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716. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Ronchaud, Louis de (1816-1887) »

Toutefois ses œuvres portent bien la marque de son propre esprit.

717. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

Saint-Marc Girardin, lui aussi, à qui d’ordinaire ce mot de passion semble faire peur, ou qui du moins aime à se jouer en en parlant, a compris que c’était là ou jamais le cas de se déclarer, que c’était une passion par raison, tout pour le bon motif et pour l’ordre, pour l’étroite morale et la juste discipline : dans une suite de charmants articles il a pris rang à son tour parmi ceux qui occupent en propre un de ces beaux noms de femmes d’autrefois, qui s’en emparent et portent désormais couleurs et bannière de chevaliers. — Et vous donc qui parlez, me dira quelqu’un, où avez-vous planté votre drapeau ? […] Leurs brillants esprits, quand elles se seront développées, se porteront à aimer, à favoriser par goût les plus naturels et les moins réglés des génies d’alors ; elles en seront les inspiratrices déclarées et les patronnes : la duchesse de Mazarin ne saurait se séparer de son philosophe Saint-Évremond, ni la duchesse de Bouillon de son conteur La Fontaine. […] La France est trop petite pour l’activité de ces nièces de Mazarin, et quelques-unes vont porter dans des contrées et des cours voisines leurs éclats et leurs erreurs, sans jamais déchoir pourtant de ce grand état où elles sont comme nées et où elles se sont naturalisées en quasi-souveraines. […] C’est ainsi qu’un petit-maître de l’ancien régime se transportait à Londres à grand bruit pour connaître les Anglais : il considérait curieusement ce qui se faisait à la Chambre des communes, ce qui se faisait à la Chambre des pairs ; il aurait pu donner l’heure précise de chaque séance, le nom de la taverne fréquentée par les membres influents, le ton de voix dont on portait les toast : mais sur tout cela il n’avait que des remarques puériles. […] Ce qu’il y a de plaisant, c’est que je me tue à disputer contre cette idée, en établissant que nous avons fait une paix bien aisée et immanquable à faire, dès que le roi, notre maître, voulait bien se porter de bonne foi et sans retour à des sacrifices tels que ceux que l’Angleterre a obtenus de nous.

718. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME GUIZOT (NEE PAULINE DE MEULAN) » pp. 214-248

En parcourant avec un inexprimable intérêt ces feuilles nombreuses réunies par la piété domestique, il nous est venu le désir qu’un volume encore d’extraits, un volume plus littéraire que les Conseils de Morale, et conservant sans façon le cachet primitif, pût s’y ajouter et mettre en lumière, ou du moins sauver d’un entier oubli, tant de jugements une fois portés avec rectitude et finesse, plus d’un trait précis qu’on devra moins bien redire en parlant des mêmes choses, et plus d’un qu’on ne redira pas. […] Je trouve, en juillet et août 1809, des articles d’elle sur Collin d’Harleville ; elle distingue en son talent deux époques diverses séparées par la Révolution, l’une marquée par des succès, l’autre par des revers ; dans cette dernière, Collin, très-frappé du bouleversement des mœurs, essaya de les peindre et y échoua : « Car, dit-elle, ce n’était point la société que Collin d’Harleville était destiné à peindre ; ses observations portent plutôt au dedans qu’au dehors de lui-même : il peint ce qu’il a senti plutôt que ce qu’il a vu, etc. » Le nom de Collin d’Harleville restera dans l’histoire littéraire, et on courrait risque, en ignorant ce jugement d’un coup d’œil si sûr, de voir et de dire moins juste à son sujet. — On réimprimait et on publiait alors, vers 1806, chez Léopold Collin, une quantité de lettres du dix-septième et du commencement du dix-huitième siècle, de Mademoiselle de Montpensier, de Ninon, de Mme de Coulanges, de Mlle de Launay, etc. ; Mlle de Meulan en parle comme l’eût fait une d’entre elles, comme une de leurs contemporaines, un peu tardive. […] Avec tant de qualités délicates et ingénieuses, qui faisaient d’elle une dernière héritière de Mme de Lambert, elle avait des qualités fortes ; la polémique ne l’effrayait pas ; les coups qu’elle y portait, dans sa politesse railleuse, étaient plus rudes que ceux que le poëte attribue à Herminie. — Que de fois elle s’est plu à rabattre, avec gaieté et malice, la cuistrerie de Geoffroy et consorts, même sur le latin qu’elle savait un peu98 ! […] Son rajeunissement exquis d’impression se développait en mille sens et se portait sur toutes choses. […] Sa réflexion la portait surtout remarquer en quoi nous en différions.

719. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre III. Combinaison des deux éléments. »

On est devant elle comme devant le cœur vivant de l’organisme humain ; au moment d’y porter la main, on recule ; on sent vaguement que, si l’on y touchait, peut-être il cesserait de battre. […] D’autre part, on essayerait en vain de l’arracher ; les mains qui se porteraient sur elle n’atteindraient que son enveloppe ; elle repousserait après une opération sanglante ; son germe est trop profond pour qu’on puisse l’extirper. — Si enfin, après la religion et la coutume, nous envisageons l’État, c’est-à-dire le pouvoir armé qui a la force physique en même temps que l’autorité morale, nous lui trouvons une source presque aussi noble. […] Cette idée, Rousseau l’a tirée tout entière du spectacle de son propre cœur410 : homme étrange, original et supérieur, mais qui, dès l’enfance, portait en soi un germe de folie et qui à la fin devint fou tout à fait ; esprit admirable et mal équilibré, en qui les sensations, les émotions et les images étaient trop fortes : à la fois aveugle et perspicace, véritable poète et poète malade, qui, au lieu des choses, voyait ses rêves, vivait dans un roman et mourut sous le cauchemar qu’il s’était forgé ; incapable de se maîtriser et de se conduire, prenant ses résolutions pour des actes, ses velléités pour des résolutions et le rôle qu’il se donnait pour le caractère qu’il croyait avoir ; en tout disproportionné au train courant du monde, s’aheurtant, se blessant, se salissant à toutes les bornes du chemin ; ayant commis des extravagances, des vilenies et des crimes, et néanmoins gardant jusqu’au bout la sensibilité délicate et profonde, l’humanité, l’attendrissement, le don des larmes, la faculté d’aimer, la passion de la justice, le sentiment religieux, l’enthousiasme, comme autant de racines vivaces où fermente toujours la sève généreuse pendant que la tige et les rameaux avortent, se déforment ou se flétrissent sous l’inclémence de l’air. […] Parasites et moisissure, l’un attire l’autre, et l’arbre ne se portera bien que lorsque nous l’aurons débarrassé de tous les deux. […] D’après ce principe, aux îles Hawaï, les habitants ont porté une loi qui défend de vendre des spiritueux aux indigènes et qui permet d’en vendre aux Européens.

720. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Il rend grâce à cette jeunesse puissante qui a porté aide et faveur à l’ouvrage d’un jeune homme sincère et indépendant comme elle. […] Catulle Mendès Auguste et doux, serein comme un dieu sans athée, Droit comme les Césars d’un vieil armorial, Il tient ce siècle, ainsi qu’en sa main d’or gantée Charlemagne portait le Globe impérial. […] Ce qu’on peut dire dès à présent, avec assurance, c’est que tous les temps nous envieront l’avènement et le règne, la présence et l’influence vivante d’un tel poète, et que tout un côté de notre siècle portera son nom. […] Chacune de ces œuvres tragiques semble porter le nom d’un champ de bataille : Hernani a l’aspect d’un combat étincelant sous le soleil de l’Espagne, dans quelque sierra désolée ; Ruy Blas ressemble au choc de deux escadrons farouches plus avides de donner la mort que de trouver la victoire ; les Burgraves ont la grandeur douloureuse et titanique des trilogies d’ […] Avant qu’ils n’aillent par le Portique superbe De l’Avenir se disperser dans l’univers, Le Maître a convie pour la cène du Verbe Ceux qui doivent porter aux nations les vers.

721. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

Mes condisciples étaient pour la plupart de jeunes paysans des environs de Tréguier, vigoureux, bien portants, braves, et, comme tous les individus placés à un degré de civilisation inférieure, portés à une sorte d’affectation virile, à une estime exagérée de la force corporelle, à un certain mépris des femmes et de ce qui leur paraît féminin. […] Gardez-vous de croire que ce fût là un calcul personnel ; jamais homme ne porta plus loin le désintéressement que M.  […] Un plan général de grande propagande par l’éducation classique et religieuse s’était dès lors emparé de son esprit, et il allait s’y vouer avec l’ardeur passionnée qu’il portait dans toutes les œuvres dont il s’occupait. […] C’était bien autre chose que rêvait le nouveau supérieur porté par le choix de l’archevêque à la fonction, peu recherchée, de diriger les études des jeunes clercs. […] Il avait fait dans l’intervalle de fortes études bibliques ; je ne pus savoir s’il était tout à fait détaché du christianisme, mais il ne portait plus l’habit ecclésiastique et il était dans une vive réaction contre l’esprit clérical.

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