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258. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Prosper Mérimée. »

Observer (comme fit Mérimée) les règles de la plus élégante honnêteté, et cela sans croire à rien d’absolu en morale, c’est une manière de protestation contre la réalité injuste ; et c’est une protestation contre la réalité douloureuse que de ne pas daigner se plaindre devant les autres.

259. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « George Sand. »

Elle a une imagination qui, naturellement et par un besoin irrésistible, transforme et embellit la réalité et trouve des combinaisons de faits imprévues et charmantes. […] Croire à ce point au règne futur de la justice, c’est être bon pour l’univers, c’est pardonner à la réalité d’être présentement fort mêlée.

260. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

C’est donc la réalité par excellence que l’art cherche à représenter ; mais une réalité tout intérieure, tout invisible. Cette idée que nous portons en nous, de l’infini, de l’absolu, correspond à la seule véritable et positive réalité, dont les réalités extérieures ne sont que les ombres grossières. La vraie réalité pour l’art, le type de ses représentations, c’est donc l’idéal. […] Le génie est évidemment créateur, et qui dit création dit réalité. […] L’art ne fait pas comme la prose la nomenclature, le procès-verbal, l’inventaire de la réalité ; il peint la réalité, mais en subordonnant les côtés inférieurs des objets à leur élément idéal.

261. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

Il le reçoit tout fait de la réalité, de la vie. […] Elle vient amender la réalité. […] « Revenons à la réalité, disait Balzac. […] De ses trois artistes créateurs, Zola, Maupassant et Huysmans, il ne reste pas une image d’hommes, mais une réalité d’œuvres. […] Que ceux qui sont déroutés par ce livre étrange remarquent par l’exemple de Huysmans à quel point Flaubert a modelé Bouvard sur la réalité, à quel point la réalité de Huysmans, chef de bureau à l’Instruction publique, s’est modelée sur lui.

262. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome I

Le philosophe qui, frappé au préjugé, de l’abus, de l’erreur contenue dans la forme, croit posséder la réalité en se réfugiant dans l’abstraction, substitue à la réalité quelque chose qui n’a jamais existé. […] Pour ce dernier, les idées étaient un moyen de voir et de montrer la réalité. Cette réalité n’est guère, au regard de M.  […] Chacun de nous aperçoit non pas l’univers, mais son univers ; non pas la réalité nue, mais, de cette réalité, ce que son tempérament lui permet de s’approprier. […] C’est le mal dont il a tant souffert qu’il a incarné en eux, le mal d’avoir connu l’image de la réalité avant la réalité, l’image des sensations et des sentiments avant les sensations et les sentiments.

263. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVII. Forme définitive des idées de Jésus sur le Royaume de Dieu. »

Et ne dites pas que c’est là une interprétation bienveillante, imaginée pour laver l’honneur de notre grand maître du cruel démenti infligé à ses rêves par la réalité. […] Ces vérités, qui sont pour nous purement abstraites, étaient pour Jésus des réalités vivantes. Tout est dans sa pensée concret et substantiel : Jésus est l’homme qui a cru le plus énergiquement à la réalité de l’idéal.

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