Et l’on a remarqué qu’un jeûne léger, sans exagération, une demi-diète, favorisent mieux la verve des poètes et la réflexion des philosophes que ne ferait la digestion, avec ses suites proverbiales, d’une énorme truffe. […] Il coupe la truffe en deux : « Tous les philosophes, déclare-t-il à sa sœur, devraient naître avec trois mille francs de rente à Paris, et deux mille en province, ni plus, ni moins. » Le devis que propose Stendhal est légèrement plus élevé : « Celui qui n’a pas sept mille francs de rentes, écrit-il quelque part, doit y penser toujours. […] Renan avait connu une crise de conscience, je crois qu’il faudrait la chercher un peu plus tard, quand il a terminé son essai sur l’Avenir de la Science et qu’après quelques tentatives, il se détermine à se conformer à la conduite dictée par les anciens : « Le philosophe doit sacrifier aux dieux de l’Empire. » Ce que Pascal formulait : « Il faut avoir une pensée de derrière la tête et juger du tout par là, en parlant cependant comme le peuple. » Cet aphorisme constitue le point essentiel du « renanisme » ; c’est à l’adopter que le maître put hésiter, parce qu’il avait l’amour de la vérité et qu’il dut lui en coûter de la taire à demi, comme il fit le plus souvent, dès sa trentième année.
Pour compléter le portrait du philosophe, je rapporterai qu’il mâchait d’ordinaire un petit bout de bois, afin de tromper sa nervosité et, sans doute, son besoin de fumer, et quand il se livrait à cette distraction, l’avance du bas du visage lui donnait l’apparence d’un rongeur. […] « Un philosophe n’est pas aisément prophète en son pays. […] L’un d’eux, au xviie siècle, avait été surnommé par son entourage « Taine le philosophe ».
. — De la morale avant les philosophes (1860). — De Sacra poesia Græcorum (1860). — Le Polythéisme hellénique (1863) […] Jules Michelet De la morale avant les philosophes : Un petit livre admirable de force et de bon sens.
Si les Philosophes de nos jours ont fait les derniers efforts pour répandre leurs systêmes désolans ; les vrais Apôtres de la Religion, à la tête desquels on doit placer M. l’Abbé Bergier, ont encore eu plus de zele pour défendre la vérité ; & la victoire a été évidemment du côté des derniers. […] Il joint encore à ses lumieres les sentimens d’un Ecrivain modéré, honnête, très-éloigné de toute prétention dogmatique ; caractere propre à faire sentir évidemment la différence qui subsiste entre l’homme sage & éclairé qui redresse, & le Philosophe fastueux qui égare.
le Vayer, qu’il a été plus modéré que ces deux Philosophes. […] Le doute est une espece de fonds héréditaire que les Philosophes se transmettent les uns aux autres : mais la vérité n’est point leur héritage ; elle est celui du bon usage, des lumieres, & de la raison.
Ce Poëte a de plus le mérite très-estimable d'avoir dédaigné dans ses Ouvrages le vernis philosophique, & de s'être élevé contre les Philosophes, dont les « Ouvrages, dit-il, ne peuvent servir que de trophée à l'extravagance humaine. Il n'est point de systême, ajoute-t-il, tel absurde & ridicule qu'on puisse se le figurer, que des Philosophes anciens n'aient imaginé, & qui n'ait trouvé des Partisans pour les soutenir.