C’est en cela que le romantisme, qui a été, au point de vue du rajeunissement de la langue et de la forme, une littérature essentiellement révolutionnaire, est resté par le fait une littérature réactionnaire et conservatrice. […] Cette seconde période de la littérature moderne a été, suivant nous, magistralement inaugurée par Balzac. […] Avant de prendre pour femme légitime la politique, il avait eu la littérature pour maîtresse ; — il m’est même revenu qu’il lui avait fait pas mal d’enfants. […] Chénier ; la Chaumière indienne. — Caractère révolutionnaire de la littérature contemporaine. — Les comédies de MM. […] Je me trompe ; la Révolution enfanta un chef-d’œuvre : la Chaumière indienne ; mais, suffit-il d’un chef-d’œuvre de deux cents pages pour faire une littérature ?
L’institution de l’Académie, en France, c’est la règle et le gouvernement introduits dans la littérature, et, chose admirable ! […] Le temps n’était pas encore arrivé de discipliner la littérature, d’instituer des règles, de choisir. […] L’académie espagnole se fonda en 1714, quand il n’y avait plus de littérature espagnole, sur le patron de l’Académie française apporté par Philippe V, parmi les instructions de Louis XIV. […] Peut-être même aurait-on le droit de lui reprocher d’avoir été, à certaines époques, de complicité avec ce qui détruit les littératures et les langues, je veux dire la mode. […] C’est ainsi que se prépara l’époque de notre littérature où l’on a eu le plus de goût, et où l’on a le plus inventé.
un des grands buts de la littérature romantique ! […] C’est là de l’art et de la littérature. […] Jules Janin, quand au contraire, on aurait dû lui faire compliment d’enrichir notre littérature d’une branche nouvelle. […] Il a certainement et à un haut degré l’amour du beau et du bien dans les productions de la littérature, de la peinture, de la musique. […] Il n’est besoin, pour en tomber d’accord, que de considérer ses travaux, en les comparant au mouvement de la nouvelle littérature.
Mais il nous faut maintenant revenir au point de départ, à la première époque de la littérature française, et embrasser d’un regard les principaux caractères du monde qui s’y exprime et s’y réjouit. […] Ne nous attachons pas à la société cléricale, qui d’abord fournit si peu à la littérature française. […] Il était nécessaire de le dire, car la littérature ici ne reflète pas tout le génie national : si le Parthénon et une tragédie de Sophocle, un discours de Bourdaloue et les jardins de Versailles sont des manifestations étroitement apparentées du même génie, rien dans les formes littéraires du moyen âge français n’évoque l’idée de la conception esthétique qui fit surgir les grands monuments de l’art roman ou gothique.
Pour ne parler que de la littérature, c’est un curieux spectacle bien digne de pitié ou de raillerie que celui des conclusions contradictoires où peuvent aboutir des écrivains de talent et de bonne foi traitant de la même époque. […] Je voudrais qu’on distinguât nettement l’histoire de la littérature de la critique proprement dite. […] La critique est à l’histoire de la littérature ce que la politique est à la sociologie, la médecine à la physiologie ; l’une applique ce que l’autre a trouvé et prouvé ; l’une veut agir immédiatement sur les hommes et les choses ; l’autre porte dans l’étude des lois de la vie un désintéressement absolu et une sérénité toute scientifique.
Aussi les rôles ont-ils été renversés : Racine a de nouveau grandi, pendant que Corneille était rabaissé par les juges attitrés de notre littérature ; ils ont préféré la psychologie fine aux grands sentiments et à la force d’âme, preuve en soit les articles de MM. […] Je n’ai parlé jusqu’ici que des effets littéraires de la littérature : mais elle en a d’autres qu’on ne saurait oublier. […] La mode, à plus forte raison, suit souvent les impulsions de la littérature.