme agit toujours en vue ou en vertu d’un principe qui est en lui et qui le pousse à chercher sa satisfaction, son intérêt et son bonheur.
La politique de Venise convenait à Rohan, général plein de réflexions et de vues, et qui, en fait de république, se devait mieux accommoder d’une aristocratie que de conseils bourgeois ou populaires. […] Rohan n’hésita point : il fit arrêter Du Clausel ; on instruisit son procès, et il fut pendu à un arbre, en vue des troupes. […] Pour plus de sûreté, et se méfiant même d’une troupe de cavaliers qui avait été vue à Versoix en ce temps-là, il passa le lac et traversa la Suisse par les terres de Berne ; il se rendit à l’armée du duc de Weimar, qui assiégeait Rhinfeld.
Ses vrais devanciers et parents, les émules directs qu’il avait en vue, et dont il avait à la fois à se distinguer, il nous les indique lui-même : c’est Théophraste, c’est La Rochefoucauld et Pascal, pour ne point parler de la divine sagesse de Salomon. […] Si cependant, dans ce célèbre morceau du pâtre enrichi qui achète pour l’embellir la maison de ses maîtres, La Bruyère a songé à Gourville embellissant la capitainerie de Saint-Maur, il a un peu surchargé la description en vue du dramatique. […] En général, il n’était pas d’avis qu’un talent en exclut nécessairement un autre ; il se raille des vues courtes et des esprits bornés ou envieux qui arguent d’une de vos qualités pour vous refuser une qualité voisine ou même opposée.
Joseph de Maistre a certainement gagné aux deux ou trois recueils de lettres qu’on a publiées de lui, lettres hardies, mordantes, familières et même affectueuses, très libres toujours de vues et de ton, inconséquentes parfois à l’idée qu’on se faisait du théoricien, et qui, en définitive, si elles n’ont pas grandi le personnage, ont accentué de plus en plus l’individu. […] c’en est fait de cette société vivifiante, de cette lanterne magique du monde, que j’ai vue s’éclairer là pour la première fois, et où j’ai tant appris de choses ! […] Elle sentait en soi des puissances et des facultés supérieures à ce qu’elle avait réalisé ; mais avec ces qualités élevées, tout à fait viriles par le choix des sujets et par l’étendue des vues, elle était femme, je le répète, et comme telle elle avait besoin de plaire, de réussir, de se sentir entourée de bienveillance ; même quand elle s’élevait le plus et qu’elle planait, elle était de la nature des colombes : une flèche pouvait l’atteindre jusque dans la nue et la blesser.