En ces cent années il s’est fait une assez grande révolution dans l’ordre et le gouvernement de la société, dans l’ensemble des mœurs publiques, pour que l’existence et la vie que menait cette petite reine fantasque nous semble presque comme un conte des Mille et Une Nuits, et pour qu’on se dise sérieusement : « Était-ce donc possible ? […] Elle rêvait dans l’avenir gloire, grandeur politique, puissance, et, en attendant, elle voulut vivre le plus à son gré et le plus en souveraine qu’elle pût, rendre le moins possible aux autres et se passer tous ses caprices, avoir sa cour à elle, où ne brillât nul astre rival du sien. […] L’admiration, l’enthousiasme dont il était saisi, lui inspirait des expressions qui répondaient à la mâle et harmonieuse énergie des vers grecs, autant qu’il est possible d’en approcher dans la prose d’une langue à peine tirée de la barbarie… Cependant M. de Malezieu, par des efforts que produisait un enthousiasme subit, et par un récit véhément, semblait suppléer à la pauvreté de la langue, et mettre dans sa déclamation toute l’âme des grands hommes d’Athènes.
Il développa ses idées sur la situation à M. de La Marck et ses vues générales sur une direction possible : « Le sort de la France est décidé, s’écria Mirabeau ; les mots de liberté, d’impôts consentis par le peuple, ont retenti dans tout le royaume. […] Cependant, disait Mirabeau à M. de La Marck, quelle position m’est-il donc possible de prendre ? […] Je n’excepte pas même une contre-révolution armée ; le royaume serait reconquis, qu’il faudrait encore que le vainqueur composât avec l’opinion publique, qu’il s’assurât de la bienveillance du peuple, qu’il consolidât la destruction des abus, qu’il admît le peuple à la confection de la loi, qu’il lui laissât choisir ses administrateurs ; c’est-à-dire que, même après une guerre civile, il faudrait encore en revenir au plan qu’il est possible d’exécuter sans secousse.
M. de Lavalette, directeur général des postes, était ce soir-là chez le maréchal : celui-ci, voulant emmener avec lui le plus d’artillerie possible, lui demanda un ordre pour prendre tous les chevaux dont disposait l’administration. […] De telles précautions morales étaient alors nécessaires dans l’état des esprits, et si une transaction avait été possible à quelque moment, comme l’espérait le maréchal, elle ne l’était que moyennant ces ménagements mêmes. Car, ne l’oublions pas, une transaction alors, dans une affaire si mal engagée, était la seule solution possible.
« C’est un homme, disait en terminant l’abbé de Choisy, d’une vivacité surprenante, d’une éloquence qui ne laisse pas la liberté de douter de ses paroles, bien que, à la quantité qu’il en dit, il ne soit pas possible qu’elles soient toutes vraies. […] Le cardinal lui avait dit en lui remettant son brevet : « Cela s’appelle faire un maréchal de France sur la brèche. » Ce brevet reçu, Cosnac, qui n’était abbé que le moins possible, va trouver l’archevêque de Paris : « Le roi, lui dit-il, monseigneur, m’a fait évêque ; mais il s’agit de me faire prêtre. » — « Quand il vous plaira ! […] Cosnac écoute les agents, ne les croit qu’autant qu’il faut, démêle ce qui est possible et réel, et en parle à son maître ; il ne peut obtenir de lui qu’il applique sa pensée à ce dessein, ni qu’il s’en ouvre sérieusement au roi son frère.
De plus, ils méconnaissent l’autre point précédemment indiqué : que toute transition, tout changement a deux directions possibles, du dedans au dehors, du dehors au dedans, et que, dans l’un des cas, nous voyons l’antécédent du changement, dans l’autre, nous ne le voyons pas. […] Quand nous pensons à une action simplement possible pour nous, nous voulons déjà cette action et nous la commençons. […] Selon nous, la simple cérébration — à laquelle correspond l’idée d’un mouvement possible — est un état de tension où se contre-balancent un ensemble de petits mouvements oscillatoires ; le triomphe actuel d’une impulsion cérébrale, au contraire, implique une décharge nerveuse dans une direction déterminée.
Ils se donnent à entendre en contrefaisant le bruit que fait la chose, ou en mettant dans le son imparfait qu’ils forment, quelque ton qui ait le rapport le plus marqué qu’il soit possible, avec la chose qu’ils veulent donner à comprendre sans pouvoir la nommer. C’est ainsi qu’un étranger qui ne sçauroit pas comment le tonnerre s’appelle en françois, suppleroit à ce mot par un son qui imiteroit autant qu’il seroit possible le bruit de ce méteore. […] Il est clair par les raisons que nous avons exposées, qu’il est bien plus facile aux écrivains latins de faire des alliances agréables entre les sons, de placer tous les mots d’une phrase auprès d’autres mots qui se plaisent dans leur voisinage : en un mot de parvenir à ce que Quintilien appelle inoffensam verborum copulam, qu’il n’est possible aux écrivains françois de le faire.