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578. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre II. Principale cause de la misère : l’impôt. »

C’est seulement après l’avoir remboursée qu’on peut toucher au reste, qui est le bénéfice véritable, le produit net. […] En général, dans les pays de grandes fermes, le propriétaire touche 10 livres par arpent si la culture est très bonne, 3 livres si elle est ordinaire. Dans les pays de petites fermes et de métayage, il touche par arpent 15 sous, 8 sous et même 6 sous  C’est que tout le profit net va au Clergé et au Trésor. […] … Nous sommes accablés d’impôts de toute sorte ; nous vous avons donné jusqu’à présent une partie de notre pain, et il va bientôt nous manquer si cela continue… Si vous voyiez les pauvres chaumières que nous habitons, la pauvre nourriture que nous prenons, vous en seriez touché ; cela vous dirait mieux que nos paroles que nous n’en pouvons plus et qu’il faut nous diminuer… Ce qui nous fait bien de la peine, c’est que ceux qui ont le plus de bien payent le moins.

579. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (3e partie) » pp. 161-219

L’empereur Napoléon lui fit écrire de venir à Paris toucher les 30 000 F auxquels son titre de cardinal français lui donnait droit. […] Au lieu donc de me montrer touché et reconnaissant de sa bonté et de cet aveu si extraordinaire et tellement significatif sur les lèvres d’un pareil homme, aveu fait en s’accusant d’avoir eu le tort de m’écarter du ministère, je me vis dans la dure nécessité de riposter à une assertion des plus obligeantes de sa part par une phrase des plus fortes et des plus énergiques. […] Quand je le connus, il touchait à la vieillesse ; mais cette vieillesse avait toute la grâce même de la jeunesse, la douceur, la sérénité, l’accueil souriant des belles années. […] Consalvi, jeune encore, avait le délire de la musique, cette langue sans parole qui vient du ciel et qui exprime sans mots ce que l’âme rêve et ce qui est le plus inexprimable aux langues humaines ; la musique, langue des anges, quand elle avait touché son âme, y restait à jamais comme le souvenir d’un autre monde, comme une apparition à l’âme d’un sens supérieur aux sens d’ici-bas.

580. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

Et puis nous avons depuis Rousseau et Chateaubriand des besoins d’imagination et de sensibilité que nos pères ignoraient : moins suspendus que nous aux formes fugitives de l’être, moins frémissants de sympathie avec la vie universelle, méprisant dans la nature la matière, et ne faisant des sens que les instruments de l’utilité pratique et des plaisirs inférieurs, ils ne sentaient pas comme nous la sécheresse des pures conceptions intellectuelles : ils se satisfaisaient de posséder la vérité abstraite sans aspirer à toucher la réalité concrète. […] Par un scrupule de conscience, il rendit un bénéfice qu’il avait obtenu du temps où on le destinait à l’Église, et il restitua même une somme égale à tous les revenus qu’il avait touchés. […] Il dit vrai ; et il embellit tout ce qu’il touche. […] Quant à la pension, Boileau n’en remercia le roi qu’en 1675 par l’Épître VIII, et les registres des Comptes des bâtimens du roi nous apprennent qu’il ne commença à la toucher qu’en 1677.

581. (1914) Enquête : Les prix littéraires (Les Marges)

L’homme est un triste animal qui a tôt fait de corrompre ce qu’il touche. […] Pour mon compte, si je faisais un roman, il ne me déplairait pas de toucher les 5 000 francs du Prix Goncourt ou de La Vie heureuse et je laisserais mes concurrents dire que le prix a été mal donné, ce qui serait peut-être vrai, mais qu’importe ? […] Ils n’en sont pas moins agréables à toucher. […] Ce troisième larron, dont il faut croire, de l’avis même de l’Académie Goncourt, (puisqu’elle ne le choisissait pas tout d’abord) qu’il a moins de talent que les deux autres, est pourtant celui qui touchera le prix et que connaîtra le public.

582. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Victor Hugo »

Du moins, s’il y avait pensé, la main qui aurait touché aux Templiers, n’eût-elle peint que leurs vices, aurait été de proportion avec eux. […] Il y a, dans cet incroyable recueil de quatre mille vers, de la même mesure à l’exception d’un très petit nombre de morceaux, beaucoup de pièces où le virtuose n’a eu besoin que de poser légèrement son archet sur les cordes de son violon pour que les cordes, impalpablement touchées, aient chanté. […] Le talent touche ici au miracle ! […] Il s’est dit un matin, l’aimable homme : « Quel coup de partie, si, sans que nous y touchions, elle pouvait nous débarrasser d’elle ! 

583. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Tiercelin, Louis (1849-1915) »

Le poète est convaincu — et il le prouve du reste — qu’il n’est point de nuance, si subtile soit-elle, qu’on ne puisse rendre et pour ainsi dire faire toucher au moyen des mètres consacrés que le vrai poète sait toujours modeler sur la pensée.

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