Ce que je vais dire n’est pas un conte : je sais telle grande ville de province, siège de Facultés, dont la Bibliothèque possède un manuscrit d’Alfieri ; un jeune homme demande à le consulter : le bibliothécaire, gardien du trésor, s’effraie à cette seule demande : « Je puis bien vous le montrer, répond-il ; prenez le chiffre du format, le nombre de pages, si vous le voulez ; parcourez-le même, mais je ne puis vous en laisser copier une ligne. » Et pendant tout le temps que le manuscrit était en main, le malheureux homme en peine était là tournant, rôdant autour du pauvre curieux qui se sentait lui-même sur les épines de se voir ainsi épié.
Or, cette docilité vaniteuse, cette fausse hardiesse d’esprits médiocres et vides, cette ardeur pour les nouveautés uniquement parce qu’elles sont des nouveautés ou que l’on croit qu’elles en sont, tout cela est très humain ; et c’est pourquoi, si le mot de snobisme est récent dans le sens où nous l’employons, la chose elle-même est de tous les temps.
* * * Et cependant, telle humble femme du peuple donne non seulement le peu de pauvre argent qu’elle gagne à la sueur de son front, mais tout son temps, et toutes ses forces, et tout son cœur, bref, se « sacrifie » à des enfants abandonnés, à des filles sans asile, à des malades, à des vieillards.
Il n’y a nulle exagération à dire, et le disant on n’apprend rien à personne, qu’il est et demeurera une des plus hautes figures littéraires de notre temps, et par un très haut talent et par cette vie entièrement dédiée à la poésie, et à la plus hautaine.
[Le Temps (28 mars 1873).]
Maurice Maeterlinck nous a donné l’œuvre la plus géniale de ce temps, et la plus extraordinaire et la plus naïve aussi, comparable, — et oserai-je le dire ?