Plus tard, dans les romans que nous préférons, quand Dickens, plus las et plus calme, se fut fatigué de se trop mêler à ses livres, dans Les Grandes Espérances, dans L’Ami commun, il a réussi à peindre, dans le gris et le glauque, quelques beaux sites de marais, de grandioses tombées de nuit sur le lent cours de la Tamise. […] Barnabé Rudge a le spectacle de l’effroyable assaut que donne la populace orangiste contre la prison centrale de Londres, la nuit, à la lueur des torches et des incendies, quand dans les ruisseaux bleus flambants d’eau-de-vie, des amas d’hommes et de femmes brûlent lentement en cuvant leur ivresse. […] L’inanimé et l‘irresponsable, la nature, les cieux et la mer, les drames changeants que jouent en ce théâtre la lumière, les nuages et la nuit, n’ont pas d’attrait pour lui. […] Gil Blas, les Mille et une Nuits. […] On lui donnait six shelling par semaine (7 fr. 50) pour empaqueter toute la journée les boîtes de ce produit, en compagnie de quelques pauvres gamins ; et c’est sur cette somme que l’enfant dut vivre, seul, abandonné toute la semaine, logé la nuit chez une vieille qui ne prenait aucun soin de lui, et achetant lui-même ses maigres repas chez les vendeurs de pouddings et les charcutiers de son quartier.
Ensuite, la mer est transparente ; elle ressemble au firmament ou à l’éther, qui répercutent la lumière de l’astre du jour ou des étoiles de la nuit ; elle se transfigure sans fin comme le caméléon par ses couleurs changeantes, roulant tantôt la lumière, tantôt la nuit dans ses vagues. — Émotion ! […] Elle le voit dans ses rêves ; elle s’entretient nuit et jour avec ses compagnes des perfections idéales de Nala. […] Je mourrai, je le sens, si je ne vois dès aujourd’hui ce prince, plus resplendissant de vertu et de beauté que l’astre des nuits ! […] « Ô femme, aux cheveux noirs comme la nuit », dit-il en s’adressant par une apostrophe involontaire à Damayanti, « ne t’indigne pas contre l’homme infortuné, privé de sa raison, qui cherchait en vain la nourriture de sa femme et la sienne, et à qui des oiseaux néfastes venaient d’enlever jusqu’à son manteau ; si tu vois jamais revenir ton époux, dépouillé de l’empire, indigent, dévoré de remords, ah ! […] « La femme aux joues vermeilles attire sur son sein la tête de son bien-aimé ; elle soupire et sourit à la fois ; ils passent la nuit à se redire comment ils avaient erré sans guide, sans vêtement et sans nourriture, dans la forêt. » XXXVIII Nala, purifié de ses fautes par le pardon de l’amour, rentre, suivi de Damayanti, de ses enfants et de ses serviteurs, dans ses États.
— « En attendant, chaque lit pleure, dans Suse, l’époux absent, et les femmes perses se désolent, ayant perdu les héros, compagnons armés de leurs nuits. » Ce grand chœur est le prélude de la symphonie funèbre qui va suivre ; tous les contrastes s’y heurtent, toutes les alternatives s’y balancent ; son rythme est celui de l’oscillation. […] Nullement confus pourtant dans leur mystère fatidique, modelés sur le fait ou sur l’expiation qu’ils prédisent, avec les hauts reliefs du symbole : on dirait des marbres terribles voilés par la nuit. […] Le Sérail est isolé comme le cloître ; la nuit de l’ignorance s’ajoute à l’ombre des treillages pour l’enténébrer. […] un jour radieux dans une nuit noire ! […] Enfin l’œil de la Nuit noire se fermant, nous abrita sous son ombre.
Demandez-lui le sacrifice de ses repas, de ses jours de congé, de ses nuits, elle les accorde, elle les prodigue avec joie ; mais ses heures de classe, elle n’y touche jamais. C’est au point qu’après huit ou dix nuits, et quelquefois plus, passées au chevet des malades, elle a toujours trouvé assez de force et d’énergie pour ne pas prendre ne fût-ce qu’un quart d’heure de repos sur le temps dû à l’école. […] Veiller les nuits, élever et recueillir chez elle des orphelins, se charger de fardeaux disproportionnés, et les porter à bon port sans fléchir, ce fut sa manière d’être. […] Morlot, qui lui dit : « Je viens pour vous défendre de veiller les nuits ; vous devez vous ménager pour les vôtres et pour les pauvres. » Et il lui remit une médaille avec cordon rouge.
Peu après il partit pour sa belle terre de Veretz en Touraine, et se mit à penser de plus en plus sérieusement à la perte irréparable : « La retraite, dit M. de Chateaubriand (d’après Dom Gervaise), ne fit qu’augmenter sa douleur : une noire mélancolie prit la place de sa gaieté ; les nuits lui étaient insupportables ; il passait les jours à courir dans les bois, le long des rivières, sur les bords des étangs, appelant par son nom celle qui ne pouvait lui répondre. […] L’amour reproduisait à sa mémoire ornée le sacrifice de Simèthe cherchant à rappeler un infidèle par un des noms d’un passereau consacré à Vénus ; il invoquait la Nuit et la Lune… » Je ne sais s’il fit, en effet, toutes ces choses que le génie, cet autre enchanteur, peut à son gré remuer et évoquer. […] Il n’avait pas moins fallu pourvoir au matériel, relever les bâtiments qui tombaient en ruine, en chasser le bétail et les oiseaux de nuit, refaire les clôtures. […] » En vain, au début du livre, par manière de prélude, il se disait en une de ces paroles, telles que seul il les sut trouver : « La vieillesse est une voyageuse de nuit : la terre lui est cachée ; elle ne découvre plus que le ciel. » À deux pas de là, il oubliait cette vieillesse que les dieux de la Grèce ne connaissaient pas, ou il ne s’en souvenait que pour s’écrier : « Ô Rome !
Le dit de l’outillement au vilain 86 nous fait défiler sous les yeux tout ce qui compose un ménage rustique, jusqu’à la vache dont le lait empêchera le marmot de crier la nuit. […] Comme lorsque Amour expose le devoir d’un amant, qui est de ne pas dormir en son lit la nuit, et d’aller rêver à la porte de sa belle, Soit par nuit ou par gelée, maître Guillaume, emporté par la situation, met une parenthèse humoristique et réaliste, qui tranche avec le caractère abstrait et idéal du morceau. A la place de la dame irréelle, il voit une vraie femme, qui remplira sa nuit bourgeoisement, prosaïquement, qui, dit-il, … Sera peut être endormie Et à toi ne pensera guère.