Lisons-les tous les deux, nous serons dans le vrai de l’histoire et de la destinée du genre humain, en littérature comme en politique. […] Je vais, en peu de mots, vous introduire au fond de mes pensées les plus secrètes, comme au fond de la situation qu’une révolution si soudaine faisait à la France, dont je dirigeais la politique extérieure. […] Je ne le nie pas, mais quelquefois un scrupule de conscience est la plus habile politique. […] aurais-je pu lui rouvrir inoffensivement pour les autres puissances, et plus légitimement pour elle-même, une plus belle perspective de renaissance nationale, politique et littéraire ? […] Est-ce que cette scène politique ou littéraire du monde a quelque prix encore pour celui qui a vu sur quels tréteaux on y monte, et par quels tréteaux on en descend ?
Cette race, dans la politique, dans le commerce, dans la guerre, avait des facultés innées qui éclataient souvent en individualités colossales. […] Le cardinal de Retz, qui fut à l’intrigue ce que Machiavel fut à la politique, était un Toscan. […] Un tel homme est indispensable à Rome, où il y a une politique permanente et traditionnelle à côté de souverains électifs et transitoires. […] Je goûtais beaucoup ces entretiens avec un homme supérieur en âge, en érudition et en politique. […] Alors il allait par les rues de Florence, jetant des pierres aux femmes et aux enfants qui calomniaient son parti politique.
Il avait une grande facilité à rimer ; mais Des Yveteaux lui parla là-dessus comme aurait pu faire Malherbe, et, démêlant mieux son génie, lui conseilla de s’appliquer de préférence à la politique et à l’histoire. […] Veut-on trouver dans son Histoire le contrecoup même de la dédicace et de l’éloge adressé à Richelieu au sujet de la prise de Perpignan : qu’on ouvre le règne de Charles VIII ; Mézeray y montre ce roi assez souvent victorieux, mais peu politique, restituant à la maison d’Autriche une partie de l’Artois et la Franche-Comté : Ce ne fut pas, remarque-t-il, sans un grand étonnement des sages politiques que le roi restitua ces deux comtés : mais ce fut avec murmure et indignation de la France, et à la risée de toute l’Europe, qu’il rendit encore celle (la comté) de Roussillon au roi d’Aragon. […] Mais Charles son fils, tout au contraire, bon à ses sujets, non pas à son État (si rarement se rencontre un prince doux et politique tout à la fois !) […] Blanche la prudente, la sage, la raisonnable, la politique et la sainte, n’a jamais mieux été comprise et présentée que dans ce portrait de Mézeray. […] Dans le voyage qu’il fit contre les Albigeois, elle l’accompagna jusqu’en Languedoc, et faisait porter sa tente pour camper avec lui, tant elle avait peur de s’en éloigner d’autant de chemin qu’il y avait à la prochaine ville, et que cependant quelque autre ne s’emparât de son esprit, qu’elle voulait posséder et gouverner toute seule : ce qu’elle faisait encore par zèle contre les hérétiques… Le reste du portrait se soutient, et l’auteur achève d’y expliquer l’influence à la fois vertueuse et politique de Blanche, son ascendant dès qu’elle fut entrée dans le Conseil de France.
Les mœurs publiques ont changé ; les luttes parlementaires ont montré aux prises, et parfois bien rudement, des athlètes politiques, qui se rencontraient l’instant d’après, et sans apparence de ressentiment, sur le terrain neutre de l’Académie. […] L’Académie, en la personne de plusieurs de ses membres considérables, a, en effet, une grande peur : c’est encore moins la politique qui détermine dans certains cas, que la crainte de la Bohême littéraire. […] Mais, je le répète, il a de bons articles, et fort sensés, à propos de livres politiques et d’histoire, dont on cause et dont on disserte autour de lui. […] Il compte bien avoir pour lui, en se présentant, ses collaborateurs du Journal des Débats qui sont membres de l’Académie, et plusieurs autres amis politiques. […] Éloquence et art d’écrire (philosophie, morale, politique, sciences, etc., tous les genres de prose élevée).
Il y avait, quoi qu’il en soit, dans l’esprit politique des Romains tout le contraire, à certains égards, de l’esprit des Spartiates, une faculté de se transformer et de transiger sans briser, une disposition adoptive, si j’ose dire, qui n’existait pas en Grèce : comme l’aristocratie anglaise, le Sénat romain résistait aux réformes jusqu’au dernier moment ; puis, ce moment venu, il cédait et s’accommodait du nouvel ordre. […] Zeller, avec plus de précision et résumant le sens politique de toute la conduite romaine dans ces mêmes siècles, dira : « Vous avez cet admirable gouvernement où la sagesse du Sénat tempère l’élan de la place publique ; où la monarchie temporaire, sous le nom de dictature, empêche ou modère les luttes ou les excès de l’aristocratie et de la démocratie ; où les Consuls conservent toujours un pouvoir fort ; où les assemblées n’ont que la délibération et la sanction, le contrôle et les appels des grandes causes politiques ; cette société, enfin, où le mariage et la propriété constituent en quelque sorte la cité même, où la famille est réglée comme un État, où l’État et la religion se pénètrent au point que le gouvernement fait un avec le culte, et que l’amour des dieux est le culte même de la patrie, et le culte de la patrie l’amour des dieux ! […] Comme la vie politique n’est qu’une lutte entre les divers ordres de l’État et même entre les particuliers ; comme les tribunaux eux-mêmes sont à Rome une arène ouverte à toutes les passions, l’éloquence est un avantage que nul ne peut négliger, une arme qui sert à défendre son honneur ou sa fortune, à attaquer l’honneur ou la fortune d’autrui, et toujours à jouer un rôle dans la cité. […] Ampère, avait tenté quelque chose de pareil ; mais, préoccupé d’une idée politique trop fixe, il lui est arrivé souvent de forcer Suétone et Tacite, tandis qu’il s’agissait surtout, laissant là les allusions présentes, de se bien rendre compte du passé. […] C’est ainsi que l’historien s’explique que Marc-Aurèle, pendant un règne de dix-neuf ans, n’ait pas plus fait ni tenté pour restaurer radicalement l’Empire, pour en améliorer la Constitution d’une manière durable et qui lui survécût : « Pauvres politiques, se disait tout bas le sage, ceux qui prétendent régler les affaires sur les maximes de la philosophie !
La Restauration, tant qu’elle se tint dans les voies modérées, semblait faite pour satisfaire ses vœux et pour répondre à son idéal politique. […] Droz sur l’application de la morale à la politique, et sur l’économie politique elle-même conçue au point de vue philanthropique, je ne ferai plus qu’une remarque, qui répond à une objection que j’ai souvent entendu adresser à ces sortes d’ouvrages : les hommes d’action, les hommes du métier, sont en général tentés de les considérer comme inutiles, et comme n’étant propres à persuader que ceux qui sont déjà convaincus. […] Droz avait composé des ouvrages dignes d’estime ; « mais les sujets qu’il avait traités ne lui avaient pas donné l’occasion de nous montrer des études aussi profondes, des vues si élevées, un jugement si ferme, un sens politique si exquis et si juste ». […] Droz a senti qu’en révolution il ne fallait pas abdiquer sitôt, qu’il existait alors un homme de génie, le seul même qu’eût produit le mouvement de 89, Mirabeau, et que tant qu’avait vécu ce puissant mortel, il n’y avait pas eu lieu de désespérer tout à fait d’une direction politique. […] [NdA] La Décade avait perdu son titre à cette date et s’intitulait La Revue philosophique, littéraire et politique.