C’est la science, les notions demandées à tout, l’encyclopédisme, cette rage des vieux siècles littéraires, qui a fait faiblir la poésie aussi dans Gœthe ; et je cite Gœthe, ce poète, qui n’a pas selon moi la grandeur qu’on lui donne, mais que je prends comme un exemple, parce qu’il est superstitieusement respecté !
Je ne doute pas que de belles découvertes ne l’y attendent, aussi importantes peut-être que l’ont été, dans les siècles précédents, celles des sciences physiques et naturelles.
Ma propre expérience m’apprit quel dut être l’effort du génie de Milton pour décrire tant de choses inconnues, et les placer en des lieux qui même ne sont point, lorsque j’essayai, dans l’Atlantiade, de personnifier les principes de la science newtonienne, et de tracer des objets et des espaces qui ne sont que soupçonnés, en inventant, d’après les modèles des anciens, une théogonie symbolique des lois positives de la nature, telle que nous nous l’expliquons ; la condition des mœurs m’avait arrêté d’abord, et je le fus ensuite par celle des localités. […] Je ne sais d’ailleurs par quelle humble retenue on n’oserait, dans l’étude des lettres aussi bien que dans celle des sciences exactes, appuyer les principes que l’on émet des expériences et des découvertes qu’on peut avoir faites soi-même. […] On présume que les progrès des sciences exactes tendent à leur avancement perpétuel, tandis que les lettres font souvent des pas rétrogrades ; mais nous voyons, dans ces exemples, que la poésie hérite des découvertes antérieures, et marche de même au perfectionnement que lui procure l’imitation. […] Un certain terme est la barrière que notre entendement ne saurait franchir ; car si l’héritage des connaissances acquises enrichit la capacité de notre mémoire, l’esprit des découvertes, si souvent stationnaire, ne se transmet point dans les sciences positives, et ne marche point d’un pas égal jusqu’à l’infini.
Dugas-Montbel, esprit assez studieux pour interpréter laborieusement le grand poète, assez poétique pour ne pas déflorer la poésie par la science. […] vous avez toute la nature, tous les hommes et tous les dieux de l’Olympe, le monde matériel complété par le monde immatériel ; l’univers, enfin, entendu dans la plus large acception du mot ; l’univers, exposé, non raconté, non décrit, non analysé seulement par la froide main de la science, mais l’univers senti, peint et chanté par la voix la plus mélodieuse et dans la plus musicale des langues prosodiées qui enchantèrent jamais l’oreille humaine.
Moreau y accomplit avec moins de promptitude, mais avec plus de science et de certitude, le second acte de la campagne de 1800. […] Thiers conduit son lecteur par le fil des événements avec une clarté de vue, une sûreté de marche et une universalité de science historique qui entraînent sans cesse sans jamais lasser.
Sa figure est une de celles dont la ressemblance exige l’introuvable artiste de qui la main sait peindre le reflet des feux intérieurs, et sait rendre cette vapeur lumineuse que nie la science, que la parole ne traduit pas, mais que voit un amant. […] La plupart de mes idées, et même les plus audacieuses en science ou en politique, sont nées là, comme les parfums émanent des fleurs ; mais là verdoyait la plante inconnue qui jeta sur mon âme sa féconde poussière ; là brillait la chaleur solaire qui développa mes bonnes et dessécha mes mauvaises qualités.