FRAGUIER, [Claude-François] Abbé, de l’Académie Françoise & de celle des Inscriptions, né à Paris en 1666, mort dans la même ville en 1728.
LABAT, [Jean-Baptiste] Dominicain, né à Paris, mort dans la même ville en 1738, âgé de 75 ans.
PASQUIER, [Etienne] d’abord Avocat, puis Conseiller au Parlement de Paris, ensuite Avocat-Général de la Chambre des Comptes, né à Paris en 1528, mort dans la même ville en 1615.
, Goethe docteur en droit, beau, noble, aimable, après de fortes et libres études commencées à Leipzig, continuées à Strasbourg, et ayant su résister dans cette dernière ville à l’attraction vers la France, est rappelé à Francfort sa cité natale, et de là il est envoyé par son père à Wetzlar en Hesse pour se perfectionner dans le droit et y étudier la procédure du tribunal de l’Empire ; mais en réalité, et sans négliger absolument cette application secondaire, il est surtout occupé de lire Homère, Shakespeare, ou de se porter vers tout autre sujet « selon que son imagination et son cœur le lui inspireront ». […] Après les premiers ennuis de l’installation et un premier coup d’œil peu favorable donné à la ville, il cherche à se distraire par des promenades solitaires dans la charmante vallée de la Lahn ; il emporte avec lui son Homère, L’Odyssée qu’il lisait beaucoup alors, tout occupé de revenir à la nature, et il croit voir des tableaux approchants et des idylles dans ce qu’il observe à chaque pas. […] Je me suis arrêté sur le pont55 : la ville sombre des deux côtés, l’horizon brillant silencieusement, le reflet dans le fleuve, ont produit sur mon âme une impression délicieuse que j’ai retenue avec amour. […] L’ordre, la précision et la promptitude sont des qualités dont je tâche tous les jours d’acquérir un peu. » Au milieu de cela, des voyages en Suisse, en Italie, l’étude dans toutes les directions, la comparaison étendue dans toutes les branches des beaux-arts et des littératures ; bientôt les sciences naturelles qui vont s’y joindre ; une vie noble, assise, bien distribuée et ordonnée, occupée et non affairée, à la fois pratique et à demi contemplative (« Je demeure hors de la ville, dans une très belle vallée où le printemps crée dans ce moment son chef-d’œuvre ») ; tout ce qui, enfin, devait faire de cette riche organisation de Goethe le modèle et le type vivant de la critique intelligente et universelle.
Il s’adresse volontiers, dans ses confidences, à Olivier de Magny, agréable poète de sa volée, en exil, comme lui, dans la Ville éternelle ; il le prend à témoin de ses peines et de ses tracas ; il les soulage, dit-il, en chantant jour et nuit : Ainsi chante l’ouvrier109 en faisant son ouvrage, Ainsi le laboureur faisant son labourage, Ainsi le pèlerin regrettant sa maison, Ainsi l’aventurier en songeant à sa dame, Ainsi le marinier en tirant à la rame, Ainsi le prisonnier maudissant sa prison. […] Ne m’en parle donc plus, si tu ne veux me fâcher, mais bien plutôt pendant que d’une main habile Tu me laves la barbe et me tonds les cheveux, Pour me désennuyer, conte-moi, si tu veux, Des nouvelles du Pape et du bruit de la ville. […] Il était aux premières loges pour décrire un conclave ; il ne s’en fait faute, et l’on a en quatorze vers la réalité mouvante du spectacle, la brigue à huis clos, les bruits du dehors, les fausses nouvelles, les paris engagés pour et contre : Il fait bon voir, Pascal, un conclave serré, Et l’une chambre à l’autre également voisine D’antichambre servir, de salle et de cuisine, En un petit recoin de dix pieds en carré ; Il fait bon voir autour le palais emmuré, Et briguer là dedans cette troupe divine, L’un par ambition, l’autre par bonne mine, Et par dépit de l’un être l’autre adoré ; Il fait bon voir dehors toute la ville en armes, Crier : Le Pape est fait ! […] La biographie du poète commence par une sorte de mémoire sur la commune et municipalité de Cahors, sa ville natale.
La détresse du peuple, les travailleurs sans pain, le dernier des Condés disparu dans les ténèbres, Bruxelles chassant les Nassau comme Paris les Bourbons, la Belgique s’offrant à un prince français et donnée à un prince anglais, la haine russe de Nicolas, derrière nous deux démons du midi, Ferdinand en Espagne, Miguel en Portugal, la terre tremblant en Italie, Metternich étendant la main sur Bologne, la France brusquant l’Autriche à Ancône, au nord on ne sait quel sinistre bruit de marteau reclouant la Pologne dans son cercueil, dans toute l’Europe des regards irrités guettant la France ; l’Angleterre, alliée suspecte, prête à pousser ce qui pencherait et à se jeter sur ce qui tomberait ; la pairie s’abritant derrière Beccaria pour refuser quatre têtes à la loi, les fleurs de lis raturées sur la voiture du roi, la croix arrachée de Notre-Dame, la Fayette amoindri, Laffitte ruiné, Benjamin Constant mort dans l’indigence, Casimir Périer mort dans l’épuisement du pouvoir ; la maladie politique et la maladie sociale se déclarant à la fois dans les deux capitales du royaume, l’une la ville de la pensée, l’autre la ville du travail ; à Paris la guerre civile, à Lyon la guerre servile ; dans les deux cités la même lueur de fournaise ; une pourpre de cratère au front du peuple ; le midi fanatisé, l’ouest troublé, la duchesse de Berry dans la Vendée, les complots, les conspirations, les soulèvements, le choléra, ajoutaient à la sombre rumeur des idées le sombre tumulte des événements. » VIII Tout cela mène à ce que l’auteur nomme l’Épopée de la rue Saint-Denis, c’est-à-dire aux barricades. […] Victor Hugo, au contraire, n’a eu besoin que de son âme, d’ouvrir les yeux autour de lui, au milieu de nous, de décrire une maison déserte et un jardinet inculte dans un de nos faubourgs les plus reculés, et d’y placer deux êtres qui se sont entrevus, deux innocents, deux sauvages de la grande ville, Cosette et Marius ; et, avec ces simples personnages, il a fait, en racontant leurs entrevues et leurs entretiens, le plus ravissant tableau d’amour qu’il ait jamais écrit. […] « Ce jardin n’était plus un jardin, c’était une broussaille colossale ; c’est-à-dire quelque chose qui est impénétrable comme une forêt, peuplé comme une ville, frissonnant comme un nid, sombre comme une cathédrale, odorant comme un bouquet, solitaire comme une tombe, vivant comme une foule.