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428. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXe Entretien. Souvenirs de jeunesse. La marquise de Raigecourt »

Ils lui parlèrent de moi comme d’un jeune homme qui donnait de belles espérances à la poésie, au royalisme, et qui n’était point enrôlé dans le parti opposé à la religion. […] Il aimait la religion, surtout pour ses pompes et ses solennités. […] Le duc de Montmorency I Le duc Mathieu de Montmorency, le plus grand nom de France, avait eu pour premier maître en révolution et en religion politique l’abbé Sieyès. […] Il trouva en Suisse, dans la maison de Coppet, l’amitié la plus tendre, la religion la plus tolérante et toutes les consolations que les mêmes déceptions donnent aux illusions également trompées.

429. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre 2. La littérature militante »

La grandeur des objets qui mettaient les hommes aux prises — c’était la religion avec la morale — faisait que l’actualité échauffait la poésie sans la rapetisser, la précisait sans la dessécher. […] Bodin malheureusement ne nous appartient pas tout entier : il écrivit en latin cette Méthode pour l’étude de l’histoire où abondent les idées neuves et fécondes, et cet étrange Heptaplomeres inédit jusqu’à nos jours, où avec une force incroyable pour le temps il confronte toutes les religions et les renvoie dos à dos, sans raillerie impertinente, comme expressions diverses de la religion naturelle, seule raisonnable, et comme également dignes de respect et de tolérance. […] Du Plessis-Jlornay, Traité de l’Eglise, 1579 ; et Traité de la vérité de la religion chrétienne, 1581.

430. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre IV. L’heure présente (1874) — Chapitre unique. La littérature qui se fait »

Il nous a fait aimer l’efficacité morale des religions. […] Aussi de curieuses tendances s’indiquent-elles dans la jeunesse : après plusieurs générations de savants et de struggle-for-lifers, nous avons vu paraître des générations en qui le culte de la science n’est pas amoindri sans doute, et qui ne professent pas non plus le hautain renoncement, mais qui ont enfin, au moins dans l’imagination, par saillies d’intention, par bouffées de bonne volonté, la religion de la morale. […] Il y a un accent bien personnel de pessimisme énergique dans la poésie bouddhique de Jean Lahor967 ; et l’on trouve un exquis mélange de philosophie et d’émotion, un fin sentiment des antiquités et des religions, dans les drames que M.  […] L’influence de son christianisme démocratique et philanthropique a été très grande chez nous, je veux dire dans notre littérature : au comte Tolstoï doit surtout se rapporter l’esprit nouveau, plus largement philosophique et plus profondément humain, que je signale plus bas dans nos romans et même sur notre théâtre. — Anna Karenine, 2 vol. in-18, 1871, tr. 1885 ; la Guerre et la Paix, 3 vol. in-8, 1872, trad. 1880 et 1885 ; Ma religion, 1885 ; les Cosaques, souvenirs de Sébastopol, 1887, 4 vol. ; la Puissance des ténèbres, drame, in-18, 1887 ; la Sonate à Kreutzer, 1 vol. in-18, 1890 ; Souvenirs, Hachette, in-12, 1887, etc. — A consulter : M. de Vogué, le Roman russe.

431. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Oscar Wilde à Paris » pp. 125-145

En attendant l’avènement d’une religion de lumière nouvelle, que l’Olympe nous serve d’abri et de refuge. […] Voilà pourquoi ces deux génies, si distants l’un de l’autre, si dissemblables, si divers d’essence et de tendance, se sont rencontrés néanmoins dans leur méthode divergente, sur un point d’exercice, et ont communié dans la religion du dandysme. […] C’est pourquoi il en avait fait une religion. […] Ernest Raynaud, Baudelaire et la religion du dandysme (Mercure de France).

432. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 24, des actions allegoriques et des personnages allegoriques par rapport à la peinture » pp. 183-212

Ils peuvent bien dans les sujets qui ne répresentent pas les mysteres et les miracles de notre religion, se servir d’une composition allegorique, dont l’action exprimera quelque verité, qui ne sçauroit être renduë autrement, soit en peinture, soit en sculpture. Je consens donc que la foi et l’esperance soutiennent un mourant, et que la religion paroisse affligée aux pieds d’un évêque mort. Mais je crois que toute composition allegorique est défenduë aux artisans qui traitent les miracles et les dogmes de notre religion. […] Les faits sur lesquels notre religion est établie, et les dogmes qu’elle enseigne, sont des sujets où il n’est point permis à l’imagination de s’égayer.

433. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IV : M. Cousin écrivain »

Voici une page écrite sans légèreté et sans emphase, noble ; mesurée, et pourtant pressante, d’un style ample et grave, sans rien de monotone ou d’académique, qui semble du dix-septième siècle et qui n’est point une copie, qu’on peut relire dix fois, et qu’on trouvera toujours plus belle, et qui, certainement, donne une idée de la perfection : Depuis les premiers jours des sociétés humaines jusqu’à la venue de Jésus-Christ, tandis que dans un coin du monde une race privilégiée gardait le dépôt de la doctrine révélée, qui, je vous prie, a enseigné aux hommes, sous l’empire de religions extravagantes et de cultes souvent monstrueux, qui leur a enseigné qu’ils possèdent une âme, et une âme libre, capable de faire le mal, mais capable aussi de faire le bien ? […] La religion vient alors achever la morale. […] S’il se porte à des figures plus hardies, elles sont suivies, raisonnables, tirées d’objets ordinaires, préparées de loin, sans rien qui puisse étonner ou choquer, simples effets d’une éloquence passionnée, simples moyens oratoires, au même titre que les raisonnements et les faits : « La religion de Pascal, dit-il, n’est pas le christianisme des Arnaud et des Malebranche, des Fénelon et des Bossuet ; fruit solide et doux de l’alliance de la raison et du cœur dans une âme bien faite et sagement cultivée ; c’est un fruit amer, éclos dans la région désolée du doute, sous le souffle aride du désespoir. » Telle est l’imagination de l’orateur, bien différente de celle de l’artiste, qui est brusque, excessive, aventureuse, qui se plaît aux images nouvelles, qui frappe et éblouit le lecteur, qui se hasarde parmi les figures les plus rudes et les plus familières, qui ne se soucie pas d’élever, par des transitions ménagées, les esprits jusqu’à elle, et dont la folie et la violence mettraient en fuite l’auditoire que l’orateur doit se concilier incessamment pour le retenir jusqu’au bout. […] L’impétueux orateur amenait sur le théâtre et faisait défiler en une heure Dieu, la nature, l’humanité, la philosophie, l’industrie, l’histoire, la religion, les grands hommes, la gloire et bien d’autres choses encore ; cette symphonie chantée par un seul homme donnait le vertige, et les esprits, habitués aux tranquilles dissertations des sensualistes, s’inclinaient, comme devant un révélateur, devant le poète qui peuplait leur imagination de ces prodigieux fantômes, et les entraînait, éblouis, dans un monde qu’ils n’avaient pas soupçonné.

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