Mais quand la tragédie eut commencé à prendre une meilleure forme, ces récits ou épisodes, qui n’avaient été imaginés que comme un accessoire pour laisser reposer le chœur, devinrent eux-mêmes la partie principale du poème dramatique, dont, à son tour, le chœur ne fut plus que l’accessoire.
Rappelez-vous Froissart, et comment les égorgements, les assassinats, les pestes, les tueries de Jacques, tout l’entassement des misères humaines disparaît chez lui dans la belle humeur uniforme, tellement que les figures furieuses et grimaçantes ne semblent plus que des ornements et des broderies choisies pour mettre en relief l’écheveau des soies nuancées, et colorées qui fait la trame de son récit. […] Mais le récit ne suffit point à exprimer le bonheur et le rêve ; il faut que le poëte aille192-A « dans les plaines qui s’habillent de verdure nouvelle, où les petites fleurs commencent à pousser, où les pluies bonnes et saines renouvellent tout ce qui est vieux et mort » ; où « l’alouette affairée, messagère du jour, salue dans ses chansons le matin gris, où le soleil dans les buissons sèche les gouttes d’argent suspendues aux feuilles. » Il faut qu’il s’oublie dans les vagues félicités de la campagne, et que, comme Dante, il se perde dans la lumière idéale de l’allégorie. […] Non-seulement il est gai, mais il est moqueur d’un bout à l’autre du récit ; il voit clair à travers les subterfuges de la pudeur féminine ; il en rit malicieusement et sait bien ce qu’il y a derrière ; il a l’air de nous dire, un doigt sur les lèvres ; « Chut ! […] Tous ces récits sont liés, et beaucoup mieux que chez Boccace, par de petits incidents vrais, qui naissent du caractère des personnages, et tels, qu’on en rencontre en voyage. […] Il y a tel récit d’un jeune garçon qui, meurtri par son précepteur, veut à toute force le garder, afin d’apprendre.
Il fallait insérer dans le récit épique Rome entière, l’histoire de Rome depuis les origines jusqu’à la bataille d’Actium, la légende des vieilles races qui avaient peuplé d’abord le sol italien, une sorte de livre d’or de la noblesse, qui se disait sortie des compagnons d’Énée ; toute la religion romaine, les dieux indigènes, les dieux helléniques latinisés, les vieilles divinités locales, les mœurs et usages publics et privés du peuple romain, etc… Virgile y a réussi. […] On est d’accord aujourd’hui pour croire au récit de son fils Louis, à ce Mémoire sur la misère du peuple, confié par Racine à Mme de Maintenon. […] On put croire d’abord que le jeune poète parnassien n’avait vu dans ces récits qu’un exercice amusant et difficile de versification, quelque chose comme le plaisir d’écrire en français des vers latins (si j’ose cette catachrèse) sur des sujets réfractaires à la poésie. […] C’est dans ses récits en prose non rimée que je goûte avec le plus de sécurité la sensibilité vive et franche de M. […] Elles se sont mises à écrire à leur tour ; et la grâce la plus aisée, l’expérience la plus fine et la plus clémente, le spiritualisme le plus délicat ornent leurs récits ; et c’est en ajoutant au meilleur de ce qu’il passait pour représenter qu’elles gardent le nom dont elles sont dépositaires.
Écartez les images orientales, et, sous cette couleur, qu’exigeait le sujet, vous reconnaîtrez le grand sentiment de tel récit de bataille des Perses. […] Sans armes cette fois, comme ce capitaine à la canne de jonc du récit d’Alfred de Vigny, il s’exposa au feu avec un flegme très voisin du désespoir, en homme à qui pèse la vie. […] Et il ajoute à l’émouvant récit cette ligne de conclusion : « Toute la grandeur du pays sort de l’endurance des Per et des Kersti ». […] Ne serait-ce pas dans la ballade de Coleridge, dans quelques strophes enchantées de ce mystérieux récit de matelot, The Rime of the ancient mariner ? […] Quant au mérite, trop surfait, de ces récits improvisés, je ne prendrai pas l’attitude paradoxale de le contester pleinement.
Récamier de la haute fortune dont il éblouissait Paris et dont il faisait jouir sa femme ; il faut lire ce récit pathétique dans un fragment écrit des souvenirs de la pauvre Juliette. […] Écoutons ce récit dans une note écrite de la main de sa nièce. […] Ce secret échappe au roi Murat dans une scène de tragédie vraiment antique, rapportée par madame Lenormant d’après le récit de sa tante. […] (Nous voulions finir ici ce récit, nous ne le pouvons pas ; il y a trop de belles lettres de M. de Chateaubriand dans sa vieillesse ; poursuivons.
Le récit de leurs exploits est homérique et héroïque, comme ces combats primitifs des héros du Nord ; il enthousiasme le roi Duncan de reconnaissance et d’admiration pour Macbeth. […] ces tressaillements, ces soubresauts, symptômes qui ne devraient accompagner qu’une crainte fondée, feraient à merveille dans le récit d’une histoire qu’une femme raconte au coin du feu, d’après l’autorité de sa grand’mère. — C’est une vraie honte ! […] Dans les anciens temps, avant que des lois humaines eussent purgé de crimes les sociétés adoucies, oui vraiment, et même depuis, il s’est commis des meurtres trop terribles pour que l’oreille en supporte le récit ; et l’on a vu des temps où, lorsqu’un homme avait la cervelle enlevée, il mourait, et tout finissait là. […] Ô récit trop cruel dans son exactitude, mais trop vrai !