Vous ressemblez à ces princes qui, en faisant avec la France leurs traités de paix en langue française, ont bien soin de stipuler que, par l’usage de cette langue, ils ne prétendent reconnaître aucune supériorité dans la nation qui la parle. […] Cette pièce avait pour titre, De l’Éducation d’un prince 1 : tout m’a charmé dans cet ouvrage ; pensées, sentiments, images, harmonie, facilité, noblesse, mais surtout de grandes leçons, et des vérités utiles, qui n’en ont que plus de mérite pour être mises en beaux vers, parce qu’à leur mérite propre elles en joignent deux autres, celui de la difficulté vaincue sans que l’empreinte du travail y reste, et celui d’être exprimées dans un langage sonore qui les rend plus faciles à retenir. […] Ce dialogue fut fait dans le temps où le conte de Voltaire, sur l’éducation d’un prince, venait de paraître.
Ne pouvant encore s’autoriser contre l’usage, il fit connaître à ses amis qu’il allait à l’armée faire sa cour qu’il lui coûtait moins d’exposer sa vie que de dissimuler ses sentiments, et qu’il n’achèterait jamais ni de faveurs, ni de fortune aux dépens de sa probité. » Je pourrais encore citer d’autres endroits qui ont une beauté réelle ; mais le discours en général est au-dessous de son sujet ; on y trouve plus d’esprit que de force et de mouvement ; on s’attendait du moins à trouver quelques idées vraiment éloquentes sur l’éducation d’un dauphin, sur la nécessité de former une âme d’où peut naître un jour le bonheur et la gloire d’une nation ; sur l’art d’y faire germer les passions utiles, d’y étouffer les passions dangereuses, de lui inspirer de la sensibilité sans faiblesse, de la justice sans dureté, de l’élévation sans orgueil, de tirer parti de l’orgueil même quand il est né, et d’en faire un instrument de grandeur ; sur l’art de créer une morale à un jeune prince et de lui apprendre à rougir ; sur l’art de graver dans son cœur ces trois mots, Dieu, l’univers et la postérité, pour que ces mots lui servent de frein quand il aura le malheur de pouvoir tout ; sur l’art de faire disparaître l’intervalle qui est entre les hommes ; de lui montrer à côté de l’inégalité de pouvoir, l’humiliante égalité d’imperfection et de faiblesse ; de l’instruire par ses erreurs, par ses besoins, par ses douleurs même ; de lui faire sentir la main de la nature qui le rabaisse et le tire vers les autres hommes, tandis que l’orgueil fait effort pour le relever et l’agrandir ; sur l’art de le rendre compatissant au milieu de tout ce qui étouffe la pitié, de transporter dans son âme des maux que ses sens n’éprouveront point, de suppléer au malheur qu’il aura de ne jamais sentir l’infortune ; de l’accoutumer à lier toujours ensemble l’idée du faste qui se montre, avec l’idée de la misère et de la honte qui sont au-delà et qui se cachent ; enfin, sur l’art plus difficile encore de fortifier toutes ces leçons contre le spectacle habituel de la grandeur, contre les hommages et des serviteurs et des courtisans, c’est-à-dire contre la bassesse muette et la bassesse plus dangereuse encore qui flatte. […] Et quand on pense que l’homme qu’il avait à peindre donnant ces leçons, était le duc de Montausier, quel parti l’orateur pouvait encore tirer d’un gouverneur qui respectait bien plus la vérité qu’un prince, qui, pour être utile, aurait eu le courage de braver la haine, et se serait indigné même de se souvenir que celui qui était aujourd’hui son élève, pouvait être le lendemain son maître. […] « Monseigneur, si vous êtes honnête homme, vous m’aimerez ; si vous ne l’êtes pas, vous me haïrez, et je m’en consolerai. » Plusieurs personnes ont lu cette fameuse lettre qu’il écrivit au même prince, et qu’on ne saurait, trop citer.
A ces paroles, M. de Ségur, encore apprenti diplomate, ne put dissimuler un profond étonnement, dans lequel le prince ne vit peut-être qu’une admiration naïve. […] Le prince Henri avait de grandes vertus ; ses lumières, son humanité, sa justice l’avaient popularisé en Europe, et, auprès de la gloire de Frédéric, la sienne, moins brillante, semblait incomparablement plus pure : et ce même prince, sans songer à mal, invente la plus odieuse des iniquités politiques ; à l’occasion, il en cause avec Catherine, il en cause avec son frère ; la partie s’arrange, il s’en félicite, et, dans sa retraite de philosophe, s’en berce comme d’un doux et beau souvenir !
On reprochoit au prince de la poësie Italienne, d’avoir trop cherché l’esprit, la finesse & les embellissemens. […] Il rougissoit de sa réputation d’auteur, laquelle avoit fait sa fortune & toute sa gloire, l’avoit mis dans les bonnes graces de l’empereur Maximilien, de Henri de Valois, de plusieurs papes, & de beaucoup de cardinaux & princes d’Italie.
Je résigne des fonctions honorifiques ou lucratives que je tiendrais de la faveur du prince, mais je ne résigne pas mon patriotisme ; et si le peuple, revenu de son égarement, me désigne pour le servir dans ses comices, j’obéirai à son appel. […] Le duc de Rivière était, comme M. de Polignac, un de ces monuments de fidélité chevaleresque, que Louis XVIII et le comte d’Artois étaient heureux de montrer à la jeunesse royaliste de 1825 dans les grandes places, comme des preuves vivantes de la mémoire des princes restaurés. […] Il fallait lui donner une compensation dans un poste diplomatique en chef ; il méritait qu’on lui en trouvât un : on créa ce poste auprès d’un prince de la maison de Bourbon d’Espagne, fils de la reine d’Étrurie, qui régnait alors à Lucques et qui devait, après Marie-Louise, régner à Parme. […] Il aurait voulu sans doute conseiller dignement son prince, il ne s’offensa jamais de se voir préférer les conseils d’autrui. […] Une faible brise de l’ouest amena l’Estafette à l’abri de l’écueil qui forme à lui seul la rade de la ville, depuis que le célèbre prince des Druses, Fakhr-el-din (Facardin), en a fait combler le port pour éloigner les flottes turques.
De plus sots princes agissent de beaucoup plus sagement. […] La poésie ne rassasie aucun prince, et s’il a un cœur faible qui ne puisse rien digérer de fort, il s’affaiblit lui-même. » M.