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158. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IX. Beltrame » pp. 145-157

L’ordonnance de séquestre a été obtenue par Fulvio, à qui Cintio doit une quinzaine de ducats gagnés au jeu. […] L’étudiant Cintio commence à se décourager ; il a reçu une lettre de son père qui l’invite à demander à Beltrame la main de sa fille ; il s’y résoudrait peut-être s’il n’était pas piqué au jeu par la rivalité de Fulvio.

159. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVII. Conclusion » pp. 339-351

Ils lui apprirent surtout à donner un relief vigoureux aux idées comiques ; ces incidents variés à l’infini, ces situations singulières, ces jeux de théâtre, ces pantomimes expressives, jusqu’à ces lazzi que les Italiens multipliaient et prodiguaient souvent sans autre but que l’action elle-même, Molière les employa avec réflexion. […] Ainsi, lorsque les personnages se cherchent à tâtons dans la nuit noire, se prennent les uns pour les autres, et que Lubin, croyant avoir affaire à Claudine, révèle à George Dandin la trahison d’Angélique, nous sommes en plein sur le terrain de la comédie italienne ; ces jeux nocturnes, ces échanges, ces méprises abondent dans les canevas des Gelosi.

160. (1932) Le clavecin de Diderot

Pour la France officielle, la poésie c’est, avant tout, un jeu, un exercice d’éloquence. […] Le pain et les jeux, on connaît le programme du grossier et sinistre empire romain au temps de sa décadence. […] Le cœur (à quand la psychanalyse des jeux ?) […] Ce petit jeu n’est pas le qui perd gagne, mais le qui gagne, perd. […] Et ce fils se prête à ce petit jeu, d’aussi bonne grâce qu’Isaac suivit son père Abraham au bûcher et Jésus consentit à la crucifixion.

161. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre X »

Voici d’abord la maîtresse de céans, madame de Vernières, une de ces invalides de la galanterie, dont l’hôtel garni est le dernier refuge, qui vivent de la table de jeu ou de la table d’hôtes, cantinières du vice dont elles ne peuvent plus être les amazones. […] Ainsi, lorsque commence le quatrième acte, la baronne d’Ange a, comme on dit, tous les atouts dans son jeu. […] Pour le seul plaisir de faire pièce à M. de Jalin, en prouvant, devant lui, et malgré son dire, à M. de Nanjac, qu’une femme honnête peut venir la voir, elle s’expose à un éclat scandaleux, elle jette de l’huile sur le feu d’irritation secrète qui couve déjà entre ces deux hommes, elle les met aux prises, dans le moment extrême ou son mariage est en jeu, et où son intérêt le plus vif serait de les éloigner l’un de l’autre ! […] Il a gagné six millions au jeu des affaires, et il porte cet insolent bonheur sans trop d’insolence ; s’il péchait, ce serait plutôt par gloriole de roture et de modestie. […] Le jeu du tapis vert distrait de ce qui se passe à la petite table.

162. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

Ce qu’ils voient et reproduisent surtout, c’est le jeu des acteurs en scène, sans s’inquiéter ni même se douter du travail qui s’opère par la force des choses ou la force des idées. […] C’est un politique expliquant tous les faits qu’il raconte par la nature des institutions, par le rôle des partis, par le conflit des intérêts et le jeu des passions, par l’éloquence des hommes d’État et la tactique des hommes de guerre. […] Où Thucydide avait mis en jeu les partis et les institutions politiques, nos historiens font intervenir les causes géographiques, économiques, ethnographiques, qui expliquent l’avènement et la durée de ces institutions et de ces partis. […] César, Napoléon, de même que Danton et Robespierre, sont renvoyés devant le tribunal de la conscience publique, trop longtemps dominée par le spectacle des jeux de la force et des miracles du génie. […] Car c’est en mettant en jeu des forces sans conscience et sans liberté que tous ces maîtres des peuples ont gouverné leur troupeau humain.

163. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

Des canevas qui le composent, il ressort que la pantomime, c’est-à-dire ce qui consistait en postures, grimaces, sauts et jeux de scène, s’était alors développée considérablement au détriment des autres parties de la comédie de l’art. […] Arlequin se désespère, fait des sauts, des extravagances ; les autres l’imitent en tout, à l’exception du butor qui se remue lourdement. » Ces jeux se continuent longtemps et forment à eux seuls une partie du spectacle ; comme ils n’avaient pas eu grand succès à la première représentation, Dominique les redouble : il inscrit sur son livre : « Il faut que nous fassions des postures d’estropiés, de gros ventres, de tourner les mains derrière le dos, de former des attitudes singulières. […] Je joue déjà assez bien le rôle de l’Ermite ; et d’ailleurs ce serait un vrai moyen de me délivrer de l’importunité de mes créanciers, qui ne cessent de me persécuter. » Les quelques lignes de la fameuse préface que nous venons de rappeler suffisent à nous avertir que les chefs-d’œuvre de la comédie française, L’École des femmes, Le Misanthrope, Le Tartuffe, L’Avare, se succédaient sur le même théâtre où Scaramouche et Dominique faisaient à qui mieux mieux leurs culbutes « et autres singeries agréables, comme dit Gherardi, qui sont du jeu italien ».

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