Alors le livre déchu n’est plus jugé qu’au poids du talent et du mérite. […] Elle ne saurait être coupable de l’espèce de galimatias double (on va en juger) que Raphaël lui prête dans ce moment solennel de la conversion : Dieu !
M. de Lamartine lui-même n’avait pas été si bien accueilli de lord Byron que M. de Musset semble le croire : Byron, dans ses Mémoires, ne parle de cette belle épître sur L’Homme, des premières Méditations, que très à la légère et comme de l’œuvre d’un quidam qui a jugé à propos de le comparer au démon et de l’appeler chantre d’enfer. […] Comment M. de Chateaubriand lui-même, qui garda si bien les dehors, jugeait-il dans le principe M. de Lamartine poète, sinon comme un homme de grand talent et de mélodie, qui avait eu un succès de femmes et de salons ?
On peut juger nettement par ce passage à quel point Pascal négligeait et même rejetait avec dédain les demi-preuves ; et pourtant il se montrait ici plus difficile que l’Écriture elle-même, qui dit dans un psaume célèbre : Cœli enarrant gloriam Dei : Les cieux instruisent la terre À révérer leur Auteur, etc. […] Il faut citer ce passage d’une souveraine beauté : Qui voit Pythagore ravi d’avoir trouvé les carrés des côtés d’un certain triangle, avec le carré de sa base, sacrifier une hécatombe en actions de grâces ; qui voit Archimède attentif à quelque nouvelle découverte, en oublier le boire et le manger ; qui voit Platon célébrer la félicité de ceux qui contemplent le beau et le bon, premièrement dans les arts, secondement dans la nature, et enfin dans leur source et dans leur principe, qui est Dieu ; qui voit Aristote louer ces heureux moments où l’âme n’est possédée que de l’intelligence de la vérité, et juger une telle vie seule digne d’être éternelle, et d’être la vie de Dieu ; mais (surtout) qui voit les saints tellement ravis de ce divin exercice de connaître, d’aimer et de louer Dieu, qu’ils ne le quittent jamais, et qu’ils éteignent, pour le continuer durant tout le cours de leur vie, tous les désirs sensuels : qui voit, dis-je, toutes ces choses, reconnaît dans les opérations intellectuelles un principe et un exercice de vie éternellement heureuse.
Son conseil est composé de tous les professeurs ordinaires et publics, qui se partagent l’administration des biens de l’université, et jugent avec lui tout ce qui est du ressort de sa juridiction. […] C’est un très-bel usage en Allemagne que celui d’envoyer les pièces des procès les plus compliqués, les plus délicats, à quelque faculté de droit d’une université, en supprimant le nom des parties, et faisant ainsi juger le procès sous des noms supposés par la faculté ; c’est-à-dire par une assemblée de jurisconsultes, qui, ne connaissant aucun des intéressés, sont nécessairement exempts de tout soupçon de partialité, de tout parti, de toute passion quelconque qui se glisse quelquefois dans les jugements des hommes les plus intègres d’une manière imperceptible, et à eux-mêmes inconnue.
Mais quand on aura lieu de juger que l’auteur aura hasardé dans sa langue une expression de génie, c’est alors qu’on pourra en chercher de pareilles. […] On peut juger un ouvrage libre, en se bornant à exposer dans une critique raisonnée les défauts qu’on y aperçoit ; parce que l’auteur était le maître de son plan, de ce qu’il devait dire, et de la manière de le dire : mais le traducteur est dans un état forcé sur tous ces points, obligé de marcher sans cesse dans un chemin étroit et glissant qui n’est pas de son choix, et quelquefois de se jeter à côté pour éviter le précipice.
Sans doute il faut être à la tête des affaires pour juger les événements, pour voir à la fois mille petits détails séparés dont les rapports entre eux méritent plus ou moins d’être appréciés, enfin pour pouvoir embrasser d’un seul coup d’œil l’ensemble, même des choses. […] Les lecteurs méditatifs le comprendront mieux, et ne l’en jugeront que plus propre à opérer la réconciliation entre les partis.