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453. (1902) Le chemin de velours. Nouvelles dissociations d’idées

Comment les classer, selon quel ordre ? […] Il faut mettre ordre à cela et ranger le monde sous la houlette de Berquin. On confond l’équité, qui est l’ordre, avec la justice, idée chrétienne. […] Leurs moralistes donnent des conseils, jamais des ordres. […] Tous les ordres religieux et le clergé séculier ont fourni des casuistes.

454. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers, Tome xix. (L’île d’Elbe, — L’acte additionnel. — Le champ de mai.) » pp. 275-284

Après le Napoléon du Consulat, le Napoléon de 1815 revenant de l’île d’Elbe avec des paroles de modération et de paix, et appelant à lui non seulement les hommes d’épée, ses vieux compagnons d’armes, non seulement les fonctionnaires de tout ordre, ses anciens serviteurs, mais les amis même de la Révolution et de la liberté, tous les hommes de la patrie, quelle que fût leur origine, ce Napoléon était le plus fait pour toucher et pour entraîner. […] Le registre des correspondances, le journal des ordres donnés par Napoléon, qui a été conservé, a permis à l’historien de résumer avec précision tout ce que fit le souverain déchu durant ces dix mois de séjour. […] On lui a détruit son grand empire, elle va en recommencer un tout petit avec les moyens dont elle dispose, mais de la même manière et dans le même ordre.

455. (1875) Premiers lundis. Tome III « L’Ouvrier littéraire : Extrait des Papiers et Correspondance de la famille impériale »

A un ordre social nouveau il faut des fondations nouvelles et qui en reçoivent l’esprit. […] Les beaux esprits pourraient sourire d’abord, comme ils sourient de tout en France, mais la France n’est pas dans quelques salons, et les travailleurs, dans quelque ordre qu’ils soient, sont trop occupés pour sourire : ils sont sérieux et seraient reconnaissants. […] La comparaison cloche toutefois : le militaire a pour lui l’avancement et les honneurs du grade : l’ouvrier littéraire, en général, n’avance pas ; il n’a pas de grade reconnu, même dans son ordre.

456. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 151-168

Voltaire est le premier qui ait ameuté contre lui tout le Corps des Pygmées Littéraires qui combattoient sous ses ordres. […] Des Auteurs sans génie, sans talent, sans étude, & tout à la fois ambitieux, vains, & tranchans ; les Littérateurs plus habiles dans les mysteres de l’intrigue, que dans ceux de la Littérature, qui, à la faveur des suffrages extorqués, prétendoient attirer les hommages qui ne sont dus qu’au Génie ; des importans du second ordre, qui, se croyant en droit de décider de tout suivant leur caprice, s’efforçoient de substituer un faux culte à celui des véritables Divinités du Parnasse. […] Enfin l’Art poétique d’Horace est un magasin d’excellens Tableaux, jetés au hasard les uns les autres ; celui de Despréaux, une galerie de peintures rangées avec ordre & symétrie, d’où résulte un tout, une histoire qui plaît & intéresse par les nuances & les gradations que le Poëte y a su ménager.

457. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1824 »

En effet, si, après une révolution politique qui a frappé la société dans toutes ses sommités et dans toutes ses racines, qui a touché à toutes les gloires et à toutes les infamies, qui a tout désuni et tout mêlé, au point d’avoir dressé l’échafaud à l’abri de la tente, et mis la hache sous la garde du glaive ; après une commotion effrayante qui n’a rien laissé dans le cœur des hommes qu’elle n’ait remué, rien dans l’ordre des choses qu’elle n’ait déplacé ; si, disons-nous, après un si prodigieux événement, nul changement n’apparaissait dans l’esprit et dans le caractère d’un peuple, n’est-ce pas alors qu’il faudrait s’étonner, et d’un étonnement sans bornes ? […] L’ordre renaît de toutes parts dans les institutions ; il renaît également dans les lettres. […] Il doit les ramener à tous les grands principes d’ordre, de morale et d’honneur ; et, pour que sa puissance leur soit douce, il faut que toutes les fibres du cœur humain vibrent sous ses doigts comme les cordes d’une lyre.

458. (1799) Jugements sur Rousseau [posth.]

Ce livre m’a paru, en général, plein d’éclairs et de fumée, de chaleur et de détails puérils, de lumière et de contradiction, de logique et d’écarts ; en mille endroits l’ouvrage d’un écrivain du premier ordre, et en quelques-uns celui d’un enfant. […] Cette différence se remarque surtout, je n’observe pas l’ordre des volumes, mais n’importe, dans les deux parties de la profession de foi du vicaire savoyard, il n’est guère que rhéteur quand il parle de l’existence de Dieu, de la vie à venir et de l’immortalité de l’âme ; quand il attaque ce qu’il appelle les mensonges que les hommes ont nommés religion, il est orateur et presque philosophe : ce morceau est peut-être celui de son livre qui a réuni le plus de suffrages. […] J’écris, comme l’auteur, mes jugements sans beaucoup d’ordre, et à mesure que les idées me viennent ; les écarts qu’il se permet si fréquemment dans ses livres, doivent moins choquer dans celui-ci que dans aucun autre, parce que l’objet en est si vaste, qu’il n’y a, pour ainsi dire, rien qui n’y tienne.

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