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1393. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

Matamore révèle à Clindor qu’autrefois il était terrible et beau en même temps ; dans certains moments cela le gênait ; alors il a demandé au roi des dieux d’être seulement l’un ou l’autre à volonté ; Jupiter s’est empressé de lui complaire. […] » Il ne prétend pas user du droit que lui donne la promesse faite par Chimène, ni se prévaloir de la volonté favorable du Roi ; non, en présence de ce Roi, il renonce à une conquête si chère ! […] Ainsi, lorsque la volonté inflexible de Chimène n’a réussi à rien pour venger son père, on est doublement heureux parce qu’on entrevoit qu’enfin tant d’amour sera récompensé, et cela sans qu’il en ait rien coûté au devoir, ni de la part de Chimène, ni de celle de Rodrigue. […] Don Garcia Autre chose est d’y atteindre, autre chose de l’avoir mérité, Qu’ai-je gagnéà toucher la beauté qui m’enflamme, si je n’ai obligation de cette faveur qu’au hasard, et non à votre volonté ? […] Laissez-moi donc regretter qu’en ce bonheur qui m’est échu, j’aie rencontré la main sans le cœur, la faveur sans la volonté… Etc.

1394. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

« La cause réelle est la série des conditions, l’ensemble des antécédents sans lesquels l’effet ne serait pas arrivé… Il n’y a pas de fondement scientifique à la distinction que l’on fait entre la cause d’un phénomène et ses conditions… De même, la distinction qu’on établit entre le patient et l’agent est purement verbale… La cause est la somme des conditions positives et négatives prises ensemble, la totalité des circonstances et contingences de toute espèce, lesquelles, une fois données, sont invariablement suivies du conséquent. » Les philosophes se méprennent donc quand ils croient découvrir dans notre volonté un type différent de la cause, et quand ils déclarent que nous y voyons la force efficiente en acte et en exercice. […] « Notre volonté, dit encore Mill, produit nos actions corporelles, comme le froid produit la glace, ou comme une étincelle produit une explosion de poudre à canon. » Il y a là un antécédent comme ailleurs, la résolution, qui est un caractère momentané de notre esprit, et un conséquent comme ailleurs, la contraction musculaire, qui est un caractère momentané d’un ou plusieurs de nos organes ; l’expérience les lie et nous fait prévoir que la contraction suivra la résolution, comme elle nous fait prévoir que l’explosion de la poudre suivra le contact de l’étincelle. — Plus précisément encore, et quels que soient les deux caractères, simultanés ou successifs, momentanés ou permanents, l’attache par laquelle le premier entraîne, provoque ou suppose le second comme contemporain, conséquent ou antécédent, n’est qu’une particularité du premier considéré seul et à part.

1395. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff (suite) » pp. 317-378

Elle eut peur d’écrire, mais son messager, un paysan petit et sec, qui avait le talent de faire ses soixante verstes à pied par jour, fut chargé de dire à Ivan Pétrovitch de ne pas trop s’affliger, qu’elle espérait, avec l’aide de Dieu, convertir la colère de son mari en clémence ; qu’elle aurait préféré une autre belle-fille, mais que telle n’avait sûrement pas été la volonté divine, et qu’elle envoyait à Malanïa Serguéiewna sa bénédiction maternelle. […] Heureux déjà celui qui n’a point perdu la croyance dans le bien, la persévérance dans la volonté, l’amour du travail !

1396. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1889 » pp. 3-111

Je n’ai pas besoin de te dire que je ne voudrais pas que ma proposition exerçât la moindre pression sur ta volonté. […] Il ajoute qu’il est menteur, menteur, qu’il a une très moyenne intelligence, mais une volonté enragée, avec le talent, un talent tout particulier de parler à la corde sensible des gens auxquels il s’adresse, et qu’il a très souvent la bonne fortune des mots qui enlèvent, enfin qu’il est un allumeur de foules.

1397. (1895) Les confessions littéraires : le vers libre et les poètes. Figaro pp. 101-162

Et voici des vers que, par jeu, le poète voulut bien écrire à notre intention pour cette enquête : Toute l’âme résumée Quand lente nous l’expirons Dans plusieurs ronds de fumée Abolis en autres ronds Atteste quelque cigare Brûlant savamment pour peu Que la cendre se sépare De son clair baiser de feu Ainsi le chœur des romances À ta lèvre vole-t-il Exclus-en si tu commences Le réel parce que vil Le sens trop précis rature Ta vague littérature Qu’on ne s’étonne pas si nulle ponctuation ne précise ces vers — banvillesquement rimés — : ce fut par expresse volonté du poète qui exprime ainsi le « flou du flou ». […] Moréas, véritable pèlerin passionné, parti des ̃classiques, revient aux classiques, mais avec une volonté de classicisme épuré, agrandi, progressiste ; de son voyage vers les sables lumineux du symbole — où le Mirage remplace trop souvent, hélas !

1398. (1927) Des romantiques à nous

Il y a la volonté, le sentiment, ’les dispositions morales et affectives. […] Et la « création » ne commence que par l’acte propre de l’intelligence et de la volonté pour s’emparer de ces mouvements jaillissants, les observer, les étudier comme s’ils étaient d’un autre, calculer froidement les moyens de les rendre sans les refroidir, les amener, sans les diminuer, à cette expression fixée, générale, objective, humaine qui en fera désormais le bien de tous les esprits et dans la production de laquelle le tourment de l’artiste, en quelque sorte délivré de lui-même, s’apaisera. […] Avec une voix d’autant plus apte à tous les emplois qu’elle n’existait point, je chantais à volonté, les basses, les ténors et les soprani.

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