— Ses paroles sur la guerre ; — sur le don du commandement ; — sur le travail ; — sur la règle des vingt-quatre heures dans la tragédie […] J’aime la tragédie63, mais toutes les tragédies du monde seraient là d’un côté, et des états de situation de l’autre, je ne regarderais pas une tragédie, et je ne laisserais pas une ligne de mes états de situation sans l’avoir lue avec attention. […] Et comme il était question un peu de tout avec Napoléon, et que sa pensée se portait en mille sens, je trouve encore, dans une de ces conversations, du 6 mars 1809, ce brusque jugement sur les unités et la règle des vingt-quatre heures, à propos de la tragédie semi-romantique de Walstein qu’avait publiée Benjamin Constant. Les classiques peuvent enregistrer cet imposant témoignage de plus à l’appui de leur système : Benjamin Constant a fait une tragédie et une poétique, disait Napoléon. […] Ce n’est pas arbitrairement que la tragédie borne l’action à vingt-quatre heures : c’est qu’elle prend les passions à leur maximum, à leur plus haut degré d’intensité, à ce point où il ne leur est possible ni de souffrir de distraction ni de supporter une longue durée.
À la veille de son début au théâtre, quand on allait représenter sa tragédie de Warwick (novembre 1763), il avait déjà, grâce à ses bons amis les auteurs, une réputation affreuse ; on racontait, en l’exagérant, l’histoire des couplets satiriques composés au sortir du collège : « Cette petite horreur, nous dit Collé dans son Journal, m’a déjà été confirmée par deux ou trois personnes, et je n’ai encore vu qui que ce soit qui ait contredit ou nié le fait. » Lorsque cette tragédie de Warwick, qui, malgré tout, avait fort bien réussi, fut reprise en janvier 1765, les ennemis s’arrangèrent si bien, que le cinquième acte fut hué : « Je n’ai jamais vu de ma vie, nous dit encore Collé, arriver un pareil échec à une reprise ; le contraire arrive plus ordinairement, les applaudissements redoublent au lieu de diminuer. Il faut que M. de La Harpe ait un secret particulier pour se faire plus d’ennemis qu’un autre. » En tête de sa seconde tragédie, Timoléon, lorsqu’il l’imprima, La Harpe se crut obligé de mettre une justification expresse sur les couplets de collège qui lui étaient imputés à crime, et il ajouta quelques réflexions sensées qui nous peignent très bien le moment où il parut : La mode dominante, disait-il, est aujourd’hui d’avoir de l’esprit… Tandis qu’un petit nombre d’écrivains illustres honore et éclaire la nation, un bien plus grand nombre d’écrivains obscurs, possédés de la manie d’être littérateurs, sans titres et sans études, ont fait une espèce de ligue pour se venger du public qui les oublie, et des véritables gens de lettres qui ne les connaissent pas. […] Il est fâcheux seulement que cette juste sévérité contre la petite littérature du temps s’affiche en tête d’une tragédie sifflée, et assez digne de l’être, et non en tête d’une excellente satire à la Despréaux. […] Cette tragédie de Timoléon, dès le premier jour (1er août 1764), « fut écoutée, jugée et condamnée par le public avec beaucoup de tranquillité », sauf deux ou trois endroits applaudis. […] Une mauvaise tragédie et un mariage, c’est faire deux sottises coup sur coup. » En commettant cette imprudence, La Harpe témoignait pourtant de sa probité et de sa générosité.
La tragédie dite classique fait des larves ; le drame fait des types. […] On compare habituellement Eschyle et Shakespeare par Oreste et par Hamlet, ces deux tragédies étant le même drame. […] C’est la tragédie géante. […] Hamlet est le chef-d’œuvre de la tragédie rêve. […] Shakespeare, portant Cordelia dans sa pensée, a créé cette tragédie comme un dieu qui, ayant une aurore à placer, ferait tout exprès un monde pour l’y mettre.
. — Antigone, tragédie en cinq actes, avec Vacquerie, d’après Sophocle (1844). — Hamlet, tragédie en cinq actes en vers, avec Dumas et Maquet, d’après Shakespeare (1847). — Benvenuto Cellini, drame en cinq actes (1852). — Paris, drame en cinq actes (1855). — Fanfan la Tulipe, drame en cinq actes (1858).
Celui-ci étoit fort jeune lorsqu’il débuta dans les Lettres par la Tragédie de Coligni, & par des Poésies légeres dont il prépare une édition plus digne du Public, que celle qui a paru en trois volumes, & qu’il désavoue. […] elles n’en ont pas moins des rapports de ressemblance très-marqués avec ces Tragédies, dont les représentations firent couler autrefois les larmes de toute la Grece, & qu’on lit encore avec intérêt, en suppléant par l’imagination au défaut de l’illusion théatrale.
Ses Tragédies ne conservent pas même le plus foible reste de cette chaleur impétueuse qu’on remarque dans ses Philippiques. […] On peut encore plus sûrement conclure qu’il n’avoit de talent décidé que pour la satire, en ce que ses Opéra sont même inférieurs à ses Tragédies.