Ce soir-là, Mme du Châtelet ne fit point de géométrie ; Voltaire ne ferma point l’œil de la nuit, et il parut presque aussi touché le lendemain matin qu’il l’avait été la veille. […] Je regarde un homme qui a aimé la poésie, et qui n’en est plus touché, comme un malade qui a perdu un de ses sens. […] Voilà le petit côté, Mme de Graffigny nous le fait toucher à nu, mais sans l’exagérer, et en reconnaissant d’ailleurs à Voltaire ses qualités vives, irrésistibles, et, malgré tout, aimables.
Moraliste aux nuances fines, observateur qui s’attendrit en raillant, peintre gai, mais dont la gaîté touche si joliment à la mélancolie, enfin paysagiste vivant par-dessus tout cela, voilà ce que nous a paru Hippolyte Babou en ces nouvelles, d’une valeur inégale entre elles, mais toutes de cette distinction, recherchée et obtenue, qui appelle non pas les tapages, — abyssus abyssum invocat, — mais la distinction du succès. […] » N’est-ce pas là une touche excellente, et, quoique la bonhomie n’y soit pas encore, la bonhomie, cette fleur tardive qui ne croit dans le talent qu’à travers les expériences et quand la vie nous a simplifiés, ne peut-on prévoir que Babou l’aura un jour et qu’il deviendra le peintre complet qu’il n’est que fragmentairement aujourd’hui ? […] Écrivain d’imagination, romancier qui a fait plus que de nous donner des romans, car il nous a donné des nouvelles qui sont des romans concentrés, l’auteur des Païens innocents a parfois interprété et illuminé même l’Histoire avec cette fantaisie qui touche le vrai, souvent, dans les délicieux colins-maillards qu’elle joue ; mais cette devineresse par éclairs n’est point l’imagination du critique, qui, comme une lampe entretenue d’huile, verse sur des œuvres qu’il faut pénétrer une clarté égale et continue.
Ici la question est délicate et touche à l’essence même du drame et de la comédie. […] Je ne puis que toucher ici à quelques points qui se rapportent plus spécialement aux conditions du concours.
Où était-il alors, en cette triste plaine champenoise, harassé et pesant, presque inquiet au toucher d’un des siens, le radieux Consul qui s’était écrié, la main sur son front : « Je sens en moi l’infini ! […] reprit vivement Napoléon, ne me parlez pas d’une religion qui ne me prend qu’à vie, sans m’enseigner d’où je viens et où je vais. » Napoléon touchait là du doigt les deux pôles de toute religion.
Lorsqu’on lui parlait, il se sentait étourdi comme si plusieurs personnes lui parlaient à la fois… Il ne reconnaissait ni le goût ni l’odeur des mets, et ne distinguait pas les objets au toucher, les yeux fermés. […] Néanmoins il m’a fallu une grande contention d’esprit et de volonté pour croire à la réalité de ce que je touchais.
Un moindre génie, qui sait ordonner ses inventions, touche plus sûrement le but, fait une œuvre plus forte et plus belle qu’un grand esprit qui dédaigne ce soin asservissant. […] N’ayant pas rapporté chaque partie au tout et aux autres parties, il ne taillera point chacune de ses pensées à la convenance du sujet, il leur laissera trop de largeur ou trop peu : il n’y touchera pas avec précision le point par lequel elles tiennent à sa matière ; elles garderont du vague et de l’incertitude : elles resteront plus ou moins à l’état de simulacres flottants et sans consistance, de silhouettes lumineuses parfois et vives, mais où l’on ne sentira point le solide soutien des muscles et des os.