C’est au goût individuel à fixer les nuances et choisir les mesures. […] Ce n’est, pas la diversité continue d’un paysage qui se déroule aux yeux du voyageur, à mesure qu’il s’avance : ce sont les verres d’une lanterne magique, que l’opérateur présente successivement, et non pas si vite qu’il n’y ait entre les diverses vues un court moment où l’on ne voit rien.
Et, dans la mesure où il est libre, il ne peut élire que des idées qui arrivent à lui un temps nécessairement longs après leurs conceptions, soit après que la nature des choses les avait suggérées à des penseurs, par conséquent au moment même où les choses qui n’ont garde de stagner imposent à des synthétistes plus récents des philosophies plus adéquates. […] Leur double passage reconstituait derrière moi, si je tournais la tête pour les voir, une ordonnance et une surprise nouvelles dont l’aspect se modifiait encore à mesure de mon progrès vers ce qui fournissait à mon changement la matière de sa variété. » C’est la précision même, une précision de myope, qui veut se rendre compte et, à défaut des couleurs, voir nettement les lignes.
Le grand Alcandre, pour avoir le plaisir de voir madame de Montespan, allait plus souvent chez madame de La Vallière, et madame de La Vallière, se faisant l’application de ces nouvelles assiduités, en aimais davantage encore madame de Montespan… Mais enfin… elle s’aperçut bientôt de la vérité… elle se plaignit au grand Alexandre, qui lui dit qu’il était de trop bonne foi pour l’abuser davantage ; qu’il aimait madame de Montespan ; mais que cela n’empêchait pas qu’il ne l’aimait comme il devait, et qu’elle devait se contenter de ce qu’il faisait pour elle… Nouveaux pleurs, nouvelles plaintes… Mais le grand Alcandre n’en étant pas plus attendri, lui dit une seconde fois que si elle voulait qu’il continuât de l’aimer, elle ne devait rien exiger de lui au-delà de sa volonté ; qu’il désirait qu’elle vécût avec madame de Montespan comme par le passé, et que si elle témoignait la moindre chose de désobligeant à cette dame, elle l’obligerait à prendre des mesures. […] Les mémoires de mademoiselle de Montpensier nous apprennent que jusqu’à la mort de la reine-mère, arrivée le 20 janvier 1666, « le roi avait gardé quelques mesures de secret sur son amour pour madame de La Vallière, pour ne point donner de chagrin à la reine-mère ; mais que quand il fut hors de cette appréhension, cette affaire devint publique » ; et Mademoiselle ajoute que dans ce temps-là… madame de Montespan, qui était une des dames de la reine, « commença à aller chez madame de La Vallière, qui était ravie de la voir chez elle pour amuser le roi. » C’est cet amusement du roi qui commença l’intrigue dont Bussy-Rabutin raconte si bien l’origine.
Ecoutons encore : le Maréchal de Saxe étudioit l'art qui enseigne les propriétés du mouvement, qui mesure les temps & les espaces, qui calcule les vîtesses & commande aux élémens dont il s'assujettit les forces,…. […] Il décompose les ressorts de toutes ces machines immenses, observe celles qui, avec le moins de force, produisent les plus grands mouvemens…… Il franchit les barrieres qui sont entre l'homme & l'infini, &, le compas à la main, mesure les deux extrémités de cette grande chaîne.
Ceci est particulièrement intéressant, instructif, excellent et nécessaire à connaître pour juger d’un talent que Voltaire s’est amusé à grandir outre mesure, et d’une moralité que ses éloges ont rendue suspecte. […] Je vais vous lire encore… » « Votre état me touche (continuait-il en 1745), à mesure que je vois les productions de votre esprit si vrai, si naturel, si facile et quelquefois si sublime… » Et, en 1746, faisant toujours la boule de neige de ces incroyables éloges : « Je vais lire vos portraits, — lui mandait-il. — Si jamais je veux tracer celui du génie le plus naturel, de l’homme du plus grand goût, de l’âme la plus haute et la plus simple, je mettrai votre nom au bas… » Ailleurs, à propos de cette détestable et ridicule déclamation, fausse comme les larmes d’un catafalque, sur la mort d’Hippolyte de Seytres, tué dans la campagne de Bohême, il avait déjà comparé Vauvenargues à… Bossuet !
C’est le regard d’un enthousiasme enivré qui n’a pas vu le peu de valeur de ces lettres vantées par eux outre mesure, et qui leur a fait intituler leur livre : Sophie Arnould d’après sa correspondance. […] Edmond de Goncourt avait ajouté de ces choses qu’inspire la vie et qui nous font la mieux comprendre, à mesure que nous la perdons, le livre, œuvre éclatante et charmante, aurait pu devenir un chef-d’œuvre.