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14. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre IV. Le Père. — Priam. »

D’abord il se garde bien de nommer le héros troyen ; il dit seulement, il y en avait un, et il ne nomme Hector à son vainqueur, qu’après lui avoir dit qu’il l’a tué combattant pour la patrie ; Τὸν σὺ πρώην κτεῖνα ; ἀμυνόμενον περὶ πάτρης : il ajoute alors le simple mot Hector, Ἔκτορα. […] Si Priam eût d’abord nommé Hector, Achille eût songé à Patrocle ; mais ce n’est plus Hector qu’on lui présente, c’est un cadavre déchiré, ce sont de misérables restes livrés aux chiens et aux vautours ; encore ne les lui montre-t-on qu’avec une excuse : Il combattait pour la patrie, ἀμυνόμενον περὶ πάτρης.

15. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Sénecé ou un poète agréable. » pp. 280-297

La montagne que l’on trouve à droite est la plus élevée ; la ville qu’elle porte sur sa croupe se nomme Invention ; elle est superbe en tours et en édifices dont la structure paraît merveilleuse. Mais ce qui la rend plus remarquable et la distingue de toutes les cités qui se voient ailleurs, c’est un château qui commande toute la ville et que l’on nomme Bel Esprit. […] Il est extrêmement rapide… Et voilà les ingéniosités quintessenciées et glaciales que Sénecé met dans la bouche de Virgile, en prétendant que rien ne ressemble plus au siècle d’Auguste que celui de Louis XIV ; c’est du Scudéry tout pur, c’est la carte du royaume de Tendre transportée dans la description du goût. — Et puis, quand on est embarqué sur le fleuve d’Imagination, l’arrivée à l’endroit nommé le Péage des critiques, la garde qu’y font les capitaines Scaliger, Vossius et autres, les « petits bateaux couverts qu’on appelle métaphores », et dont quelques-uns échappent à grand-peine à ces terribles douaniers ; et plus loin, quand on a pénétré dans le cabinet du Bon Goût, l’attitude et l’accoutrement baroque de ce bon seigneur qui m’a tout l’air d’être fort goutteux, appuyé d’un côté sur la Vérité et de l’autre sur la Raison, qui, tenant chacune un éventail, lui chassent de grosses mouches de devant les yeux (ces mouches sont les Préjugés) : les deux jeunes enfants qui sont à ses pieds, aux pieds du seigneur Bon Goût, et qui le tirent chacun tant qu’ils peuvent par un pan de son habit, l’un, un petit garçon toujours inquiet et remuant, nommé l’Usage : l’autre, une petite fille toujours fixe et assise, une vraie poupée nommée l’Habitude, que vous dirai-je de plus ? […] Il fit certaine pièce nommée Athalie, dont le sujet est tiré des livres saints, pour récompense de laquelle il fut gratifié d’une charge de gentilhomme ordinaire de la chambre du roi. […] Je sais que, parlant ailleurs de Racine dans une épigramme ou épitaphe, Sénecé l’appelle le grand Racine ; mais ce qui lui est propre et ce qui est unique, c’est une certaine pièce nommée Athalie ; voilà le mot décisif qui juge à jamais le goût de Sénecé et qui le classe, lui l’agréable auteur, à côté de Mme Des Houlières, de Fontenelle et autres qui ont traversé le grand siècle par la lisière, en ayant assurément beaucoup d’esprit, mais pas le meilleur en tout ce qui touche au grand goût ou au goût solide.

16. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Aristophane, et Socrate. » pp. 20-32

Cet oracle de Delphes, qui l’avoit nommé l’homme de la Grèce le plus sage ; cette fureur de décrier toutes les sectes, & de n’en avoir aucune ; cette antipathie pour tout ce qui étoit mode, agrémens, magnificence, plaisirs, fêtes ; ses goûts suspects ; ses tracasseries de ménage ; le prétendu démon duquel il se disoit inspiré ; tout, jusqu’à sa naissance & sa profession, fournissoit des armes contre lui. […] Cette même Athènes défendit de traiter des sujets véritables, & de nommer les personnes. […] Dans l’in-promptu de Versailles, il a nommé Boursault, qui avoit fait contre lui la comédie intitulée le Portrait du peintre. Il ne ménagea pas la cour & les dévots, encore moins les médecins, sans nommer néanmoins les personnes.

17. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

Un nommé Mirza Mughim était alors bibliothécaire, qui est celui qu’Abas II envoya en qualité d’ambassadeur au roi de Golconde l’an 1657. […] L’allée finit à une maison de plaisance du roi, qui en occupe la largeur, et qui est si grande, qu’on la nomme Mille-Arpents. […] Le fils aîné fut nommé, et l’ombre du harem couvrit le sort du second fils. […] On nommait encore cette immense allée Thaq sebz, la Voûte verte. […] Le pont qu’il fit bâtir se nomme aussi pont de Djulfah, parce qu’il conduit à ce faubourg.

18. (1914) Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne pp. 59-331

Un certain contact nommé mouillé, une certaine entrée en contact nommée mouillature ne s’établit pas. […] Ce qu’ils nomment liberté c’est ce que nous nommons une bonne servitude. Comme ce qu’ils nomment socialiste c’est ce que nous nommons un pâle centre gauche. Et ce qu’ils nomment révolutionnaire c’est ce que nous nommons par ici un bon conservateur. […] Quand on ne nomme pas, c’est lui que l’on nomme.

19. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie militaire du général comte Friant, par le comte Friant, son fils » pp. 56-68

Championnet demanda au général en chef Jourdan le nom de cet officier précieux et désira l’avoir avec lui pour commander son avant-garde ; et quand peu de temps après Friant passa général, il lui apprit sa nomination en ces termes tout empreints de la camaraderie républicaine : Le représentant du peuple Gillet vient de rendre justice à ton mérite ; il t’a nommé général de brigade. […] Le général Menou avait pourtant nommé Friant lieutenant général de l’armée d’Orient, pour en remplir les fonctions sous ses ordres ; mais il n’en écouta pas davantage ses avertissements militaires. […] Je ne cherche à jeter de la défaveur sur personne, mais un jour chacun de ceux qui ont eu part aux événements devra rendre compte au gouvernement de sa conduite ; la mienne sera facile à connaître : le général Menou fut nommé par vous notre général en chef9 ; il avait votre estime, il eut votre confiance ; devais-je lui refuser la mienne ? […] » Friant indiqua Dorsenne et rappela quel beau colonel ou chef de brigade il était en Égypte. « C’est vrai, dit l’empereur, mais il y a encore tel et tel », et il en nomma d’autres. — « En ce cas, ce n’était pas la peine de me consulter », répliqua Friant. — « Allons, Friant, ne vous fâchez pas, on prendra Dorsenne. » Friant, grièvement blessé à la bataille de la Moskowa, se trouvait encore retenu à Paris à l’ouverture de la campagne de 1813. […] Le général Bonaparte, en quittant l’Égypte, avait nommé Kléber général en chef.

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