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802. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre I : Des sens, des appétits et des instincts. »

Quand nous regardons un objet éloigné, dit ce physicien, les deux axes visuels sont sensiblement parallèles, et les images qui se peignent dans chaque œil sont semblables ; dans ce cas, il n’y a aucune différence entre l’apparence visuelle d’un objet en relief et sa projection sur une surface plane ; c’est là-dessus qu’est fondé le diorama. […] Et maintenant si l’on remarque que les images peintes sur la rétine sont les matériaux de la vision, qu’ils servent à nous suggérer une construction mentale qui seule constitue la vision proprement dite, « qu’il se produit dans l’esprit, à la vue d’un objet extérieur, un agrégat d’impressions passées que l’impression du moment suggère et ne constitue pas » ; on comprend qu’il importe peu que ces matériaux qui servent au travail ultérieur de l’esprit soient fournis par deux images, comme dans l’homme, ou par des milliers comme dans l’insecte.

803. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Chefs-d’œuvre de la littérature française (Collection Didot). Hamilton. » pp. 92-107

Ce sont de ces traits qui peignent au naturel une race fine, mais fortement trempée. […] Je crois saisir dans ce portrait-là comme un reflet d’Hamilton en personne ; mais c’est surtout quand il nous peint sa sœur, la belle Mlle d’Hamilton qui épousa Grammont, c’est dans cette page heureuse entre tant d’autres qu’il lui échappe des traits que je lui renvoie à lui-même, et que j’applique non pas à sa muse (ce sont des noms solennels qui ne lui vont pas), mais à sa grâce d’écrivain : Elle avait, dit-il, le front ouvert, blanc et uni, les cheveux bien plantés, et dociles pour cet arrangement naturel qui coûte tant à trouver.

804. (1854) Préface à Antoine Furetière, Le Roman bourgeois pp. 5-22

Peindre, telle est l’intention fondamentale du roman de Furetière, et peindre en caricature.

805. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Nièces de Mazarin » pp. 137-156

Renée nous les déballe et nous les peint d’un pinceau galant et charmant, mais sans enthousiasme, sans que la magie de ses déesses fasse une seule fois trembler son pinceau. […] Il juge les femmes qu’il peint en homme que la bonne compagnie ne trouble point, parce qu’il la connaît.

806. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XV. M. Dargaud » pp. 323-339

Cette queue impérieuse qui commande à la tête dans tous les partis et qu’il a méprisée l’a, dit-on, accusé d’avoir fait trop belles certaines individualités catholiques, comme si lui, le plus vrai d’impression de tous les historiens, même quand il ne l’est pas d’appréciation raisonnée, ne les avait pas vues telles qu’il les a peintes, absous par cette pureté de vision qui est, hélas ! […] C’est une espèce de marquis de Posa historique, mais qui ne rêve plus, quand il a congédié l’avenir et circonscrit son regard aux hommes et aux choses qu’il veut peindre.

807. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Récamier »

Mais quand un autre se substitue à elle dans l’expression de souvenirs personnels, et qui n’ont d’autre valeur peut-être que parce qu’ils sont personnels, cet autre — fût-ce une femme, plus flexible qu’un homme pour cette interprétation si délicate et si difficile, — devrait prouver qu’il peut aborder une difficulté si grande en montrant qu’il a profondément compris la personne dont il prend la place, et il doit au moins la peindre ressemblante pour avoir le droit de la remplacer. […] Ici, Madame Récamier n’est pas remplacée, parce qu’elle n’est pas peinte, parce que la personne qui tient le dé pour elle dans ce livre de Souvenirs n’a pas plus pénétré cette femme et ne l’a pas plus reproduite que ne l’aurait fait la première venue qui sait écrire quatre lignes de narration française, dans cette société myope de regard et effacée de langage qu’on appelle la bonne compagnie ; parce qu’enfin sur cette femme, dont la supériorité fait l’originalité la plus rare et la plus exquise, on n’a eu à dire que des banalités élégantes, qui roulent sur tous les parquets depuis qu’il y a au monde des parquets !

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