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708. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — II. (Fin.) » pp. 495-513

Mme de Staal de Launay, dans ses ingénieux Mémoires, a immortalisé cette petite scène de raccommodement qui eut lieu à souper, le 5 avril, dimanche d’avant Pâques de 1716 : ce jour des Rameaux n’était pas choisi sans dessein pour le pardon chrétien des injures : Avant que je fusse à la Bastille, écrit Mlle de Launay, M. de Valincour m’avait fait faire connaissance avec M. et Mme Dacier ; il m’avait même admis à un repas qu’il donna pour réunir les anciens avec les modernes. […] Je laisse dans le mépris qu’il mérite un mémoire odieux, né de quelque rancune fanatique au sein du parti protestant qu’elle avait quitté117. […] [NdA] On lit ce mémoire dans la Bibliothèque française ou Histoire littéraire de la France (1735), t. 

709. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — I. » pp. 312-329

Ludovic Lalanne, publie pour la première fois62 un texte plus exact et véritablement naturel des Mémoires de d’Aubigné, qui ne se lisaient jusqu’à présent que dans une version arrangée et rajeunie : il a mis à la suite du texte tous les fragments tirés de l’Histoire universelle du même auteur, qui se rapportent à sa vie. […] Ses petits Mémoires, destinés à ses enfants, et qu’on publie aujourd’hui dans un texte plus exact, c’est-à-dire dans une langue plus inégale qu’on ne les avait précédemment, ne doivent point, si l’on veut prendre de lui une entière idée, se séparer jamais de la grande Histoire à laquelle il renvoie sans cesse, et où il se montre par ses meilleurs et ses plus larges côtés. […] Henri IV, dans les Mémoires particuliers de l’auteur, nous est montré par d’assez vilains côtés et qui tendraient à le rapetisser ; on l’y voit atteint et accusé d’envie, d’avarice : il n’est rien de tel dans la grande Histoire, et ces petits griefs personnels et de domesticité s’évanouissent : d’Aubigné y replace le héros et le politique à sa juste hauteur, et l’ayant perdu, le regrettant avec larmes, il lui redevient publiquement favorable et fidèle.

710. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Lammenais » pp. 22-43

J’ai beau chercher dans ma mémoire, je ne trouve rien à comparer, même de loin, au spectacle que nous offre la Chambre des députés… Jamais on n’avait vu une dégradation si burlesque, ni une corruption si bête. » (28 mars 1825.) […] L’avenir ne le reniera pas ; sa dernière forme, dégagée de quelques violences qui de loin, déjà, nous font seulement sourire, prévaudra dans la mémoire ; son dernier geste, dès qu’on veut bien oublier l’énergumène ou l’enfant colère, est d’un ami touché de tendresse jusqu’au fond de l’âme pour ceux qui viendront. […] Guizot, a tracé de lui, au tome III de ses Mémoires, un portrait supérieur, éloquent, ressemblant, généreux d’intention jusque dans sa sévérité, admirable de talent, pour tout dire.

711. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

Il y avait bien dans ]’Institut une Classe qui répondait à ce qu’avait été l’Académie française ; mais cette Académie elle-même existait alors si peu comme un corps identique à l’ancien, qu’on a un mémoire rédigé par Fontanes vers cette date et en vue de son rétablissement : Napoléon, qui avait sans doute demandé le mémoire, ne donna pas suite à l’idée. […] Ce fut aussi chose à peu-près convenue dès lors, dans l’opinion, que les autres Académies moins nobles travaillaient, publiaient des mémoires, des recueils savants dont on leur demandait un compte exact et fréquent mais que l’Académie française, à part son Dictionnaire qu’elle retouchait de temps en temps et qu’elle recommençait toujours, ne travaillait pas : elle était censée comme les lis de la vallée, « qui ne travaillent ni ne filent. » Une conséquence qui découlait de cette distinction première : toutes les autres Académies eurent des académiciens libres ou amateurs ; l’Académie française seule n’en eut pas.

712. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier »

Ces preuves, ce sont sans doute les écrits durables et permanents ; mais le plus sûr est de ne pas s’en tenir uniquement aux écrits déjà anciens et qui ont jeté leur feu ; le meilleur coup de fortune pour une mémoire immortelle est d’avoir, du sein du tombeau, deux ou trois de ces retours et de ces réveils magnifiques qui étonnent les générations nouvelles, qui les convainquent qu’un mort puissant est là, redoutable encore jusque dans son ombre et son silence. Les Mémoires d’Outre-tombe de Chateaubriand, tant de pages même si justement critiquées, mais marquées encore de la griffe du lion, n’ont fait que confirmer l’idée de son talent et de sa force dans l’esprit des jeunes groupes, toujours prêts à se révolter, et ses défauts même, qui sont les leurs, l’ont servi. […] J’ai vu avec peine que la mémoire et la célébrité de Mme de Staël n’avait eu aucune de ces bonnes fortunes et aucun de ces rafraîchissements.

713. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Lettres inédites de Jean Racine et de Louis Racine, (précédées de Notices) » pp. 56-75

Les Mémoires sur sa Vie que nous a laissés son fils sont fort agréables, très justes en général par l’esprit de tradition et de piété qui les anime, mais inexacts en bien des points, surtout pour les commencements et le début de la carrière. […] Un des interlocuteurs des Soirées, le Chevalier ayant cité de mémoire quelques vers de Racine fils, le Comte lui répond : « Avant de vous dire mon avis, Monsieur le Chevalier, permettez, s’il vous plaît, que je vous félicite d’avoir lu Louis Racine avant Voltaire. […] Aussi ne marche-t-on qu’avec eux, en s’appuyant sur eux, sur ce qu’ils ont dit ; on a dans la mémoire toutes sortes de belles ou jolies sentences, recueillies à loisir et qu’on tient à placer ; on dirige tout son discours, on incline tout son raisonnement pour amener une phrase de Quintilien, pour insinuer une pensée de Cicéron, et l’on est tout content d’avoir échappé ainsi à penser par soi-même et en son propre nom.

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