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186. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Anatole France, le Lys rouge »

Il est sauvage et libre, malgré les codes et les modes. […] Elle a l’esprit philosophique et libre. […] Brunetière, non l’infaillibilité de la science, mais le droit illimité de la recherche scientifique et de la libre spéculation.

187. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VII. Développement des idées de Jésus sur le Royaume de Dieu. »

Peut-être si le baptiste, à l’autorité duquel il lui aurait été difficile de se soustraire, fût resté libre, n’eût-il pas su rejeter le joug des rites et des pratiques extérieures, et alors sans doute il fût resté un sectaire juif inconnu ; car le monde n’eût pas abandonné des pratiques pour d’autres. […] Plusieurs stoïciens avaient trouvé moyen d’être libres sous un tyran. […] Mais, en constituant une immense association libre, qui, durant trois cents ans, sut se passer de politique, le christianisme compensa amplement le tort qu’il a fait aux vertus civiques.

188. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVIII. Caractère essentiel de l’œuvre de Jésus. »

Nos civilisations, régies par une police minutieuse, ne sauraient nous donner aucune idée de ce que valait l’homme à des époques où l’originalité de chacun avait pour se développer un champ plus libre. […] La prédication de Jésus, sa libre activité en Galilée ne sortent pas moins complètement des conditions sociales auxquelles nous sommes habitués. […] Mais le souffle de Dieu était libre chez eux ; chez nous, il est enchaîné par les liens de fer d’une société mesquine et condamnée à une irrémédiable médiocrité.

189. (1902) L’humanisme. Figaro

Mais, bien qu’ils y revinssent toujours comme en leur citadelle inexpugnable, les parnassiens sortirent souvent de la belle tour close où ils adoraient à l’écart l’idole hiératique : témoin Leconte de Lisle, dont la poésie, si impassible qu’elle veuille être, laisse souvent deviner la pensée généreuse et entendre le cœur palpitant ; témoin Sully Prudhomme, si préoccupé de justice et de bonheur, et qui loua André Chénier d’avoir uni Le laurier du poète à la palme du juste ; et Anatole France, dont les Noces corinthiennes ont pu sembler, vingt ans après avoir été écrites, une pièce d’actualité ; et le tendre et nostalgique Dierx, et Catulle Mendès, dont la fantaisie est si moderne, et Coppée, penché sur les humbles, et Heredia enfin, le somptueux conquistador épris des époques reculées et des rivages lointains, qui un jour, se souvenant qu’il était un homme d’aujourd’hui et appartenait à un « peuple libre », consentit à dresser un beau « trophée » en plein Paris, sur le pont Alexandre. […] Le vers libre lui-même, je le crois, est capable de vraies beautés, s’il sait à la fois, selon la remarque récente d’un des esprits les plus indépendants du symbolisme, « se symétriser et se styliser ». […] Vous figurez-vous donc que l’esprit humain, que la raison humaine soit libre de fuir, à sa fantaisie, cet immense désert où elle se promène douloureusement tous les jours, sans eau ni ombrage ; et dont il faut absolument tenir compte, puisque l’univers même en est la plus éclatante manifestation.

190. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre I : Une doctrine littéraire »

Nous transportons ces vues dans la littérature et dans les beaux-arts ; nous pensons que c’est l’initiative individuelle qui a trouvé le beau, que l’idéal n’est passé dans la réalité et n’est devenu sensible que par la création libre des grands artistes et des grands écrivains, dont chacun lui a donné la couleur de son âme. Par là, nous sommes surtout favorable dans les arts aux inventeurs, à ceux qui sortent des voies battues à leurs risques et périls ; et, sans méconnaître le charme et le mérite des grandes beautés régulières, nous leur préférons les beautés libres et hardies. […] C’est celle qui recommande et même ordonne l’examen, c’est-à-dire le libre exercice du jugement.

191. (1824) Notice sur la vie et les écrits de Chamfort pp. -

Habitué à parler en homme libre, il ne pouvait se persuader qu’il fût dangereux de s’expliquer franchement sur les hommes et les choses. […] Les personnes qui se trouvaient chez lui, et avec lesquelles il venait de dîner, averties de ce qui se passait par le bruit du coup de pistolet et par le sang qui coule à flots sous la porte, se pressent autour de Chamfort pour étancher le sang avec des mouchoirs, des linges, des bandages ; mais lui, d’une voix ferme, déclare qu’il a voulu mourir en homme libre, plutôt que d’être reconduit en esclave dans une maison d’arrêt, et que si, par violence, on s’obstinait à l’y traîner dans l’état où il est, il lui reste assez de force pour achever ce qu’il a commencé. « Je suis un homme libre, ajouta-t-il, jamais on ne me fera rentrer vivant dans une prison. » Il signa cette déclaration où respire l’énergie du plus ferme caractère ; et sans daigner s’apercevoir qu’il pouvait être entendu des nombreux agents de la tyrannie, il continua de s’expliquer librement sur les motifs de l’action qu’il venait de commettre.

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