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1083. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Additions et appendice. — Treize lettres inédites de Bernardin de Saint-Pierre. (Article Bernardin de Saint-Pierre, p. 420.) » pp. 515-539

Je crois devoir publier ici dans leur suite et dans leur étendue treize lettres inédites de Bernardin de Saint-Pierre adressées en divers temps à M.  […] J’ai profité de ce temps pour me faire habiller simplement. […] J’aurai recours à vous, mon ami, dans des temps d’orage. […] Le temps me gagne, mon cher ami ; c’en est assez pour aujourd’hui. […] Pictet est devenu et que je sais que dans ce temps-là il vous était redevable d’une forte somme, c’est à vous que je remettrai cet argent.

1084. (1887) George Sand

Le temps fera de plus en plus sûrement son œuvre, ici comme ailleurs. […] Il n’était que temps. […] En temps ordinaire, George Sand s’y mettait tout entière, cœur et âme, avec ses doigts de fée. […] « Et quels progrès depuis ce temps-là ! […] Pour moi, c’est du temps perdu, comme de se récrier sur l’ennui de la pluie et des mouches.

1085. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Jules Laforgue » pp. 36-47

Alors, j’ai fait d’la littérature, Mais le démon de la Vérité Sifflotait tout l’temps à mes côtés : « Pauvre ! […] Mais tout l’temps là à s’extasier ! […] C’est le mal du temps. […] Nous ne sommes plus au temps où Malherbe ne se donnait d’autre importance que celle d’un bon joueur de quilles. […] La vanité de tout, le déchirement de l’illusion, l’angoisse des temps, le renoncement, l’inutilité de l’univers, la misère et l’ordure de la terre perdue dans les vertiges d’apothéoses éternelles de soleils7. » Et Laforgue se met à l’œuvre et il accouche d’un chaos fulgurant d’éclairs.

1086. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 29, qu’il est des païs où les ouvrages sont plûtôt apprétiez à leur valeur que dans d’autres » pp. 395-408

Cette inaction, l’occasion continuelle de voir de beaux tableaux, et peut-être aussi la sensibilité des organes plus grande dans ces contrées-là que dans des païs froids et humides, rendent le goût pour la peinture si general à Rome, qu’il est ordinaire d’y voir des tableaux de prix jusques dans des boutiques de barbiers, et ces messieurs en expliquent avec emphase les beautez à tous venans, pour satisfaire à la necessité d’entretenir le monde, que leur profession leur imposoit dès le temps d’Horace. […] On peut dire de nous ce que Pline disoit des romains de son temps, un peu plus occupez que les romains d’aujourd’hui, quand il se plaint de la legereté de l’attention qu’ils donnoient aux statuës superbes, dont plusieurs portiques étoient ornez. […] Les plaisirs qui sont encore plus vifs et plus fréquens ici que par tout ailleurs, se saisissent du tems que nous laissent les occupations que la fortune nous a données, ou que notre inquiétude nous a fait rechercher. […] Concevons-nous aujourd’hui qu’on ait mis durant un temps Monsieur Mignard à côté de Monsieur Le Brun ? […] Il ne sçauroit concevoir tout le prix de l’ouvrage qu’après l’avoir vû plusieurs fois, ni lui donner la préeminence dont il est digne, qu’après avoir comparé durant un temps le plaisir qu’il lui fait, avec le plaisir que lui font ces ouvrages excellens qu’une longue approbation a consacrez.

1087. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XI. Mme Marie-Alexandre Dumas. Les Dauphines littéraires »

Les Dauphines littéraires12 I Un singulier phénomène, digne d’être décrit et classé par les moralistes de ce temps, c’est celui d’une Société, démocratique par envie, qui n’a pas mis du tout, comme elle s’en vante, l’aristocratie par terre, mais qui s’est seulement contentée de la transposer ; C’est convenu et c’est entendu. […] Je me contente de faire saillir au nez de mon temps, pour le lui allonger, la tendance égyptienne de constituer des castes à propos de tout ce qui caractérise ce vieux Lascar ! […] Alexandre Dumas et Théophile Gautier sont, en effet, des rois littéraires de ce temps, sinon de droit divin, du moins de suffrage universel. […] » Ce que ne dit pas une seule fois à sa maîtresse la femme de chambre de cette mondaine coupable qu’on appelle Mme Almaviva. — Dans ce livre d’Au lit de mort, que Mme Sand n’eût certainement pas écrit, je le reconnais, dans ce livre qui affecte l’accent chrétien, mais dans lequel la langue chrétienne est mal parlée ; où l’on sent l’âme troublée, l’idée fausse, l’esprit sans forte direction et sans guide, et cette religiosité corrompue par les sensibilités romanesques et morbides de ce temps, Mme Marie-Alexandre Dumas n’invente-t-elle pas un confesseur sans sacrement, sans fonction, sans autorité ; un confesseur qui n’est pas prêtre, un confesseur-femme, — elle-même !  […] … Quant au talent, il est nul tout le temps qu’elle christianise, mais il y en a cependant dans le récit de l’adultère et du duel ; seulement un talent à la Dumas, sans esprit, tout de récit et de faits, et d’une personne qui a vécu dans une atmosphère où pendant trente ans et plus, on n’a parlé, arrangé, inventé que de ces choses-là.

1088. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pierre Dupont. Poésies et Chansons, — Études littéraires. »

Pierre Dupont était affectueuse et pacifique ; et c’est un oubli presque hardi, cela, quand tout le monde peut lire le Chant du soldat, le Chant des étudiants, le Chant des transportés, la Républicaine et tant d’autres appels aux armes qui ressemblent à l’appel aux armes de tous les temps et de tous les partis ! […] Ce que la politique de leur temps tue de poètes, à toute époque, est incalculable. […] Pierre Dupont, qui a peut-être pensé à se saisir en temps utile de la succession de Béranger expirant, aura pris le bruit des contemporains pour la vraie gloire. […] Faites pour le temps et dévorées par lui, ces chansons ne seront plus, dans quelques années, comme les chansons du vieux Maurepas, que des renseignements historiques, feuilletés par le curieux, en souriant. Quand la Satire Ménippée est froidie, quand Les Provinciales elles-mêmes ont pâli, quand Junius, cette œuvre qui a soulevé l’Angleterre, n’a plus que la fascination impatiente du masque qu’on n’a pu pénétrer, ce ne sont point quelques chansons, de la même inspiration momentanée, léchées et pointillées par un patient, gouttelettes d’huile qui sentent la lampe d’où elles sont lentement tombées, ce n’est pas tout cela que le Temps, ce grand balayeur de toutes choses, n’emportera pas !

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