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1898. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

Scènes de notre enfance, après quinze ans rêvées, Au plus pur de mon cœur impressions gravées, Lieux, noms, demeure, et vous, aimables habitants, Je vous revois encore après un si long temps, Aussi présents à l’œil que le sont des rivages À l’onde dont le cours reflète les images, Aussi frais, aussi doux, que si jamais les pleurs N’en avaient de mes yeux altéré les couleurs ; Et vos riants tableaux sont à mon âme aimante Ce qu’au navigateur battu par la tourmente Sont les songes dorés qui lui montrent de loin Le rivage chéri de son bonheur témoin, L’ondoyante moisson que sa main a semée, Et du toit paternel le seuil, ou la fumée ! […] » Après cette prédiction, il passa au sujet du jour, et il déroula pendant un quart d’heure devant moi un tableau politique et social de l’Europe qui éclairait la situation extérieure de 1830 d’un jour qui ne laissait aucune ombre sur le dernier recoin des cours et des nations.

1899. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

Pour composer ses tableaux, il les plaçait dans un cadre assorti à leur caractère inférieur. […] La raison en est simple, c’est qu’ils n’écrivent pas pour moraliser, mais pour gagneur de l’argent, et que le vice et le crime offrent des tableaux à sensation qui ont prise sur la masse du public ; et que cette peinture au niveau de toutes les intelligences, voire même les plus incultes, les dispense de style et de talent, et qu’ils l’adoptent comme étant la plus facile et la plus lucrative.

1900. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Je me borne à mettre en valeur les modifications qu’a subies de ces passes banales une âme infiniment sensible. » Cette âme sensible « a gardé une mémoire fort nette de six ou sept réalités différentes » ; elles se sont superposées dans sa conscience ; elles ont fait tableau ; et ce sont ces « tableaux » que M.  […] Jules Lemaître a pu dire très justement qu’on formerait, en réunissant leurs tableaux, une sorte de géographie pittoresque et morale de la patrie française99. […] Robert de La Villehervé118, étude souvent puissante, vive et vraie toujours, La Ferme des Gohel et Les Hautes Manières, deux bons tableaux d’intérieurs normands, par M. 

1901. (1921) Esquisses critiques. Première série

À l’autre extrémité du tableau, et si nous nous référons toujours à notre expérience personnelle, nous gardons le souvenir de libres penseurs et d’athéistes, parfaites honnêtes gens, qui ne fument point l’opium et ne tuent pas, qui ont une conscience, une règle de conduite, des principes moraux et l’âme stoïcienne dans tout son éclat. […] Nous n’allons pas jusqu’à dire que, détourné du soin de la publication immédiate, il eût dressé un tableau de la société comparable aux mémoires du duc de Saint-Simon — à l’endroit duquel il semble nourrir une admiration de disciple et dont en plusieurs lieux il parle fort bien — mais il se fût manifesté comme un écrivain de la même sorte. […] Marcel Boulenger a composé de traits épars, mais rassemblés avec un choix voulu, le tableau d’une société charmante et policée, où la vie serait désirable. […] Les uns, Balzac, Hugo, Zola — noms que l’on s’étonnera peut-être de voir réunis — tracent un tableau d’une incomparable ampleur où les évolutions de masses énormes de figurants n’empêchent pas que l’on aperçoive le mouvement des individus brassés par le tumulte qu’ils ont entrepris de dépeindre.

1902. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Pleins de rêves et comme de nuages, de murmures parfois indécis, de chuchotements, de notes éoliennes, dirait-on, ils n’en ont pas moins tel brillant prismatique, plutôt, cortège de menues à l’infini critiques d’art et d’idée, de tableaux jolis lâchés jusqu’à l’esquisse, mais quelle et qu’exquise ! […] Il faudrait une épithète de la vieille Asie… » s’achève en un tableau gracieux au possible et joli comme tant de bébés « … qui appellent de leurs petits bras, de leur sourieuse mine s’enflant comme de vague désir, ils appellent l’infini même. […] En eussé-je eu le temps, j’aurais tenté d’apercevoir un grand tableau que l’on remarqua justement au Salon de 1872. […] Il laisse, outre le roman inachevé que nous publions aujourd’hui, plusieurs ouvrages inédits, parmi lesquels un volume de vers : Galerie de tableaux et une traduction de Perse avec notes et commentaire, qui montrera le poète latin sous, paraît-il, un jour tout nouveau.

1903. (1898) Essai sur Goethe

Or, les Mémoires sont le tableau de cette vie qu’il veut nous imposer : il faut donc bien en discuter le sens et l’exactitude. […] Des montagnes énormes m’environnaient, des abîmes s’ouvraient devant moi, des torrents tempétueux se précipitaient ; les fleuves coulaient sous mes pieds ; j’entendais mugir la forêt et la montagne, je voyais toutes ces forces mystérieuses agir et se combiner dans la profondeur de la terre, puis, sur la terre et sous le ciel, tourbillonner les races innombrables des êtres… » Nos yeux s’arrêtent encore avec quelque plaisir sur ces vastes tableaux, bien que nos préférences vraies aillent aux paysages plus intimes. […] Un seigneur mécontent de soi et de tout le monde, hasardant tous les jours sa vie avec peu de santé pour la soutenir, son frère encore plus fluet, une mère chagrine, une épouse mécontente, tous ensemble de bonnes gens, et rien qui s’accorde dans cette malheureuse famille. » Le tableau n’est pas aimable : qu’il soit exact ou poussé au noir, il montre du moins que Goethe avait bien complètement conquis la petite résidence de Charles-Auguste, dont il allait peu à peu faire la sienne. […] Souvent il ennoblit ce qui nous paraissait vulgaire, et ce qu’on estime s’anéantit devant lui. » La princesse renchérit, en réclamant sa place dans un coin du tableau : « Mais la réalité me semble aussi l’attirer et le retenir puissamment. […] Parallèlement à ce premier conflit, un autre se développait dans l’âme du malheureux : moins élevé peut-être, celui-là, moins abstrait, mais plus humain, plus accessible, plus réellement dramatique, plus naturellement fécond en riches péripéties, en tableaux émouvants : si Tasse vécut dans une époque difficile, son milieu immédiat fut aussi le moins propice à son génie, le moins favorable à son caractère47.

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