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1182. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Banville. Les Odes funambulesques. »

Mais nul sentiment, venant de plus haut ou de plus profond qu’un épiderme, rougissant ou pâle, ne passe dans cette langue ouvragée comme une cassolette pour contenir, à ce qu’il semble, les plus immatériels éthers de la vie, et qui ne gardera pas même cette goutte de larmes moins pure ! […] Quand l’Inspiration, dont le caractère semble être d’agrandir notre âme aux dépens de notre corps, ne nous a pas, comme dans le livre dont il s’agit ici, allégé le poids de nos organes, et qu’on a été soumis au martelage tellement appuyé de ce double coup, la sensibilité en est comme stupéfiée, on est accablé de cette matérielle perfection, et on éprouve le désir de retourner à quelque négligé divin, à quelque mal rimé, puissant ou exquis, comme Alfred de Musset ou Maurice de Guérin, par exemple. […] On se dit bien que l’instrument a un défaut, qu’il est imparfait, près de se casser, près de se rompre, mais l’haleine pure qui passe dans les trous du misérable roseau semble mieux porter & l’âme le son de la poitrine inspirée…, et les plastiques, les acrobates et les funambules sont oubliés !

1183. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Corneille »

Levallois, l’admirateur passionné de Maurice de Guérin semble s’être bien donné de garde d’écrire sur Corneille (sur Corneille !!!) […] Attendrissement inattendu qui vous prend en regardant cette figure d’une si mâle expression de génie qu’il semble qu’on ne l’a jamais vue jeune, quoi qu’elle l’ait été… et quand le grand Corneille est toujours, plus ou moins, le bonhomme Corneille ! […] — Corneille, réfugié et monté dans la gloire et qui semblait inaccessible et invulnérable, reçut en plein cœur ce coup d’une pâle amour dédaignée et il n’en put guérir… Il avait cependant en lui de vigoureux dictames.

1184. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — L’arbitrage et l’élite »

Mais le monde antique « fermé », sans lien réel avec l’en-dehors, ne pouvait adopter une conception qui suppose admise la solidarité entre nations et « la plus large des communautés. » Il semble qu’Henri IV, à l’aurore du monde moderne, conçut le premier l’idée d’une juridiction dont les États de l’Europe auraient à invoquer l’autorité, pour régler leurs conflits. […] Il me semble toutefois que le vœu de constitution d’une cour d’arbitrage, telle qu’il est généralement présenté, n’apparaît point avec toute la force qu’il devrait présenter. […] Pour moi — et c’est à cette observation que je veux en venir, — il est une sorte d’hommes qui me semblent tout désignés pour assumer d’aussi hautes fonctions : l’élite, la vraie et forte élite, dans chaque nation.

1185. (1887) Essais sur l’école romantique

Toutes les choses de la terre lui semblent un lien mystérieux entre la nature divine et la sienne. […] Il semble alors que le poète soit mené par le rythme, et qu’il s’enivre de sa propre harmonie. […] Victor Hugo me semble avoir mieux peint Louis XI comme portrait que comme caractère. […] Pourquoi, quand l’amant donne un baiser de flamme, un baiser long (style de conte), pourquoi semblent-elles si désappointées de ne pas l’avoir reçu sur leurs lèvres ? […] Victor Hugo semble n’être plus, en vérité, que le compilateur et le regrattier de ses premières poésies, serait-elle le dernier mot du poète ?

1186. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

Le monde lui parut un vaste ensemble où chacun tient sa place, et l’homme un agent puissant dont le but est de s’exercer ; il lui sembla que, puisque l’homme est ici-bas pour agir, plus il agit, plus il remplit son but. […] L’un et l’autre se trouvaient si éloignés à leur point de départ, qu’ils semblaient vraiment ne devoir jamais se croiser. […] Le passage est un peu long, mais il ne semblera point tel, nous l’espérons, à qui l’aura lu en entier. […] Et si, dans les intervalles de ces bruits qui se succèdent comme des ondes, un chant de berger résonne quelques instants, il semble que la pensée de l’homme s’élève avec ce chant pour raconter ses besoins, ses fatigues au ciel, et lui en demander le soulagement. […] Il me semble avec un historien philosophe, le sage Droz, que la révolution aurait pu être dirigée dans les premiers temps ; et, une fois même qu’elle fut lancée et déchaînée à l’état d’avalanche, il dépendit de bien des accidents d’en faire dévier la chute et le cours.

1187. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

« Il semblerait donc démontré par là que l’imitation la plus matérielle est aussi la moins bonne. […] La sensation a besoin du corps évidemment ; la pensée n’en a pas moins besoin, bien qu’elle semble plus propre à l’âme que la sensibilité. […] Voilà, ce semble, ce grand Traité de l’âme bien abaissé ; voilà d’immenses erreurs et des lacunes non moins immenses. […] Il semble bien que d’autres sciences, la médecine, par exemple, avaient déjà trouvé la leur. […] Mais Aristote, qui a certainement connu celle de son maître, ne semble pas en avoir tenu le moindre compte.

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