De Maistre était un personnage trop considérable et un esprit trop convaincu pour se borner à être un observateur, un témoin passif et désintéressé ; il prit parti pour une société célèbre qui porta bientôt ombrage à l’orthodoxie russe, et dont le zèle arma le zèle contraire. Des conversions opérées chez des personnes de la haute société firent éclat : de Maistre en avait été, de bonne heure, le confident ; on le soupçonna d’en avoir été l’instrument ou l’auxiliaire.
Il y a encore une classe d’étrangers qui écrivent en français, mais ceux-ci parce qu’ils sont venus en France et à Paris, qu’ils y habitent, qu’ils y vivent dans la meilleure société et en ont pris le ton, le tour d’esprit. […] Il y a dans le caractère génevois une tendance assez forte à reformer sans cesse des exclusions ou des restrictions, des orthodoxies et des sectes, à replacer des barrières : ne vous mettez pas en peine, il y aura toujours assez de ces apartés de société à Genève, fût-elle par sa constitution la plus démocratique des cités, fût-elle par son courant habituel la plus cosmopolite des villes.
L’organisme des sociétés ressemble fort à celui du corps humain. […] La tête de la société alors ne l’entendit pas ainsi ; la bourgeoisie (sauf des exceptions) pensait comme la tête et était devenue cette tête elle-même.
Il n’y aurait pour cela qu’à partir de quelques principes généraux et convenus, à se montrer rigide et inexorable pour tout ce qui s’écarte de nos mœurs, de notre état de société et de civilisation, à faire la leçon d’un bout à l’autre, à condamner au nom d’un symbole whig ou d’un catéchisme libéral tout ce qui s’écarte de la droite ligne, une fois tirée : on arriverait ainsi à un effet certain et à une unité de conclusion qui séduit et satisfait toujours à première vue les lecteurs superficiels et les esprits tout d’une pièce. […] Et quelques années auparavant, pendant un pèlerinage de l’Impératrice au couvent de Troïtza, non loin de Moscou, Catherine, qui s’était établie dans les environs, à Rajova, avec son monde, voyait arriver tous les jours le frère du favori d’alors, l’Hetman des Cosaques, le jeune comte Cyrille Razoumowsky, très-aimable, lequel demeurait assez loin dans sa terre par-delà Moscou, et qui faisait 40 ou 50 verstes tous les jours (10 ou 12 lieues) pour venir dîner et souper dans cette petite société, s’en retournant chaque nuit.
Lucrèce n’a pas traité des champs en particulier ; mais, dans son tableau de l’origine du monde et des premiers âges des sociétés (au livre Ve), il a cueilli les plus vastes images, il a tracé les plus larges cadres de l’époque rurale primitive, du bonheur naturel et des ébats champêtres auxquels se livraient les innocents agriculteurs au retour des printemps : Sæpe itaque inter se prostrati in gramme molli, Propter aquæ rivum, sub ramis arboris altæ, Non magnis opibus jucunde corpora habebant, Præsertim cum tempestas ridebat, et anni Tempora pingebant viridantes floribus herbas… Quelle ampleur de peinture et de langage ! […] Depuis que ces animaux ont été vus à Bethléem dans la crèche du divin Enfant, il semble qu’ils se soient rapprochés et élevés d’un degré dans l’ordre de la domesticité et de la société humaine : La vache !
Un atelier est toujours fort mêlé, mais on était sous le Directoire et le mélange alors avait un caractère particulier : les écoles, comme la société, offraient de violents contrastes. […] Ce bruit se communiqua, d’oreille en oreille, et jamais depuis ce jour on ne se permit la plus légère plaisanterie sur les habitudes religieuses des deux amis lyonnais. » La crise morale qui travaillait la société se réfléchit là en abrégé : la Guerre des Dieux de Parny, d’abord triomphante, est repoussée et bat en retraite ; le Génie du christianisme approche, il est dans l’air.