Il est porté au directoire du département de la Côte-d’Or, et il y suit la ligne de modération ferme qui devait être la règle du régime nouveau et la condition de sa durée. […] Passy, dans l’étude consciencieuse qu’il a faite, s’attache à montrer ce que fut, au sortir de là, le préfet de la Seine sous le Consulat et l’Empire ; quelles ressources et quels obstacles il rencontrait pour l’accomplissement de sa tâche dans les lois nouvelles, dans la nature du gouvernement et dans le caractère du maître : « C’est le seul moyen, dit-il, de rendre une équitable justice à l’homme qui, avec du labeur, du bon sens, de l’honnêteté, sut faire des qualités supérieures. » Il y eut plus d’un moment distinct et plus d’une étape durant ces douze années d’administration : le Conseil général, composé de vingt-quatre membres nommés par Napoléon, n’eut pas tout à fait le rôle qu’on semblait lui destiner d’abord. […] Parmi les personnages publics surpris par Malet, tous du moins s’étaient récriés, avaient résisté et n’avaient cédé qu’à la violence : un seul, que la conspiration semblait épargner comme moins suspect, avait accepté, sans raisonner, le mot d’ordre et, au premier avis, avait tenu son Hôtel-de-Ville ouvert comme une hôtellerie aux nouveaux arrivants. […] En 1815, à cette heure de réaction, tout disgracié du gouvernement impérial devenait comme de droit un favori et un adopté du régime nouveau.
Ainsi se forment de nouveaux centres d’agriculture et d’industrie qui deviennent aussi des centres nouveaux de population6. […] Là les persécuteurs, au moment de frapper, tombent sous une atteinte invisible ; les bêtes sauvages deviennent dociles ; les cerfs de la forêt viennent chaque matin s’atteler d’eux-mêmes à la charrue des saints ; la campagne fleurit pour eux comme un nouveau paradis ; ils ne meurent que quand ils veulent. […] Pour la seconde fois, une figure idéale se dégage9 après celle du saint, celle du héros, et le nouveau sentiment, aussi efficace que l’ancien, groupe aussi les hommes en une société stable.
Avec des accents tout nouveaux, ils font des lettres une partie de l’honneur national et comme une province de la patrie. […] Ce qu’on peut demander alors, c’est que celui qui fait des mots nouveaux les fasse par bon jugement. […] Au moins Ronsard ne veut-il pas que ces composés soient « prodigieux », mais, comme tous « vocables » nouveaux, « moulés et façonnés sur un patron déjà reçu du peuple ». […] 6° Plus originale, plus audacieuse est la méthode si fort préconisée par Ronsard : le provignement des mots : « Si les vieux mots abolis par l’usage ont laissé quelque rejeton, tu le pourras provigner, amender et cultiver, afin qu’il se repeuple de nouveau. » Ainsi de lobbe, on tirera lobber, de verve, verver, d’essoine, essoiner.
La direction de l’esprit public n’appartenait plus à la littérature, qui demandait à la critique les moyens de se mettre en harmonie avec les besoins nouveaux des intelligences. […] En histoire, Taine a repris le sujet qui avait tenté Tocqueville faire comprendre, par la description de l’ancien régime, de la Révolution, du régime nouveau, ce qu’est la France contemporaine. […] (Premiers Lundis), 1875 et suiv. ; Table, 1881, in-8. ; Nouveaux Lundis, 10 vol. in-18, C. […] Outre les ouvrages que je nomme ci-dessous, il a écrit son Voyage aux Pyrénées (1855), ses études sur les Philosophes français du xixe siècle (1855-56), sa Vie et opinions de Thomas Graindorge (1863-65), ses Notes sur l’Angleterre (1872).Éditions : Hachette, in-18 : De l’lntelligence, 2 vol ; Littérature anglaise, 5 vol. ; Philosophie de l’art, 2 vol. ; Essais de critique et d’histoire, 1 vol. ; Nouveaux Essais, 1 vol. ; Derniers Essais, recueil posthume, 1894, 1 vol. ; Origines de la France contemporaine, 7 vol. in-8 (Ancien Régime, 1 vol ; Révolution, 3 vol. ; Empire, 2 vol.)
Trop de gens — même parmi ceux qui font profession d’écrire l’histoire littéraire ou de diriger le public dans le jugement des ouvrages anciens et nouveaux — trop de gens ne sont habitués qu’à lire rapidement comme on lit un-journal ou comme on lit un roman, à parcourir plutôt qu’à lire. […] Nous sommes un public pour ces écrivains immortels au même titre que les gens de 1580 ou de 1670 ; et nous avons le même droit d’essayer sur nos consciences, nos sensibilités et nos intelligences, la vertu de leurs œuvres, de les obliger à révéler par les réactions de nos esprits des propriétés nouvelles, que les générations des siècles disparus n’ont pas ou n’ont qu’à peine soupçonnées4. […] Ce jour est venu quand les textes français sont devenus objets d’étude, quand ils ont, en vieillissant, perdu pour les nouvelles générations cette clarté apparente d’expression et d’idée dont le premier public se contentait ; enfin quand les écoles et les collèges s’en sont emparés pour en faire les instruments de l’éducation de la jeunesse. […] Et voici notre application de nouveau justifiée.
La part de plus en plus grande faite à l’éducation, à l’instruction et à l’imitation, la spécialisation croissante des procédés et des aptitudes, la nécessité croissante d’un apprentissage laborieux, les exigences d’une technique artistique minutieuse, les disciplines compliquées et les raffinements voulus des nouvelles écoles poétiques et artistiques sont autant de barrières à l’essor de l’imagination, autant d’obstacles à la spontanéité de l’inspiration. Il est difficile de trouver du nouveau. Les nouvelles formes d’art sont vite usées et confessent bientôt leur épuisement et leur stérilité45. […] Peu d’artistes partageraient aujourd’hui l’espoir un peu naïf de Mme de Staël qui croyait que la littérature pourrait trouver dans les nouvelles conditions sociales des causes de renouvellement, que le théâtre, la philosophie et l’éloquence seraient appelée à un éclat imprévu46.