Le mot d’amour réveille dans l’esprit de ceux qui l’entendent, autant d’idées diverses que les impressions dont ils sont susceptibles. […] Il se peut aussi que les hommes soient très intéressés, très amusés surtout, par l’attrait que leur inspire la beauté, par l’espoir ou la certitude de la captiver ; mais qu’a de commun ce genre d’impression et le sentiment de l’amour ? — Je n’ai voulu traiter dans cet ouvrage que des passions ; les affections communes dont il ne peut naître aucun malheur profond, n’entraient point dans mon sujet, et l’amour, quand il est une passion, porte toujours à la mélancolie : il y a quelque chose de vague dans ses impressions, qui ne s’accorde point avec la gaîté ; il y a une conviction intime au-dedans de soi, que tout ce qui succède à l’amour est du néant, que rien ne peut remplacer ce qu’on éprouve, et cette conviction fait penser à la mort dans les plus heureux moments de l’amour. […] C’est uniquement de cette passion que j’ai voulu parler ; j’ai rejeté toute autre manière de considérer l’amour ; j’ai recueilli, pour composer les chapitres précédents, ce que j’ai remarqué dans l’histoire ou dans le monde ; en écrivant celui-ci, je me suis laissée aller à mes seules impressions ; j’ai rêvé plutôt qu’observé, que ceux qui se ressemblent se comprennent.
Le développement général de l’esprit est nécessaire pour bien écrire, avant toute préparation particulière Tout revient donc là : habituer l’esprit à réfléchir, à penser sans cesse, lui donner de la pénétration : de sorte que rien ne lui soit insignifiant, que tout ce qu’il aperçoit éveille en lui quelque idée ; que ses idées soient dans un perpétuel mouvement, au lieu de se déposer dans un coin de la mémoire, pour y dormir comme de vieux papiers dans la poudre des archives ; qu’elles se heurtent, s’associent, se groupent, se multiplient par leur incessante activité ; qu’elles se renouvellent au contact des impressions récentes, s’agrandissent, se modifient. […] Cette, richesse d’impressions antérieures est ce qui fait le prix du naturel et de l’abandon dans les lettres de Mme de Sévigné. […] Mais il a fallu un esprit pénétré de poésie, une imagination excitable et prompte à transfigurer ses impressions, et, par-dessus tout, cette pudeur des âmes délicates qui voile l’émotion d’un sourire et élude par la fantaisie l’expression trop poignante de la réalité. […] La plénitude expressive du style est l’effet naturel d’une masse d’impressions accumulées.
Certaines personnes gardent, sans le vouloir, des lambeaux ressuscitants d’impressions lointaines. — « Il me revenait souvent à l’esprit, dit M. […] Quoique d’ordinaire le temps affaiblisse et entame nos impressions les plus fortes, celles-ci reparaissent entières et intenses, sans avoir perdu une seule parcelle de leur détail, ni un seul degré de leur vivacité. […] C’est en vertu de cette disproportion que les impressions d’enfance sont si persistantes ; l’âme étant toute neuve, les objets et les événements ordinaires y sont surprenants. […] On dit à ce propos, dans le langage ordinaire, qu’une impression plusieurs fois renouvelée se grave plus profondément et plus exactement dans la mémoire. […] La première impression, si précise devient la deuxième fois moins précise.
Quoiqu’elle l’ignorât, en entrant dans cette chambre elle tressaillit, et comme on lui demandait la cause de son émotion : « J’ai, dit-elle, l’impression distincte d’être venue autrefois dans cette chambre. Il y avait dans ce coin une dame couchée, paraissant très malade, qui se pencha sur moi et pleura80. » Cette impression distincte et cependant indéfinissable constitue la reconnaissance. […] De là encore une sphère d’intensités plus ou moins grandes et de qualités distinctives, dans laquelle viennent se ranger non seulement toutes nos impressions sensibles, mais toutes les réactions motrices correspondantes : juger et « objectiver », c’est mesurer l’intensité et la qualité de la réaction nécessaire pour répondre à une impression ; c’est avoir conscience de la force centrifuge en rapport avec la force centripète, dans une représentation ou idée quelconque. […] Un malade, dit Sanders, en apprenant la mort d’une personne qu’il connaissait, fut saisi d’une terreur indéfinissable, parce qu’il lui sembla qu’il avait déjà éprouvé cette même impression. […] Parfois enfin le sentiment de familiarité et de reconnaissance produit par une impression nouvelle vient de ce que nous avons rêvé des choses analogues.
. — Que tous les faits cérébraux ne sont pas des impressions d’origine périphérique. […] Il faudra faire entrer de force l’appétition dans la sensation, ou dans les idées de mouvement qui ne sont que les résidus d’impressions kinesthésiques. […] Bastian ; mais qu’est-ce, dans l’autre groupe, que ces impressions prétendues purement sensorielles « qui primitivement excitent au mouvement » ? […] Pourquoi certaines impressions excitent-elles à des mouvements d’écart, par exemple ? […] Fort bien ; mais est-il évident que la douleur soit elle-même une pure impression et purement sensorielle ?
J’ai emporté de cette première leçon une impression pénible ; j’ai reconnu une fois de plus qu’il suffit de quelques malveillants obstinés pour tenir en échec la bonne volonté du grand nombre. […] Il a parlé, en une occasion, de ses impressions à Rome, rien qu’incidemment, il est vrai, mais d’une manière qui laisse peu à désirer aux plus fervents. […] Si la première impression que reçut M. […] Il m’en est resté, du moins, l’impression très nette du degré d’avancement où était alors cette science des monuments du Moyen-Âge. […] Le Panthéon d’Agrippa, le mieux conservé et le plus entier des édifices purement romains, même quand on se le représente dans la splendeur et la nouveauté de sa magnificence première, ne devait donner qu’une impression de gravité suprême et de majesté.