Les ruines, considérées sous les rapports du paysage, sont plus pittoresques dans un tableau, que le monument frais et entier. […] Les flots de l’Égée, qui viennent expirer sous de croulants portiques, Philomèle qui se plaint, Alcyon qui gémit, Cadmus qui roule ses anneaux autour d’un autel, le cygne qui fait son nid dans le sein de quelque Léda, mille accidents, produits comme par les Grâces, enchantent ces poétiques débris : on dirait qu’un souffle divin anime encore la poussière des temples d’Apollon et des Muses ; et le paysage entier, baigné par la mer, ressemble à un tableau d’Apelles, consacré à Neptune et suspendu à ses rivages210.
Au tableau suivant, l’enguirlandement des motifs complète celui des fleurs et des chœurs, et il n’y a point à développer ici les rapprochements immédiatement appréciables. […] Du motif A, s’élève sur notre tableau, à gauche, un rameau de 14 motifs, dont voici la brève interprétation : M. 1 (p. 8. 38, 59). […] Le côté gauche de notre tableau ne renferme, on le voit, que des motifs de prière, d’élévation, de foi, de grâce, de béatitude. […] Sur la droite du tableau. […] Quelques motifs ne figurent pas dans notre tableau, mais ils se rattachent très sensiblement à ceux qui y figurent.
Même, pour ce tableau le plus antique, le retour du printemps, que l’on prenne, dans Anna Karénine, la sortie du propriétaire Lévine, allant, par la première journée douce de renouveau, inspecter les champs aux molles noires, les enclos où meuglent les bestiaux étourdis et ivres de leur sortie au grand air, puis sa course à cheval par ses bois, dans la brise molle et crue cependant de la fonte des neiges, dont l’eau claire court, à peine salie sur le sol gelé ; les faits familiers mais précisés, les sensations vives fraîchement remémorées d’une observation plus attentive et plus charmée, plus immédiatement vraie que dans la plupart des romans réalistes, s’y pressent comme pris à même avec de grosses et bonnes mains, sans qu’il y ait cependant à vrai dire de passages descriptifs, sans qu’on puisse séparer la série de traits formant tableau de la série des pensées du personnage dont la présence dans cette scène en cause le narré. […] D’autres avant lui ont tracé, d’un coup, des profils et des tableaux également saisissants ; il n’est unique qu’en sa manière de montrer des vies entières, de décrire peu à peu par une lente accumulation de scènes, de récits et d’indications, toute l’évolution vitale, en ses variations, ses écarts et sa particularité permanente d’un être conduit d’un bout à un autre d’une partie ou du tout de sa carrière. […] Que l’on compare les procédés de notations de ses grands tableaux, d’analyse de ses grandes scènes, à ceux de nos romanciers naturalistes héritiers pour le style, des romantiques, on sera frappé du manque de force, de certitude, d’éclat, d’intérêt soutenu, d’épuisement du sujet, de la plupart des pages semées cependant de ramassements subits, qui synthétisent tout un ensemble. […] Et ce tableau véridique si charmant du mariage ordinaire est loin encore des scènes familiales dans La Guerre et la Paix, de la vie de château et de palais des Rostow avec leurs enfants, leurs amis et leurs domestiques. […] Le grand mouvement d’âme qui donne la tranquille assurance de l’héroïsme aux bataillons silencieux des défenseurs de Borodino, les larmes de Koutouzoff en apprenant le premier mouvement de retraite de Napoléon, l’exode instructif de toute la population de Moscou, sont des tableaux grandioses et graves qui remémorent aux âmes même les plus affranchies l’amour du sol natal.
Son talent découvrit du premier coup d’œil un ample champ de tableaux et trouva à s’y épanouir en pleine jouissance et félicité. […] Son talent semble créé tout exprès pour décrire les lieux, les cités, les monuments, les tableaux, les ciels divers et les paysages. […] Quoiqu’il puisse sembler bien naïf, avec un écrivain dont le récit forme comme un bas-relief ou un panorama continu et où tout est tableau, de prétendre en détacher un et de venir le présenter dans un cadre, je veux le faire pour l’endroit capital de ce voyage d’Espagne, pour le moment décisif qui est l’entrée en Andalousie. […] D’autres croupes bizarrement chiffonnées ressemblaient à ces étoffes des anciens tableaux, jaunes d’un côté et bleues de l’autre. […] Un vrai couplet à mettre en musique par Mozart. — Théophile Gautier a dû à Grenade et à son ciel enchanté des heures de mélancolie, — « d’une mélancolie sereine bien différente de celle du nord. » Le poète plastique, tout occupé de « donner une fête à ses yeux », et leur recommandant de bien saisir chaque forme, chaque contour des tableaux qui se développaient devant eux et qu’ils ne reverraient peut-être plus, s’y révèle avec une vivacité de sentiment et d’émotion qui témoigne d’une organisation particulière.
Un tableau de la génération qui succéda à celle de Musset était bien à point, ces années-là, en tenant compte, évidemment, du caractère un peu artificiel de tout tableau de ce genre ; dire « ma génération », c’est la plupart du temps monter sur une échelle pour dire : moi et mes amis. […] Et dans la société dont l’Éducation fait le tableau, la femme du monde, c’est la femme riche. […] Tel est le centre du tableau, les valeurs claires. […] Ils me fatiguent. » Au contraire, le petit tableau de la mythologie latine, où Flaubert n’est pas écrasé par son sujet, forme un délicat et joli tableau. […] Le schème lui est resté dans la tête comme celui du tableau de Gênes, s’y est peu à peu transformé et nourri.
Alexandre Dumas fils, était envoyé au concours, et la commission, dont chaque membre aurait aimé individuellement à n’avoir qu’à louer et à applaudir l’auteur pour la franchise de ses expositions, pour la spirituelle et frappante énergie de ses tableaux, a dû se former un avis au point de vue particulier où elle était placée, en vue de la fonction dont votre confiance, monsieur le ministre, l’avait investie. […] Si dans quelques pièces précédentes qui roulaient à peu près sur les mêmes personnages, et dont les situations étaient empruntées à un monde au moins très voisin de celui-là, la nature même des scènes et des tableaux nuisait à la leçon qui en pouvait résulter ; si l’exemple avait sa contagion à première vue, et son rapide attrait avant que le dégoût eût opéré, il n’en est pas ainsi de la nouvelle pièce, où l’auteur a su très bien observer et saisir, pour le lui mieux enlever, le faux vernis d’honnêteté dont se couvre précisément ce monde limitrophe, qui voudrait bien par moments s’incorporer à l’autre et s’en faire reconnaître. […] À cela il a été répondu, moins comme contradiction directe à ce que ces éloges avaient, liitérairement, de mérité, que comme correctif et au point de vue où la commission avait à juger l’ouvrage, qu’il ne paraissait point du tout certain que la peinture fidèle de ce vilain monde fût d’un effet moral aussi assuré ; que le personnage même le plus odieux de la pièce avait encore bien du charme ; que le personnage même le plus honnête, et qui fait le rôle de réparateur, était bien mêlé aux autres et en tenait encore pour la conduite et pour le ton ; que le goût du spectateur n’est pas toujours sain, que la curiosité est parfois singulière dans ses caprices, qu’on aime quelquefois à vérifier le mal qu’on vient de voir si spirituellement retracé et si vivant ; que, dans les ouvrages déjà anciens, ces sortes de peintures refroidies n’ont sans doute aucun inconvénient, et que ce n’est plus qu’un tableau de mœurs, mais que l’image très vive et très à nu, et en même temps si amusante, des vices contemporains, court risque de toucher autrement qu’il ne faudrait, et qu’il en peut sortir une contagion subtile, si un large courant de verve purifiante et saine ne circule à côté.