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374. (1914) Une année de critique

Choc pathétique entre une neuve intelligence et les antiques doctrines qui furent, à travers les siècles, l’aliment du cerveau des hommes ! […] Pour comprendre le monde, Jules Renard use moins de son intelligence que de ses sens. […] Je cherchais des raisonnements, c’en est un ; toutefois, je ne sais pas si l’intelligence a concouru pour une grande part à l’élaboration de celui-là. […] Un Jules Renard peut accomplir son destin littéraire sans le secours de cette intelligence spéculative. […] C’est mal connaître l’auteur de la Philosophie de Bergson, le prophète de l’Intelligence pure, que le croire capable d’exposer des idées avec ironie.

375. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

Il a de l’intelligence au reste du goût : il aime la poésie, il fait des vers164, comme Marot, trop souvent comme Jean, mais par rencontre aussi comme Clément. […] Les traductions de quelques ouvrages d’Aristote n’impliquent aucune intelligence de la langue ni surtout de la pensée grecques : on lisait la Poétique, et nous voyons, dans un traité de métrique du xive  siècle, les poèmes de Lucain et de Stace donnés comme exemples de tragédies. […] Le cœur en elle mène l’intelligence, elle ne vit que pour aimer et se dévouer. […] Faut-il ajouter qu’il est tout esprit, et que, sauf de hautes exceptions, ce ne sera pas le sentiment, mais l’intelligence qui créera notre littérature du xviie et du xviiie  siècle ?

376. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

Et quant à ceux, en plus grand nombre, qui naissent intelligents et distingués, on dirait qu’on leur en sait plus de gré qu’aux autres hommes, sans doute parce qu’ils pourraient mieux se passer de ces dons ; et il semble aussi qu’il leur soit plus facile qu’à nous d’user de cette intelligence pour se composer une vie élégante et délicieuse à souhait. […] Je me disais : « Je vois bien qu’un chef d’armée doit avoir une certaine lucidité et une certaine force d’intelligence. […] Plusieurs, du reste, n’ont même pas eu cette sorte d’intelligence que je viens de dire : le hasard a presque tout fait pour eux, et il y a eu plus d’une bataille gagnée à l’insu de celui qui commandait. […] Ce qui fait la grandeur d’un général en chef, outre l’intelligence calculatrice et organisatrice qu’il doit posséder à un degré remarquable, c’est qu’il doit agir, et dans les conditions les plus terribles, les plus propres à paralyser la volonté.

377. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre VIII. L’antinomie économique » pp. 159-192

Maurras a noté ce fait caractéristique de notre régime bourgeois : l’Intelligence asservie à l’Argent : ancilla ploutocratiae 82. — En régime collectiviste, les besoins d’indépendance de l’individu seraient-ils mieux sauvegardés ? […] Les seuls biens reconnus seront les biens communs, accessibles à l’intelligence et à la sensibilité de tous. […] Confinés dans leur bureau, relégués dans leur domaine spécial à l’écart de la vie réelle, privés des joies saines d’une activité extérieure, et portant des fruits visibles, ils s’étiolent, perdent toute sûreté d’instincts, et souvent dégénèrent : c’est dans leurs rangs que se recrute l’armée sans cesse plus nombreuse des décadents — mécontents ou résignés, pessimistes ou dilettantes — qui constituent un danger des plus sérieux pour l’avenir de notre vieille Europe87. » Ainsi la désintégration des individualités, la dissociation en elles de l’intelligence et de l’instinct, de la pensée et de l’action, de la théorie et de la pratique ne font que s’accentuer sous l’influence de notre mécanisme social. […] Maurras, L’Avenir de l’intelligence.

378. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVIII. Formule générale et tableau d’une époque » pp. 463-482

Ainsi ce douteur, qui se défie de ses sens, a une foi inébranlable dans sa raison, dans sa logique, dans les déductions de son intelligence. […] Descartes, à force d’abstraction, n’est pas loin de réduire l’homme à n’être plus qu’une intelligence servie par des organes, une âme qui a rencontré un corps par hasard, qui se trouve accouplée avec lui on ne sait comment et qui, en attendant d’en être délivrée, peut et doit raisonner comme si elle était seule. […] Et comme les animaux, placés entre les deux extrêmes, l’embarrassent fort, il leur ôte l’intelligence et même la sensibilité ; il ne veut pas qu’ils aient une âme, fût-ce un embryon d’âme ; il les assimile à des horloges ; il en fait de purs automates qui n’ont que l’apparence de la vie. […] Pendant que la poésie s’amincit et se décolore à force de s’adresser à l’intelligence pure, la prose a toutes les qualités de beauté calme et méthodique que préfère le goût régnant.

379. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

On a affaire aux questions réelles ; au progrès dans l’intelligence et par l’intelligence. […] Ces deux livres ne vivent pas en bonne intelligence. […] Des hommes éminents de tous les pays, représentants de l’intelligence en France, en Allemagne, en Belgique, en Espagne, en Italie, complètent ce comité, à tous les points de vue excellent et compétent.

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